Conjoncture mondiale flageolante

L'inquiétude que nous exprimions en décembre 2013 et en janvier 2014 sur l'état de la conjoncture, à contrecourant des propos très optimistes qui étaient répétés dans la presse et relayés par les politiques, était malheureusement fondée.

Il n'y aura pas eu de reprise générale mondiale au premier semestre. La croissance est partout plombée. Le stock de dettes douteuses est encore si élevée que les banques ne peuvent pas relayer la croissance. La perspective des stress tests "réalistes" en Europe pèse sur les comptes des banques. Les pénalités phénoménales imposées par le gouvernement américain plombent encore un peu plus la situation.

Le secteur financier a perdu en huit plus de 100.000 salariés à travers le monde. L'hémorragie continue.

Quelques pays ont tiré leur épingle du jeu du fait d'un certain besoin de renouvellement de l'équipement. Pour beaucoup, il s'agit d'un renouvellement de machines retardé par la crise. Après 8 ans d'immobilisme, il était impossible de conserver un parc de machines obsolètes. C'est le même mécanisme qui touche le parc des voitures. Il ne peut pas vieillir indéfiniment (sauf à Cuba !). Le commerce international reste bas. La reprise de 2013 était principalement due aux achats de précaution des détenteurs de dollars.

Les pays très exportateurs à natalité basse comme l'Allemagne et le Japon sont confrontés à des difficultés internes croissantes du fait du vieillissement de la population et désormais du risque de contraction démographique.

La rente pétrolière étrangle toujours l'économie mondiale, mais les bénéficiaires voient leurs revenus stagner.

Tous les facteurs qui militent contre la croissance, démographie, rentes abusives, paralysie bancaire, excès de dettes notamment publiques, ajustement par la dépression en Europe,  sont pleinement actifs.

Ils empêchent la phase haute du cycle de se matérialiser. Comme dans les années 2006-2008 en Europe, où cette phase a été très molle, mais cette fois- ci c'est le monde entier qui est frappé. On risque d'entrer dans la crise décennale après un épisode de "haute conjoncture" particulièrement médiocre. C'est ce qui s'était passé en 1938.

Commentaire
S du Jonchay's Gravatar Nous sommes donc dans une méta-cyclicité de l'économie que nous ignorions jusqu'à présent puisque nous ne sommes que dans le premier cycle qui est l'histoire de l'unification du monde.

On pourrait nommer cette cyclicité "syndrome de Babel". Une grande tour unique semble se construire ; mais plus les économistes politiques en parlent, moins ils sont d'accord sur les plans de la construction. Les effondrements locaux se multiplient indiquant que la mesure locale du risque par les opérateurs financiers n'a rien à voir avec le risque du système, lequel échappe à toutes les réglementations prudentielles qui prétendent le cantonner. Tout indique après le krach des subprimes que la perte latente du système financier mondial est très supérieure à ses fonds propres comptables.

Au prochain krach qui surviendra en bas de la micro-cyclicité observable, tous les compteurs du capital seront brutalement mis à zéro. Les banques centrales ne pourront plus émettre de la liquidité sauf à renoncer ouvertement à toute contrepartie en actif collatéral réel et à rémunérer directement les patrons de banque qui acceptent d'emprunter une monnaie centrale sans valeur réelle. L'armée physique et numérique des Etats-Unis devra occuper tout l'espace mondial pour forcer les Etats et les banques centrales à emprunter à la Federal Reserve. La dictature financière du dollar mettra en liquidation toute l'économie mondiale afin de maintenir un semblant de stabilité sur le territoire des États-Unis où tous les riches viendront se réfugier...

On peut aussi convoquer un nouveau Bretton-Woods pour convenir d'une langue universelle de la monnaie de crédit adossée à l'économie réelle régulée par la société des Etats. On peut susciter un véritable capital politique international qui assure un équilibre mondial des parités de change déterminé par une appréciation politique de la soutenabilité de l'endettement international. On peut créer une légalité financière internationale qui pose une finalité mondiale de croissance réelle et vraie qui ne soit pas fondée sur l'usure du capital humain et de la réalité physique.
# Posté par S du Jonchay | 30/05/14 10:58
DvD's Gravatar Croissance séquentielle négative aux Etats-Unis au premier trimestre, alors qu'on nous rabat les oreilles jusqu'à l'overdose sur les "leçons de croissance" de la Fed et que l'euphorie boursière correspond à une attente de croissance autour de +4%-+5% ! L'hiver rigoureux n'explique pas tout, loin de là. Il s'agit surtout d'un déstockage massif après des ventes de fin d'année très médiocres. Autrement dit, la croissance de fin 2013 était sur-estimée. Il y a juste une série de mini-cycles liés aux variations de stocks, pas de reprise soutenue. La consommation stagne, l'investissement baisse (normal, l'investissemennt d'aujourd'hui sert à satisfaire la consommation attendue demain). En effet, ça ne repart pas au deuxième trimestre, un peu de reconstitution des stocks tout au plus.

Aux Etats-Unis, au Japon, les politiques de création monétaire tous azimuts n'ont pas ou très peu d'effet sur l'économie (c'est normal, là bas comme en Europe, les problèmes ne sont pas dus à un quelconque manque de liquidités) mais enflent une nouvelle bulle financiére. Croire que la réconciliation entre le prix des actifs financiers et les flux de l'économie réelle qui in fine les sous-tendent va se faire par une accélération soudaine et miraculeuse de l'économie tient de la pensée magique. C'est la troisième fois de suite que cette erreur est commise. Les deux premières expériences ont pourtant été très claires : crise asiatique de 1997, défaut Russe et faillite de LTCM en 1998 => injections de liquidités => bulle des actions technologiques => crash financier => récession de 2001-2002 => injections de liquidités ^ 2 => bulle immobilière de 2005-2006 => crash financier => récession de 2008-2009 => injections de liquidités ^ 3 => bulle généralisée de toutes les classes d'actifs financiers en même temps => ???

Le prochain crash financier et la prochaine récession sont pour ainsi dire déjà programmés, les banques centrales y travaillent activement tout en prétendant le contraire (normal, c'est la règle no 1 de la novlangue officielle, comme l'avais trés bien compris George Orwell). Sauf que maintenant, les emplois et les salaires n'ont même plus le temps de se reprendre entre deux récessions. Seuls, les marchés financiers ont le temps de se rétablir.

Bernanke pense avoir évité une grande dépression suite à un crash de 1929. En réalité, il est très probable qu'il ait juste réagi à un crash de 1921 de la même façon que ses lointains prédecesseurs pour nous mener tout droit au crash de 1929 et à la grande dépression qui en sera la conséquence.

Les autorités (si on peut les appeler ainsi) françaises ne comprennent rien, ne proposent rien, ne voient rien venir, sont ballotées au gré des évènements, passent au 20h faire un peu de tragi-comédie, s'agitent et gesticulent vainement, puis perdent les élections suivantes pour ensuite jouir paisiblement d'une retraite à vie au frais du contribuable pour services non rendus sans que - pour une fois - aucun d'eux ne s'indigne de cette "atteinte intolérable aux valeurs de la République".
# Posté par DvD | 30/05/14 11:06
# Posté par Clio | 04/06/14 12:11
Petit Curieux's Gravatar Vous êtes étonamment bien informés ! La stagnation générale est dans la presse en cette fin de mois de juin alors que votre article est de mai. Idem pour votre autre article sur la panique à Bercy. Vous aviez également averti que tout le climat créé en début d'année sur une hypothétique reprise était mal fondé. Quelles sont vos sources ?
# Posté par Petit Curieux | 28/06/14 09:14
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