Macron : une anguille à la sauce hollandaise ?
La candidature Macron est importante. Elle l'est sur un plan purement politique. Elle a cassé ce qui reste du modem et marginalisé le dernier survivant de la classe politique des années quatre-vingt : François Bayrou. Elle a probablement cassé la dynamique d'unité socialiste que le Manuel Valls voulait construire autour de sa personne. Elle aurait fait beaucoup de mal à Juppé s'il n'avait été éliminé aussi radicalement aux Primaires de la droite et du centre. Elle l'est également sur le plan économique puisque la restauration d'un moteur économique puissant est au centre de son discours, ce qui rejoint la démarche de François Fillon. Venant directement du premier cercle du président sortant, qui a porté et la loi Macron et la loi El Khomry, cela met un coin terrible au sein du PS. Valls paraît jouer petit bras et les frondeurs ne peuvent que sentir une indicible force répulsive.
La candidature Macron est également habile. Il a réussi à faire passer un message d'enthousiasme. Son livre révolution est absolument vide. Mais on aurait tort de le juger sur sa vacuité programmatique. Il n'a pour but que d'affirmer des enthousiasmes (l'entreprise, l'Europe, les nouvelles technologies, …) et de balayer des miasmes (le socialisme ringard, la droite ringarde, le syndicalisme ringard, …), la ringardise étant associée à un passéisme dégénéré. Le but est de plaire aux femmes et à la jeunesse, tout en ouvrant les bras à l'immigration, à l'Europe et au Monde. Le but est de caler François Fillon dans le camp des tristounets en attendant d'en faire un croque-mitaine.
Ce genre d'exploit médiatique n'est pas si rare que cela. C'est au fond ce qu'avait réussi à faire un temps François Bayrou. L'ennui de ce genre d'approche, c'est sa vulnérabilité dès qu'on entre dans le dur des programmes. En 2007 Bayrou était au sommet de sa forme et comptait comme Macron actuellement sur une cote située entre 15 et 19 % des intentions de vote. Sur tous les grands sujets la réponse était la même : ce sera bien parce que ce sera moi aux commandes et que j'irai chercher les meilleurs. Au final, cela n'a pas suffi.
Macron a senti le danger et décidé de donner des éléments de programme qu'au compte-gouttes lâchant élément par élément, comme on pèle un oignon odorant. Suffisamment pour épicer le discours, mais en évitant de faire pleurer.
Ce qu'il a divulgué hier dans sa première grande réunion comme candidat démontre qu'on a toujours tort de sortir de l'ambiguïté, la grande maxime du Mitterrandisme, reprise par François Hollande. Il y a beaucoup et probablement trop de hollandisme dans le programme Macron. Comme Hollande, il évite de s'attaquer de front aux grands tabous. On ne touchera pas aux trente-cinq heures ; on ne touchera pas aux fonctionnaires ; on ne touchera pas à la sécurité sociale ; on n'augmentera pas la TVA "qui frappe les plus faibles". Bref, on rassure tout le monde. Il y aura plein de boucliers partout. le changement sans changement, il n'y a que cela de vrai. "On va faire confiance aux Français, déconcentrer à mort, décentraliser pleinement (à moi Bretons et Corses) ; on va faire confiance à l'Europe". Revoici le langage du grand écart : la proximité champêtre plus les directives européennes. Une contradiction ? Quelle contradiction ? Et le gouvernement français, il fait quoi au milieu de ce déchaînement d'énergie au dessus et au dessous ?
Mais Monsieur, c'est très simple : il distribue. On va redonner de l'argent aux actifs en supprimant une grande part des charges salariales qui seront renvoyées sur …les retraités. Oh pas tous : les 40 % les plus riches. Allez hop ! À ces salauds de retraités aisés qui votent de toute façon à droite, on va piquer 1.7 % de leur revenu. C'est quoi 1.7 ? Presque rien. De quoi ils se plaignent ? Toujours les mêmes ces riches qui ne veulent pas sauver la France en se faisant égorger fiscalement. Et ceux-là, ils ne pourront pas s'exiler. Dans la pratique cela veut dire que le taux marginal d'imposition va passer de 65.5 à 67.2 %. Encore un effort et on sera au 75 % hollandais. Et cette mesure ne pèse en aucun cas sur l'entreprise triomphe Macron-les-beaux-yeux-bleus-ni-degauche-ni-de-droite. Pour les retraités la pilule sera amère : l'inflation repart. On pense qu'elle dépassera 2 % en 2017 et il n'y a plus d'indexation. Ils vont perdre 4 % sur la totalité de leur revenu mais 8 à 10 % sur le disponible : et oui, les fameux retraités aisés sont déjà souvent taxés à plus de 50 %. Si on tient compte des charges fixes de logement, l'impact sera plutôt autour de 20 %. Mais cela, on ne poussera pas l'honnêteté jusqu'à l'avouer.
Les premières mesures annoncées (comme on les comprend à travers un discours, mais elles seront peut-être explicitées par écrit) n'auront aucun effet sur les entreprises, ce ne sont pas elles qui paient les charges salariales. Elles ne facilitent pas la compétitivité (comme la TVA sociale). Elles n'augmenteront pas la demande globale (on en fait un simple transfert d'une catégorie sociale à une autre). Et on recommence à séparer les bons Français corvéables à merci qui sont chargés de payer le vote d'un candidat. Hollande, nous voilà !
Comme Hollande on est pour tout ce qui est pour contre tout ce qui est contre, dans le verbiage de l'enthousiasme, on contourne tous les nœuds gordiens qui se dénoueront tout seuls, on ne touche à personne sauf à une partie de la population "aisée" corvéable à merci et qui aurait bien tort de crier à l'injustice.
On revient à la démarche de Hollande. Évitements divers, refus de traiter les sujets qui fâchent, et achat de vote démagogique. Sans aucun résultat à attendre sinon un méchant retour de bâton en moins de deux ans.
En fait cela donne de la marge à François Fillon qui n'aura qu'un mot à dire : qu'est-ce que ce programme change et en quoi peut-il sortir le pays de l'ornière où il se trouve. Tout le monde il est gentil tout le monde il est beau c'était en 1968. Faire du socialo-hollando-centrisme soixante-huitard n'est pas ce qu'on attendait du jeune Emmanuel Macron.Mais quand on est haut fonctionnaire et banquier d'affaire on ne peut pas s'attendre à ce qu'on casse la baraque. L'important est la conservation de l'Administration et la préservation des affaires réservées aux 100 milliardaires qui comptent vraiment pour les choses sérieuses et dont une partie finance sa campagne. Ceux-là veulent d'abord la paix sociale. L'avilissement national ne compte pas. La symbiose entre haute fonction publique et affairistes mondialisés doit perdurer. Et qu'on ratisse les retraités moyennement aisés (40 % du total tout de même) les gêne moins qu'une manif un peu rude de la CGT.
Voici que Mélenchon a du grain à moudre.
Décidément non. Cette approche Macron n'est pas la bonne pour la France, même s'il faut attendre que toutes les mesures qu'il propose sortent de la boîte pour en juger définitivement. Elle ne permet pas de détourner le Titanic français de sa course folle vers la falaise grecque. Seulement de détourner l'attention.
Dommage.
Le cercle des économistes regroupés dans E-TOILE autour de Didier Dufau, Economiste en Chef, aborde des questions largement tabous dans les media français et internationaux soit du fait de leur complexité apparente, soit parce que l'esprit du temps interdit qu'on en discute a fond. Visions critiques sur les changes flottants, explications sur le retard français, analyses de la langueur de l'Europe, réalités de la mondialisation, les économistes d'E-Toile, contrairement aux medias français, ne refusent aucun débat. Ils prennent le risque d'annoncer des évolutions tres a l'avance et éclairent l'actualité avec une force de perception remarquable. Association loi 1901 |
Hamon à un niveau très faible.
Son diagnostic sur le chômage structurel de masse en France attribuable au seul progrès technique / technologique est au minimum très incomplet.
Son idée de combattre le chômage en partageant le travail via une réduction à 32h hebdomadaire ne tire aucun leçon de l'expérience des 35h qui a pourtant échoué à faire baisser le chômage. C'est pour le moins léger.
Rien dans son programme sur la prévention et la correction des déséquilibres européens entre pays membres baissant leur coût du travail et ceux qui l'augmentent au sein d'une zone de monnaie unique sans budget fédéral, donc sans possibilité d'ajuster les différentiels de compétitivité par les taux de change ou les transferts fiscaux. Hamon propose que la France alourdisse son coût du travail avec les 32 heures et le revenu universel. C'est incompatible avec le fait de rester dans la zone Euro dans laquelle les partenaires soignent leur compétitivité salariale. Les déséquilibres intra-zone vont encore s'accentuer au détriment de la France. Celle-ci risque de jouer à la prochaine crise le rôle que la Grèce, l'Espagne ou le Portugal ont tenu lors de la crise précédente. Hamon, qui ne prône pas une sortie de la zone Euro, ne semble même pas avoir conscience du risque, montrant ainsi que 8 ans de crise européenne n'ont aucunement amélioré sa compréhension des dysfonctionnements de la zone. C'est pour le moins léger.
Pas un mot sur le chômage et / ou la pression salariale résultant de l'immigration d'une main d'œuvre peu qualifiée et disposée à travailler pour des salaires inférieurs à ce que demandent des travailleurs français. Hamon propose d'encourager l'immigration avec l'idée d'un visa humanitaire. De la part d'un candidat aspirant à diriger une société déjà frappée par le chômage structurel de masse où le travail - déjà trop rare - serait inéluctablement amené à se raréfier du fait de la technologie au point qu'il faille le partager toujours davantage, c'est pour le moins incohérent.
Sa proposition de revenu minimum sans contrepartie de travail est le pendant dans une société de chômage structurel de masse du salaire minimum dans la société de plein emploi de l'après guerre (le salaire minimum a été instauré en 1950 en France). Considérant que le plein emploi a perduré en France jusqu'au début des années 1970, on saisit mieux l'incroyable plantage de ces 45 dernières années. Plantage dont aucun diagnostic fondé et communément accepté n'est établi à ce jour.
Bref, Hamon est très loin d'avoir le niveau requis.
Pour Mélenchon, c'est beaucoup plus inattendu et cocasse. Il faut payer pour lire son programme qui n'est autre que son livre "l'avenir en commun" ! Son site de campagne est en fait un site de e-commerce (https://materiel.jlm2017.fr/produit/kit-de-10-prog...). Mélenchon ultra-libéral dont la soif de profit le pousse à vendre à titre onéreux un bien public tel qu'un programme électoral ? Bon, de ce que je comprends, lui veut sortir de la zone Euro, ce qui a au moins le mérite d'une plus grande cohérence par rapport à son programme intérieur. C'est un progrès par rapport à Hamon qui est totalement incohérent sur ce point. Faire payer un programme électoral, tout de même ! Il faut reconnaître, ce type à un culot ... présidentiel.