« Contre le Libéralisme » d’Alain de Benoist
Un livre déjanté typique de l'esprit du momentParmi les mouvements d’idées calamiteuses qui polluent le ciel des idées en cette période anarchique, on voit remonter des cavernes certains idéologues d’extrême droite qui trouvent une sorte de débouché profitable à leurs détestations.
Les penseurs d’extrême droite ont toujours été anti-libéraux, surtout ceux qui ont considéré que le Moyen-âge était le summum de la civilisation et la période la plus conforme aux réalités de l’âme humaine. Marginalisés, mais stimulés par le gauchisme et le socialisme dominants, ils ont fini par creuser un trou éditorial assez grand pour y piéger différents aspects de l’actualité. La crise et ses conséquences sociales, l’irrédentisme violent des Musulmans et ses effets criminels, l’effondrement de l’URSS, l’affaissement du radicalisme de gauche dans le politiquement correct anti blanc et anti mâle, avec ses effluves de plus en plus délétères, le développement du ZADisme et de la violence institutionnelle des mouvements anarchistes, l’écologisme délirant, avec ses zélateurs hystériques, tout cet effroyable gâchis les a fait remonter à la surface autour d’une idée simpliste : le libéralisme est responsable de tout !
La méthode employée par l’auteur de « Contre le libéralisme » pour développer et illustrer cette idée est simple. On donne une définition biaisée d’un bout de doctrine, qu’on monte sur un pilori. Et on bombarde de citations tirées de partout pour montrer que l’horreur qu’on a dessinée n’est pas une caricature mais ce que juge tout le monde qui pense. Chaque procès successifs donne lieu à des dizaines de citations puisées à toutes les sources mêmes les plus saugrenues.
Le lecteur un peu informé voit l’esprit faux à chaque phrase, le détournement de sens à chaque paragraphe, l’accumulation des contradictions à chaque page. Un procès n’est jamais une réflexion. On veut sanctionner des coupables. La guillotine est au bout. Les idées sont décolletées, tirées vers l’abattoir sous les crachats, et amenées au billot dans l’allégresse un peu verbeuse du procureur content de lui.
Et à la fin, les deux pieds dans la flaque sanglante de l’idéologie saccagée, on se dit : mais il n’y a rien à garder de ce carnage ! On cherche. Il ne reste vraiment rien.
Une accumulation de citations hors contexte, découpées pour servir une détestation, ne fait pas une pensée mais une poubelle. L’auteur a dû se dire comme Mistinguett : l’ai-je bien descendue ? Le libéralisme fantasmé a bien été écartelé par un maximum de chevaux de traits (acérés). La bouillie n’est pas nourrissante. L’auteur se garde bien de proposer quoi que ce soit. Le lecteur sort de là en se disant : et alors ? Et alors, rien. Un petit exercice compilatoire de nihiliste content de son œuvre n’apporte rien, parce que le but est justement nul. Le gamin piétine son château de sable avant que la mer ne l’emporte. L’auteur piétine ses détestations avec la même frénésie enfantine. On ne peut même pas dire qu’à force de biaiser il finit par enfanter un monstre. Il n’enfante rien.
En creux s’esquisse une forme de paradis perdu non assumé qui se cache derrière des aphorismes faux mis en opposition avec des fantômes de débris historiques fantasmés. Le lecteur reste pantois. Aller jusqu’au bout du livre est une épreuve. Car on sait que cela ne sert à rien.
On veut un exemple ? Ouvrons le livre au hasard. La page 328 se présente et en son centre cette phrase : « Ce n’est que dans le capitalisme que le travail a pour fonction d’obtenir des produits qui prennent la forme de marchandises ». Celui qui réfléchit juste une seconde s’aperçoit que la production depuis des millénaires qu’on produit, a pour but de créer des produits. Tautologie. Le Serf, dans la bienheureuse période chérie l’auteur, produisait bien des produits. Ah mais voilà. Ils n’étaient pas de la marchandise. C’est-à-dire qu’ils n’avaient pas vocation d’être vendus librement sur les marchés. Les reitres du seigneur venaient l’arracher au paysan à coups de pied dans le derrière. C’était beaucoup mieux. Que le paysan soit à son compte et vende le surplus de sa production pour acquérir des productions dont il a besoin, cela devient scandaleux. Voilà une rupture fatale avec « toutes les autres formes de vie sociale ». Oui, en effet avec le servage, l’esclavage et le droit de cuissage. Et alors ?
Et alors, « Mort au Koulak » ! Staline avec nous !
Les extrêmes se touchent comme chacun sait. A chaque page, la contestation du libéralisme (beurk !) oblige à des alliances idéologiques et verbeuses avec les bons marxistes. Non : pas ceux qui ont créé l’URSS mais les adeptes des premières pages de Das Kapital ! « En réduisant le capitalisme à un système où les méchants propriétaires des moyens de production se borneraient à exploiter les travailleurs en leur extorquant une plus-value, le « marxisme traditionnel » est passé à côté de l’essentiel ». C’est, qu’à l’extrême droite, on sait juger de l’essentiel de l’extrême gauche ! Alain de Benoist sort alors la grosse artillerie, le summum de la pensée critique et de l’analyse fine : « Le capitalisme est un système où ce sont les marchandises qui règnent ». On est en plein animisme. Les objets ont des pouvoirs et prennent des décisions qu’ils dictent aux malheureux crétins qui ne comprennent pas leur aliénation. Le serf et l’esclave eux étaient aliénés par des hommes. C’était tout de même plus smart. Notez bien que ce n’est pas le produit qui règne mais la marchandise, comme signalé plus haut. Si le produit n’était pas vendu mais arraché aux mains du producteur par le seigneur et maître, il perdrait son caractère venimeux. L’auteur l’affirme sans ambages et sans rire : « La société féodale était tout entière ordonnée à la notion de bien commun ». Walter Scott avec nous ! Il faut dire que dans l’esprit un peu échauffé de l’auteur, le féodalisme est la seule solution qui permette « les solidarités organiques traditionnelles ». Qu’est-ce que c’est que çà, direz-vous ? Débrouillez-vous, l’auteur ne précisera pas ! De toutes façons, tout va mal depuis que les Capétiens, avec l’aide de la bourgeoisie (Beurk !), ont mis fin « aux rapports sociaux hérités de la féodalité » et au « déploiement » tellement heureux d’un « être social global ». Parle à mes sabots, ma tête est malade !
Relevons au passage que libéralisme est assimilé en permanence à une floppée de concepts sans aucun effort de différenciation. Libéralisme = capitalisme = socialisme marxiste dégénéré = démocratie = société marchande = bourgeoisie = bobo des villes = individualisme = indigéniste = n’importe quoi. Tous dans le même sac.
On aura compris. Des concepts brouillons et déjantés s’opposent artificiellement à des concepts détournés de leurs sens et réduits à une bouillie infâme, le tout saucissonné dans une farandole de citations tronquées.
Montjoie Saint Denis, crénom ! Que trépasse si je faiblis.
Trépasse ton chemin, BenoistLe cercle des économistes regroupés dans E-TOILE autour de Didier Dufau, Economiste en Chef, aborde des questions largement tabous dans les media français et internationaux soit du fait de leur complexité apparente, soit parce que l'esprit du temps interdit qu'on en discute a fond. Visions critiques sur les changes flottants, explications sur le retard français, analyses de la langueur de l'Europe, réalités de la mondialisation, les économistes d'E-Toile, contrairement aux medias français, ne refusent aucun débat. Ils prennent le risque d'annoncer des évolutions tres a l'avance et éclairent l'actualité avec une force de perception remarquable. Association loi 1901 |
Nous voyons éclore sous nos yeux une "fleur du mal" qui envahit toute la sphère politico médiatique : le rejet du libéralisme considéré comme une doctrine vicieuse et cause de tous nos maux. Traditionnelle à gauche, l'idée envahit la droite, ou les droites comme on voudra. Associée à la réfutation des droits de l'homme renommée droitdell'hommisme, cette généralisation est pour nous porteuse de régressions multiples. De Zemmour à Polony, en passant par toutes les nuances de jaune, de rose, de vert et de rouge, on voit s'étaler cette répulsion de l'individu et de ses libertés.
Le livre de Benoist est consternant par sa méthode. Caricaturer et mettre la caricature au pilori est la méthode stalinienne traditionnelle à la fête de l'Humanité dimanche. Accumuler des projectiles en tronquant ou détournant des citations n'est pas plus sérieux. On fait passer un brulot pour une réflexion philosophique. Il n'y a rien à garder de ce texte. Les mauvais procédés ne servent jamais de bonnes idées. Mais ils concourent, dans la période fâcheuse de trouble généralisé que nous traversons en France à aggraver la détestation de libertés nécessaires et fécondes qui sont fondamentales pour une société libre et prospère.
Delenda est.