La vraie question sur l'avenir de la France
Le meilleur thermomètre pour mesurer les évolutions économiques de long terme est la production intérieure par tête (PIB). La comparaison est un peu délicate car il y a eu un changement de monnaie et une érosion continue de la valeur de chacune des deux monnaies successives. Les spécialistes arrivent facilement à surmonter ce genre de difficulté et les résultats sont sans appel : le PIB par tête est quasiment le même fin 2020 que celui de 1980. Quarante années de stagnation !
Il ne faudrait pas croire qu’il s’agisse d’un constat récent ou établi par des commentateurs approximatifs, marginaux ou contestataires. Par exemple DG Trésor, qui dépends du ministère des Finances publie le 13 juin 2014 une note qui fait le point sur l’évolution des quarante dernières années et qui précise froidement : « la position de la France située en 1975 au-dessus de la moyenne des pays de l'OCDE, est maintenant en-deçà de la plupart des grands pays développés ». Au plus haut sommet de l’Etat on sait parfaitement que la France est en déclassement de longue durée sans que cet état de fait ne provoque la moindre émotion. Personne n’en tire la conclusion qu’une urgence politique s’impose pour mettre fin à cet effondrement relatif. Sans surprise, la situation depuis n’a fait que se dégrader. La France s’enfonce.
L’hebdomadaire Marianne a effectué les calculs pour certaines catégories d’enseignants et est parvenu à des résultats pires encore : leur revenu a baissé ! Stagnation générale, recul par rapport aux autres nations et paupérisations absolues catégorielles forment l’histoire économique récente. Toutes les catégories professionnelles, et pas seulement les infirmières et les enseignants, constatent que la rémunération en France est moindre qu’en Allemagne, qu’en Suisse, qu’aux États-Unis, qu’en Grande Bretagne… Les Français ont voulu connaître une expérience socialiste à rebours du monde entier. Le coût de cette lubie a été démesuré. Pendant ces quarante années les économies ont continué à croître dans les pays correctement gérés. Nous sommes désormais au 29e rang mondial pour le PIB par habitant à 43 551 dollars, selon le classement du FMI. La Suisse est passée de 20 000 dollars en 1980 à 86 000 dollars aujourd’hui, soit plus de 400 % de hausse, et un résultat final exactement le double de la France ! Ne parlons pas du Luxembourg qui a atteint 109 192 dollars. Nous sommes dépassés par presque tout le monde en Europe : l’Allemagne, la Grande Bretagne, la Suède, la Finlande, les Pays bas, l’Irlande, la Belgique… L’expérience socialiste prolongée nous a conduits à un terrible déclassement qu’il est impossible désormais d’occulter, de nier, de minimiser et dont il est impossible de s’exonérer.
L’année 1980, base de notre comparaison, était particulièrement difficile. Toute la décennie précédente avait été marquée par les conséquences du désordre monétaire international provoqué par la politique américaine et notamment sa conséquence sur les coûts pétroliers. Un second choc pétrolier avait été subi deux ans avant. La situation s’était tellement dégradée que Raymond barre avait été appelé pour faire face à un déficit du budget de 15 milliards de francs, un déficit du commerce extérieur de 10 milliards et un besoin d’endettement de 15 milliards. En se comparant à l’année 1980, on prend un point bas de l’histoire économique récente. Qu’on soit resté aussi bas est consternant.
Comme Pierre Antoine Delhommais en fait la remarque malicieuse dans le Point du 18 novembre 2021, le déficit du budget actuel de la France est de 197 milliards d’euros, celui de la balance commerciale de 90, et le besoin de financement par la dette de plus de 200 milliards. Ceux qui veulent vraiment se rendre compte de la dérive, peuvent convertir en francs les déficits actuels (il suffit de multiplier par 6,55957) et les comparer à la situation que voulait corriger Raymond Barre. Attention au vertige !
On considérait la situation critique alors que le déficit était à 1.8 % du PIB, contre 8.4 % aujourd’hui, la dette à 16 % du PIB contre 110 %, le chômage à 3.8 % contre 8 %. Et M. Macron aurait le droit de se présenter en triomphateur qui a remis la France sur pied ? Alors qu’on est au fond du trou ?
Oui les quarante années qui ont suivi la mise en place du programme commun de gouvernement qui a assuré le destin électoral de François Mitterrand, constamment aggravé ultérieurement par les gouvernements Mauroy, Rocard, Jospin, Ayrault, Valls, Philippe et Castex, ont été un véritable désastre. Les gouvernements de droite, arrivés au pouvoir en général dans la foulée d’une récession mondiale, comme Balladur, Juppé et Raffarin, n’ont eu ni la latitude ni souvent le courage de lancer une politique difficile de grand redressement, alors que le corps social était ballotté par les crises successives et rétif. Le gouvernement de cohabitation dirigé par Jacques Chirac de 1986 à 1988 est le seul à avoir tenté d’enrayer la chute. Mitterrand sera réélu. L’opportunisme électoral voudra, au sein des dirigeants de tous bords, qu’on ne se batte plus contre une opinion publique dirigée par une idéologie néfaste mais dominante et que l’on cherche à l’étranger, par la construction européenne renforcée, le moyen d’éviter les conséquences les plus délétères pour les grandes entreprises. On ajoutera la perte de souveraineté et de la fierté nationale au déclin économique et social.
Le déclassement économique est indiscutablement une composante majeure du malheur français tel que l’a examiné brillamment Marcel Gauchet d’une façon plus globale et auquel il a consacré deux ouvrages qui font l’unanimité aujourd’hui parmi les élites et s’impose comme la caractéristique nationale principale.
Triste réalité : ce malheur français a été voulu avec un certain acharnement par les Français eux-mêmes.
Les Français montrent désormais par des signes nombreux qu’ils ont compris le déclassement économique que la France a subi depuis la victoire de l’Union de la gauche en 1981. Les ouvriers ont déserté aussi bien le parti communiste que le parti socialiste. Ce dernier le lui a bien rendu en ne s’intéressant plus qu’aux fonctionnaires, aux populations immigrées et aux folies de nouvelles radicalités totalitaires, violentes, masochistes et autodestructrices. Les jacqueries des Bonnets rouges puis des Gilets jaunes ont montré qu’il ne fallait pas aller trop loin dans les contraintes à imposer à des populations paupérisées.
La France, aujourd’hui, veut que la descente aux enfers s’arrête et se cabre devant une idéologie dominante dans les médias qui reste figée dans les dogmes du socialisme de 1980. Mais, au-delà de la crispation déclarée « populiste » par les élites médiatiques, comment faire alors qu’un alarmisme écologique extrême pousse à des amputations drastiques des moyens de la croissance ? Comment éviter un malheur économique sans fin ?
Telle est la vraie question posée aux électeurs pour cette nouvelle élection présidentielle.
Le cercle des économistes regroupés dans E-TOILE autour de Didier Dufau, Economiste en Chef, aborde des questions largement tabous dans les media français et internationaux soit du fait de leur complexité apparente, soit parce que l'esprit du temps interdit qu'on en discute a fond. Visions critiques sur les changes flottants, explications sur le retard français, analyses de la langueur de l'Europe, réalités de la mondialisation, les économistes d'E-Toile, contrairement aux medias français, ne refusent aucun débat. Ils prennent le risque d'annoncer des évolutions tres a l'avance et éclairent l'actualité avec une force de perception remarquable. Association loi 1901 |
Dommage qu’il n’y ait aucun(e) candidat(e) crédible pour y répondre.
On sent tout votre mépris, vous professeur d'université...
"établi par des commentateurs approximatifs, marginaux ou contestataires. que nous sommes" ?
Beaucoup de gens pensent que les analyses non officielles ou non publiées sont contestables parce qu'ils cherchent plus l'argument d'autorité que l'examen autonome et dépassionné des faits. C'est dommage parce que leur examen permet des constats précis, importants et sereins qui, bien que connus ne figurent pas dans les médias ni la communication politique "main stream', qui servent différents maîtres et entendent garder leur monopole de la vérité dicible.
Seulement voilà : les faits sont têtus. Et le peuple français a tendance à aimer les décisions dont il déteste les conséquences.La France doit à la fois sortir du socialisme, de l'autodestruction de la "cancel culture" et de l'hystérisation écologique avec ses raisonnements moralisateurs, punks et atrabilaires. La nouvelle politique doit promouvoir le bien social, assurer la coexistence pacifique des sexes, des races et des religions, et sauver la planète. On voit que la sémantique n'aide pas.
Emmanuel Macron a échoué car il n'a pas compris qu'on ne pouvait être social qu'en abandonnant radicalement le socialisme, qu'on ne pouvait pas unir, si on cédait à la gauche Woke, et qu'on ne pouvait pas sauver la planète en concédant trop aux fanatiques écolos. Alors que le pays l'a lui parfaitement assimilé en ramenant les forces socialistes et radicalement gauchistes au quart des vœux électoraux. Le centrisme mou n'a pas de sens dans la situation d 'aujourd'hui en France. On voulant mélanger tous les narratifs, il finit dans la confusion et la démagogie électoraliste sans limite. Il n'a plus aucune assise, plus aucune colonne vertébrale, pour un second mandat. C'est ce qui était arrivé à François Mitterrand. Avec la fin que l'on sait.
La difficulté est de faire émerger un noyau majoritaire de gouvernement qui corresponde au noyau majoritaire de l'électorat.
Et cela n'en prend pas le chemin. Le RN n'a ni l'envie, ni les compétences de sortir de son rôle de ramasse miettes des colères. Zemmour dynamite le Wokisme et l'angélisme immigrationniste, mais néglige les dimensions économiques et écologiques. LR organise un concours de beauté, mais sans qu'aucun des candidats n'assument les grands enjeux.
Valérie Pécresse veut représenter le féminisme et tombe dans l’ambiguïté du Wokisme, et assure sa passion pour le planète, sans parler du risque économique des politiques écologiques. Le social est passé à l'as.
Xavier Bertrand a vaincu Macron dans ses terres. Mais n'a aucune proposition économique, civilisationnelle et écologique.
Eric Ciotti a surtout un langage clair sur la question de l'immigration et de la sécurité.
Philippe Juvin assure sa notoriété et sa place future dans le jeu politique.
François Barnier soigne son image qui est attaquée par l'âge et l'obscurité du discours.
Celui qui gagnera devra muter pour devenir un candidat crédible et à la hauteur des enjeux.
Édouard Philippe travaille à sa survie politique et à celle de l'énarchie compassionnelle sans trop s'occuper des questions que se posent le pays.
Emmanuel Macron restera perdu dans son "en même temps" et ne pourra pas en sortir.
Eric Zemmour est en mode torpille et face à des torpilleurs nombreux et déterminés. Peut-il jaillir de l'eau et devenir l'ange radieux des lendemains qui chantent ? Il tient bien la partie civilisationnelle mais ne parvient pas à tenir un discours économique tout en esquivant totalement la question écologique. Il lui faudra une sacrée mutation de son spike politique pour vraiment accrocher.
Il reste trois mois pour remettre la campagne sur des rails sérieux. Cela ne va pas être simple.
On ne voit pas trop qui pourrait prendre un tel poste ministériel dans la cage aux folles écologique française. C'est comme si on créait un ministère de la population, chargé de l'homme blanc hétérosexuel et de la condition féminine confié à une femme homosexuelle "réaliste".
A suivre...
Personne ne semble vouloir assumer la cause de la régression salariale française.
Dans aucun des cas, l'effondrement relatif du PIB par tête de la France n'a été cité, exploré et commenté. Le fait que nous soyons 29e sur ce critère alors que nous étions dans les tout premiers en 1980 ne semble motiver personne.
A part Juvin qui a justement répété qu'on ne pouvait distribuer que ce qu'on avait produit, on a remis en place la petite mécanique des transferts de charge sans dire qui paierait les coûts qui eux demeurent.
Donc sur la contradiction entre le besoin de croissance et de "pognon" d'un côté et les restrictions de pollution, pas un mot. Vive le nucléaire et non aux éoliennes, voilà l'élément de langage. Ce qui nous mène exactement à rien, le nucléaire ne pouvant être relancé que très tard.
Il parait difficile de lutter contre un déclassement lorsqu'on refuse d'en analyser la réalité et les causes. Il parait difficile de lutter contre des pollutions massives sans donner un scénario un minimum crédible et compatible avec la volonté de rattrapage de niveau de vie.
Les médias dominants refont ce qu'ils ont fait à Fillon avec Zemmour et cela suffit à leur bonheur. On n'magine même pas une émission un peu fouillée qui permette au plus grand nombre de comprendre les enjeux de la croissance et les contradictions mortelles que nous devront affronter. Il parait qu'il y a un journalisme d'investigation ...