L'importance négligée de l'Ukraine
La France, traditionnellement, néglige l'Ukraine. Elle s'est beaucoup focalisée sur la Pologne, à juste titre. Mais elle a généralement laissé l'Ukraine loin de ses considérations diplomatiques.
L'Ukraine est une grande nation qui a vocation à être une nation à part entière et qui le souhaite. Ouverte à tout vent, du fait de sa géographie, elle a toujours été une frontière, une bordure, que les armées voisines ont voulu traverser ou annexer. Grenier à blé facile d'accès, réservoir de main d'œuvre, l'Ukraine a connu de nombreuses vicissitudes historiques. Des découpes et des rattachements ont fait constamment évoluer ses frontières. Les influences ont été nombreuses.
Les Français, qui ne connaissent ni l'histoire ni la géographie, considèrent l'Ukraine comme une partie de la Russie. Certains croient, avec la propagande Russe, que Kiev est à la naissance même de la Grande Russie.
En vérité, jusqu'aux grandes conquêtes russes de la fin du 18ème siècle, l'Ukraine n'a strictement rien à voir avec la Russie. Elle est, en réalité, tiraillée entre les grandes monarchies du nord, Lituanie et Pologne, et les Asiates qui sont installées en Crimée. Elle est déchirée entre catholicisme et orthodoxie. Les pressions ottomanes se feront sentir plus tard.
Les deux derniers siècles ont été tragiques pour l'Ukraine.
Elle est sous domination de la Russie, de l'Autriche Hongrie et partiellement de l'empire ottoman pendant le XIXème siècle. Le nationalisme culturel ukrainien est constamment soumis à la répression russe. Le régime Moldave et la tutelle de l'Autriche-Hongrie sont plus doux.
La domination polonaise a conduit à un peuplement juif extrêmement important. De 600.000 au début du XIXème siècle, la population juive passera à près de 2 millions à l'aube du XXème siècle. De nombreuses villes sont à majorité, absolue ou relative, juive.
"72% de la population juive y vivait dans 262 communautés de plus de 1,000 personnes, ce qui voulait dire qu'en ajoutant les communautés de plus de 500 juifs, 37% de la population juive vivait dans des villes et bourgades dans lesquelles les juifs formaient la majorité absolue, et 22% dans les localités ou ils formaient 40–50% de la population totale. Par contraste, dans la partie de l'Ukraine au delà de la Dnieper, dans les provinces de Poltava et Chernigov (ou vivaient environ 225,000 juifs qui constituaient la majorité dans deux endroits seulement et seulement 40% de la population totale dans trois autres), 65% de la population juive vivait dans 39 communautés de plus de 1,000 personnes. On trouve une situation semblable dans la "Nouvelle Russie" (les provinces de Kherson, Yekaterinoslav, et Taurida) ou vivaient plus de 500,000 juifs : 76% de la population juive était concentrée dans 58 communautés de plus de 1,000 personnes et les juifs ne formaient une majorité que dans les implantations agricoles. En 1897, les juifs constituaient 30% de la population urbaine de l'Ukraine, 26% d'entre eux vivant dans 20 villes dans chacune desquelles il y avait plus de 10,000 juifs".
L'instauration des zones de peuplement et des restrictions de circulation en Russie, les difficultés anti-juives en Pologne, ont conduit à un regroupement important de population juive dans les différentes régions ukrainiennes.
Cette histoire est importante pour la communauté juive. Une ville universitaire comme Czernowitz, ancienne capitale du Duché de Bukovine, est la capitale incontestée du Yiddish. Des mouvements religieux importants sont nés en Ukraine et font encore aujourd'hui l'objet de pèlerinage. L'Ukraine est également un des rares lieux lieu d'implantation agricole juive, vieille réclamation juive, dont la population avait presque partout interdiction d'acheter de la terre. Les concepts Kibboutsim sont largement nés en Ukraine.
Cette communauté juive s'est largement heurtée à la résistance des populations paysannes ukrainiennes pour des raisons multiples :
- Economiques : l'aristocratie polonaise et les boyards faisaient appel aux gestionnaires juifs pour tenir leurs grandes propriétés. Le négoce du blé était entre les mains des commerçants juifs ainsi que le commerce de tout ce qui était nécessaire aux exploitations agricoles. Une part très importante des industries étaient entre les mains d'entrepreneurs juifs. Les relations économiques extérieures étaient généralement conduites par des entrepreneurs juifs.
- Religieuses : traversée déjà par un conflit entre christianisme, poussée par la Pologne et orthodoxie, l'Ukraine supporte difficilement la religion juive, ses particularités et son séparatisme.
- Politiques : la volonté "nationaliste" d'une partie des intellectuels ukrainiens, voient dans l'internationalisme puis le socialisme juif un obstacle, même si, comme en Pologne, il y eut de nombreuses évolutions tout au long du XIXème. Les juifs sont parfois vus soit comme des auxiliaires de la Pologne, et surtout comme étant globalement en faveur des liens avec la Russie.
La guerre de 14-18, en libérant les passions, et en déchaînant les conflits armés, va avoir des conséquences désastreuses sur cette partie du monde.
Les Allemands avant d'être défaits et de développer le revanchisme qui mènera à Hitler et au nazisme, exportent Lénine et permet le déclenchement de la révolution bolchevique et de son impitoyable violence. Les alliés détruisent l'Autriche-Hongrie lors des négociations qui mettent fin momentanément à la guerre.
Tout est prêt pour un déchaînement dans les pays de l'Est.
L'Ukraine proclame la République Populaire Ukrainienne, reconnue par la France et la Grande-Bretagne en janvier 1918, et déclare son indépendance le 22 janvier 1918.
L'histoire de la nation ukrainienne indépendante aurait du commencer là. Les bolcheviques ne le veulent pas. Lénine et Trotsky considèrent que sans l'Ukraine les chances de succès de la révolution socialiste sont minces. La guerre à outrance commence. Elle provoque une première famine désastreuse qui tuera près de 2,5 millions de personnes. Elle attise les conflits ethniques. Une partie des forces nationalistes voient dans la communauté juive un foyer de partisans de l'Union Soviétique. Des massacres ont lieu qui se traduiront en France par l'assassinat de Petlioura, dont l'assassin sera gracié, action qui marque les débuts de certaines ligues contre l'antisémitisme.
Finalement c'est une Ukraine démantelée qui sort de l'anarchie générale. La partie à l'est, avec Kiev, est désormais sous la coupe de l'Union Soviétique. La région de Lvov (Lviv aujourd'hui) va en Pologne. La Bucovine du nord est rattachée à la Roumanie.
Après la période de calme relatif de la NEP, qui voit, dans la partie soviétique, une certaine reconnaissance du nationalisme ukrainien et un réel dynamisme culturel, en même temps que les paysans armés se sont appropriés les terres des grands propriétaires polonais ou boyards, arrive Staline et son "grand tournant" : la dékoulakisation, l'appropriation publique de toutes les activités agricoles et l'utilisation des biens agricoles ukrainiens pour payer les importations nécessaires à l'industrialisation à marche forcée de l'Union Soviétique.
L'Ukraine est considérée par Staline comme une colonie dont les ressources sont à la disposition de l'URSS, en même temps qu'un glacis dangereux d'où peut venir la contre-révolution.
La conjonction d'un projet socialiste de révolution totale avec élimination des "classes perdues" et d'une realpolitik sans pitié, qui considère les populations ukrainiennes comme un réservoir d'esclaves incultes et dangereux, va conduire au premier grand génocide en temps de paix de l'histoire de l'humanité.
Une répression sauvage s'abat sur l'Ukraine. Toutes les populations "allogènes", grecs, polonais, tatars, sont considérées comme des agents potentiels de l'étrangers et massacrées. La population paysanne locale est réprimée et déportée par millions. L'échec de la collectivisation entraîne des réquisitions de plus en plus lourdes. La famine pointe son nez. Staline décide que des millions de bouches à nourrir sont en excédent et compromettent le succès du plan quinquennal d'industrialisation à outrance.
Il provoque et maintient une famine exterminatrice en 32 et 33. Dans 10.000 villages ukrainiens la population est décimée ou disparait intégralement. Des villages entiers sont rayés de la carte.
Au total, de 1928 à 1933 entre 20 et 25% de la population ukrainienne disparait dans des conditions abominables.
La répression continuera sans cesse jusqu'à la guerre. Des centaines de milliers d'Ukrainiens sont massacrés par les différentes organisations policières soviétiques. L'Ukraine se couvrent de charniers secrets où reposent ces centaines de milliers d'Ukrainiens.
Ce génocide, appelé Holodomor par les Ukrainiens, comme la répression qui a suivi, qui verra la destruction culturelle de l'Ukraine, ne sera jamais pardonné au "grand frère Russe". Et cela d'autant plus qu'il est dissimulé et que les occidentaux, et jusqu'à la Croix-Rouge, tâche indélébile sur son histoire, acceptent de jouer le jeu de la tromperie et de la dissimulation.
L'arrivée des Nazis au pouvoir en Allemagne conduit les Occidentaux à rechercher l'alliance avec Moscou. Donc les Occidentaux mentiront. La presse française mentira. La gauche mentira. Les gouvernements successifs mentiront. C'est un régime génocidaire qui entre à la SDN dans le cadre d'un mensonge inhumain ("Il n'y a pas de famine en Ukraine") , lorsque l'Allemagne nazie en sort.
Tout cela pour aboutir au pacte germano-soviétique. L'Urss annexe la partie polonaise et la partie roumaine de l'actuelle Ukraine. Lorsqu'elle entre à Cernauti, ex Czernowitz, elle liquide sur liste préparée plus de 1.200 personnes "ennemis du peuple et de la révolution", en un jour. Les méthodes qui sont connues depuis Katyn ont été employées de la même façon en Ukraine où toutes les élites ont été liquidées dans la partie annexée selon des plans préparés.
La population d'origine allemande est renvoyée chez Hitler. Elle représentait une partie importante et historique du peuplement de l'ouest de l'Ukraine. Elle est réinstallée de force pazr les Nazis dans la partie de la Pologne annexée par l'Allemagne, dans le cadre du partage de l'accord soviéto-nazi. Les Roumains , majoritaires en Bucovine, sont réprimés et déportés. La communauté juive, très présente dans de nombreuses villes de l'est ukrainien, se divise entre les industriels et les commerçants dépossédés dont beaucoup émigrent notamment aux Etats-Unis, une partie de la jeunesse qui fait fond sur la révolution et cherche à devenir des cadres du nouveau régime et les traditionnalistes qui cherchent à conserver leur vie dans les Shetl ou à partir vers quelque Israël, qu'il s'agisse de la terre de Sion ou du Birobidjan.
L'opération Barbarossa va accroître les crimes immenses que subit sans cesse la région depuis 1917. Les quelques nationalistes qui ont cru qu'il serait possible de récréer une Ukraine indépendante dans les wagons nazis sont immédiatement déniaisés. Ils sont fusillés et rejoignent dans le charnier de Babi-Yar la population juive du Podl de Kiev et les pauvres enfants handicapés des hôpitaux de la région. Il est exact qu'une partie de la population ukrainienne a considéré que le génocide de 32-33 a été commis majoritairement par des juifs arrivés au pouvoir avec la révolution socialiste. Un sentiment antisémite extrême s'ajoute au ressentiment national et à la tradition antisémite à base religieuse qui couve depuis la fin du XVIIème. Hitler et les Ersatz-gruppen trouveront sans difficulté de la main d'œuvre locale pour exécuter les basses œuvres. Souvent ce sont les exécuteurs soviétiques qui se sont reconvertis à ces tâches.
Hitler, comme Staline, considère que l'Ukraine est une terre d'expansion dont la population n'a d'autre vocation que celle d'esclave des nouveaux seigneurs teutoniques. L'Ukraine est le "pot de chambre de l'Europe", comme l'écrit un diplomate allemand. Elle est peuplée de sous-hommes qui doivent être exploités comme des esclaves et qui vont l'être.
Par chance, la fin des "territoires réservés", qui fixait la population juive, a permis aux juifs ukrainiens de se répandre un peu partout dans l'Union soviétique. Beaucoup ont quitté le pays avant l'entrée des Nazis. Heureusement, car ceux qui restent sont impitoyablement déportés dans des camps ou exécutés.
A Cernauti, le retour des roumains persécutés se traduit par une répression féroce de la population juive considérée comme complice des soviétiques et accusée d'avoir fourni les listes de personnes à exécuter. La répression est si féroce qu'à Cernauti il ne reste plus que deux médecins juifs, un accoucheur et un dentiste. Les Nazis ne sont pas là. Ils ont laissé faire les Roumains.
Inutile de dire qu'il y aura un retour de bâton tragique contre les Roumains lorsque les soviétiques chasseront les Nazis et réoccuperont la Bukovine.
Que l'on considère un instant la situation de la Bukovine nord. Jusqu'en 39, elle est composée de Juifs, d'Allemands et de Roumains, à 90%. En 1945, il ne reste plus d'Allemands. Relocalisés en Pologne, Hitler refusera les moyens de les faire fuir lors de l'offensive soviétique. Ils seront impitoyablement liquidés par les Polonais et les Soviétiques. Les Juifs ont disparu. Les Roumains sont morts ou en fuite vers la Roumanie. Ils continueront à se battre jusqu'à ce que la Roumanie tombe sous la botte soviétique.
100% de nettoyage ethnique en Bukovine. Un remplacement total de la population ! L'abjection à l'état pur, au nom, alternativement, du "socialisme réalisé" ou du "national socialisme".
Staline s'occupe spécialement de l'Ukraine. Il a largement remplacé les paysans ukrainiens morts de faim par des paysans émigrés russes dans les provinces de l'est. Il profite de l'invasion nazie pour détruire Kiev et Odessa. Ces épisodes ne sont pas connus en Occident, où l'occultation est totale.
Staline fait miner la plus grande rue de Kiev, l'avenue Kreshchatik.
Le prétexte est la lutte contre l'envahisseur. Mais ce n'est qu'un prétexte. Pourquoi sinon miner aussi la Laure de Petcheck haut lieu de l'orthodoxie ukrainienne et de l'histoire du pays où les armées allemandes ne sont pas installées ?
Staline veut profiter des évènements pour abaisser Kiev et conserver à la seule Moscou le prestige du passé.
Imaginons qu'on ait, à Paris, dans le même mouvement, miné entièrement les Champs Elysées et le Bd Saint Germain, plus la Sorbonne pour faire bonne mesure !
L'explosion est infernale. La ville de Kiev est détruite. Des dizaines de bâtiments explosent. Des centaines d'autres brûlent. Jamais il ne sera possible de faire le décompte des victimes. La destruction étant classée parmi les actes "héroïques", on ne compte pas. Les estimations vont de 20.000 à 60.000 victimes ukrainiennes, passées par pertes et profits. L'histoire recommence à Odessa avec des résultats moindres mais définitifs sur la qualité architecturale de la ville.
Les troupes allemandes sont-elles réellement touchées ? Oui. Quelques milliers de soldats sont tués ou blessés dans les explosions. A Kiev et à Odessa, les destructions sont mises sur le compte des commissaires politiques juifs et justifient le massacre de la communauté juive résiduelle. A Kiev le Podl est vidé de ses habitants juifs qui sont exécutés dans la fosse de Babi-Yar. Les nazis prennent des photos et font des décomptes précis. On sait exactement combien de victimes ont été exécutées. Un peu plus de 30.000 personnes à Kiev.
L'Ukraine est mise en coupe réglée par les Nazis, après les Soviétiques. Ils s'empressent de conserver l'agriculture collectivisée. Ils n'arriveront pas plus que les soviétiques, à en faire des usines à blé. La population est réquisitionnée et envoyée un peu partout en Europe sur les chantiers du Grand Reich. L'organisation Todt les utilisera notamment pour construire le "mur de l'atlantique" en France.
La guerre finira par tuer à nouveau près de 2.000.000 d'Ukrainiens. Le retour de la dictature soviétique s'accompagne d'une nouvelle épuration farouche et finit à nouveau par une famine désastreuse (près de 700.000 morts en 1947).
Staline accroit le drame des Juifs en pratiquant une nouvelle épuration, à la suite de l'option américaine prise par Israël. Ceux qui ont fui l'invasion nazie essaient de retrouver leurs appartements en Ukraine. Ils n'y arriveront pas.
La mort de Staline allège à peine le fardeau soviétique en Ukraine qui n'est qu'une colonie tenue en main par les autorités de Moscou, et cette main est de fer.
On comprend que lorsque l'URSS s'effondre l'Ukraine soit un des premiers pays à déclarer son indépendance, le 24 août 1991.
L'Ukraine n'est décidemment pas une région russe, même si les historiens français et plus largement européens, souvent marxistes ou sous influence marxiste, ont choisi de ne pas séparer l'histoire russe et l'histoire ukrainienne. Ils ont passé sous silence l'histoire abominable de l'Ukraine au XXème siècle. On connait Babi Yar en France mais qui connait le sinistre charnier de Bikivnia dans la banlieue de Kiev ? Qui connait celui de Vynitssia ? Et tant d'autres.
Bien entendu, après tant de massacres et tant de mouvements de population, la situation intérieure ukrainienne est d'une extrême complexité. La région de Lviv n'a à peu près rien à voir avec celle de Kharkov. La Crimée est une dépendance russe plus qu'Ukrainienne. On parle le russe à l'est. On parle l'ukrainien à l'ouest. La décomposition du soviétisme s'est faite en Ukraine comme partout ailleurs : des groupes parfois mafieux se sont emparés en même temps des richesses nationales et du pouvoir politique. Les mafias locales guignent le pouvoir parce que seul le pouvoir central permet de capter les richesses naturelles du pays. Il n'y a pas encore d'état de droit en Ukraine.
Il ne faut pas croire que Ioula Timoshenko soit d'une essence très différente de celle de l'actuel président Ianoukovitch. Ce sont tous des polichinelles aux mains d'oligarques animant des mafias locales.
Le mouvement Orange a échoué parce qu'il n'était pas lui-même totalement en ligne avec les principes qui ont conduit l'Occident à le soutenir.
L'Ukraine actuelle est souvent décourageante pour les occidentaux en mal de voir la démocratie s'épanouir dans ce pays martyrisé.
Un exemple, retenu lors de ma visite à Kiev : la gestion de la redevance des bateaux touristiques allait à un organisme dépendant du Parti Communiste. Un clan a voulu s'assurer de cette ressource. Il a fait déclarer dangereux les quais et a expulsé tout le monde. Pour revenir il fallait payer mais à ce clan là. Bravo pour l'état de droit !
Entreprendre est très difficile en Ukraine compte tenu de l'insécurité juridique et administrative, même s'il y a quelques belles réussites.
Le pays n'a toujours pas réglé la question de la propriété de la terre. Des droits d'exploitation sont concédés soit à l'état soit aux régions soient aux paysans qui louent les terres à des exploitants souvent étrangers.
Les Ukrainiens, eux, en ont par-dessus la tête des commémorations et des conflits. Ils veulent sortir de la pauvreté et sont près à tout pour cela.
Les oligarques ukrainiens vivent à la fois en symbiose avec les anciens colonisateurs russes, et en s'en méfiant terriblement. Ils savent que si l'URSS remet la main sur l'Ukraine ce sont les mafias russes qui reprendront le pouvoir économique. Pour en avoir rencontré un certain nombre, la chanson qu'ils chantent est toujours la même : "De bonnes relations avec la Russie oui, mais si l'Otan pouvait être là ce serait pas mal".
La gestion économique globale est évidemment désastreuse. L'Etat est aux mains de clans qui sont là pour réussir et vite. Le nombre de millionnaires au Parlement (Rada) est une fable qui ne fait pas rire. Etre émissaire du FMI pour l'Ukraine est tout sauf une sinécure.
Est-ce une raison pour que la France soit TOTALEMENT hors du coup en Ukraine ? On laisse à nouveau ce territoire sous les influences croisées de la Russie et de l'Allemagne dont le bilan passé pour la nation ukrainienne est particulièrement lourd. Compte tenu des massacres insensés commis par ces deux pays en Ukraine, sont-ils réellement les mieux placés pour conduire la politique dans la région ?
La France n'a-t-elle réellement aucun rôle à y jouer ?
L'Europe a commis une erreur grossière lorsque son Parlement a refusé de reconnaître Holodomor pour ce qu'il est, un génocide, comme l'avait expliqué l'inventeur du concept de génocide lui-même,le juriste polonais Lemkin. Qui savait en France, lors des élections européennes, que ses mandants allaient se comporter en négationniste ou révisionniste, comme on voudra ? Personne n'a évoqué la question du génocide ukrainien ni avant, ni pendant, ni après les élections européennes. En niant le génocide, il s'agissait à la fois d'empêcher que le socialisme porte la responsabilité d'un génocide, au même titre que le national socialisme et de ménager la Russie. On retrouve les réflexes du début des années trente. Cachons ces massacres que nous ne serions voir !
Avoir laissé à la Commission, à Mme Ashton et à M. Rompuy la tâche exclusive des rapports avec l'Ukraine était une énorme erreur. Lorsqu'on met des nains au milieu des géants, il est rare qu'ils gagnent. Poutine a triomphé sans gloire ni mérite contre d'obscurs bureaucrates européens.
L'Ukraine a vocation a entrer dans l'Union Européenne et il faut tout faire pour cela. Ce n'est pas le glacis occidental de l'empire russe. C'est une partie intégrante de l'Europe. La CEI est un piège mortel pour l'Ukraine.
Bien sûr, les dirigeants actuels de l'Ukraine ne sont pas particulièrement attrayants. Bien sûr le traitement infligé à l'égérie de la révolution Orange est regrettable. Bien sûr la gestion générale de l'Ukraine est un désastre.
Mais il est géopolitiquement indispensable d'arrimer l'Ukraine à l'Europe et de lui permettre un développement synchronisé au notre. Nous avons besoin de l'Ukraine. Elle a besoin de nous.
On ne peut pas rester sur l'échec actuel.
La France ne peut pas non plus continuer à s'en laver les mains, ni continuer à y être considérée, comme en Pologne, comme le dernier pays marxiste avec la Corée du Nord.
Son avenir se joue plus dans les steppes ukrainiennes que dans ses anciennes colonies.
Il y a Lviv, à Cernivtsi (ex Cernauti, ex Czernowitz), à Kiev, de nombreux intellectuels qui comptent sur la France, pays des droits de l'homme, et qui s'étonnent de son absence quasiment totale. Nos industries ont autant de débouchés potentiels en Ukraine qu'en Pologne ou en Roumanie.
Laisser totalement à l'Europe supra-nationale le destin de l'extension de l'Union pose problème. L'échec ukrainien se conjugue avec la volonté européenne, sous pression américaine, de faire entrer la Turquie dans l'Union Européenne, ce que littéralement personne ne veut. L'Europe n'a pas besoin de la Turquie.
On marche sur la tête.
Un changement majeur de la politique et de la diplomatie française est nécessaire.
Dans l'affaire ukrainienne, la passivité est un contresens économique et politique majeur.
Le cercle des économistes regroupés dans E-TOILE autour de Didier Dufau, Economiste en Chef, aborde des questions largement tabous dans les media français et internationaux soit du fait de leur complexité apparente, soit parce que l'esprit du temps interdit qu'on en discute a fond. Visions critiques sur les changes flottants, explications sur le retard français, analyses de la langueur de l'Europe, réalités de la mondialisation, les économistes d'E-Toile, contrairement aux medias français, ne refusent aucun débat. Ils prennent le risque d'annoncer des évolutions tres a l'avance et éclairent l'actualité avec une force de perception remarquable. Association loi 1901 |
Les Ukrainiens n'ont de visibilité sur rien qu'ils soient simples citoyens ou dirigeants. Ce n'est pas le monstre administratif de Bruxelles qui aurait du conduire cette politique mais une Troïka comprenant la France, l'Allemagne et le RU. Avec un peu d'argent à mettre au pot.
Vous avez raison de signaler que l'erreur géopolitique est énorme et pour ma part je la crains irratrapable.
L'aspect moral et "structurant", pour parler Finkielkraut, des génocides socialistes, n'intéresse personne en France. Qu'on ai voulu détruire 20 à 30% d'une population pour créer définitivement les conditions propices à l'émergence d'un homme nouveau, qui soit débarrassé des trois facteurs de haine, la propriété, la religion et la nationalité, est considéré par la plupart des socialistes et de leur accompagnateurs de gauche, comme une expérience certes violente mais qui méritait d'être tentée pour voir le résultat.
Aller expliquer dans ces contrées lointaines qu'on a compris le message et qu'on en a tiré les conséquences serait vécu comme un reniement par la gauche française. Les socialistes français n'admettent plus le meurtre ni le crime contre l'humanité, même s'ils tentés de les oublier ou de les absoudre. Ils persistent à croire que la propriété c'est le vol , la religion une dangereuse alinéation et l'idée nationale une relique dont il importe de se débarasser, en supprimant toute frontière.
Un homme libre et indépendant ne se définit pas par ceq u'il a fait, acquis, construit. Rien ne lui appartient en propre. Toute réussite n'est due qu'au vol, à l'abus ou aux opportunités offertes par la collectivité. Son argent ne lui appartient pas et doit être tenu à la discrétion de l'Etat tutélaire et accessoirement aux clientèles qui votent socialistes.
Le socialisme, dans un pays de liberté économique, scinde la société entrer ceux qui doivent recevoir et ceux qui doivent cracher indéfiniment au bassinet. On clive à mort entre les happy few à qui on doit faire rendre gorge et qui doivent tout payer, quitte à leur prendre plus de 100% de leur revenu, et les "masses" à qui on fera miroiter que l'argent des autres permettra de leur donner des avantages supplémentaires.
Cette vision fait trembler toute personne qui a connu l'Union Soviétique. La ruine générale était cachée par une propagande permanente sur la supériorité du socialisme, en termes d'égalité, et sur l'exécution épisodique de "vilains" corrompus, à qui il fallait imputer les horreurs économiques du régime. "Vous êtes malheureux mais regardez ce que je fais à quelques boucs émissaires pour vous défouler de votre frustration".
Les Ukrainiens n'ont que faire de la France socialiste. Ils veulent la prospérité. Ils rêvent de "business" et rien d'autre.
Réciproquement la France socialiste n'a rien à faire d'un régime qui donne une certaine image de ce qu'est le socialisme dans la durée.
Vous parlez donc dans le vide.
Hollande, président nullissime d'un pays qu'il ruine, n'a rien à dire à Ianoukovitch, président douteux d'un pays ruiné par le socialisme. Ianoukovitch n'a qu'un mot à la bouche : tu me paies combien pour que je rentre dans ton club ? T'as pas un rond ? Dégage !
Une histoire de putes et de proxénètes en fait.
Bon courage tout de même.
Cordialement
Bref, c'est un pays mal barré. Ce que j'ai retenu de votre récit, à travers mon prisme, c'est que sa multi-ethnicité (juifs-orthodoxe-cathos) a été sa principale faiblesse qui a empêché l'emergence d'un sentiment national. Chaque religion porte un projet politique (l'inverse est également vrai) et il n'est pas convergent avec ces trois là.
Enfin, je ne suis pas sûr que la corruption que vous évoquez sera amenuisée par l'UE (cf. la sicile, la roumanie ou même le sud de la france en sont l'exemple...). Seul un régime fasciste pourra en venir à bout (cf mussolini) mais ce n'est pas politiquement correct de l'avouer, d'ailleurs je pense qu'un Poutine ressemble plus à un fasciste que Barroso.
Enfin, le projet européen étant un projet américain, je ne suis pas certain que l'histoire de l'ukraine ne se répète prise en le marteau russe et l'enclume US.
Bref, quand on transpose cela à mon cher pays, je suis inquiet de la chute du sentiment national et à la baisse de l'homogeneité ethnico-confessionnelle concomitante. nous risquons de subir le même sort que l'Ukraine si nous ne sommes pas soudés autour d'un projet commun et que nous le défendions quel qu'il soit. Le communautarisme est le cancer de la nation et de la société en général, ce n'est qu'un baril de poudre qu'une influence étrangère saura allumé au moment opportun.
La seconde leçon tient au caractère désastreux des impérialismes qu'ils soient allemands ou russes.
La troisième leçon est que les crimes de masse conduisent à des situations inextricables. On ne tranche pas les noeuds gordiens quand les noeuds sont des hommes.
La quatrième leçon est qu'on ne sort pas facilement d'une société communiste qui a privé la population de ses droits. Le contrôle des richesses naturelles du pays et de l'économie par des mafias colonisant à la fois le politique et l'économie a été le modèle de base des sorties du système soviétique. Stiglitz a cru devoir dénoncer une erreur des pays occidentaux allant trop vite vers le libéralisme. En fait les pays occidentaux n'avaient strictement aucun moyen de contrôler le démantèlement des économies étatiques sous forme de récupération par les mafias et les cadres communistes.
La cinquième leçon est qu'il faut dénoncer tous les crimes et ne pas avoir une attitude hémiplégique. L'Europe et notamment les intellectuels français se sont deshonorés (sans parler des parlementaires européens) en refusant de rendre compte et de qualifier justement, tous les crimes qui ont eu lieu dans les pays de l'est. Du coup un ressentiment farouche s'est installé chez les survivants des victimes qui favorise les groupements sectaires et les extrêmismes.
La sixième leçon est que les peuples d'Ukraine ne sont pas si divisés que cela. Il y a une volonté farouche de retrouver une démocratie à l'occidentale dans l'ouest, notamment autour de Lviv. Les populations russophones de l'est ne veulent pas que l'on coupe toutes leurs racines mais ne vivent pas réellement dans l'amour de la Sainte Russie. Les oligarques de Kharkov craignent comme la peste les oligarques russes.
Il ne parait donc pas que l'essentiel soit dans le refus absolu des minorités. L'émergence d'un état de droit basé sur les libertés usuelles avec garantie d'une indépendance nationale, dans l'interdépendance avec tous, est la solution à la crise ukrainienne.
La méthode, voilà le problème. Envoyer des représentants d'une Commission avec 150 kilos de législation à mettre en oeuvre sous la tutelle pointilleusede la dite Commission, n'a strictement aucun sens. Cela n'en d'ailleurs pas non plus pour les membres de l'Union. Il faut faire de la politique et de la diplomatie. Donc il faut des grosses têtes et pas du soft power de zombis nommés et totalement hors de contrôle.
Surtout quand on parle aux valets d'oligarques particulièrement mafieux.
Pourquoi aucuns présidents français et/ou premiers ministres n'ont-ils jamais visité l'Ukraine ? Pourquoi aucun discours à la Rada ? Pourquoi aucun dialogue organisé avec les intellectuels locaux ?
Il fallait solder les leçons de l'histoire, marquer ce qui était essentiel pour des pays comme la France, fixer à Poutine les limites. De gaulle l'aurait fait.
Laisser faire les associations financées par Washington et la triplette fantôme (Barroso, Rompuy, Ashton), sous les gros sourcils de Mme Merkel, cela donne ce qu'on voit : des désordres qui ne vont pas faire avancer les choses et pousser les tensions à leur maximum.
La MittelEuropa est aussi une affaire française.
Où se terre Hollande ? Où se cache Ayrault ? Où dort Fabius ?
La crise Ukrainienne n'est pas la crise du multiculturalisme et du multi confessionnalisme. C'est plutôt un marqueur de la crise Française, qui tourne à la disparition diplomatique pure et simple, et de la crise Européenne qui, elle, tourne à la farce grotesque. Quant au "leadership" de Barak Obama ....
La presse traite de l'Ukraine comme de la Thaïlande !
Comme si tout cela n'intéressait pas l'histoire commune de l'Europe.
Navrant.
L'Europe de M. Rompuy et Mme Ashton n'avait rien compris. M. Barroso a été inexistant.
Des conséquences devront être tirées.
D'autrant plus que la phase qui s'ouvre est pleine de dangers.
Il démontre
- que la division sud -sud est et ouest nord ouest est largement artificielle. Les partisans de maîdan ont été nombreux dans la partie russophone.
- que l'aspiration de la population ukrainienne de l'est à revenir dans le giron soviétique est nulle.
- que personne ne souhaite de séparation.
La tradition française de voir dans l'Ukraine un glacis russe est une absurdité qui rend ses autorités muettes et ses agents inutiles dans l'affaire en cours. Laisser à Poutine et à Merkel, c'est à dire aux dirigeants de pays qui ont martyrisé l'Ukraine, le soin d'en fixer l'avenir est aussi grotesque qu'amoral.
Les Ukrainiens forment un peuple normal qui aspire à devenir une République normale sans voyous, sans nazis et sans oligarques.
L'Ukraine est un pays clairement européen, et par la géographie et par l'histoire. Qu'elle aspire à entrer dans l'Union Européenne est normale, en tout cas plus légitime que l'entrée de Chypre, de la Turquie ou d'Israêl.
Evidemment l'Ukraine est un pays "méditerranéen", un pays du Club Med qui présente tous les problèmes de la Grèce plus ceux de l'Ukraine ce qui fait beaucoup.
Contrairement à ce qu'écrit l'éditorialiste du Figaro il faut clairement indiquer que l'Ukraine a vocation d'entrer dans l'UE. La question n'est pas le but mais le chemin.
Si la Russie s'oppose à l'idée même de cette évolution, il faudra l'affronter. Les rodomontades de Putin ne doivent pas inquiéter plus que nécessaire. Cela n'est possible que si l'Europe et l'Occident ont une stratégie vis à vis de Moscou et envisagent des évolutions positives, pas seulement négatives.
La Russie est grignotée en Orient par la Chine du fait de la dépopulation russe. Elle est confrontée au Caucase et dans les Républiques musulmanes à de nombreuses difficultés.
Elle ne vit actuellement que sur la rente pétrolière et ses oligarques la ruinent de l'intérieur, comme l'Ukraine l'a été par un quarteron de voyous.
Il ne faut pas croire que les Russes n'aspirent pas à un état libéré des adhérences violentes et à une gouvernance démocratique. La crise frappe la Russie comme les autres pays du monde.
Le premier acte politique est d'abord de sortir de la crise et donc de refonder le système économique, financier et monétaire mondial. Pour le reste il faut pilonner sur ce que doit être le but du chemin politique en cours : démocratie, bonne gouvernance, respect, libertés publiques et économiques.