La zone Euro va-t-elle éclater ?

"Au lieu de lire des vers de mirliton nous préfèrerions savoir concrètement si la zone Euro peut exploser et si oui ce qu'il faut faire pour se protéger". 

La question est si franche que nous y répondons :

- Oui la zone Euro peut exploser

- Non il n'y a pas grand-chose à faire pour se protéger.

Vous voilà bien avancé,  cher lecteur.

Nous ajouterons : il n'est pas certain qu'elle explose. Il n'est pas obligatoire de chercher à tout prix des protections.

Nous n'avons jamais cru, au Cercle des économistes e-toile, les théories qui expliquaient que la zone Euro n'avait aucune chance de vivre ou de survivre. Nous ne croyons pas à la théorie des zones monétaires optimales, pour des raisons si souvent expliquées ici que nous y renvoyons le lecteur. Nous ne croyons pas à l'existence d'un vice absolu vouant l'édifice aux poubelles de l'histoire.
 
En revanche nous considérons que la zone Euro, zone politique, est grevée de nombreux défauts de construction qu'il importe de comprendre avant de savoir s'il faut et s'il est possible de les corriger.

Une zone monétaire ne peut pas fonctionner durablement sans qu'une politique économique complète soit mise en œuvre. Une politique économique possède quatre dimensions indissociables :

- Le budget
- La banque centrale et la politique de crédit
- Le change
- la législation économique, sociale  et fiscale .

Pour conduire une politique il faut des organes coordonnés vers un même but.

La zone Euro a été construite en refusant ces réalités.

Il n'y a pas d'objectifs globaux explicites. Les budgets restent nationaux, comme la législation économique, sociale et fiscale.

La banque centrale conduit une politique qui lui est propre avec un objectif de prix des biens de consommation tels que définis dans un indice composite européen.

Le change est laissé à l'abandon. M. Juncker, Président de l'Eurogroupe, est théoriquement en charge de la politique de change, selon les traités. En vérité l'idéologie dominante veut que ce soit les marchés qui fixent "librement" les cours de change.
 
Le système actuel repose sur des normes de déficits et d'endettement contredites par  des politiques disparates.

Il s'inscrit par ailleurs dans un système monétaire international sans règle, chaque pays étant libre de faire ce qu'il veut : lier sa monnaie à une autre, la laisser flotter, la diriger.   En revanche les capitaux sont libres de se déplacer à travers le monde sans aucune supervision internationale et d'agir pour ou contre la politique de chaque banque centrale,  c'est selon. 

Autant dire que la zone Euro était un accident dans l'attente de se produire.
 
On dira : l'accident conjoncturel qui frappe la zone n'est pas de son fait et on n'envisageait pas de telles tempêtes. La crise actuelle est de type centennal et le fait qu'elle survienne dix ans seulement  après les débuts de l'Euro tient à la malchance et non  à ses faiblesses structurelles.
 
Les deux affirmations sont justes. Ce n'est pas la zone euro qui est à la source de la crise mondiale et la gestion "par la norme" n'était pas faite pour le gros temps.

Le très gros temps est de la partie. Les défauts deviennent criants.

Pour chacun des états de l'Euroland la pression est sévère.

Leurs dirigeants ont laissé leur pays s'endetter au long cours et les solutions à court terme apportées à la crise mondiale  (sauver les banques et laisser jouer les "amortisseurs sociaux")  ont fait  déborder des bassins déjà trop pleins.  Ils sont à court de ressources et à la merci des prêteurs.  L'Euro n'a pas de responsabilités directes dans l'affaire, sinon en ayant laissé croire à la force du bloc et permis des taux d'intérêt bas pendant un temps trop long.

La difficulté est que les politiques  n'ont plus rien entre les mains pour faire face. La monnaie ? Ce n'est pas eux ? Les changes ? Ce n'est pas eux ?

Restent les budgets et la législation.
 
Dans plusieurs pays de la zone Euro la dette est devenue impossible à rembourser et même à proroger. Les taux d'intérêts sont devenus prohibitifs. Les budgets ne peuvent plus être bouclés et les déficits ne peuvent plus être financés. Ils sont en état de faillite virtuelle.

La seule solution était la solidarité des pays de la zone monétaire  par l'appui de la Banque centrale et la mutualisation des dettes. En un mot la Banque centrale aurait fait chauffer la planche à billets autant que de nécessaire pour financer les états en détresse ; le trésor commun aurait fait rouler la dette, en en purgeant un petit bout au passage. Seulement voilà : les statuts de la BCE interdisent ce genre de politique et les traités précisent bien que les états nécessiteux ne doivent leur salut qu'à eux-mêmes.

Pendant que les pays de l'Euro tergiversent, les banques porteuses des dettes concernées sont considérées comme en grand danger de faillite. Depuis juillet, date où des décisions rapides s'imposent sur la Grèce, puis l'Italie, rien n'a été fait. Alors la croissance s'est arrêtée. Les banques ont vu leurs liquidités s'assécher. La panique s'est installée dans une sorte de sauve qui peut général.

Faute d'autre moyens tous les états se sont lancés dans la contrition budgétaire. Pour contrer les effets déflationnistes les banques centrales se sont concertées. Elles ont  sauvé les banques en panne de dollars puis toute celles en panne de liquidité.

Un énorme coup de frein budgétaire et les plus grandes libéralités monétaires coexistent. Manier le frein et l'accélérateur en même temps provoque généralement des dérapages.

La question est de savoir si la tentation du cavalier seul monétaire, en un mot permettre à un état de produire autant de monnaie qu'il le veut en quittant l'euro et en laissant plonger sa monnaie , l'emportera dans l'esprit des principaux dirigeants européens.

En raison, ils ne sont pas obligés par la crise d'aller à cette extrémité là.

On a vu avec l'Islande, avec le RU et avec bien d'autres pays qui ont leur monnaie propre, que le privilège de pouvoir jouer avec le change et l'offre de monnaie ne changeait pas fondamentalement les choses. Le coup de massue budgétaire au RU est plus sévère qu'en Europe continentale. Il n'y a guère de différences entre l'état de l'Islande et celui de l'Irlande.

Il va de soi que si la zone Euro disposait d'une structure de commandement économique centralisé, d'un trésor central, d'une banque centrale assujettie aux ordres de la gouvernance économique, d'une politique offensive des changes, ainsi que de tous les instruments financiers centralisés, la situation serait meilleure.

Eusse-t-elle été dotée de ces outils en 2008  la politique aurait été sensiblement différente. On aurait laissé filer l'Euro, géré sans effort le cas grec qui aurait disparu des radars,  et prouvé aux marchés que la banque centrale était prête à financer inlassablement tous les déficits qui apparaîtraient et à fournir de quoi rembourser au nominal toute forme de prêts privés ou publics.

La crise n'aurait pas été réglée pour autant. Le Japon, les Etats-Unis  et la Chine auraient été immédiatement gênés par la politique de la zone Euro. Un Euro faible ne les arrange pas. Leurs dettes sont aussi là. Une guerre des changes aurait été possible bien pire que celle que l'on connait.

On aurait craint d'en arriver là. Entre puissances il aurait bien fallu vaille que vaille aboutir à un compromis sur les monnaies.

Eh oui, un compromis sur les monnaies ! Car une guerre de changes ne mènerait nulle part.

Le plus grave dans l'organisation zombie de la zone Euro c'est que sa faiblesse même interdit la seule solution globale. On craint qu'elle ne s'effondre mais on ne la craint pas. Zone d'ajustement elle est et doit rester.

Le RU dévalue à tout va comme la Corée. La Chine ne sait plus où elle va. L'épargne mondiale en folie cherche où se cacher et ne trouve pas. On fuit l'Euro sans tête mais on craint le dollar.

Si la zone Euro casse, tout cassera. Le "credit crunch" sur les dettes sera tel qu'on va directement à la dépression auto entretenue.

2012 est l'année de tous les dangers parce que les décisions politiques qui devraient être prises ne le sont pas. Peuvent-elles l'être ?
 
On entre ici dans la prévision politique. Le tu-me-tiens-je-te-tiens par la barbichette est un jeu difficile à arbitrer. L'issue dépends de la résistance des barbichettes et de la force ceux qui tirent dessus.

Si la guignolade continue au G.20 comme devant et si l'Euroland persiste dans le tempo actuel alors oui il y aura explosion de la zone euro et dépression générale. Oui. Et désolé, il n'y aura aucun endroit où se cacher. Environ 10% du capital mondial disparaîtra ce qui est le coût d'une guerre.


Nous sommes aux extrêmes limites.

Le conseil que nous donnons à la zone Euro est de nommer immédiatement un "chancelier de l'échiquier de la zone euro" avec pour mission de négocier le retour à système monétaire international où les états auront des responsabilités et le pouvoir d'utiliser tous les instruments nécessaires pour éviter l'explosion de la zone Euro.

Le conseil que nous donnons à la Chine et aux Etats Unis, c'est de se préparer à un nouveau Bretton-Woods qui les verra solidifier avec l'Europe  la solidarité des grands pays du monde autour d'objectifs de vraie stabilité  et de coopération équilibrée.

Allons, donnons les parités souhaitables : 1 Euro = 1 Dollar = 5 CNY = 100 Yens.

S'ils avaient mis en œuvre cette politique dès l'explosion du marché interbancaire de 2007, nous n'en serions pas là. Quatre ans ont été perdus. Parions qu'une cinquième année de n'importe quoi ne restera pas sans conséquences gravissimes. 

Revenons à nos questions initiales :

- La zone Euro va-t-elle exploser ? La solution ne dépends pas d'elle seule et suppose qu'elle change profondément ses pratiques. Elle est donc très mal. D'autant que pas une bouche officielle ne tient le discours qu'il faudrait et que les économistes officiels pro-euros sont cachés sous le tapis.

- Peut-on se protéger ? Non. La fuite est en cours depuis des mois et des années. Les actifs gonflés par la fuite s'effondreront plus encore que les autres en cas de dépression généralisée.

La meilleure protection est de militer pour des idées justes et de voir les bonnes politiques triompher.

La chance de Sarkozy serait d'emboucher les bonnes trompettes. Mal conseillé, il tergiverse. Il doit dire à Mme Merkel que les structures de la zone Euro doivent changer et pourquoi, sans cacher qu'un refus de sa part signifie la mort de l'Euro.  Il doit affirmer haut et fort à la Chine et aux Etats unis que les politiques aventurées, le n'importe quoi pour les Etats-Unis et le mercantilisme pour la Chine, se heurteront de plein fouet à la réalité d'une grande dépression. Mme Lagarde doit jouer son rôle qui n'est pas seulement de Cassandre mais de proposition.

Ni Sarkozy ni Merkel  n'ont les conseillers, le bagage économique et la force de conviction pour porter ce message. Qu'ils prennent enfin conscience des efforts qu'il leur faut faire sur eux-mêmes et sur leurs équipes !
 
Si chacun des dirigeants des grands pays  continue à creuser la tombe de l'économie mondiale avec ses petites dents, prisonnier de ses petits calculs, de ses lobbies et des grandes ambitions de son pays, entourés d'idéologues qui les trompent et qui se trompent, alors oui 2012 verra un désastre économique de première grandeur.

Le pire n'est pas sûr.  Le monde est résistant. Les quatre années de pensée zéro et de contre politique  qui viennent de passer le montrent.  Mais le compte à rebours est désormais  enclenché.

Joyeuse année 2012 à tous. 

Didier Dufau pour le Cercle des économistes e-toile.

Commentaire
DarkVador's Gravatar Certains économistes comme Paul Krugman sont plus pessimistes que vous. Je cite son éditorial du 12 novembre 2011 dans le International Herald Tribune :

""Et c'est ainsi que l'Euro se termine"...."Il est difficile de voir comment l'Euro va pouvoir s'en sortir."..."Maintenant que le projet Euro est fracassé dans les rochers."

Milton Friedman n'y croyait pas et avec lui les monétaristes. Les keynésiens avec Krugman cessent d'y croire à leur tour.

Qui reste-t-il, à part vous pour un croire encore un peu ?
# Posté par DarkVador | 27/12/11 16:59
SD's Gravatar Le but de Krugman était principalement de faire la leçon à ses ennemis politiques. Dans l'article en question il ne traite pas de la destruction de la zone euro mais des interprétations que ses difficultés pourraient donner à ses adversaires. Il est dans une forme de combat idéologique contre la droite américaine qui veulent que l'on réduise les déficits alors qu'il propose dans une sorte de fuite en avant dans la dépense.

De façon très significative il ne cherche pas à savoir sur quels fondements, erronés ou non, la zone a été créée, mais il analyse les attitudes que sa construction a suscité dans le monde anglo-saxon. Une certaine droite américaine y voyait le retour à une forme de bloc or qui avait leur soutien. La gauche britannique (comme la gauche française) y voyait le triomphe de la social-démocratie. Alors que manifestement l'analyse gauche-droite est inopérante.

Le seul élément technique qu'il met en avant est celui de Milton Friedman (ce qui et plutôt drôle) : les états ont perdu l'action sur le change et sur la monnaie pour faire face à une récession. Il n'envisage pas que le collectif européen puisse utiliser ces deux leviers. Alors qu'ils seront bien obligés de le faire si la zone est proche de l'explosion finale et que désir de la sauver l'emporte sur l'aventurisme.

Sylvain
.
# Posté par SD | 27/12/11 18:37
LH's Gravatar Vue des Etats-Unis l'Europe a au moins deux difficultés :

- si les Etats ne parviennent pas à refinancer leur dette à des taux raisonnables et qu'on voit se dessiner un nouveau blocage "à la grecque" la zone est fichues. Le pari semble de créer d'énormes masses de liquidités banques centrales auprès des banques européennes pour qu'elles fassent le travail. Mais les emprunts en dollar doivent être remboursés en dollar. D'où les swaps massifs de dollars qu'on a connu. Passer par le FMi et saugrenu. Tout cela donne l'impression qu'on fait ce qu'il faut par des chemins détournés.

- si la récession arrive comme va l'imposer l'ampleur des plans d'austérité partout en Europe, la situation va s'aggraver, d'autant que la zone Euro sera moins disponible pour acheter américain ou chinois.

Dans les deux cas on peut arriver facilement au point de rupture.

Tout cela est borderline.

La Chine commence à souffrir vraiment. Le Royaume Uni est en récession et les Etats-Unis ne repartent pas. Le Japon est en récession.

Merci pour vos bons voeux pour 2012 !
# Posté par LH | 27/12/11 23:39
Job's Gravatar Idéologie mise à part, sur cette question, prêts de la BCE de 500 Milliards d'euros à 1% aux banques européennes qui déposent à leur tour pour près de 385 milliards d'euros à 0,25% auprès de la BCE!
Cinq fois le montant de la dette grecque, plus que le fond de stabilité, plus de trois fois la somme versée par le FMI; des taux d'intérêts ridicules en comparaison de ceux consentis à la Grèce...
# Posté par Job | 28/12/11 10:24
SD's Gravatar @job

Le refinancement dont les banques ont besoin dans l'Europe entière se compte en milliers de milliards d'Euros avec un étouffement en devise lié à la fuite des capitaux internationaux. Les banques européennes, comme d'ailleurs tout le système bancaire mondial sont en faillite. La traditionnelle distinction entre crise de liquidité et crise de solvabilité n'a exactement aucun sens. On a les deux en même temps.

Comme les banques sont en crise de liquidité et de solvabilité il leur faut des financements longs. Deux ans c'est très long pour une facilité de caisse banque centrale. Comme personne ne veut prêter sur le marché interbancaire, l'argent est remis à la BCE en attendant la prochaine crise de liquidité. La perte enregistrée entre le taux d'emprunt et celui de replacement est payé par les prêts gouvernementaux et les prêts commerciaux tous supérieur à 1%.

Le problème est que les collatéraux présentés pour obtenir ces facilités de "trésorerie" ne valent pas grand chose. Le bilan de la BCE enfle et perd en qualité.

Il n'y a plus de marché interbancaire ; les devises sont obtenues par des swaps de banques centrales. Le système monétaire et bancaire international, faute de confiance, est bloqué.

Commencé fin juillet 2007 le blocage continue en décembre 2011. Faute de réformer le système global personne ne sait comment en sortir sinon en multipliant les expédients et les faux semblants.
# Posté par SD | 28/12/11 13:14
Ronny's Gravatar @SD,

le commentaire sur celui de Job est pas très clair...
# Posté par Ronny | 28/12/11 23:57
SD's Gravatar Je veux simplement dire que les sommes de la BCE mises en jeu en jeu ne sont pas à comparer avec le seul cas grec. Elles traduisent un problème beaucoup plus ample et qui dure depuis l'été 2007 et qui touche toute l'Europe. Cela dit Il va de soi que la cas Grec aurait pu et du être réglé autrement et bien plus tôt. Nous l'avons dit et répété. L'obstination de Merkel dans cette affaire a été très dommageable.

Est-ce plus clair ?

Sylvain
# Posté par SD | 29/12/11 01:00
Ronny's Gravatar @SD,

Merci pour la réponse SD. Mais un peu déçu toutefois car plutôt que de préciser avec des explications plus détaillées sur les mécanismes la réponse donne plutôt dans une forme de généralité.....
Un petit sujet de n-bolg là-dessus nous éclairerait peut-être plus?
Merci encore toutefois.

Ronny
# Posté par Ronny | 29/12/11 10:18
kleber's Gravatar Si je comprends votre article parfois assez technique, les solutions semblent connues mais les dirigeants politiques ne sont pas à la hauteur des difficultés.
Comment peut-on attendre d'une génération de dirigeants politiques et d'économistes incompétents, qui nous ont menti et trompé et dont la gouvernance a conduit à des niveaux de dettes abyssaux, à des déficits publics prohibitifs et des taux de chômage catastrophiques, tout en promettant des réformes à longueur d'élections, que les bonnes décisions soient prises aujourd'hui?
Je crains qu'il faille atteindre le chaos pour que des hommes nouveaux émergent pour refonder le système.
Il convient toutefois de bien distinguer dans les analyses les deux crises majeures actuelles : la crise économique et financière mondiale et celle de la zone EURO.
# Posté par kleber | 29/12/11 17:39
DD's Gravatar On peut comprendre votre colère. La crise actuelle est une crise de l'inconscience et de l'impuissance doublée par la passion fiscale d'élites politiques entièrement tournées vers la dépense publique et les "cadeaux" électoraux au peuple, le masochisme, le malthusianisme, la peur de tout. Une forme de christo-socialisme bobo magnifiée par l'énarchie compassionnelle et exploitée à son profit.

La cause majeure du désastre général de l'économie mondiale est à chercher dans l'introduction d'un système fou de changes flottants en 1971. Trois crises graves plus tard (1973-74, 192-1993, 2007-200x) "la plus grave depuis 1929" à chaque fois et une baisse régulière du taux décennal de croissance mondiale pendant quarante ans, cette idée devrait être dans toutes les têtes. Justement elle n'y est pas. D'où l'inconscience.

Pour y remédier il faudrait explicitement un consensus mondial sur une nouvel ordre monétaire mondial, réglant les problèmes connus de l'accord de Bretton Woods de 44. Personne ne le veut ni le cherche. La voix française serait totalement isolée. D'où l'impuissance.

Inconscients et ou impuissants, les hommes politiques depuis 1974 essaient de s'adapter aux conséquences en abandonnant leur corpus idéologique propres.

A partir de M. Giscard, on découvre que la gauche "n'a pas le monopole du coeur", donc des impôts et des libéralités sociales. La gauche de Mitterrand se lance dans les folies socialistes que l'on sait et finit par adouber un libéralisme quasi absolu. Depuis Chirac a élevé une statue au culte des avantages définitivement acquis et du ni ni.

La France a maintenant un taux de non emploi absolument délirant : là où une nation de 66 millions d'habitant devrait avoir 25 millions de salariés, nous en avons à peine 15. 10 millions de manque à travailler ! Et de façon tout à fait normale dans ces conditions près de 10 millions de résidents qui vivent totalement aux crochets de la société.

Les politiciens français, presque tous fonctionnaires depuis quarante ans (ce sont des élèves des travées de l'Ena qui se tirent la bourre) ont cru intelligent de faire monter le taux de dépenses publiques à plus de 56% du PIB tout en montant les prélèvements à des taux qui frôlent les sommets mondiaux. Et comme cela ne suffisait pas, ils ont laissé les mécanismes de hausse de la dette globale agir à plein. La France est exsangue, ruinée de dette, percluse d'impôts, assommée par le chômage et l'assistanat forcé ou transformé en mode de vie. Les déficits extérieurs sont au maximum historique.

N. Sarkozy a compris qu'il fallait une rupture. Mais il ne l'a pas faite. Et il est totalement impuissant à faire quoi que soit toutes les politiques françaises étant dans la dépendance du système monétaire mondial et européen qu'il est impuissant à changer si tant est qu'il ait jamais compris qu'il fallait le changer. Le chant politique est quasiment unanimement, à l'UMP y compris, un couplet social démocrate fondé sur "les droits à", la "solidarité" factice, "le modèle social français", le "vive l'impôt".

Il faut tout de même garder à l'esprit que le plus petit salarié est l'occasion d'un prélèvement fiscal de près de 60%, le cadre moyen étant à 70%, le cadre supérieur et l'entrepreneur entre 80 et 110% selon la part de l'ISF dans ses impôts. Seule une petite croute de quelques milliers de personnes, en général bien calées dans le système administratif et politique ou vivant en symbiose avec lui, tire son épingle du jeu du fait de systèmes d'exonérations pointus.

Il faut comparer la valeur ajoutée des entreprises privées et la dépense publique. On est quasiment à 100%. L'état dépense l'équivalent la totalité de ce qui est produit en France par le secteur marchand !

Et voilà qu'on nous annonce que la dette publique va encore augmenter pour atteindre 100% du PIB, que les déficits extérieurs sont tels qu'il faut baisser les salaires nominaux pour rétablir les équilibres (5 à 10% apparemment) sans quitter l'Euro, que la dégelée fiscale va encore être pire que le coup de massue Juppé qui avait suivi la crise de 92.

Vive l'impôt , vive l'impôt ! Le cri est général. Que veut-on : dépasser en prélèvement la production du secteur marchand ? Vendre le patrimoine des Français ?

Ce qui affole c'est l'ampleur des réformes structurelles à faire :

En France :

- séparer administration et politique et mettre fin à l'énarchie compassionnelle. Réduire drastiquement le coût de la politique.
- remettre au travail près de 10 millions de personnes. Oui, dix millions, soit pratiquement augmenter de 80% le nombre de salariés.
- réformer entièrement le système de sécurité sociale en supprimant la gratuité du petit risque.
- baisser de 16% de point de PIB de taux de dépense publique sur PIB
- revenir à l'équilibre budgétaire
- baisser de 10 points les prélèvements et changer leur assiette.


En Europe :

- refuser la politique de déflation systématique en réorganisant fondamentalement la gouvernance et les objectifs de la zone Europe, ou l'abandonner.

Dans le Monde :

- Militer pour une réforme du système monétaire international et prendre des mesures offensives et défensives au cas où cela serait impossible.


Il n'y a pas un seul homme politique français actuellement capable de concevoir un tel projet et de le porter.

La coalition PS/Ecologie socialiste et l'UMP/divers droite sont totalement hors course. Si cela vous amuse, allez porter le débat dans une réunion publique tenue par ces gens là : chiffres en main avec graphiques et raisonnement imparables, la réponse est toujours la même : "c'est faux" ou "vous avez bien préparé votre coup, provocateurs". "les autres sont pires". Débat impossible.

Les extrêmes droites et gauches n'ont aucune crédibilité et ne cherchent d'ailleurs pas à en avoir.

Au sein de la gauche il n'y a strictement aucun espoir d'une prise de conscience et d'une action positive. On ne cherche que le moyen de prendre les places en annonçant comme d'habitude des "cadeaux au peuple". Pas une voix sérieuse. Le culte de l'impôt et de l'avantage acquis paralysera toute vraie solution. Européiste et fondateur du système global dans lequel nous nous effondrons, le parti n'a de toute façon aucune tribune à offrir à des voix divergentes.

Au sein de la droite, on a repris toutes les antiennes de la gauche. On ne parle que d'imposition juste, de droits à, de solidarité, avec tout le monde en France et ailleurs, de sauvetage du modèle social français, de lutte contre les vilains, de traque des paradis fiscaux, de chasse au traders et de faire rendre gorge aux riches, d'aller chercher ceux qui ont fui la déréliction de leur pays et les taux d'impôt confiscatoires en leur faisant tout de même payer l'impôt même quand ils ne sont plus là !

Tous ces prêcheurs ne comprennent qu'une chose : l'argent des autres doit servir leur élection. Point stop. Le pays s'enfonce sans retour et sort de l'histoire. Qu'importe. La France ? C'est quoi la France ?

Oui, on peut comprendre votre colère.
# Posté par DD | 29/12/11 20:51
SD's Gravatar Tiens la France de 2012 a perdu son triple A ! L'année 2012 n'avait que 14 jours !
# Posté par SD | 16/01/12 03:20
Le blog du cercle des économistes e-toile

Le cercle des économistes regroupés dans E-TOILE autour de Didier Dufau, Economiste en Chef,   aborde des questions largement tabous dans les media français et internationaux soit du fait de leur complexité apparente, soit  parce que l'esprit du temps interdit qu'on en discute a fond. Visions critiques sur les changes flottants,  explications  sur le retard français,   analyses de la langueur de l'Europe,  réalités de la mondialisation,  les économistes d'E-Toile, contrairement aux medias français, ne refusent aucun débat. Ils prennent le risque d'annoncer des évolutions tres a l'avance et éclairent l'actualité avec une force de perception remarquable.

Association loi 1901

  
BlogCFC was created by Raymond Camden. This blog is running version 5.9.002. Contact Blog Owner