Eviter la dépression : VITE !

Alors que beaucoup croient que nos thèses sont "exotiques" voire bizarres, il est intéressant de noter que tous les traités signés après guerre et qui tenaient compte des leçons de la crise de 29 s'appuient sur les principes que nous défendons : 

Charte de la Havane

- L'intégration du plein emploi dans ses objectifs « Atteindre les objectifs fixés par la Charte de nations Unis, particulièrement le relèvement des niveaux de vie, le plein emploi et les conditions de progrès et de développement. » (article 1)

- L'Équilibre de la balance des paiements: aucun pays ne doit être en situation structurelle d’excédent ou de déficit de sa balance des paiements. (article 3 et article 4)

Cette Charte signée au sortir de la guerre par beaucoup de pays énonçait une vérité économique fondamentale : il faut que les états se gardent d'accumuler des déficits ou des excédents  excessifs. Le système de Bretton Woods allait dans le même sens : les états devaient veiller à garder des fondamentaux économiques propres et tenir leur monnaie. 

Cela nous a valu les trente glorieuses.

Les Etats-Unis n'ont jamais voulu jouer vraiment le jeu. Ils ne signent pas les accords de la Havane.

Mais ils signent les accords de Bretton-Woods qui stipulent dans leurs statuts toujours en vigueur

..."dispositions en vertu desquelles tant les États membres dont la balance des
paiements est excédentaire que les États membres ayant une balance des
paiements déficitaire doivent prendre des mesures rapides, efficaces et
symétriques afin de parvenir à l’ajustement ...

C'est clair, non ?

Les accords de Bretton Woods étaient bancals du fait du rôle excessif du dollar et du droit de véto donné aux Etats-Unis.Une organisation "asymétrique" comme on dit très diplomatiquement ne peut pas fonctionner durablement, le bénéficiaire allant généralement jusqu'au bout de son abus.  Mais comment dénoncer cet abus quand on a été le second bénéficaire du Plan Marshall avec 2,7 milliards de dollars et que nous avons reçu 4 milliards de dollars d'aide au titre des accords militaires. Au total à peu près 100 milliards d'aide en Euros actuels. 

L'explosion de 1971 a conduit aux changes flottants c'est à dire à un système où les déséquilibres étaient non seulement possibles mais obligatoires. Les déficits américains constants sont équilibrés par des excédents allemands excessifs, puis des excédents japonais excessifs, puis des excédents chinois excessifs.Au point que quelques économistes américains mal inspirés parlent, extatiques, à la fin des années 90,  d'un nouveau paradigme économique source d'une croissance perpétuelle. En un mot ces abrutis encensaient la violation de tous les traités internationaux en prenant la cause du mal pour un bienfait phénoménal.  Malheureusement des politiciens français comme Madelin chantèrent et chantent toujours la même chanson. 

Inondation monétaire constante avec acceptation que les pays excédentaires replacent dans le pays principalement déficitaire la monnaie obtenue par les excédents de balances de paiement, amorçant la double pyramide de dettes dénoncée par J. Rueff : voilà ce que sera le régime économique mondial pendant 40 ans. 

Une économie spéculative remplace l'économie basée sur la production et les échanges. Le haut de bilan l'emporte sur le compte d'exploitation.  Les produits ne s'échangeant plus contre des produits, le chômage enfle dans les pays déficitaires, sans possibilité d'en sortir sinon par l'emprunt ou une déflation.  Au total on voit un gonflement incoercible  des en-cours de crédits donc des dettes  qui se retrouvent sans flux de trésorerie crédibles pour les rembourser.

La crise actuelle est toute entière dans l'oubli des règles de la Havane donc dans l'oubli des leçons de la crise de 1929. On a créé un système impossible.  Créer une OMC sans encadrement des balances de paiements donc des devises,  était une gageure. 

Les solutions que nous proposons ne sont donc pas curieuses, anormales, non conventionnelles, dissidentes ou aventurées.

Elles s'appuient sur les règles de base de la coopération économiques et elles figurent encore dans tous les traités qui ont été violées simplement parcequ'une puissance y a trouvé son compte. Des perroquets intéressés ont constamment défendus le système impossible mis en place à la suite de l'effondrement des coopérations économiques. Ils ont réussi à faire taire la presse et les gouvernements tiers. Mais l'anomalie, l'excentricité, la bêtise et l'ignorance crasse ne sont pas dans nos thèses, qui figurent en vérité en excergue de tous les traités internationaux .

Le viol de ces règles expliquent la crise, la violence de la crise, la durée de la crise et pourquoi on n'en sort pas.

Il est totalement illusoire d'attendre des banques centrales seules la sortie du marasme actuel.  M. Bernake vient d'annoncer un tour massif  de planche à billets verts, peu après M. Draghi qui a ravi tout le monde en affirmant qu'il ferait de même en violant toutes les règles écrites de la BCE. Il est vrai que le dégonflement du secteur bancaire mondial provoque chaque année un "crédit crunch" de plusieurs milliards de dollars qu'il faut bien compenser pour la faillite du système bancaire mondial ne se voit pas trop. 

Comme les plans de relance budgétaires ne sont plus possibles et que les plans de rigueur entraînent le monde dans la récession, on voit que le risque d'une grande dépression menace. Car on ne règle pas un problème de solvabilité par un programme chargé de règler une question de liquidité. 

Le seul moyen d'en sortir est donc de revenir aux règles centrales qui ont été intégrées dans les traités au sortir de la guerre et dont le viol a fini d'entraîner le monde dans la catastrophe.

Dans l'instant où les grandes puissances se seront réunies pour rebâtir un système monétaire fondé sur la parité flexible mais contrôlée des parités, où les excédents massifs et les déficits massifs sont purement et simplement interdits, y compris pour les Etats-Unis et la Chine, avec un rôle accru du FMI, la panique cessera et un plan de croissance mondiale coordonné sera possible permettant de liquider la dette sans éliminer tout espoir de croissance.

Il aurait fallu le faire il y a quatre ans, quand l'effondrement du système absurde des monnaies administratives flottantes gérées par des gnômes est devenu certain.

Les politiques récessionnistes entraînent immanquablement le monde dans l'approfondissement de la crise. Il faut réagir maintenant.

C'est à Mme Lagarde qu'il appartient de prendre la parole la première  haut et fort puisque DSK ne l'a pas fait, même s'il se susurre qu'il avait mis à l'étude un plan de retour aux partiés fixes. Après tout elle parle l'anglais.

C'est à l'Europe d'élever la voix, en rappelant que la politique mercantiliste de l'Allemagne est intenable et ne mène à rien, qu'il faut une monnaie internationale différente du dollar et que les excédents de la Chine et des pays pétroliers ne sont pas acceptables.

Contrer l'Allemagne alors que son argent est partout réclamé, cela parait impossible. Contrer les Etats-unis alors que se prépare de nouvelles guerres, cela parait incongru. Contrer la Chine qui vit dans l'hubris et l'exaltation de la grande domination possible des Hans, cela parait risible. 

L'Allemagne n'a pas d'avenir sur l'effondrement européen et est déjà obligé de manger son chapeau monétaire tous les jours. Les Etats-Unis ne parviennent pas à sortir de la crise. La Chine est à deux doigts d'une catastrophe conjoncturelle. Leur intérêt est d'agir donc de changer un système qui les a mis dans cette situation.

Le rôle des politiques et de rendre possible ce qui est nécessaire. Au possible tout le monde est tenu. 

Didier Dufau pour le Cerle des économistes e-toile

 

 

 

 

 

 

 

Commentaire
DD's Gravatar Complétons par un éclairage sur ce qui s'est passé en France de 1952 à 1972.

De 1952 à 1972 les dépenses de la loi de finance (effectives) ont oscillé entre 22 et 25% du PIB. Avec des retours en arrière. Mai 68 avait porté les dépenses à 25.1 mais en 1972 on en était à 21.8 !

On oublie que de 52 à 57, le déficit budgétaire a été compris entre 4.1 et 5.5% du PIB. La gestion gaulliste l'a ramené à moins de 2 dès 1960 et elle était à 0.2% en 1969, malgré mai 68.

On voit qu'on peut réduire fortement le déficit budgétaire sans augmenter massivement la pression fiscale.

De même le chômage était de 193.000 en 1952 et il était resté proche, 206.000 en 1969, malgré le retour des "rapatriés d'Algérie".

Les importations ont toujours été couvertes par les importations (entre 85 et 102%).

Le revenu individuel (PIB par habitant) de 58 à 68 a doublé en terme réel..

Contrairement à ce qu'on croit généralement la valeur externe du Franc n'a pas varié beaucoup : 2.53 G d'or fin en 50, 2.11 après la dévaluation Pinay de 58 et 1.80 avant les conséquences de 68. En dépit d'une forte inflation en interne. On faisait à peine plus de bêtises que les autres.

La dette globale (tous les agents et pas seulement l'Etat) est passée de près de 400% du PIB à un peu moins de 200%.

En un mot nous sommes sortis de la guerre et de la reconstruction avec une dette faramineuse, un déficit budgétaire de près de 6%. Et nous sommes parvenus à réduire le déficit budgétaire à zéro, à diminuer de moitié notre endettement global et à doubler le pouvoir d'achat des Français. Il n'a pas fallu pour cela mener une politique de dévaluation massive contrairement à ce que certains croient à tort.

Certes nous avons été aidés par le Plan Marshall mais nous avions à supporter une guerre en Algérie.

Il est donc parfaitement possible de rétablir ses comptes sans ruiner un pays par des politiques absurdes.

Mais voilà :

- Nous vivions sous le régime de Bretton-Woods avec des changes fixes mais ajustables, les ajustement étant finalement modestes.
- Mais la dépense publique ne représentait que le quart du PIB pas 56%
- Mais il n'y avait pas l'Euro.

On voit que désastre actuel n'est pas une fatalité.

Il faut revenir à une régime de changes fixes mais ajustables. partout, même en Europe.

Il n'y a pas de solutions si on ne réduit pas massivement la dépense publique, devenue indécente en France.

On voit aussi pourquoi on ne s'en sort pas :

- Les changes flottants sont un tabou
- L'Euro ne se donne pas de possibilité de flexibilité interne même temporaire
- M. Hollande maintient la dépense publique à son niveau.

On peut agir. Mais on ne peut plus le faire seul. Et attendre ne fera qu'aggraver la crise et en ralentir la fin.

DD




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# Posté par DD | 15/09/12 19:19
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Le cercle des économistes regroupés dans E-TOILE autour de Didier Dufau, Economiste en Chef,   aborde des questions largement tabous dans les media français et internationaux soit du fait de leur complexité apparente, soit  parce que l'esprit du temps interdit qu'on en discute a fond. Visions critiques sur les changes flottants,  explications  sur le retard français,   analyses de la langueur de l'Europe,  réalités de la mondialisation,  les économistes d'E-Toile, contrairement aux medias français, ne refusent aucun débat. Ils prennent le risque d'annoncer des évolutions tres a l'avance et éclairent l'actualité avec une force de perception remarquable.

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