Des idées qui font leur chemin ?
Comme chacun sait nous défendons ici trois explications de la crise et les solutions qui devraient être mises en œuvre :
- La crise du gonflement global des dettes des pays de l'OCDE au-delà de 400% est entièrement provoquée depuis 1971 par le système des changes flottants associés à la liberté totale des flux de capitaux, le pivot du système étant la double pyramide d'endettement théorisée par J. Rueff.
- La crise de l'Euro est entièrement dans l'utopie qu'il y a à créer une zone de monnaie unique sans aucun organe de pilotage mais seulement deux normes. Des instruments essentiels de pilotage conjoncturel comme la politique du change ont été abandonnés sans raison. Une banque centrale autonome est incapable de sortir de la crise. L'absence de pilote conduit à des disparités intolérables et à des ajustements par la récession qui sont socialement intolérables.
- La crise française est entièrement due à son syndrome d'hyperfiscalité délirante qui fait que depuis maintenant des lustres les Français actifs paient en moyenne plus de 80% de leur revenu en impôts, et que la dépense publique correspond grosso modo à la valeur ajoutée des entreprises du secteur marchand, ce qui est une configuration structurellement intenable et qui a mis la France dans une situation presque désespérée lorsque la crise a éclaté en 2007.
Ce diagnostic, formulé pour la première fois publiquement en 1997, n'a jamais été remis en cause.
A ces trois causes correspondent trois remèdes :
- Il faut mettre fin au système des changes flottants de monnaies administratives gérées de façon pseudo indépendante par des gnomes non élus et revenir à un système global coopératif, non fondé sur une monnaie nationale, qui exclut les grands déficits et les grands excédents, conformément aux règles définies après guerre, lorsque les leçons de la crise de 29 étaient encore chaudes. Les Etats doivent être à nouveau responsabilisés et les mouvements de capitaux à court terme doivent être contrôlés à cette fin autant que de besoin. Le FMI doit retrouver un rôle global et doit cesser d'être une institution sans objet qui travaille en contradiction avec ses statuts.
Nous avons souligné la faute inouïe du G.20 d'avoir écarté en novembre 2008 cette solution simple et efficace : les trente glorieuses ont montré qu'on pouvait éliminer un tas de dettes trop volumineux par la croissance coopérative. On a préféré le chemin d'une relance débridée de la finance sans aucune réforme autre que de détail. 5 ans après, la crise est toujours là. La crise a été plus longue qu'en 1929 !
- La zone Euro a le choix. Soit elle disparait et on revient au système sensé des changes fixes et ajustables avec unité de compte commune ; soit on crée ce que nous avons appelé un Chancelier de la zone Euro, supervisant les Trésors nationaux et la BCE. Cela suppose une construction démocratique renforcée que nous ne voyons pas dans le renforcement de la Commission, mais dans des organes ad hoc. On s'est contenté d'un traité renforçant les normes, sans aucune option d'organisation. La zone Euro se porte mal et risque toujours gros 5 ans après le déclenchement de la crise.
- La France devait faire le choix de la production et de l'emploi privés en créant les conditions d'une économie entrepreneuriale renforcée. Il fallait supprimer l'ISF et faire rentrer l'argent qui avait fui à l'étranger (100 milliards d'Euros) et recréer les conditions d'une rentabilité des entreprises privées. Le transfert vers la TVA de l'essentiel des charges patronales était indispensable. En même temps il fallait réduire le champ des actions de l'Etat, spécialiser et réduire les institutions publiques, tout en se donnant des règles stables de construction des budgets à tous les étages. En particulier des normes auraient du être établies pour éviter les dérapages de dépenses et de prélèvements tels que ceux constatés à Paris. Il fallait revenir au quarante heures et à la retraite à 65 ans. Seul le travail peut nous permettre de nous en sortir.
Malheureusement la Présidence Sarkozy n'a pas voulu voir venir la crise et a fait un plan de première année décalé par rapport aux nécessités. La suite a été une histoire de demi mesures et une gestion de la panique, finissant par une frénésie fiscale. La présidence Hollande est pire encore, le PS considérant qu'il doit profiter de la crise pour mener une politique de destruction sociale "définitive" absolument contraire aux besoins de la nation. On n'est même plus dans l'hystérie fiscale mais dans l'exaction et la destruction du pacte républicain, avec un début de révolte générale de la part des entreprenants.
Comme nous l'avons prédit l'absurde plan Hollande de l'automne 2012 a provoqué l'arrêt de l'économie française en 2013 avec un record de 40.000 faillites, 100.000 emplois perdus, le blocage du commerce et de la distribution, des baisses de 20 à 30% dans la majorité des secteurs économiques, la fuite accélérée de milliers de ménages hors de France (100.000 depuis 2007), le gaspillage de l'épargne française, le non respect des objectifs sur lesquels la France s'était engagée, le gonflement de la dette à près de 100% du PIB, et deux fois la valeur ajoutée des entreprises et l'arrêt des transactions immobilières et de la construction. Naturellement aucune réforme permettant de réduire la dépense publique n'a été entreprise. Le plan Hollande a sinistré le pays déjà durement frappé et a été à l'inverse exact des nécessités.
Sur ce fond désastreux, voit-on apparaître des fissures dans les blocs de certitude ou les habitudes de pensée acquises ?
Le drame qui se joue actuellement dans les pays dits émergents renforce le camp de ceux qui pensent que les changes flottants sont une mécanique suicidaire et incontrôlable. L'échec de la FED a sortir le pays de la crise montre bien que l'affaire n'est pas uniquement une question de banque centrale. La spéculation dirigée par les grandes banques américaines est partout revenue à des niveaux intolérables et dangereux et jouent contre la croissance mondiale.
En quelques jours, un livre, une émission de télévision et un article ont bien montré que la source principale des difficultés actuelles est à chercher dans le grand tournant de 1971. On n'en est plus à l'explication par les subprimes et c'est un bien. Le seul inconvénient est que ces trois documents y voient essentiellement le début d'une finance débridée porteuse de tous les maux. Les mécanismes d'endettement croisés sont totalement ignorés. On retombe sur la condamnation de la vilaine finance sans compréhension des mécanismes globaux de la montée absurde de l'endettement global. Et naturellement, cette erreur ne permet aucune politique de sortie de crise.
ll n'y a donc pas de réel progrès dans l'idée qu'il faut mettre fin aux changes flottants. En revanche cette solution ne trouve plus de défenseur sur un plan purement intellectuel.
En Europe, plus personne ne nie les problèmes posés par la non gestion d'une zone de monnaie unique. Les excédents allemands commencent à faire mauvais genre. Les fédérolâtres s'agitent en criant : il faut plus d'Europe. Mais les aspects techniques sont éludés. La question démocratique aussi. Tout le monde crie que l'Euro est trop fort, ce qui est vrai, notamment pour la France. Mais personne ne cherche à savoir qui est responsable du change de l'Euro. Normal, il n'y a personne. 'idéologie des changes flottants s'établissant "librement" sur un marché parfait n'est pas remise en cause dans les milieux européistes. On pleure donc des conséquences dont on chérit les causes. Comme d'habitude. L'impuissance et le déni de démocratie restent les deux mamelles du drame de la zone Euro.
Quant à la France, les évènements récents ont montré que le ras le bol fiscal devenait explosif. A-t-on pour autant renoncé au "vive l'impôt" qui est le leitmotiv de tous les énarques de gouvernement depuis des lustres ? Pas du tout. Le projet politicien de "grand soir fiscal" se place dans la même perspective démagogique perceptible depuis l'élection présidentielle : on va faire du tort aux riches pour calmer les autres. La reprise des idées folles de Picketty ne garantit rien d'autre qu'une nouvelle fuite des entreprenants et une destruction quasiment définitive du système entrepreneurial français. On saccage la vie de boucs émissaires pour des raisons purement politiciennes sans aucun effet positif pour la nation. 1914 confirmera cette évolution délétère.
Au final sur les trois fronts qui nous intéressent, on voit bien s'affirmer des "ça suffit comme cela", des "arrêtons ces sottises", des "cela ne peut pas marcher comme cela". Plus personne ne croit qu'un approfondissement des changes flottants, qu'un surcroit de normes autour de l'Euro et qu'un surcroit d'impôts en France apporteront quelques solutions que ce soit. L'effondrement intellectuel qui est à la base des constructions délétères mises en place dans le monde l'Europe et la France est total et désormais irrattrapable.
Il n'y a plus d'avocats pour ces mauvaises causes. Mais il n'y en a pas non plus en situation d'influence pour construire un meilleur futur.
La politique du rat crevé au fil de l'eau continuera donc dans le monde, dans la zone Euro et en France.
Avec les résultats merveilleux que l'on constate depuis 5 ans.
2014 : septième année de crise avec aucune solution en vue.
Pour la France, c'est une décennie perdue qui s'annonce avec une véritable destruction du pays, probablement impossible à réparer tant la volonté rageuse de rendre définitives les destructions est forte au sommet de l'Etat.
Didier Dufau, pour le Cercle des Economistes e-toile.
Le cercle des économistes regroupés dans E-TOILE autour de Didier Dufau, Economiste en Chef, aborde des questions largement tabous dans les media français et internationaux soit du fait de leur complexité apparente, soit parce que l'esprit du temps interdit qu'on en discute a fond. Visions critiques sur les changes flottants, explications sur le retard français, analyses de la langueur de l'Europe, réalités de la mondialisation, les économistes d'E-Toile, contrairement aux medias français, ne refusent aucun débat. Ils prennent le risque d'annoncer des évolutions tres a l'avance et éclairent l'actualité avec une force de perception remarquable. Association loi 1901 |
De quel livre, de quel article et de quelle emission de télé s'agit il ?
Le livre est celui de Jean Michel Naulot "Crise financière", POURQUOI LES GOUVERNEMENTS NE FONT RIEN.
Un livre honnête et documenté mais qui n'apprend pas grand chose. Et il n'explique pas pourquoi les gouvernements ne font rien. Encore un titre qui ne correspond pas au fond du livre ! L'auteur fait bien remonter le grand changement à l'arrivée des changes flottants, de facto depuis 71. Mais il se concentre sur les dérives de la planète finance sans voir aucun des mécanismes sous-jacents. Nous prétendons que dans cette affaire les banques ont été des amplificateurs. Régler l'ampli n'est pas sans importance. Mais l'émetteur, voilà la vraie cible. Et là, c'est le vide.
L'émission de télévision a été vue sur la chaîne histoire ou sur Arte (j'étais à l'hôpital, je ne me souviens plus très bien) et prétendait là aussi, expliquer la crise financière. Et là aussi on voyait bien que le déclenchement des dérapages dataient de 71, mais on se contentait de faire du système financier la cause de tous les maux. beaucoup de chaleur ; peu de lumière.
Quant à l'article, plus de souvenir, sinon qu'une fois de plus il faisait remonter les difficultés à la fin des accords de Bretton-Woods.
C'est un énorme progrès quand on se souvient qu'il y a peu, on en était encore à mettre en cause les seules subprimes et la titrisation, phénomène important mais marginal par rapport aux énormes déséquilibres accumulés pendant 40 ans.
Le vrai phénomène : la montée de l'endettement de 100 à 400% dans les pays de l'OCDE n'est pas comprise et son rôle dans la crise non maîtrisée. Mais cela viendra. Encore une petite dizaine d'années, à mon avis.
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