FMI : l'incroyable aveu de DSK !

L'aveu fait par DSK dans son interviex au journal le Monde datée  du 8 octobre 2010 est tout à fait extraordinaire.

"Le FMI va commencer des études de contagion", dit-il. "Jusqu'à présent le FMI étudiait la politique monétaire des Etats Unis principalement en analysant ses effets sur l'économie américaine elle même".  Et il continue en remarquant qu'il procèdait de même sur la question des excédents Chinois.

On relit en se pinçant.  L'analyse des déficits américains et des excédents chinois n'était même pas unifiée !  La stratigraphie des services bureaucratiques  remplaçait l'analyse économique du monde par  des analyses exclusivement pays par pays.

Comment détecter alors ce qui est pour nous le source principale de la crise : la double pyramide de crédits  s'emballant entre la Chine et les Etats Unis, provoquant partout une inflation de dettes intenables, aggravées par l'instabilité structurelle des changes flottants. ?

Ainsi s'explique la complète faillite du FMI à comprendre et à prévoir quoi que ce soit. Nous avons dénoncé cette carence dans plusieurs articles sur ce blog dès 2008. Il faudra plus d'un an au FMI pour se re synchroniser avec la réalité.

Ce compartimentage absurde de l'observation et de la réflexion n'est pas le seul fait de la bureaucratie du FMI. Sa composante idéologique est évidente.  C'est le décalque d'une organisation qui veut que les banques centrales n'ont d'autres préoccupations à avoir que le niveau des prix de leur zone monétaire.

Les évolutions de changes et les mouvements financiers internationaux, qui sont justement  les vecteurs de la "contagion" dont parle DSK,   sont idéologiquement hors du champs  de l'observation économique et d'une quelconque responsabilité politique.  Les effets multiplicateurs croisés d'une monnaie de réserve américaine non gérée comme telle, d'une politique monétaire mercantiliste en Chine et de l'instabilité des changes flottants,  qui sont le coeur même des désordres ayant provoqué la crise  n'ont pas été observés parcequ'ils n'avaient pas à être observés pour des considérations idéologiques.  Nous retrouvons là la force destructrice du tabou.  Il n'y a pas pire aveugle que celui qui ne veut pas voir.

C'est sur cet aveuglement volontaire  que la postérité économique sera sans doute le plus critique. Il accompagne l'autre immense sottise qui veut qu'on se batte comme des chiffoniers sur un demi pour cent de droit de douane mais qu'on trouve normal et hors de discussion qu'une monnaie perde 50% de sa valeur par rapport à une autre.

DSK aurait voulu démontrer la nullité effarante des conceptions économiques dominantes, qui s'apparentent plus à la pensée magique qu'à une analyse scientifique des causes et des conséquences, il n'aurait pas fait mieux.  Il serait sot de croire que le changement d'attitude du FMI correspond à une prise de conscience radicale des changements de méthodes et de perspectives qui s'imposent. C'est bien là le plus grave.  La réflexion menée s'inscrit dans une école de pensée qui fait des subprimes la cause de la crise  qui se serait amplifiée par des phénomènes de contagion sous estimés.  DSK confirme cet aveuglement lorsqu'il dit : "il ne faut pas oublier le secteur privé qui est à l'origine de la crise". 

On reste dans ce charabia débile qui veut que par un effet papillon magique  le comportement de certaines firmes sur le marché immobilier américain aurait "par contagion" gangrené le monde entier.   On ne veut pas voir que la crise est systèmique  ; que les "subprimes" ne sont qu'un détail infime dans le décor de dettes immense qui s'étaient  accumulées  progressivement  du fait du comportement de certains Etats.  La non gestion du dollar bien que monnaie de réserve et le mercantilisme du gouvernement communiste chinois dans le chaos des changes flottants  n'ont strictement rien à voir avec le comportement d'entreprises privées.

L'erreur conduit DSK à une contradiction immédiate puisqu'il finit par admettre que "la surévaluation du Yuan est à l'origine de tensions sur l'économie qui sont en train de devenir une menace".   Comme si cette menace était nouvelle !  Elle l'est depuis 20 ans. Seulement voilà : les changes ne pouvant pas être un problème, il était interdit d'envisager la responsabilité du système des changes.  Rappelons le : la crise des changes flottants  de 1998, improprement appelée la crise des pays émergents, n'était que le fait du comportement de "cronies" dans la bouche des économistes de cour américains et de leurs suiveurs dans les organismes internationaux comme le Banque Mondiale et le FMI.  Ajouter l'injure à la bêtise n'a jamais gêné qui que ce soit dans le domaine de l'analyse économique et monétaire internationale.

DSK n'a toujours rien compris. Il flotte comme un bouchon au gré des pulsions de ses mandants principaux.  Il fait de la politique. Rien d'autre.  A cause de cela le FMI est toujours à côté de la plaque. Son explication de la crise est nulle. Ses méthodes sont encore paralysées par l'idéologie des monnaies administratives gérées par des banques centrales indépendantes se concentrant sur l'inflation dans leur zone monétaire et dont la valeur est déterminée par "les marchés financiers".   Dans cette optique, la seule réforme demandée est que le Yuan flotte.  Pendant qu'on s'enquiert des phénomènes de contagion des crises bancaires et des moyens de les enrayer.  On a pourtant vu que tout le vacarme sur les bonus, la comptabilité, les agences de notation  n'ont abouti à rien de décisif.

L'interview de DSK montre qu'alors que le système des changes est partout sous tension et que les politiques monétaires désormais s'écartent sans honte du consensus de Washington,  le FMI traîne encore à l'arrière du front, alors que sa mission originelle dont il n'aurait jamais du s'écarter, était de conduire les états à s'inquiéter du potentiel de désastre contenu dans des politiques monétaires et de changes non synchronisées.

Le pompier n'est pas devenu pyromane.  Il avait la tête ailleurs.  Il vient de découvrir que quand le champ brûle il est bien possible que la forêt d'à côté peut aussi flamber.  Grands Dieux : il y a eu contagion ! Est-ce possible !  Et le village a fini par flamber aussi ? Tiens donc, quel intéressant  champ de nouvelles réflexions !  Alors que le climat avait été sec  depuis des années et que tous les campeurs du coin multripliaient les  barbecues !   Ne serait-ce pas ce barbecue à mergez qui aurait mis le feu en premier autour duquel s'agitent des types avec de drôles de têtes patibulaire ?  Sûrement si. Attaquons nous au goût pour les mergezs,  à la norme du barbecue et à l'organisme qui donne des notes de sécurité au barbecue.

La sécheresse ? L'inflamabilité générale ? L'absence de tout mécanisme permettant de contrôler les évolutions du feu entre les champs et le village ?  Allons : cela notre idéologie nous interdit d'y penser.

Et on en est encore là trois ans après une crise  qui a fait des dégâts gigantesques et dont la sortie n'est pas encore acquise.

Et pendant ce temps là en France les nigauds dressent un autel à DSK !

Le Français né malin ...

 

Didier Dufau pour le Cercle des économsites e-toile.

Commentaire
KP's Gravatar Tout cela laisse sans voix.

Qui imaginait que personne ne s'occupait des interactions entre les zones monétaires et notamment entre les Etats Unis et la Chine.

Il fallait bien une raison à ces erreurs répétées de prévisions. Mais penser que cela allait jusqu'à ce point là, c'est réellement inconcevable.


K. Peiper
# Posté par KP | 08/10/10 20:26
jean-marc's Gravatar La médecine du FMI:

"Le système monétaire international s'est avéré résilient, mais il subsiste des tensions et des sources de vulnérabilité du fait de l’aggravation des déséquilibres mondiaux, de la volatilité persistante des flux de capitaux, des variations des taux de change et des problèmes liés à l'offre et à l’accumulation de réserves officielles. Comme ces questions sont d'une importance fondamentale pour le bon fonctionnement de l'économie mondiale et la stabilité du système monétaire international, nous appelons le FMI à intensifier ses travaux dans ces domaines, notamment par des études approfondies sur les moyens de rendre plus efficace la gestion des flux de capitaux. Nous attendons avec intérêt de recevoir une analyse plus poussée et des propositions au cours de l'année qui vient."

Le verdict ? : au prochain rapport dans 6 mois
# Posté par jean-marc | 10/10/10 02:49
DD's Gravatar "Statuts du Fonds monétaire international
ARTICLE IV - Obligations concernant les régimes de change
Section 1. Obligations générales des États membres

Reconnaissant que le but essentiel du système monétaire international est de fournir un cadre qui facilite les échanges de biens, de services et de capitaux entre nations et qui favorise une croissance économique saine, et qu'un objectif principal est d'assurer de façon continue les conditions de base ordonnées nécessaires à la stabilité économique et financière, chaque État membre s'engage à collaborer avec le Fonds et avec les autres États membres pour assurer le maintien de régimes de change ordonnés et promouvoir un système stable de taux de change"
# Posté par DD | 10/10/10 12:58
SD's Gravatar "Les membres du FMI ont décidé de renforcer la procédure de surveillance des monnaies et d'approfondir son travail sur cette question polémique". JDD

Parce qu'il avait une procédure de surveillance ?

Risible et tragique !

SD
# Posté par SD | 10/10/10 13:57
DTX's Gravatar Je pense au contraire que DSK est tout à fait au courant des causes réelles de la crise actuelle et qu'il en a très bien compris les tenants et les aboutissants...

il invoque des raisons insensées aux problèmes actuels de l'économie mondiale pour mieux en cacher les vrais causes

Le politiquement correct financier étasunien et une trop grande proximité avec le vrai pouvoir US ( Wall Sreet ) empêche DSK de remettre en question le système des changes flottants et la pyramide de crédits véritables vaches à lait de la finance moderne

quand on laisse le choix à l'oligarchie financière entre mourir guéri ou vivre en laissant mourir le reste de la planète ils n'hésitent pas une seule seconde...

S'il nous en fallait une preuve nous l'avons...

bien amicalement

Philippe
# Posté par DTX | 11/10/10 14:42
Le blog du cercle des économistes e-toile

Le cercle des économistes regroupés dans E-TOILE autour de Didier Dufau, Economiste en Chef,   aborde des questions largement tabous dans les media français et internationaux soit du fait de leur complexité apparente, soit  parce que l'esprit du temps interdit qu'on en discute a fond. Visions critiques sur les changes flottants,  explications  sur le retard français,   analyses de la langueur de l'Europe,  réalités de la mondialisation,  les économistes d'E-Toile, contrairement aux medias français, ne refusent aucun débat. Ils prennent le risque d'annoncer des évolutions tres a l'avance et éclairent l'actualité avec une force de perception remarquable.

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