Déficit et Constitution

Peut-on concilier morale et efficacité  en fixant des normes économiques dans la Constitution ?

La tentation de gommer la politique en imposant une gestion par la norme est extrêmement forte.  On la retrouve dans toute l'action de l'Union Européenne qui est une énorme machine à fixer des normes et à ne pas faire de politique ! Les  citoyens sont désormais enserrés dans un tissu de normes de plus en plus contraignantes et coûteuses.  Les élus sont d'autant plus tentés d'en introduire de nouvelles que cela ne coûte rien à l'Etat et que cela leur permet de prendre la pose.  L'Europe, en vidant le champ des politiques nationales  a poussé les politiques à rechercher du pouvoir dans la définition  de règles bien intentionnées de la vie quotidienne.

Voici donc les Français sommés d'être bons et vertueux  par des curés auto proclamés mais  élus. Tu entoureras ta piscine ; tu ne fumeras point ; tu feras attention à ton ascenseur ; tu ravaleras tes façades ; tu conduiras doucement ; tu feras du vélo ; l'énergie tu conserveras ; tu feras attention aux accidents domestiques ; tu mettras une alarme incendie chez toi ;  tu ne boiras pas ; tu ne mangeras pas trop, en tout cas ni gras ni salé  ; Jouer oui  mais  attention les jeux sont addictifs ;  etc.

La Constitution est devenu le réceptacle des vœux pieux.  Les "doits de", qui fondent les libertés, ont été remplacés par des "droits à" qui génèrent des contraintes.   Le principe de précaution a été inscrit dans  la Constitution, une des erreurs les pires qu'on ait jamais faite et comme toujours l'unanimité a été de règle. Pour les sottises bien intentionnées et politiquement correctes on trouve toujours une unanimité. L'unanimité en politique est le marqueur de la sottise.

"Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil", article unique de la Constitution des Bisounours !

Depuis la crise de 1974, incomprise  (c'était la première grande crise des changes flottants ; on y a vu une crise du pétrole, confondant cause et conséquence), les gouvernements français créent des déficits publics par facilité et amour de la dépense publique.  Tout le monde reconnait que nous sommes le champion du monde de la dépense publique.  Un maire qui dépense comme un malade et considéré comme un héro : voir Delanoë, le fou fiscal qui assume sa folie.  Un ministre qui dépense comme un malade est un héro : voir Djack Lang et son doublement du budget de son Ministère.  Un premier ministre qui crée des trous impossibles à aveugler sous la ligne de flottaison budgétaire est un héro qui se croit naturellement le champion de la catégorie : voir Rocard son RMI  et sa réhabilitation de la dépense publique.  On peut avec les trente cinq heure augmenter de 10% des coûts salariaux des entreprises  en passant pour un économiste surdoués : voir DSK !

La droite, depuis qu'elle croit que son salut passe par l'énarchie compassionnelle n'a pas été en reste.

Les cadeaux au peuple financés par la dette sont une règle de comportement politique généralisée, surtout depuis qu'on s'occupe non plus de l'état mais de la "vie quotidienne des citoyens".

En un mot la lâcheté et la démagogie sont générales.    Croire que cela va changer parce qu'on va inscrire dans la constitution qu'il faut ne pas l'être est au mieux une naïveté.   

Cela ressemble assez  au joueur invétéré qui se fait interdire de Casino.

Sauf qu'il n'y a pas de physionomistes  musclés en politique.  Croire que le Conseil Constitutionnel  peut jouer ce rôle et faire descendre son rôle à celui d'un surveillant général de cour de récréation.

Les bonnes politiques économiques se conduisent et se prouvent par des actes. Pas en portant un tee- shirt disant combien on va être bon et vertueux.  

Si on s'en tient à un raisonnement purement économique, la mesure n'a aucun sens.

Pourquoi ? Parce que le cycle décennal existe. On a donc tous les huit- dix ans un effondrement des recettes fiscales  et avec une belle régularité des flambées de croissance qui compte tenu du caractère progressif des impôts  génèrent des recettes fiscales à rythme encore plus élevé.

Plutôt que d'affirmer un principe d'équilibre permanent, il faudrait acter que les recettes fiscales et la dépense publique  en tendance ne doivent pas croitre plus vite que l'économie, ce qui signifie qu'on accepte des déficits lors des phases récessives et  des excédents  lors des années de haute conjoncture.

On sait que les politiques dépensent tous les excédents de recettes pendant les phases hautes (voir Rocard, voir Jospin pour en rester aux périodes récentes) et qu'ils refusent de réduire  les dépenses  pendant les phases de conjoncture basse. Le cliquet à la baisse des dépenses publiques est d'une solidité à toute épreuve.

Le démembrement de l'Etat en faveur de l'Europe et des collectivités locales a encore aggravé la situation. On a vu que l'Europe augmente le salaire de ses fonctionnaires  dans des proportions intenables en pleine récession. Et quelle exige avec une insistance qui sera récompensée, soyons en sûrs, que ces budgets soit triplés, quintuplés, décuplés. Le ciel est la limite.  Quant aux régions et mairies, c'est la gabegie absolue.

Une politique se conduit.  Une politique économique  exige des connaissances et une compétence.  Croire qu'on pourra substituer à ces deux exigences  l'affichage vertueux des articles de la Constitution est une illusion.

Qui dira la rage et la tristesse qui saisissent ceux qui cherchent à comprendre  et à trouver des vraies solutions  quand ils constatent que les milieux politco-médiatiques ne comprennent rien, absolument rien , glorifient les comportements destructeurs et ne cherchent qu'à se parer de vertu en triturant des grimoires !

Didier Dufau pour le Cercle des Econoimistes e-toile.



Commentaire
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