La France est mal arrivée
François Hollande croit dur comme fer qu’il a « apaisé et pacifié » la société française. La gauche intellectuelle socialiste et son bruit de fond médiatique partagent cette foi, ou le font croire. Cette aberration est un des aspects les plus étonnants de la situation morale détestable qui sévit en France aujourd’hui. Curieux pacificateur que ce président qui, à peine élu, parvient à mobiliser la défiance de 77% des Français et rassembler des foules immenses dans la rue contre ses projets. L’écart est si grand entre la prétention affichée et son résultat social qu’il devient un sujet de réflexion intéressant. Comment peut-on se tromper à ce point là ?
L’explication simpliste insiste sur la faiblesse insigne de François Hollande, faisant du président actuel de la France soit un incapable notoire qui n’a jamais travaillé, soit un petit malin hâbleur qui a toujours tout embrouillé à son profit, soit un rigolo désinvolte s’amusant à faire carrière sans trop s’inquiéter des moyens ni des fins. Il est vrai que sa prestation comme conseiller à la Cour des Comptes aura confiné à l’inexistence absolue et que celle de premier secrétaire du PS n’a pas laissé que de bons souvenirs. Ce fut un Président de Conseil général dispendieux qui a laissé son canton dans les affres d’une dette excessive. Il a rassemblé autour de lui et au gouvernement une bande d’ambitieux d’une homogénéité dans la nullité tout à fait saisissante et envoyé au parlement des militants grossiers et arrogants, pourris de certitude et nourris d’idéologie délétère.
La première mesure de ce groupe dirigeant fantomatique sera d’imposer, au milieu d’un concert d’injures, un coup de gourdin fiscal tellement massif à la France qui travaille, qu’il tuera en un seul coup et l’envie et les moyens d’investir et de recruter. Un an après, le niveau de vie a baissé et le nombre de chômeurs a grimpé de 300.000 pour la catégorie A, dépassant pour la première fois dans l’histoire du pays les 5 millions pour l’ensemble des catégories de chômeurs. Aucun des objectifs annoncés n’a été tenu. 30.000 Français sont partis à l’étranger ou en train de s’y préparer. Il faut dire que 8.200 Français ont vu leur imposition les priver de la totalité de leur revenu. Et parfois beaucoup plus. Des centaines de faillites jettent chaque jour des milliers de salariés à rue. Chaque jour.
Alors que des dizaines de livres et des centaines de rapport ont démontré que la France souffrait d’une bureaucratie disproportionnée (deux fois plus de fonctionnaires que les Allemands par tête d’habitant, ce n’est tout de même pas invisible ni négligeable), François Hollande n’a jamais voulu reconnaître le problème publiquement et depuis trois ans maintenant, deux ans de campagne et un an d’exercice du pouvoir, n’a jamais esquissé la moindre mesure pour faire face à ce drame qui pèse sur l’emploi et la compétitivité française, sans profit pour les grandes missions régaliennes. La police ne parvient plus à dominer la délinquance. La Justice est un ministère effondré, abandonné à des militants qui considèrent qu’être père d’une victime est l’occasion d’être gravement injurié. L’armée fonctionne avec des bouts de ficelle. L’éducation nationale ne permet même pas d’assurer le socle de l’instruction minimum. La santé publique est à l’encan. Ne parlons pas de notre diplomatie et de l’influence française à l’étranger.
Le pire est qu’aucune vraie mesure n’est envisagée pour faire face à cet amoncellement de difficultés sinon de voler un maximum de Français sous les vivats d’une frange (fange) haineuse de la population dont même ce site porte les stigmates.
Claude Allègre avait raison. Avec Hollande c’est toujours « oui, non, mais oui, mais non, mais bien sûr ». Sur les retraites du secteur public, honteusement avantageuses, on entend : « il faudra que tout le monde s’y colle et il faut plus de justice », puis « la réforme des retraites publiques a déjà été faite ». Il parait que c’est une méthode.
Il reste que F. Hollande a été élu. Il est donc en partie en résonnance avec l’électorat qui vote en France.
Sur une radio pas particulièrement socialiste mais où les journalistes ne veulent pas passer pour honteusement de droite (une carrière est si vite brisée !), on donnait, le jour du bac, une interview d’une jeune fille qui n’avait pas eu le bac. Toujours cette même idée qu’il ne faut pas exclure et que le bac finalement n’a aucune importance. L’élitisme, quelle catastrophe ! Pourquoi ne l’avez-vous pas passé ce bac ? « Parce que j’étais en révolte contre la société ». Et qu’est devenue cette révoltée ? Fonctionnaire catégorie B. Félicitations générales. Quel parcours ! De révoltée à fonctionnaire, sans passer par le bac, quel encouragement pour tous ceux qui passent l’examen. Toute la presse a souligné combien ce bac était obsolète, coûteux, inutile. Maintenant on affirme que ce n’est même plus un instrument de promotion sociale.
On est passé de « toute une génération au bac », à « toute une génération sacrifiée en fonctionnaires B ».
Les derniers glouglous de la contre-société post soixante-huitarde emplissent tout le bocal politicien et médiatique.
On a voulu mettre fin à la répression et à l’exclusion. On a entrepris de libérer l’enfant de la tyrannie des parents et des maîtres (et du Bac), l’épouse de la tyrannie du mari, l’adulte de la tyrannie du travail, l’homosexuel de la tyrannie des hétérosexuels, les minorités de la tyrannie de la majorité, le salarié de la tyrannie des patrons, le délinquant de la tyrannie de la société, le consommateur de la tyrannie du producteur, le malade de la tyrannie du scientisme médical, l’individu de la tyrannie de la collectivité, le citoyen de la tyrannie de la nation, de toutes les nations, et finalement on a voulu sauver la nature de la tyrannie des hommes.
Une quarantaine d’années après la France se découvre ruinée, chômeuse, endettée jusqu’au cou, sans industries, dévorée par une administration pléthorique, inculte, en proie à une délinquance incoercible, dépouillée de son indépendance par l’Europe et soumise à des forces étrangères qui s’exercent sans frein à son détriment.
En parachevant le travail de destruction des derniers vestiges « du monde bourgeois », Hollande croit avoir fait œuvre historique. Il ne fait que prouver qu’une anti-société de Bisounours n’est pas une société. Une civilisation n’atteint des objectifs de progrès qu’au prix d’un certain niveau de contraintes, de sélections et d’efforts.
Avec Hollande, la France est en train d’atteindre un niveau culturel et économique série B. Mais il n’est pas seul en cause. Les Français l’ont voulu. Ils l’ont eu. Reste à savoir combien de temps ils se satisferont de cette désolante médiocrité.
Le cercle des économistes regroupés dans E-TOILE autour de Didier Dufau, Economiste en Chef, aborde des questions largement tabous dans les media français et internationaux soit du fait de leur complexité apparente, soit parce que l'esprit du temps interdit qu'on en discute a fond. Visions critiques sur les changes flottants, explications sur le retard français, analyses de la langueur de l'Europe, réalités de la mondialisation, les économistes d'E-Toile, contrairement aux medias français, ne refusent aucun débat. Ils prennent le risque d'annoncer des évolutions tres a l'avance et éclairent l'actualité avec une force de perception remarquable. Association loi 1901 |
On s'est beaucoup trompé sur le niveau "tolérable" du chomage. Dans la France d'avant 68 (pour simplifier), chacun était responsable de lui-même et devait travailler et contribuer. Le chômage était une catastrophe. Il impliquait qu'on ne pouvait plus être dignement dans le système. L'activité était cruciale. Les aides étaient mal vécues, car preuves qu'on n'avait pas réussi à se débrouiller par soi même, fait considéré comme une honte. Dans la France socialisée, tout le monde est aux allocs d'une façon ou d'une autre. Cela rend la France extrêmement nerveuse : ceux qui sont pillés par l'impôt se demandent comment ils vont tenir. Ceux qui vivent aux crochets des autres sans vergogne se demandent si l'Etat ruinera bien les autres pour maintenir sa petite vie médiocre et sans travail.
Se retrouver parmi les 20 millions de résidents qui vivent en France aux crochets des autres n'est plus un problème psychologique aussi grave qu'avant. On a dépassé le million de chômeurs, puis 2 puis 3 millions en cat A sans réelles protestations. Toutes catégories, on frise les 5 millions sans que personne ne moufte vraiment. Nous avons montré qu'il manquait entre 5 et 10 millions de salariés dans le secteur marchand. Un manque phénoménal même pas dénoncé dans la presse.
Les salariés non cadre au travail ne craignent pas nécessairement le chômage. Un exemple récent dans une PME de mes amis : un administratif vient de passer deux ans au chômage. Il est finalement recruté. Après la période d'essai il devient aussitôt revendicatif, exige ponts et vacances, refuse tous les ajustements d'horaire que les nécessités et accidents de la vie professionnelle exigent, surtout quand on travaille constamment en sous effectif. "et si vous n'êtes pas content vous n'avez qu'à me licencier, j'irai au prudhomme. Je connais mes droits". L'indemnité de licenciement est vue comme une superprime. Le salarié "veut bien travailler". Mais "faut pas pousser, j'ai ma vie aussi". Etc.
La crainte latente est qu'il n'y est plus suffisament d'impôts pour payer. C'est pour cela que le "vive l'impôt" est aussi chanté en France et que F. Hollande a pu croire qu'en injuriant Depardieu il se refairait la cerise, après avoir constaté que ses 75% avaient aidé à son élection.
Le seul problème est que les prélèvements dépassent désormais la valeur ajoutée des entreprises. Et que le nombre de salariés baissent tous les jours, sans espoir de stabilisation avant un long moment.
La question est de savoir où est le précipice qui marquera la fin de ce sytème impossible. Ce n'est pas le chômage. On peut aller jusqu'à 25, 30 voire 40% de chômeurs comme on l'a vu en Grèce, en Espagne ou au Portugal. Les non actifs exigeront simplement que les fonctionnaires paient dès qu'on aura ratissé les retraités et les familles aisées. Les fonctionnaires grecs ont vu souvent leur salaires coupé en deux ! Le mur de la dette existe. Mais sa hauteur et sa proximité dépendent des autres grandes puissances et notamment du QE de la FED et des mesures non conventionnelles de la BCE. L'histoire récente a montré qu'en cas de nécessité, ces institutions n'hésitaient pas à violer toutes les règles "normales".
Le blocage ne peut venir que des grèves bloquantes des services publics. En Grande Bretagne à la fin des années 70, le gouvernement Wilson a été confronté à ce problème. Il a constamment lâché. Jusqu'au jour où le pays a dit stop quand la spirale est apparue à tout le monde comme un suicide collectif. Et ce fut le moment Thatcher, tant craint et haï à gauche.
Hollande craint d'abord son secteur public.Il a sans doute raison.Car il n'a plus aucune arme monétaire, financière ou budgétaire. En cas de conflit dur il n'a rien à offrir. Et il n'aura plus de PIB marchand du tout pour faire semblant de diriger le pays.
La vraie question est de savoir combien de temps il faudra pour qu'en France on en revienne aux bonnes vieilles réalités :
- Il appartient à chacun de gagner sa vie. Les aides doivent être limitées et en volume et en durée et hautement conditionnelles.
- Les prélèvements doivent être des contributions pas un système de spoliation
- Le PIB public ne doit pas représenter plus de 15 à 20% du PIB total.
- L'essentiel de l'impôt doit être sur la consommation, avec une franchise pour la nourriture de base, pas sur le travail ni sur le capital (deux facteurs de production vitaux).
- Les cadres institutionnels monétaires et commerciaux nationaux, européens et mondiaux doivent être un minimum rationnels (pas de changes flottants avec déficits et excédents monstrueux, pas de zone de monnaie unique sans organe de pilotage, pas de capture de la démocratie par une classe sociale, en France la fonction publique, ailleurs les lobbies ou les clans).
- La démographie est importante.
Le drame actuel en France, et il se perpétue depuis trop d'années maintenant, est que les dirigeants font exactement l'inverse.
Elle sortira en loques de la crise actuelle, car il n'y a en France aucune personnalité capable du langage nécessaire et la mentalité générale désastreuse ne changera qu'avec un terrible choc.
Le mal triomphe au nom du bien. Ce n'est pas neuf : l'enfer est pavé de bonnes intentions depuis quelques milliers d'années déjà !
On peut cependant douter que les intentions "antibourgeoises" aient été particulièrement bien intentionnées. Les réactionnaires sont rarement bien inspirés. On a détruit une société sans rien mettre à sa place. Le pays se tient grâce à des survivants et à des saints. C'est à dire grâce à l'inertie du bien passé. Mais comme le canard courre après qu'on lui ait coupé la tête, la France s'agite sur l'élan résiduel du passé.
Il n'y a aucune force dans la construction "sociétaliste et socialiste" parce que ce n'est qu'une déconstruction. Nous croyons marcher sur l'eau après avoir cassé le pont. En fait nous sombrons.