France et Royaume-Uni : des situations similaires

Quiconque suit les affaires britanniques ne peut que constater la très considérable identité des difficultés qui assaillent les deux pays. En fait, les situations politiques, économiques et sociales sont similaires.

Le cœur de l'affaire est l'incapacité des politiques à expliquer le ralentissement permanent du trend de croissance et la gravité des crises périodiques qui touchent de plein fouet non pas seulement "le quotidien des gens", mais l'esprit public général. Aucun citoyen n'aime être confronté à un déclin, même relatif, de sa nation, sans comprendre pourquoi et sans que des réactions ne se fassent jour. Perdre sa foi en l'avenir et celui de ses enfants au milieu d'un discours toujours lénifiant qui explique que les mesures prises sont géniales et le cadre général créé est le meilleur possible, est insupportable.

Quelles que soient les politiques d'ajustement suivies, dont certaines n'ont pas de résultats comme en France, et d'autres en ont, mais au prix de contraintes nouvelles et fortes, la perte de confiance dans les "élites dirigeantes" est la même. Quand on perd confiance, on devient craintif et nerveux.

La politique tourne à l'aigre, avec comme toujours, des victimes expiatoires.

Charles Moore dans le très conservateur Daily Telegraph souligne que jamais le Royaume Uni n'a été confronté à autant de difficulté "sans jamais les traiter au fond". Le Royaume a subi la même crise qu'en France, pire même au départ du fait de sa place dans la finance mondiale. Comme en France personne ne s'est précipité pour expliquer pourquoi cette crise avait eu lieu ni comment on en prévenait le retour.

Le rôle des politiques n'est peut-être pas l'expertise mais ils doivent lui demander de se manifester. S'il n'y a aucune explication sérieuse, prise en charge par les hommes politiques avec une vision de ce qu'il faut faire, rien ne peut se passer bien. Tous les dossiers deviennent contentieux. L'hystérie s'installe.

Le référendum a vu se créer une situation d'hystérie au Royaume Uni, comme la France vit avec hystérie la loi El Khomry et les affaires de zadistes.

L'hystérie commence quand la raison faiblit.

Cameron n'a pas joué sa carrière et l'avenir de son régime à la roulette. Il a refusé de s'attaquer à la question centrale : pourquoi la crise de 2008 ; comment on en sort ; comment on évite d'y retomber. Du coup toutes les questions annexes se sont infectées. Comme la gangrène gagnait, il a eu recourt à des remèdes de chien, d'abord sur la question écossaise puis sur la question européenne. Il a gagné puis perdu. Tant va la cruche à l'eau…

Hollande a de la même façon refuser de prendre partir sur les causes réelles de la crise et les moyens de la traiter. D'abord il n'y avait pas de crise, simplement un terrible héritage ; ensuite on allait voir ce qu'on allait voir. Il en est à 12 % de satisfaits de son action et on démolit les hôpitaux dans la rue à coups de barre de fer , là où il se voyait en "pacificateur".

L'Union Européenne n'est pas la cause de la crise. Mais certains de ses dysfonctionnements en ont aggravé les effets et compliqué la solution.

La bonne politique, au Royaume Uni comme en France, était de partir sur une analyse objective de la situation économique et la recherche d'un diagnostic et de solution, marginalisant les autres préoccupations.

Sinon, compte tenu de la gravité des conséquences de l'effondrement de 2008, on ne pouvait aboutir qu'à ce que l'on voit : les gouvernants sont déjugés et la rue s'en donne à cœur joie.

La Général de Gaulle avait dit à l'école de guerre (de mémoire) : "dans une bataille, le chef doit avoir une idée claire de l'essentiel et y concentrer toutes ses forces de conception et d'exécution".

Quand le chef s'investit dans des batailles secondaires et laisse sans réponse les grandes questions stratégiques, la défaite est assurée.

Cameron, comme Hollande, se sont concentrés sur des aspects fantomatiques de la crise larvée qui conduit l'Occident à la stagnation, en attendant pire. La question de l'Union Européenne, comme celle de la préséance des sources de droits sociaux, sont des arroyos totalement secondaires. L'immigration et le"red tape" européen sont des irritants, (islamisme et terrorisme à part) mais n'ont pas d'effets réels sur la marche de l'économie.

Quand on combat dans les buissons pour ne pas avoir à affronter les dangers de la grande route, il ne faut pas se plaindre des conséquences.

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