Des chiffres terrifiants mais significatifs

Nous ne cessons d'alerter sur la gravité de la crise économique proprement française. Nous refusons les facilités trompeuses qu'offre l'emploi du PIB pour évaluer la situation. Nous préférons la valeur ajoutée des entreprises du secteur industriel et commercial de plus d’une personne, qui est désormais près de 1 300 milliards d'euros.

L'Insee vient d'en donner une analyse.

"Sur les 3,3 millions d'entreprises (non agricoles et non financières) que compte la France, 3 000 étaient réellement au cœur de l'économie. De fait, elles concentrent 52 % de la valeur ajoutée, 70 % des investissements et 83 % des exportations!

Dans le détail, ce noyau dur d'entreprises réalise une valeur ajoutée de 986 milliards d'euros, « soit plus de la moitié de la valeur ajoutée de l'ensemble de l'économie ». Elles emploient 5,1 millions de salariés. À l'opposé de ces 3 000 entreprises, 3 millions d'entreprises contribuent assez peu à la valeur ajoutée et aux investissements."

L'important est naturellement de tirer les leçons de ces chiffres. Elles sont accablantes.

On ne voit pas comment ces 3 000 entreprises peuvent faire quelque chose de significatif pour les 6 millions de chômeurs. On notera que l'effectif des fonctions publiques est supérieur à leur effectif salarié.

Ce chiffre est à comparer aux départs des familles fortunées, généralement appuyées sur ces grandes entreprises : entre 20 000 et 30.000, selon un décompte (officieux et d'une fiabilité discutable) basée sur l'évaporation des déclarations de revenus supérieures à 100 000 euros.

Le goût français pour la fonction publique, la dépense publique, la dette et les impôts a radicalement tué notre société d'entrepreneurs.

On constatera également le caractère dérisoire des lois Khomry et Macron, qui était déjà notable  pour le CICE et autres fariboles hollandaises.

Il suffit que 20 % des entreprises de ce groupe disparaissent, soit par rachat étranger, soit par faillite, soit par délocalisation, pour que des centaines de milliers d'emplois soient encore perdues, dans le cœur même du réacteur économique. Malgré la reprise européenne de fin de cycle, ridicule par rapport aux autres épisodes du même type ces quarante dernières années, la tendance s'accuse.  

Sur fond de palinodies politiciennes tellement médiocres qu'on ne peut plus parler que de honte nationale.

Inlassablement, depuis 1997, nous rappelons que le nombre de salariés dans un pays comme la France (66 millins d'habitants) devrait être au-dessus de 25 000 000 si on disposait des ratios d'emploi salarié des pays les plus dynamiques. Globalement on nous annonce 16.5 millions fin 2014, dont on voit que le tiers se trouve dans 3 000 entreprises. C'est totalement dérisoire. L'énarchie compassionnelle et l'indigence de la gestion publique depuis les années soixante-dix ont coûté son économie privée à la France.

Rappelons qu'il n'y a pas un seul salarié du secteur marchand privé dans le gouvernement actuel composé uniquement de fonctionnaires et d'apparatchiks politiques.

Nicolas Baverez ajoute à l'endettement public de plus de 2.100 milliards, la dette connue correspondant aux retraites publiques qui est du même ordre. Mais il pourrait se contenter d'ajouter la dette privée et il arriverait à plus de 4 mille milliards selon l'Insee et près de  8.000 milliards selon McKinsey et la Deutsche Bank., chiffres dont  on se sait pas s'ils tiennent compte de la créances certaines des retraites publiques. En un mot : c'est encore plus grave que ce que vous croyez, cher Nicolas !

Là encore, la vraie question est de comprendre comment on en est arrivé là. Car ces ratios ne sont pas que français et c'est lorsque le monde a dépassé en moyenne un niveau de dettes de  400% du PIB que l'économie baudruche a explosé.

La singularité française est l'existence d'un noyau tout aussi dur d'économistes socialistes (sans trop le dire, mais tout le monde sait) qui tiennent à peu près tous les postes universitaires et leurs diverses succursales, qui viennent inlassablement au secours de la dépense publique, des impôts, des mesures d'asphyxie économique, et qui ont sorti la France du débat économique pour une servilité politique de mauvais aloi. Ceux là trouvent les chiffres cités normaux et sans danger.

On voit sur la TNT des  Henri Serdyniak  s'emporter inlassablement contre toute critique sur le niveau de la dépense publique. Encore ! Encore ! Eric Heyer se répand partout où il peut expliquer que toute libéralisation du marché du travail est une horreur absolue.  On constatera avec horreur qu'ils sévissent dans une institution dépendant de Sciences Po. Emile Boutmy et Leroy Baulieu doivent se retourner dans leur  tombe. Comme si l'institut d'études politiques se devait d'être inlassablement les propagandistes du plus d'état, du plus de dépenses publiques  et du plus d'impôts.

Un pays pourrit toujours pas la tête. La défaillance des élites universitaire explique pour les chiffres terrifiants que nous avons commentés ne provoquent aucune réaction publique.  Ceux qui devraient être le fer de lance de la réflexion, ont mis leur carrière au service de petits intérêts politiciens et idéologiques.

L'OFCE , où sévissent Heyer et Serdyniak, est censé avertir de la conjoncture. Il a été incapable de voir le gonflement de la dette globale mondiale. Il n'a pas vu arriver la crise. Il a été incapable de prévenir les politiques. Cet institut ne sert aucune recherche économique utile. C'est une machine à décérébrer.  On voit qu'on a des tas de pistes pour réduire la dépense publique. Par exemple supprimer ce "machin".

Mais il est loin d'être le seul. Rappelons que les 1xx signataires de l'appel en faveur des 35 heures  à la fin du siècle dernier, mesure qui a fait tant de bien à notre pays,  sont tous dans des postes économiques  officiels. Ils sont des rats dans le fromage de la dépense publique et ils n'ont rien compris ni rien appris.

Commentaire
DvD's Gravatar Ce noyau dur de 3000 entreprises au cœur de l'économie française produit une valeur ajoutée de €509 milliards, pas €986 milliards.

Cela ne change rien à la conclusion que le socle productif français est très étroit.

Quelques observations :

- Avec une valeur ajoutée par employé de €100k en 2013, ces 3000 entreprises sont 50% plus productives que le reste de l'économie française. Alors qu'on lit régulièrement des classements montrant la France en tête des pays les plus productifs (en oubliant que ce résultat en trompe l'œil résulte simplement de la sortie du marché du travail marchand par millions des personnes les moins productives), on constate dans cette étude de l'Insee que la base productive est très étroite.

- L'économie française dépend disproportionnellement des décisions de gestion et d'investissement des équipes dirigeantes et propriétaires de ces 3000 entreprises, soit un groupe qui doit comprendre à peine 55.000 personnes. Elle dépend aussi bien sûr de la performance opérationnelle des plus de 5 millions d'employés. Il faut donc verser au débat légitime sur les inégalités dans la distribution de richesse, le fait que la création de richesse est elle même inégale et concentrée dans une certaine mesure. Un petit nombre de personnes conduisent le développement de ces 3000 affaires. Combien, moins entreprenants et moins doués pour les affaires, les feraient péricliter à leur place par des décisions de gestion et d'investissement moins judicieuses ? Et si, au lieu des dizaines de milliers de personnes qui font régulièrement grève, les ~ 55.000 personnes dont dépend en grande partie l'économie française se mettaient en grève ou allaient voir ailleurs, que se passerait-il ?

- Avec des investissements annuels de €24k par employé ou 94% de l'excédent brut d'exploitation (quasiment tout les profits sont réinvestis dans le développement), ces 3000 entreprises investissent trois fois plus que les autres entreprises qui investissent moins de €8k par employé ou 55% des profits (le reste des profits sont distribués ; pour diverses raisons, ces autres entreprises ne cherchent pas à se développer mais simplement à se maintenir). Il ne faut pas décourager l'investissement, condition sine qua non du développement.

- En réalité, ce groupe de 3000 entreprises au cœur de l'économie française n'est pas homogène. Il comprend 234 grandes entreprises avec chacune plus de 13.000 employés. Ces entreprises sont très productives (€102k de valeur ajoutée par employé) mais leur grande taille implique qu'elles ont déjà capturé des positions importantes sur leurs marchés dont elles sont déjà les leaders. Il leur reste un potentiel de croissance mais il est nécessairement plus limité que lorsqu'elles étaient de jeunes pousses. De fait, elles investissent €19k par employé ou 80% de leur excédent brut d'exploitation. L'avenir appartient plutôt aux 2766 PME qui forment le reste du groupe et emploient 2 millions de personnes. Elles ont chacune 724 employés en moyenne. Elles sont très productives, même si un peu moins que leurs grandes sœurs (€96k de valeur ajoutée par employé), et sont en plein développement. Pour cela, elles investissent annuellement €31k par employé (4 fois plus que le reste des entreprises), soit 113% de leur excédent brut d'exploitation. Tout le profit, et plus encore, est réinvesti dans le développement.

Le drame de la France est qu'il n'y a que 2.800 entreprises comme celles-ci employant 2 millions de personnes, et non pas 10.000 employant 8 millions de personnes. Au lieu de ça, il y a 6 millions de chômeurs, 2 millions de fonctionnaires de plus que ce qui serait nécessaire à un pays de 66 millions de personnes et de très nombreux emplois aidés. Le triste résultat des politiques désastreuses menées ces 40 dernières années et qui continuent allègrement à ce jour.
# Posté par DvD | 19/03/16 11:18
Le blog du cercle des économistes e-toile

Le cercle des économistes regroupés dans E-TOILE autour de Didier Dufau, Economiste en Chef,   aborde des questions largement tabous dans les media français et internationaux soit du fait de leur complexité apparente, soit  parce que l'esprit du temps interdit qu'on en discute a fond. Visions critiques sur les changes flottants,  explications  sur le retard français,   analyses de la langueur de l'Europe,  réalités de la mondialisation,  les économistes d'E-Toile, contrairement aux medias français, ne refusent aucun débat. Ils prennent le risque d'annoncer des évolutions tres a l'avance et éclairent l'actualité avec une force de perception remarquable.

Association loi 1901

  
BlogCFC was created by Raymond Camden. This blog is running version 5.9.002. Contact Blog Owner