Crise mondiale : laisser la presse faire son travail !

La campagne en cours pour que la presse cesse de parler de la crise mondiale est une des curiosités du moment.  La presse serait la cause du pessimisme et provoquerait une aggravation de la crise.  La presse est un thermomètre de ce qui préoccupe les gens. Croire qu’en cassant le thermomètre (bien imparfait) en rétablirait la confiance parait pour le moins aventuré.

Il est vrai que le public est abasourdi par des évènements que personne ne leur avait laissé prévoir et qu’il a contemplé un temps desa fenêtre sans pouvoir croire que cela pouvait vraiment le concerner.   Frappé d’incrédulité devant des évènements  dont il n’avait aucune expérience, il a hésité entre stupeur et tremblements.

Le système bancaire s’est quasi effondré en même temps que les bourses. Les épargnants ont été durement frappés dans leur épargne courte et longue, alors qu’ils étaient plutôt sur des bases prudentes.  Le spectacle de banquiers littéralement saisis par l’inconscience (jusqu’à se faire avoir dans un pyramide de Ponzi  de dimension méga-pharaonique] et ruinant aussi allègrement leur banque  que leurs clients n’a pas arrangé les choses.

Et l’immense barnum du G20 et des plans de sauvetage et de relance a inquiété le plus assoupi.  

En même temps le secteur immobilier et de la construction a flanché, comme celui de l’automobile,  des exportations, du tourisme etc.

Aujourd’hui c’est le coiffeur du coin qui est debout devant sa devanture à espérer quelque client aventurier.  Et son voisin le restaurateur  vient de se voir refuser son autorisation de découvert, comme cela, par un texto, alors qu’il  l’aide à passer les creux depuis dix ans !  Le bistro ne va pas si bien non plus : 30% de baisse de la clientèle depuis octobre ! 

Quand au boucher qui venait de reprendre un commerce déjà à un prix bradé mais tout de même à crédit, il revoit d’urgence ses prévisions pour 2009 et cherche un refinancement. Curieusement le téléphone du médiateur ne décroche pas. 

Comme il a de l’humour il raconte (au bistro, à ses copains coiffeur et restaurateur) : « ce qui est bien c’est que maintenant à Rungis on trouve à se garer sans problème ! ».

Comme on ne peut pas compter que sur les brèves de comptoir pour son information économique, il faut bien lire la presse. En temps de crise elle se lit comme les communiqués militaires en cas de guerre.  Et avec un peu de sagacité on peut y découvrir à peu près tout.

Prenez la presse du jour, qu’est-ce qu’elle nous révèle si on se donne un peu de mal ?

-    Les prix Nobel ont perdu 20% de leur prix entre le moment où il leur a été attribué  et le jour où ils l’ont touché.  La presse se repait  de l’anecdote.  L’observateur dit : tiens la Suède et la Norvège ont dévalué de 20% !  Deux dévaluations de plus !

-    Le Japon peste contre la taxe sur les automobiles imposée par la Russie. On creuse un peu : la Russie ne cesse de dévaluer sa monnaie. La Russie est bien en guerre

Tout en essayant d’augmenter les prix de son gaz avec l’Ukraine qui elle a vu sa monnaie dévaluée de 50%. Plus que la Russie : alors les discussions se tendent et on avertit l’Europe qu’il va y avoir des victimes collatérales du conflit. 

Poutine n'est pas dans l'esprit du G.20. Il pratique des droits de douanes déguisés en taxes intérieures  pour empêcher les importations et déévalue à répétition. Inquiétant, non ?

-    Le FMI fait une séance de rattrapage : la crise va être horrible dit son économiste en chef.  Plus question de passer pour des ignorants en retard sur la crise. Sauvons nous quitte à créer la panique !  Ce brave garçon révèle un fait nouveau : les banques désinvestissent en masse de l’Afrique qui est à la veille d’un choc épouvantable ! On croyait que l’Afrique serait le moteur  de la croissance en 2009.  Finalement non.

-    C’est la samba dans toutes les monnaies sud américaines et plus personne ne sait où on va.

-    Le RU pousse encore sa monnaie à la baisse qui dégringole  désormais de 20% par rapport à l’Euro.

-    L’Insee annonce la récession en France pour le premier semestre

-    La Japon indique qu’il est en récession et sévère.

-    L’industrie du jouet se déclare sinistrée.Aussi !


Cela veut dire quoi ?

- D’abord que la crise est là et bien là même si des pans entiers de l'économie ne sont pas encore touchés. Cela vient ! 

- La crise des banques n’est pas finie.  Les premiers bilans globaux 2008 vont commencer à sortir  et ils seront très mauvais.  L’industrie bancaire aura licencié près de 250.000 personnes en 2008 et on s’attend à peu près à la même chose en 2009.

- La crise des changes n’est pas terminée : c’est le désordre le plus total et chaque variation lourde crée un nouveau trou dans le commerce mondial   empêchant toute prévision stable et toute stratégie.

- Pendant la crise la spéculation continue.

- La guerre économique contrairement aux promesses du  G20 a bien lieu. Elle a pour terrain de jeu les changes.  Des personnes qui auraient hurlé à la mort si on avait pris 20% de leur avoir par l’impôt se résignent et se taisent. Mais la perte est bien là !  Des négociateurs à l’OMC qui auraient quitté la salle si on leur avait parlé d’une baisse unilatérale de 5% des droits de douane voient sans frémir des économies  prendre sur d’autre un avantage de 50% en matière de prix !

Nous n’avons pas cessé de répéter que la cause de la crise était monétaire et qu’on ne pourrait en sortir sans stabiliser les changes.  On voit que les changes sont le principal vecteur de propagation et d’approfondissement de la crise à tous les secteurs de l’économie dans toutes les parties du Monde.

Il n’y a AUCUNE coopération.

Et le désastre s’étend, en même temps que l’on constate l’inanité des conférences et des plans.Car où est l'effet des plans de l'automne ?

Quand le communiqué de guerre annonce qu'une brillante contre offensive a permis de repousser les Allemands à Sedan on sait au moins que nous avons été enfoncé à Sedan.

La presse malgré outs ses défauts jouent le même rôle. Chaque bribe mise bout à bout raconte la chanson fonalement assez bien.

Que ceux qui veulent la faire taire  au prétexte qu’elle en dit trop et pèse sur le moral des agents économiques   commencent par dire la vérité,  à faire les bonnes analyses et à prendre les bonnes décisions ! Et que les responsables de presse ne se laissent pas influencer.

Nemo auditur suam propram turpidudinem allegans.

Il n'ya pas de trop plein sur la crise même s'il faut combattre la tendance à laisser la parole à des histrions qui font de la chaleur pour vendre leurs livres et n'apportent aucun vrai diagnostic et aucune solution.

 
Didier Dufau pour le cercle des économistes e-toile.



Commentaire
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