Ce blog a dix ans
Nous fêtons le dixième anniversaire de ce blog, créé en 2008 à la suite d’une première approche, lancée 11 ans plus tôt sur le forum du Monde, avec les mêmes ambitions. En 1997, nous pensions que l’économie était mal traitée dans la presse dominante et que Maurice Allais n’avait pas été compris. Une crise grave était en préparation dans l’inconscience générale, alors qu’une « économie baudruche » s’était installée sur les décombres des Accords de Bretton Woods. L’Europe de l’Euro étaient en marche avec des risques très sérieux, totalement minorés ou ignorés. La France s’enfonçait doucement alors que triomphait ce que nous appelons l’Enarchie Compassionnelle, sous l’effet du poids excessif de la dépense publique, d’une perte de compétitivité massive liée aux 35 heures, de l’étouffement des entreprises soumises à la dictature des juges, de la taxation confiscatoire des « possédants » et du bannissement des « riches ».
L’opinion telle qu’elle était exprimée dans la presse semblait incapable de sortir d’un discours obscurantiste déplorable mêlant les reliques de la domination marxiste à gauche et les délires du « politiquement correct » issu des universités américaines. Le gauchisme et la posture antibourgeoise étaient désormais la doctrine dominante et obligée chez les journalistes, avec de moins en moins de freins. Le forum est une technique qui vous informe très vite des mouvements d’opinion et dès 1999 l’exaltation de la haine, reconnue aujourd’hui comme la marque des « réseaux sociaux », était perceptible, rendant très difficile les dialogues positifs. Les concours de postures valorisantes et moralisantes, sans valeur et sans morale sous-jacentes, avec appel à la meute contre les vilains, étaient déjà parfaitement perceptibles en 1997. 20 ans après, ils ont pris une ampleur démentielle, tuant radicalement toute réflexion de bonne foi et construite sur les faits et non sur des actes de foi ou des marques de soumission idéologiques.
Incapacité de comprendre les dangers des changes flottants et des grands déséquilibres, incapacité à comprendre la crise argentine et plus généralement la crise appelée à tort des pays émergents, incapacité à voir venir l’effondrement du début des années 2000, incapacité à voir les conséquences délétères des 35 heures, incapacité à comprendre le caractère dépressionnaire de l’Eurosystème, incapacité à juger la politique Schroeder à sa juste valeur, incapacité à comprendre l’effet sur la classe ouvrière occidentale de la promotion des peuples anciennement soumis au communisme, incapacité à comprendre que les marchés ne règleraient pas tout et que la finance était devenue folle, tout cela était manifeste entre 1997 et 2005 mais très mal compris. Les éructations chauffées à blanc et les analyses sous prismes idéologiques déformants, témoignent de l’état mental de ceux qui s’y laissent aller, mais ne disent rien sur les réalités.
L’abandon à plusieurs reprises des historiques du forum du Monde, empêchant de faire le lien entre des projections et la réalité, a contraint notre petit groupe à se réunir et à créer un site spécialisé. L’arrivée d’une crise majeure de type 1929 était tellement aveuglante que nous voulions l’annoncer sans ambiguïté. C’est ainsi que nous avons publié notre bulletin de conjoncture semestriel qui était sans équivoque. Nos dernières interventions sur le forum Le Monde prévenaient Nicolas Sarkozy qu’il ne fallait pas annoncer qu’il allait redresser spectaculairement la croissance car il aurait rapidement à traiter une crise majeure et une récession dont on sentait qu’elle serait encore plus grave que celle de 1992-93 qui avait déjà été très forte. Nous avons envoyé une lettre en ce sens à son staff. Sans effet naturellement. Nous en avons publié l’essentiel dans un ultime message sur le forum du Monde, où il était encore récemment consultable.
Dix ans après sa création, notre blog fait l’objet chaque année d’environ 260.000 lectures. Il a dépassé 1.500.000 lectures cumulées.
Les articles les plus lus répondent à trois types de préoccupation :
- L’explication de la crise et de ses développements
- La présentation des pensées de Jacques Rueff et Maurice Allais, totalement ignorées par la presse et l’université, alors qu’elles sont remarquablement pertinentes pour comprendre les évènements
- Les articles qui complètent et précisent « des questions de cours » souvent mal traitées dans l’enseignement scolaire et universitaire actuel avec parfois l’enseignement d’erreurs « magistrales ». La monnaie est en particulier un domaine très mal enseigné.
Un des thèmes majeurs que nous avons constamment enrichi d’analyses et de témoignage se résume dans cet avertissement : « attention à la colère des peuples ! » Nous considérions (et nous persistons dans cette analyse) que le refus absolu de voir les causes et donc d’anticiper les conséquences auraient de graves conséquences sur la majeure partie de la population des pays occidentaux et qu’il fallait donc se préparer à des réactions sévères. Savoir lesquelles étaient plus difficiles. On voit que la colère s’est défoulée par le canal politique avec l’arrivée de gouvernements folkloriques et /ou populistes dans un grand nombre de pays européens, les explosions de colère dans les pays arabes, le renforcement des autocrates sans scrupules et indifférent à l’opinion mondiale, le Brexit et finalement l’élection d’un Trump à la présidence des Etats-Unis, qui donne à la notion de « leader du monde libre » des couleurs passablement grisâtres.
L’impossibilité à gauche de se dégager des analyses gauchistes qui laissaient miroiter que les difficultés seraient riches de possibilités de prise du pouvoir et à droite à s’élever au-dessus de médiocres soumissions au diktat américain, laissait l’analyse de la crise qui sévit depuis 1971 totalement orpheline. Les rares autorités officielles qui oseront se lever pour défendre la thèse qu’on ne pouvait plus continuer comme cela, en fait uniquement Maurice Allais, seront balayées à gauche comme à droite et ensevelies sous un fumier de mépris d’épaisseur majestueuse.
Une organisation mondiale défectueuse, dont les institutions communes, totalement dégénérées ne tenaient plus leur rôle, et dont les règles étaient violées tous les jours, se cumulait à une organisation européenne de la zone euro problématique et potentiellement récessionniste, dans l’indifférence générale, sinon des combats faciles à gagner contre des trublions sans solutions alternatives. La France, elle, faisait le choix suicidaire de la dépense publique sans limite, des impôts confiscatoires, des gouvernances locales hystériques et désireuses d’en découdre avec leurs propres électeurs « pour leur bien » et de frapper durement les autres dans leur vie quotidienne, de la chasse aux « dominants » en mettant la justice au côté des « dominés » ou prétendues tels.
Le justicialisme, le gauchisme judiciaire issu de mai 1968 qui veut que le juge prenne toujours la défense de la femme contre l’homme, du salarié contre le patron, du piéton contre l’automobiliste, du malade contre le médecin, de l’acheteur contre le vendeur, du locataire contre le propriétaire, etc., a été renforcé par des lois dites « d’affranchissement » qui ont bloqué toutes les possibilités de relations équilibrées dans la société. La puissance agissante, qui est la source de tout dans une nation, car il n’y a pas de progrès sans polarisation des efforts ni de polarisation des efforts sans un minimum d’autorité, a été partout entravée. Les relations sociales sont devenues impossibles. Avec l’arrivée des « réseaux sociaux » s’ajoutent une coercition « sociétale » qui réduit les anciens « papas morale » et les « mères-la-vertu » à des exemples de discrétion et de câlinerie. Jamais la réprobation morale, basée sur aucune morale, mais les lubies du temps, n’a été plus valorisante pour ceux et celles qui en emplissent leur bouche. Avec à la clé un spectacle de plus en plus grotesque et décourageant. Il ne faut plus de signe religieux dans l’espace public mais une symbolique pédérastique doit être peinte le long des passages piétons, dans un « quartiers pédé », alors qu’on interdit les concentrations sur la base d’affinités au nom de la mixité. Il ne faut plus de courses de taureaux ni de chasses au renard, mais on accepte que 400 loups tuent 12. 000 brebis. Il faut plus d’ouverture mais moins de circulation. Les handicapés doivent être mêlés dans des classes qu’ils ne peuvent pas suivre et qui, dans les configurations ethniques des banlieues noires et arabes, génèrent des situations disons incontrôlables et déplorables pour tous, en dépit de création de dizaines de milliers de postes « d’accompagnants » mal pourvus et sans doctrine. Comme le « chante » un rappeur :
« Les Gaulois nous envoient leurs tarés ;
Tarés les Gaulois, tarés les Gaulois.
Fuyons l’école et vive la rue.
Fuyons l’école et vive la rue.
Ils n’ont rien à nous donner,
Nous devons tout arracher.
Fuyons l’école et vive la rue.
Fuyons l’école et vive la rue ».
Et vive la mixité.
Pour un observateur français, la situation est particulièrement délicate. Les dysfonctionnements mondiaux et européens peuvent être décrits mais, il n’existe aucun levier pour lever les obstacles. L’effondrement français peut être dénoncé dans ses nombreuses composantes, mais les forces politiques en présence et les effets de dominations idéologiques qui prévalent dans la presse, ne permettent aucune vraie réaction. Les Français ont glorifié l’impuissance et la soumission. Maintenant qu’ils sont et impuissants et soumis, accablés de chômage, d’immigration sauvage, de dettes et d’impôts, sous la pression, dans la rue, des « sociaux-fachistes » et, dans les médias, des « christo-cocos », quelle voie de sortie vers le haut ?
Cette situation force l’analyste économique à s’éloigner de temps à autres de l’économie pour étudier les fantaisies malsaines de l’idéologie et de la politique.
Dix ans après, est-ce que certaines de nos thèses ont progressé ? Ce n’est pas tant notre force de conviction qui est en cause. Nous n’avons jamais pensé à autre chose qu’à une forme de témoignage actif, en espérant que les réalités auraient leur propre force de démonstration.
Le nouveau président a impulsé un retour en arrière sur la judiciarisation des relations sociales et un début de démontage de l’appareil de destruction fiscale mis en place par ses collègues énarques dans les 30 années précédentes. On n’est pas au milieu du gué. Peut-être au dixième du chemin à parcourir pour retrouver une situation acceptable. C’est un mieux.
Trump a été un révélateur « facilitant le diagnostic et compliquant la solution ». Désormais les grands déséquilibres sont sur la sellette. Le lien n’a pas encore été fait entre énormes déficits et énormes excédents, ni entre énormes excédents et création d’une économie baudruche, ni entre économie baudruche et explosion économique de 2008, mais cela vient.
Le malaise est complet entre les projections européistes grandioses de M. Macron et la triste situation d’un Juncker allant à Canossa et à New York pour voir Trump la queue basse et le verre haut. Il est obligé de défendre les excédents allemands qui sont indéfendables ! L’Europe est prisonnière des excèdents Allemands. La France est taxée au nom des excédents allemands. Que signifie encore le couple franco-allemand ? Des réformes majeures sont indispensables pour rendre l’Europe audible dans le monde et confortable pour ses membres. Personnes n’a su détailler lesquelles, parce que justement, la première d’entre elle est de trouver un moyen automatique et contraignant de ne pas accumuler de gros déficits ni de gros excédents. Ne pas le faire revient à un combat idiot entre démantèlement de l’Union Européenne ou saut fédéraliste refusé par les peuples.
Personne ne sait comment contrer Trump, parce qu’il a en partie raison. Les grands excédents Japonais, Allemands, Chinois sont condamnables. Au lieu de chercher à savoir comment les inactiver, les grandes institutions habituées depuis quarante ans à la soumission et au viol de leurs propres statuts, se taisent.
Les économistes officiels se complaisent toujours dans la pusillanimité et les discussions microbiques sur des points de détail qui ne peuvent fâcher personne. Le reste du temps ils s’insultent selon des lignes de fractures idéologiques. Ils sont inaudibles. Cela dure depuis longtemps, mais maintenant cela se voit.
Notre satisfaction est d’avoir correctement détecté et analysé les mouvements des grandes plaques tectoniques qui sont le soubassement des faits économiques et sociaux de ces 20 dernières années.
On se rapproche aujourd’hui du moment où il faudra bien cesser de ne rien voir et de rien faire.
Le cercle des économistes regroupés dans E-TOILE autour de Didier Dufau, Economiste en Chef, aborde des questions largement tabous dans les media français et internationaux soit du fait de leur complexité apparente, soit parce que l'esprit du temps interdit qu'on en discute a fond. Visions critiques sur les changes flottants, explications sur le retard français, analyses de la langueur de l'Europe, réalités de la mondialisation, les économistes d'E-Toile, contrairement aux medias français, ne refusent aucun débat. Ils prennent le risque d'annoncer des évolutions tres a l'avance et éclairent l'actualité avec une force de perception remarquable. Association loi 1901 |
A ma connaissance, votre blog est le meilleur blog économique de langue française. Dans l’énoncé du diagnostic de « la crise », il a une valeur explicative et une conformité générale avec les faits observés. Dans l’énoncé de la solution, il a une certaine valeur opérationnelle. Ceci étant dit sans flatterie particulière, le niveau moyen de la catégorie étant très faible.
En langue anglaise, le blog de Michael Pettis est très bon sur la question du système commercial et monétaire international. Ci-joint son dernier article sur les tensions commerciales actuelles : http://carnegieendowment.org/chinafinancialmarkets...