Deux mots sur la dette française

L'INSEE vient de présenter dans ses Tableaux la dette françaises hors intitutions financières à fin 2013.

Notons d'abord le retard à fournir des chiffres cruciaux. 14 mois, c'est bien trop. Le chiffre devrait être connu et publié dans les deux mois, au pire d'un trimestre sur l'autre.

Notons ensuite que l'on oublie les dettes du secteur financier qui sont extrêmement difficiles à bien cerner et à consolideer avec la quote part de dettes de la BCE.

Au 4.500 milliards de dettes, hors secteur financier doit s'ajouter les dettes cumulées du secteur financier. Les quatre pincipales banques françaises ont une dette cumulées (non consolidée) de plus de 6 000 milliards. 

On en est déjà à plus de 10 000 milliards, sans compter la BCE et le reste du réseau des institutions financières françaises.

Ce qui veut dire que notre taux d'endettement global est  bien supérieur à 400% du PIB et croit encore.

Ce chiffre doit être rapproché de la production des entreprises de plus de 1 personne du secteur non financier qui était fin 2013 autour de 1.200 milliard d'euros.

Croire que la production privée française va permettre de rembourser les dettes encourrues par les agents économiques français et la banque centrale européennes est une triste fadaise.

Face à cette réalité, le gouvernement Valls présente la loi Macron, dont l'effet sur la croissance du secteur privé non financier doit être environ d'un dixième de pourcent de PIB. Il aurait aussi bien fait d'attaquer la dette avec un cure-dent.

Un jour, on s'étonnera....

 

 

 

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Commentaire
DvD's Gravatar Il faut faire attention avec la dette financière.

La dette bancaire, sous forme de dépôts ou sous forme de sicav monétaires souscrivant à du papier bancaire court terme, correspond à des avoirs monétaires d'autres agents et s'élimine donc quand on considère la dette nette du système économique dans son ensemble. La prendre en compte aboutirait à un double comptage.

Et bien sûr, les grandes banques françaises ont des expositions hors de France qui sont à mettre en face des flux de productions des économies concernées. De même que les grandes banques internationales ont des expositions en France à rapprocher des flux de revenus générés par l'économie française.

En revanche, si d'autres institutions financières comme des compagnies d'assurance par exemple empruntent alors qu'elles n'en ont nul besoin compte tenu de leur cycle de trésorerie (elles encaissent les primes avant de décaisser les sinistres), c'est pour obtenir un effet de levier supplémentaires sur leurs investissement, dont beaucoup de titres obligataires (de la dette donc), de l'immobilier, des actions de sociétés qui peuvent par ailleurs avoir elles mêmes de la dette, etc. Il s'agit donc d'un double effet de levier sur la même base d'actifs et cette dette financière doit donc être prise en compte lorsqu'on estime l'endettement global du système économique dans son ensemble.

Même chose quand on remplace la compagnie d'assurance dans l'exemple ci-dessus par une holding financière qui rachète en partie par dette une entreprise ou un fonds spéculatif qui s'endette pour spéculer sur les marchés actions.

Distinguer la dette financière qui correspond à un double comptage (à exclure donc dans la consolidation comptable de l'économie nationale) de celle qui correspond à un double levier (à prendre en compte) n'est pas facile du tout. Le traitement correct de la dette des banques centrales est encore moins clair. De là vient, me semble-t-il, les variations - parfois importantes - dans l'estimation de la dette globale. Il me semble - mais j'avoue volontiers ne pas être totalement au clair sur ce sujet compliqué - que les estimations autour de 400% de dette globale / PIB global intègre une part de double comptage et que les estimations autour de 300% sont plus proches de la réalité économique.
# Posté par DvD | 21/02/15 14:57
DD's Gravatar C'est justement parce que ces chiffres posent à la fois des questions de définition et des questions de comptage et de consolidation que nous demandons inlassablement, depuis... 1997 que les instances nationales et internationales s'accordent sur une méthodologie. Lorsqu'on se penche sur les chiffres fournis par les différentes organisations, il n'y a aucune cohérence. Lorsqu'on prend des chiffres pluri nationaux le mystère s'épaissit; C'est pourquoi on a toujours des doutes sur les enquêtes fournies par des organismes indépendants comme Deutsche Bank ou McKinsey.

Seuls les chiffres fournis pour l'état, les particuliers et les entreprises sont à peu près cohérents. Pendant longtemps on a considéré qu'ils étaient seuls emprunteurs, le système financier n'étant que la contrepartie. Jusqu'au jour où on a vu les banques centrales créer de l'argent en masse, toujours en contrepartie d'une dette (l'émission est toujours au passif de la banque centrale) et qu'il y avait emprunt massif par les banques et création de passif selon un multiplicateur. La contrepartie de cette émission de dettes n'étaient plus seulement les dettes des trois "utilisateurs", mais aussi le système bancaire lui-même, spéculant pour compte propre. Le système bancaire ne porte plus seulement à son actif les prêts à l'extérieur de lui- même, mais aussi le financement par lui-même d'achats de classes d'actifs à crédits. C'est pour nous la naissance de ce que nous appelons l'économie baudruche, où les financements ne vont plus à la consommation ou à la production ou aux dépenses excédentaires des états, mais au gonflement de plus-values nominales dont le système financier entend s'attribuer le plus grande part.

Ce mouvement a commencé dans les années 70, en même temps que s'ouvraient les salles de marchés. Il prend en défaut les systèmes statistiques.

Comme les dettes des trois agents bien mesurées sont entre 270 et 290%, et que les estimations que nous faisons, à la louche, pour le secteur financier dans son ensemble (pas seulement les banques) est d'environ 100%, correspondant à un portage d'actifs propres financés par l'emprunt ou la création monétaire, et exigeant à terme un remboursement, le chiffre de 400% n'est pas injustifié.

Il faudrait pour qu'on soit à 300% que le portage d'actifs par le système financier global en contrepartie d'emprunts ou de création monétaire ne représente que 10 à 25% du PIB. Malgré le dégonflement des actifs bancaires, ce chiffre parait trop faible. Si on ajoute la création nette de dette par la BCE, le ciel est la limite.

Pour trancher il faudrait que les statistiques comptent l'actif du secteur financier financé par lui-même pour lui-même. La faillite du système bancaire n'a pas été provoquée principalement par le ralentissement des prêts et l'aggravation des pertes sur prêts mais par la perte de valeurs d'actifs spéculatifs portés par le système financier lui même.

# Posté par DD | 22/02/15 13:20
DvD's Gravatar Il est "amusant" de constater que la lettre du Ministre des Finances Grec du parti de gauche radicale Syriza à l'Eurogroupe datée du 23 février 2015 déclencherait immédiatement en France une grève de la fonction publique.

Notamment les engagements de réformes suivants :

Sur la dépense publique :
- Revoir et contrôler la dépense dans tous les secteurs du gouvernement (ex. éducation, défense, transport, collectivités locales, bénéfices sociaux).
- Travailler à améliorer drastiquement l'efficacité du gouvernement central et des collectivités locales en visant les processus budgétaires, en restructurant les directions et en réallouant les ressources mal déployées.

Sur la réforme de la sécurité sociale :
- Continuer de travailler à des mesures administratives pour unifier et simplifier les régimes de retraite.

Sur la réforme de l'administration publique :
- Réformer la grille salariale de la fonction publique en vue de décompresser la distribution des salaires via des gains de productivité.
- Réduire les avantages non-salariaux pour réduire la dépense totale.

Sur la réforme du marché du travail :
- Introduire une nouvelle approche intelligente de négociation collective des salaires équilibrant les besoins de flexibilité et d'équité.

Sur la réforme des marchés des produits et l'environnement des affaires :
- Introduire des actions qui réduise le fardeau administratif de la bureaucratie, y compris une législation interdisant aux services publics d'exiger des citoyens et des entreprises des documents que le service public détient déjà (y compris dans d'autres services).

Où l'on voit qu'un parti de gauche radicale se retrouverait à droite de l'UMP dans le paysage politique français, accusé n'en doutons pas du péché ultime d'ultra-libéralisme.

En fait, c'est encore plus piquant que ça : ces réformes sont bien sûr imposées à la Grèce par ses créanciers, au deuxième rang desquels on retrouve le bienheureux contribuable français avec plus de 42 milliards d'euros de crédits, pour la plupart à travers le Fonds Européen de Stabilité financière (car quoi de plus noble, en plus de déjà financer chez soi un des services publics les plus chers du monde, que d'en financer un deuxième sans même en avoir explicitement conscience ?).

Autrement dit, entre 4 murs à Bruxelles, le Gouvernement français et la Commission Européenne via son Commissaire à l'économie et aux finances (un certain Moscovici) imposent au Gouvernement grec les réformes dont la seule évocation en France paralyserait le pays, peur qui, précisément, fait emprunter au Gouvernement français la même voie sans issue que celle suivie par le Gouvernement grec ces dernières décennies.

Bien sûr, on ne peut pas exclure que la Grèce soit prochainement paralysée par des grèves massives.

Le lendemain de cette étonnante lettre du ministre grec de la gauche radicale, un rapport daté du 24 février 2015 de la banque centrale américaine nous indique que le marché actions américain - qui s'est envolé de façon totalement proportionnelle aux injections de liquidité de la dite banque centrale - présenterait une valorisation tendue !

Tout semble donc aller pour le mieux dans le meilleur des mondes ubuesques de l'économie européenne et américaine ...

Peut-être qu'un jour on s'étonnera encore plus, mais on peut déjà commencer à s'étonner tout de suite me semble-t-il...
# Posté par DvD | 24/02/15 23:21
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