Un bilan de l'entrée de la Chine dans l'OMC
L’année 2020 commence bien avec la lecture d’un ouvrage anglais gentiment offert par un ami : « China, Trade and Power », écrit par Stewart Paterson, un illustre inconnu, dans une maison d’édition à compte d’auteur ! Paterson fait partie de ces gens qui, comme les membres de notre petit groupe e-toile, ne se retrouvent pas dans l’économie officielle. Après une formation économique supérieure, il a eu des responsabilités à travers le monde et notamment en Asie. Il connait le terrain, « voit ce qu’il voit » et considère qu’il est important de le commenter. Les non-dits et les soumissions ont totalement anesthésié les articles d’économie dans les médias. Ce n’est pas vrai qu’en France. Alors pourquoi se taire ?
Auteur sans marquage évident, il est impossible de se livrer à cet exercice dont les Français raffolent : d’où parle-t-il ? Est-il légitime ? Il faut uniquement se concentrer sur ce qui est écrit. Ce que tout le monde devrait faire et qu’on ne fait plus en France depuis longtemps, où le procès d’intention est de règle et où la parole n’est acceptée que si elle a été préalablement légitimée et son auteur jugé digne de s’exprimer, quelles que soient la précision et l’exactitude de son discours.
Le livre est une monographie sur un sujet tout simple : l’admission de la Chine au sein de l’Organisation Mondiale du Commerce, le 11 décembre 2001, a-t-elle été une bonne chose, dont les résultats sont conformes aux espoirs qui avaient justifié cette admission ?
C’est un sujet que nous avons traité à plusieurs reprises dans ce blog (par exemple : Faut-il traiter la Chine en interlocuteur "normal" ? ( http://cee.e-toile.fr/index.cfm/2018/11/23/Fautil-traiter-la-Chine-en-interlocuteur-normal-). Nous sommes donc très heureux de connaître la réaction d’un « anglo-saxon », même marginal et hors de la pensée économique officielle. On notera l’absence totale de couverture du sujet dans les médias et dans l’édition française.
Les premiers chapitres racontent le processus qui a conduit les Etats-Unis à promouvoir la Chine dans l’OMC.
Première remarque : la France est totalement absente et de la réflexion et de la décision. Pendant qu’un couple d’Enarques nocifs s’entendaient à ruiner le pays (Chirac et Jospin), la France n’avait pas droit au chapitre, l’affaire étant réservée à la seule Commission Européenne qui détient par traité le monopole absolu des discussions commerciales. L’affaire n’a eu aucun retentissement médiatique en France, la question ne concernant pas directement les politiques français. De tradition, les grands quotidiens français ne couvrent pas les affaires européennes. Un pays sans souveraineté ne s’occupe plus des grandes affaires du monde et n’a plus d’officiels qui s’en préoccupent, à l’exception de deux ou trois spécialistes délégués auprès de Bruxelles. La France, sur les grandes questions mondiales économiques et monétaires, a, au mieux désormais, l’influence du Luxembourg. Jean Monnet a gagné. L’Europe a châtré totalement les ex grands empires européens et les Américains règnent en maîtres absolus. La politique, la presse et l’université ne préparent plus à la maîtrise des grandes questions du monde. On s’occupe des inégalités hommes-femmes en basse Lozère, en pleurant avec Greta Thunberg sur les malheurs de Gée…
Seconde remarque : la cupidité des grandes entreprises américaines l’a emporté sur tout le reste. Être leader mondial supposait de tenir le marché Chinois et ses centaines de millions de consommateurs. La bave qui coulait aux commissures des managers de grands groupes mondialisés a tout emporté. Aucune autre considération ne devait être prise en compte. C’est le gouvernement démocrate de Clinton qui une fois de plus allait tout céder au Big Business et aux cartels financiers. L’idée dominante : la Chine, une fois embarquée dans le commerce international et la croissance de la consommation, ne pourra plus être une dictature et se libéralisera. Un ordre libéral s’installera partout dans le monde. « Nous créerons par le commerce une nouvelle harmonie mondiale ». Et nos trusts seront encore plus forts. Donc les Américains plus riches. Les oppositions sont venues des ONG et des syndicats habitués à l’outrance perpétuelle. Du coup leurs réserves ont été noyées dans la masse de leurs « déchaînements habituels » et n’ont pas trouvé d’oreilles attentives. Le fait que la Chine soit une dictature infecte ne devait pas troubler. « En entrant dans l’OMC, elle devra respecter des règles. On mettra fin aux scandales justement dénoncés : dumping, vols des brevets, copies illicites, produits toxiques, fraudes à tout va ». Comment traduit-on « wishful thinking » ?
En France une voix s’est élevée, dont ne parle pas le livre (La France, c’est où ?) : celle de Maurice Allais qui a dénoncé une mesure dont on pouvait comprendre immédiatement qu’elle irait magistralement contre les intérêts des ouvriers français et qu’elle entraînerait un chômage massif. Bien avant notre auteur, il avait compris que faire entrer dans la compétition 750 millions de travailleurs potentiels payés le prix d’un bol de riz, sans que les entreprises n’aient à se préoccuper de quelques charges ou règlements que ce soit, ne pouvait pas avoir d’effets bénéfiques pour les salaires et l’emploi en Occident, et surtout en France où les salaires étaient grossis de charges uniques au monde qui en doublaient le coût pour les entreprises. On sait qu’il a été traité en vieux machin fasciste par la PQN française, notamment Le Monde. Les politiques l’ont totalement ignoré ou vomi. 20 ans après, tout le monde voit qui avait raison. Qu’on ne dise pas qu’en France, il n’y a pas eu d’alerte et « qu’on ne savait pas ». Le risque était gigantesque, les pares-feux inexistants. Les constructeurs de l’opinion publique française avaient décidé que les Français n’avaient pas à le savoir ou s’en inquiéter. De toute façon la décision était à Bruxelles.
L’ouvrage regarde ensuite les effets de la décision. Ils sont terribles pour l’Occident et son économie, et incroyablement favorable au Parti Communiste Chinois.
A partir du 11 décembre 2001, date de l’admission de la Chine à l’OMC, la fausse sécurité offerte par le traité entraîne un déversement hystérique de capitaux et de partenariats qui permettent à l’économie chinoise de devenir l’atelier du monde. Mais le Parti Communiste Chinois a bien étudié son affaire. La seule chose qui l’intéresse sont les investissements dans les produits d’exportation. Pas question de laisser le moindre accès à son marché intérieur qui est totalement bridé et sous contrôle. La banque, l’assurance, les marchés publics restent totalement entre les mains du Parti. Le message est : enrichissez-vous en créant les conditions d’une exportation massive. On garantit aux entreprises des conditions sociales inexistantes, des impôts et des taxes faibles, des règlementations laxistes et une population illimitée de travailleurs dénués de tout. L’auteur rappelle que dans certaines parties de la Chine en 2000, certaines familles de paysans n’avaient même pas de quoi vêtir toute la famille. Les vêtements étaient portés alternativement. Les enfants se noircissaient le corps au charbon pour faire semblant d’avoir un pantalon et une chemise ! Le genre d’information interdite de publication en France où le communisme, malgré ses crimes et ses conséquences sociales abominables, devait rester une option noble et possible, majorité plurielle oblige.
Le PCC a voulu une industrie exportatrice massive et rien d’autre. L’argent gagné sera utilisé à calmer le peuple et à conforter le régime tout en lui permettant de se réarmer lourdement et de retrouver une place géostratégique perdue depuis des siècles.
Le livre décrit très bien comment les Communistes s’y sont pris. Nous renvoyons le lecteur à cette partie du livre.
Les résultats ont été stupéfiants et totalement imprévus en Occident. Les chiffres laissent songeur. « Les exportations ont cru au rythme de 30% par an pendant les six années suivant l’adhésion. La part de la Chine dans la production industrielle du monde a été quadruplée. » En dix ans la Chine est devenue l’exportateur mondial numéro 1 devant les Etats-Unis. Les seules exportations dépassaient en 2010 le PIB de 2000. Elles sont passées de 300 millions de dollars à 2.500 milliards en 2014. Le PIB est passé de 1.700 milliards à 11.500 milliards de dollars. Rappelons que le PIB français est actuellement autour de 2.500 milliards de dollars. La Chine a créé quatre économies françaises en 20 ans !
Les Etats-Unis comptaient pour 6% de la population et 37% du PIB mondial en 1969. En 2016 sa part du PIB mondial était réduite à 25%. Elle s’est encore réduite depuis.
La Chine a réussi à capter 25% des bénéfices de la croissance mondiale de 2001 à 2008 et 50% dans les années suivantes jusqu’à aujourd’hui.
L’industrie occidentale a perdu près de 25% de sa production industrielle en 16 ans. En fait dans certains secteurs l’érosion a été encore plus forte. Les Etats-Unis qui pensaient que les exportations vers la Chine de produits américains permettraient de supprimer ses déficits extérieurs se sont retrouvés avec des déficits encore aggravés.
Le triomphe communiste chinois a été total. Le régime a réussi son pari de justifier sa terreur par ses bons résultats, alors que la gauche française ne cesse d’expliquer que la seule justification du capitalisme « est ses bons résultats pour la classe ouvrière ». Il fallait simplement remplacer capitalisme par « communisme parasitaire accroché au capitalisme mondial » pour être dans le vrai. Du coup, aucune des évolutions attendues vers plus de liberté et plus de rapprochement avec le modèle occidental ne s’est produite. Au contraire, comme on pouvait s’y attendre, la Chine utilise sa nouvelle puissance pour s’imposer dans le concert mondial et faire plier ses voisins à ses vues.
Ajoutons au livre les développements les plus récents : Il y a quelques jours, la Chine participait à des manœuvres dans le golfe persique avec l’Iran et la Russie, au même moment où elle réduit les habitants de Hong Kong à quia.
Les yeux ne se sont décillés que tard et partiellement aux Etats-Unis. Les études américaines ont fini par faire droit à quelques idées évidentes : la Chine totalitaire n’a respecté aucune des règles de l’OMC et les Etats-Unis ont perdu leur influence dans le processus multilatéral de cette institution. Le vol des brevets a continué sans limite et l’obligation de sociétés mixtes a permis de récupérer toute la technologie occidentale qui passait par là. Les achats d’Etat faits avec les dollars accumulés ont tous été léonins : « on vous achète mais vous transférez la technologie ». L’économie de la Chine n’est toujours pas une « market economy » au sens de l’OMC. Le rôle de l’Etat et du parti est écrasant et la sécurité juridique est nulle. La finance locale est entièrement contrôlée par l’Etat et ne finance que des plateformes d’exportation. La consommation interne est négligée. On mobilise partout des paysans pour en faire des ouvriers à bas prix. Les considérations raciales jouent comme le montre l’exemple récent du travail forcé des musulmans.
L’illusion aura été qu’une dictature meurtrière, ayant commis les pires massacres de la seconde partie du XXème siècle, dont l’atroce génocide des paysans lors du Grand Bond en Avant, les crimes de masse de la Révolution Culturelle et le massacres des étudiants de Pékin sur la place bien connue, jouerait selon les règles. Le marché intérieur a été largement fermé. Tout l’effort a porté sur une politique mercantiliste de captation de la richesse occidentale pour la mettre au service du Parti Communiste Chinois et servir des intérêts nationaux et socialistes. Face à une telle dictature, que compte l’OMC ?
Il est facile de comprendre que la déloyauté chinoise n’est pas accidentelle. On s’est illusionné par cupidité en croyant qu’un état de droit et une compétition honnête était possible en Chine. L’Etat Chinois a partout imposé un partage de technologie avec possibilité ultérieure de concurrencer le fournisseur. Il a maintenu une offre de travail artificiellement peu coûteuse et l’a spécialisée dans la capture de l’industrie mondiale.
Les effets macroéconomiques du mercantilisme chinois ont été tragiques. Il a entrainé une déflation continue en Occident, aggravée en Europe par la création de la zone Euro. Il a poussé à un gonflement sans limite de la création monétaire artificielle et sans autre objet que la spéculation faute d’opportunité d’investissement dans les pays déficitaires. L’apparente contradiction entre déflation salariale et inflation monétaire n’en est pas une. Si, par la disparition de près du quart de l’industrie occidentale, vous maintenez des salaires très bas et si votre compétitivité est constamment mauvaise, les prix des biens de consommation ne peuvent pas monter. Au contraire ils baissent. En valeur de référence (panier de biens rares), la baisse est très forte. Comme la monnaie perd toute valeur, les prix en valeurs faciales ne donnent pas l’impression de baisser mais les produits qui sont incorporés dans la valeur de référence montent prodigieusement. Voir l’or, les terres rares et l’immobilier de grandes villes.
Il est impossible de s’adapter à une telle pression. Détruire les systèmes sociaux issus de l’après-guerre de 40 n’est pas une solution acceptable. Les conséquences politiques sont commentées aujourd’hui tous les jours. Les « élites » qui ont laissé faire ce massacre industriel sont perdues de réputation. Les grandes entreprises qui avaient cru triompher dans la mondialisation et qui sont désormais en difficulté face à leurs concurrents chinois, qui ne jouent pas avec les mêmes règles, en reviennent.
Dès le TFTEA du temps d’Obama, les Etats-Unis se préparent à une contre-attaque. C’est Trump qui la mène devant, à la fois les excédents démentiels chinois et la fermeture de facto de leur marché intérieur. Mais il réalise que les Chinois ont du répondant. Il est tard, peut-être trop tard. Les réserves chinoises en dollars se comptent en millier de milliards. Elles permettent d’acheter des bonnes volontés un peu partout.
Le projet de route de la soie est la confirmation que Pékin ne souhaite qu’une chose : maintenir sa domination dans les exportations, sans faire droit à sa demande intérieure. L’argent afflue hors de Chine dans des zones ciblées qui craquent facilement. Des pays ruinés par la concurrence chinoise accepte qu’on investisse sur leur sol sans se soucier de comprendre que cela va aggraver cette situation !
La situation devient intolérable sur tous les plans, moraux, sociaux, économiques et politiques. Même l’Allemagne est obligée de se fâcher quand elle constate que les Chinois utilisent leurs immenses réserves pour tenter d’acheter les perles de son Mittelstand.
En manipulant sa monnaie, la Chine peut contrer les taxes américaines qui n’ont aucun effet sinon de rendre les économies occidentales plus fragiles. Big business craint la récession. Les articles intéressés se multiplient, expliquant que contrer la Chine est un combat perdu d’avance, que taxer les exportations chinoises perturbe les exportations américaines, que les excédents sont un signe de noble compétitivité, etc.
Des personnages stipendiés jouent à fond la carte chinoise. On le voit avec Raffarin en France. Beaucoup font semblant de croire que les objectifs de l’entrée de la Chine dans l’OMC progressent. Mais non. Xi joue la même carte violente et truquée indéfiniment. Il craint d’être viré des marchés mondiaux. Alors il pratique la séduction adossée à ses réserves et montre ses dents militaires. Trump n’a pas de réponse. Il annonce en ce début d’année un accord réglant toutes les questions en suspens. Ce n’est qu’une nouvelle illusion, si ce n’est pas qu’un minuscule calcul électoral.
Sur tous les sujets Trump a facilité le diagnostic et compliqué la solution. L’Iran, la Russie, la Turquie, la Chine, la Corée du Nord s’amusent presque à montrer son indigence stratégique, tout en espérant que la force réelle des armes américaines ne se déclenchent pas vraiment. Et tout le monde se fiche du diagnostic. L’affaire Suleiman (l’assassinat ciblé d’un général des gardiens de la révolution iranienne par un drone américain) montre que les illusions sont partout et que la puissance américaine n’est pas un vain mot.
L’Europe est totalement absente. L’Allemagne qui pratique la même politique mercantiliste que la Chine ne peut pas la condamner. Elle lui vend machines et voitures. L’Europe n’existe plus dans la géopolitique mondiale. La France s’enfonce dans le bourbier des grèves politiques et des manifestions de « Gilets Jaunes ». Elle se débat entre déficits intérieurs et extérieurs, dettes et chômage. Elle est devenue l’exemple repoussoir d’un leader mondial de la fiscalité abusive avec un niveau de criailleries gauchistes qu’on ne trouve plus guère que dans certains pays d’Amérique du Sud travaillées par le castrisme et le révolutionnarisme bolivarien.
Toutes les monographies ont le même inconvénient. Au bout de l’effort, l’auteur finit par tenter de tout expliquer par son thème majeur. Souvent en outrant les raisonnements. L’auteur n’a pas de vision globale des difficultés économiques depuis l’été 1971. Il n’a pas de théorie générale de la crise. L’affaire de l’intégration de la Chine dans l’OMC est un sous phénomène dans un phénomène plus large qui n’est pas analysé. C’est au moment de trouver des solutions que la carence apparaît nettement. Que faire ?
L’auteur considère qu’il suffirait d’imposer à la Chine de pratiquer les changes flottants pour que cela aille mieux. Il ne comprend pas que le non-système monétaire international, imposé par les Etats-Unis et qui lui a permis de participer à la grande fête des fonds de placements, est basé sur l’idée que « tout le monde fait ce qui veut et que le meilleur gagne », sachant que l’alimentation en dollars du monde suppose des déficits américains et donc des excédents quelque part. Le mercantilisme chinois n’aurait pas été possible en régime de changes fixes et ajustables sous surveillance du FMI quand les grands déficits et les grands excédents étaient proscrits. Les Etats-Unis n’ont pas voulu accepter cette contrainte et ont fait sauter le système. Ils s’aperçoivent que les Allemands et les Chinois après les Japonais, les Coréens et quelques autres ont fini par leur tailler des croupières. La fin des systèmes de « socialisme réalisé » a considérablement aggravé les choses en empêchant de réguler le rattrapage.
Paterson ne comprend pas la dimension monétaire globale de la crise et sans réforme du système monétaire international, il n’a pas de solution autre que d’exclure la Chine au prix d’une récession mondiale forte.
Son livre est une lecture indispensable, puisque ce sujet n’a fait jusqu’ici, à notre connaissance, l’objet d’aucune enquête aussi fouillée. En révélant indirectement l’effondrement géopolitique de la France, et la mort de la réflexion globale des journalistes de la PQN et des élites universitaires, il rend spécialement service aux Français. En montrant que l’Euro a aggravé les choses, il est également fort utile.
Malheureusement il démontre aussi que les meilleurs esprits anglo-saxons n’ont toujours pas compris les méfaits du système des changes flottants et qu’il n’y aura pas de solution aux effets tragiques justement soulignés des excédents chinois sans retour à un système organisé des changes et des relations commerciales. Monnaie et commerce sont les deux faces d’une même réalité.
En laissant la monnaie aux banques centrales et le commerce à l’OMC, on a créé une fausse dichotomie ingérable. Il n’y a pas de bon commerce sans bonne monnaie. Et réciproquement.
Et il n’y a pas de bonne coopération économique possible avec une dictature socialiste génocidaire.
Didier Dufau pour le Cercle des économistes e-toile
Le cercle des économistes regroupés dans E-TOILE autour de Didier Dufau, Economiste en Chef, aborde des questions largement tabous dans les media français et internationaux soit du fait de leur complexité apparente, soit parce que l'esprit du temps interdit qu'on en discute a fond. Visions critiques sur les changes flottants, explications sur le retard français, analyses de la langueur de l'Europe, réalités de la mondialisation, les économistes d'E-Toile, contrairement aux medias français, ne refusent aucun débat. Ils prennent le risque d'annoncer des évolutions tres a l'avance et éclairent l'actualité avec une force de perception remarquable. Association loi 1901 |
Dans son livre “From Third World to First”, Lee Kuan Yew le dirigeant de Singapour pendant les décennies de son miracle économique est parfaitement explicite sur la façon dont ils s’y sont pris pour assurer leur développement économique : “Nous nous sommes liés aux pays industrialisés, nous rendant utiles pour eux, fabricant leurs produits avec leurs technologies, les exportant mondialement. ». Ce qu’il faut lire « Nous nous rendions utiles aux entreprises multinationales des pays industrialisés en abaissant leurs coûts de production et en améliorant leurs profits grâce aux coûts salariaux et aux impôts sur les bénéfices largement inférieurs à Singapour. Nous fabriquions chez nous leurs propres produits avec leur propre technologie pour les ré-exporter ensuite chez eux et partout ailleurs». Lee Kuan Yew raconte dans son livre comment les délégations chinoises du plus haut niveau sont venues étudier ce modèle de développement économique très particulier et comment Singapour a envoyé des conseillers en Chine pour les aider à mettre en place leurs « zones économiques spéciales ». La seule différence étant que l’économie mondiale pouvait absorber le minuscule Singapour démocratique sans problème mais pas l’énorme Chine totalitaire.
Pourtant cela fait 2 à 3 ans que le cycle décennal est passé...
Encore une théorie économique à mettre à la poubelle...
Eh oui, mais non, du moins en ce qui concerne les USA (mais la Suisse aussi, la NZ, l'Australie et tout pays ayant adopté des réformes libérales).
Vous faites tjrs la même erreur d'analyse fondamentale, car vous avez un tropisme étatisant :
Le problème n'est pas les changes flottants, tout bonnement parce que les changes flottants, cela n'existe pas, toutes les monnaies sont trafiquées par les états (ie les banques centrales, c'est la même chose).
En affirmant que tout irait mieux si l'état contrôlait mieux la monnaie, vous affirmez clairement que c'est l'origine du problème qui est la solution ...
La réalité dément vos affirmations : les pays faisant des réformes libérales n'ont pas de trend de croissance baissier, et leurs classes moyennes sont des grands gagnants de la mondialisation.
Allez voir en Suisse !
mais bon, il suffit de regarder les résultats de la politique libérale de Trump (moins d'impôt, moins de règlement) pour voir l'élévation fantastique du niveau de vie aux USA en peu de temps, jugez plutôt :
Les récentes données du Census Bureau montrent qu’en 2018, plus de 30 % des ménages américains gagnaient plus de 100 000 dollars par an (c’est-à-dire la classe supérieure) ; moins de 30 % des ménages gagnaient entre 50 000 et 100 000 dollars (c’est-à-dire la classe moyenne) et la part des ménages américains gagnant au moins 100 000 dollars a plus que triplé depuis 1967, alors que 9 % seulement des ménages américains gagnaient autant à l’époque.
En 2018, la part des ménages gagnant moins de 50 000 dollars (la classe inférieure) est tombée sous la barre des 40 % pour la première fois depuis que le Census Bureau a commencé à collecter des données en 1967.
Mobilité des classes
À l’époque, 54 % des ménages gagnaient moins que 50 000 dollars. En fait, il existe une très grande mobilité entre les classes, ce qui fait que les plus pauvres et les classes moyennes basculent d’une catégorie à l’autre. Comme le montre aussi l’évolution du PIB par habitant, ces ménages s’enrichissent, à l’exception des périodes de crise, et les classes moyennes ne disparaissent pas.
Même si la Chine est fermée, même si elle ne fait qu'exporter, tous les pays commerçant librement avec elle sont gagnants, si tant est que leurs états les laissent suffisamment libres économiquement pour s'adapter, ce qui n'est pas le cas de nombreux pays trop étatisés ...
Ensuite, sur la question de la dictature chinoise et des droits de l'homme, on quitte le domaine de l'économie pour aller sur le sujet de la politique.
Mais que faire quand même la France, phare de l'humanité (?) pays des droits de l'homme, bafoue sa constitution (cad la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789) tous les jours ????
Encore une fois, Reagan l'a bien dit : l'état ne peu apporter de solution car c'est l'état le problème ...
Comment aller jusqu’à l’absurde par adhésion rigide à une doctrine ? Donc, même si la Chine était totalement fermée aux importations et ne faisait qu’exporter, ce serait tout de même la faute des autres pays s’ils n’étaient pas assez libéraux pour s’ajuster aux modifications de leur structure économique provoquée par ce comportement ?
Les socialistes français ont tellement de chance d’avoir des libéraux comme vous, c’est vraiment trop facile pour eux.
C'est une bonne question que nous avons posée sur ce site en...2017( http://cee.e-toile.fr/index.cfm/2017/12/26/Le-cycl...-). Les cycles décennaux sont des cycles de surexposition bancaire. En étouffant les banques et en passant aux intérêts négatifs, a-t-on asphyxier le phénomène, en le convertissant en stagnation de longue durée ou a-t-on créé les conditions d'un krach structurel et non plus conjoncturel ? La question reste ouverte.
Sur la Chine nous avons posté un article le 23 novembre 2018 sur ce thème. "Faut-il traiter la Chine en interlocuteur "normal" "? avec les mêmes conclusions que ce Monsieur Paterson qui a écrit son livre à la même époque. Le constat d'une déviation dangereuse menant à une situation désastreuse prévaut désormais. La Chine fait des gestes. Elle vient de supprimer l'obligation de la co-entreprise pour les sociétés financières. Tout prouve qu'il n'y a dans cette affaire que de la géopolitique malsaine de la part de la Chine (Xi venant en plus de se faire reconnaître le statut de Mao Tse Dong, sa pensée devenant "constitutionnelle") et pas de véritable issue positive pour l'économie occidentale où l'explosion des populismes répond à l'effondrement d'une partie de la classe moyenne et surtout ouvrière dans tous les pays développés sans exception.
La question des déséquilibres de balances extérieures a été traitée par de nombreux économistes libéraux même si les théories microéconomiques de cette école s'appliquent idéalement dans un pays homogène et fermé. Techniquement la question est celle du bouclage du circuit économique dans un pays en déficit. Le revenu distribué ne se retrouve pas en face de la production qui l'a justifié, puisqu'il y a eu fuite vers l'extérieur. Ce non bouclage provoque chômage et déflation, et des pertes dans le système bancaire qui a prêté pour permettre cette production. De surcroît les gains mercantilistes des pays en excédents se retrouvent dans "la double hélice de crédits" de Rueff et provoquent une montée de l'endettement global et des poussées spéculatives qui provoquent des crises financières lourdes. Ce qui a été amplement prouvé depuis 1971. Un économiste qui prétendrait nier ces phénomènes devrait au moins prouver ses dires contre tant de preuves accumulées. Personne n'a jamais essayé ce tour de force.
En tout état de cause, la théorie libérale s'applique difficilement lorsque les acteurs sont des états qui tiennent entre leurs mains entre 50 et 100% du PIB de leur pays (en France la valeur ajoutée des entreprises non financières et non individuelles est l'exact équivalent de la dépense publique, comme le confirment les chiffres de 2018 et les premières évaluations pour 2019).
Les systèmes monétaires internationaux, qu'il s'agisse du régime mondial dit "des changes flottants", en fait du "que le meilleur gagne" ou de l'Euro, sont dommageables dès qu'ils ne permettent pas structurellement le retour à un minimum d'équilibre. Le dépérissement des États n'étant pas pour tout de suite, la sagesse commande de faire les réformes rationnelles qui s'imposent.
je suis d'accord avec vous, n'allez pas jusqu'à l'absurde par adhésion rigide à une doctrine !
accessoirement, le libre échange découle de la philosophie du Libéralisme, qui n'est pas une doctrine ...
En vous lisant, je crois lire la pétition des marchands de chandelles de Bastiat : "Nous souffrons d’une concurrence étrangère intolérable en ce qui concerne la production de lumière, qui inonde absolument le marché national à un prix fabuleusement bas. Ce rival n’est autre que le soleil.»
Mais manifestement, voue n'avez pas compris ce que j'ai dit : une économie libérale (et ses consommateurs), cad souple et adaptative, sera malgré tout gagnante de commercer avec un pays totalement fermé à ses exportations, comme les faits le montrent pour toutes les économies un tant soit peu libérales : Suisse, Singapour, Corée du Sud, Hong Kong, NZ, Australie, Chili, USA, etc etc etc ...
Curieusement, et contrairement à ce que vous affirmez, les classes moyennes n'ont pas disparu dans ces pays, elles se sont même enrichies, comme l'ensemble de la société d'ailleurs, avec des taux de chômage fort bas.
Par contre, les économies fortement étatisées comme la France, ou l'Italie, la Grèce, etc ... n'ont pas besoin de la Chine et de son économie fermée, elles coulent très bien toutes seules.
Chercher les responsabilités ailleurs (en Chine) de ce qui arrive en France par notre faute, c'est un travers bien français.
Pas du tout. Les débuts de l'économie concerne justement la question monétaire et le mercantilisme. Détacher la notion de valeur de la notion de monnaie a été une dure tâche. Empêcher les Etats de confondre richesses des nations et accumulation d'or est le fondement des premiers écrits économiques. Nous ne faisons que rejoindre les initiateurs de l'économie politique. On peut même dire que l'économie démarre pour empêcher les Etats de croire qu'il faille rechercher à accumuler un tas d'or et pour les aider à se concentrer sur la production.
La liberté se chérit mais les libertés s'organisent. C'est particulièrement vrai dans le domaine international qui voit s'affronter des Etats souverains. Comme la base des échanges n'est plus principalement l'avantage compétitif naturel mais le niveau des salaires, la chute des systèmes socialistes a amené des centaines de millions de salariés pauvres sur le marché international de la production, provoquant une baisse globale du revenu des salariés (exprimés en valeur de référence) dans les pays développés et une hausse dans les pays émergents. Voir notre article récent sur le sujet. Nier cette baisse est indigent. Les Etats qui ont des électeurs doivent nécessairement répondre de ce phénomène qui explique la poussée dite des populismes. Ils ne réagissent pas en sujets économiques mais comme décideurs souverains. Ce que nous proposons c'est d'organiser le jeux des pouvoirs souverains afin que l'intérêt général prévale. Afin justement que le libéralisme prospère et s'étende. On avait presque réussi à Bretton Woods. Il ne faut pas lâcher l'affaire.
Vous semblez peu familier avec le modèle de développement économique de beaucoup des pays que vous citez en exemple.
Pour Singapour, vous trouverez beaucoup d’éléments dans le livre du principal artisan de ce miracle économique Lee Kuan Yew “From Third World to First”. Vous ne trouverez rien du tout sur le commerce avec les pays fermés aux exportations auxquels Singapour ce serait libéralement adapté. En revanche, vous trouverez des phrases de ce genre que je vous laisse méditer : « Nous nous sommes associés aux pays industrialisés, nous rendant utiles pour eux, fabriquant leurs produits avec leur technologie, les exportant mondialement ».
Les pays qui produisent s'enrichisse, les pays qui revendent les produits fabriques par d'autres s'appauvrirons, c'est ineluctable.