Le livre de J. Généreux : la DéCONnomie

L'injure comme substitut à la réflexion économique ?

Le livre de J. Généreux aurait pu ne pas être inintéressant. Son mérite aurait pu être de donner à réfléchir sur ce que nous-mêmes appelons "la crise", définie comme un ensemble de trois phénomènes fondamentaux : la baisse de la croissance ; la montée constante de l'endettement et la gravité des crises décennales.

Le but du livren'est malheureusement pas de donner à comprendre. L'objet unique est de désosser les habitudes de pensées, les phrases type, les conceptions communes qui amènent à accepter le capitalisme. On n'est plus dans l'analyse économique mais plutôt dans le "comment se débarrasser des idées qui rendent tolérable pour le plus grand nombre un système intolérable". Cet a priori de combat idéologique marqué finit par tuer la bonne volonté du lecteur tant les concepts et les faits sont sollicités. L'auteur fait feu de tout bois et produit une chaleur qui n'échauffera que la haine des convaincus.

À chaque fois qu'une évolution est détectée, un phénomène entre-aperçu, on se dit : ça y est ! Il va donner une explication. Et non. Tout s'enchaîne sans raison ou avec des phrases chevilles qui n'apportent aucune lumière.

Donnons juste un exemple qui nous intéresse particulièrement. L'ère des trente glorieuses s'arrête. C'est vrai. Nous ne sommes plus en forte croissance en France comme dans la majorité pays développés, depuis longtemps. Pourquoi ? L'explication fuse : "parce que le modèle économique sous-jacent s'épuise". C'est tout ? C'est tout ! Comme souvent dans les récits d'histoire économique, les faits flottent comme les yeux dans le bouillon. L'animisme économique, cette tentation qui veut que les objets, les organisations et les systèmes aient une âme dont les états seraient la base du développement historique, est une déviation risible. Nous ne cessons de le dire et nous ne le cesserons pas. La notion de système qui s'épuise comme un rameur fatigué par sa course, cela ne correspond à rien. Cette approche conduit à définir des intentionnalités, qui sont évidemment aussi floues que collectives, donc politiques, que l'on ne peut contrer que par d'autres intentionnalités construites par le rassemblement des masses. On connaît bien la suite : Nuit Debout contre les Vilains et le Capitalisme. Sans aucune solution naturellement sinon la déconstruction du langage de l'ennemi.

Le refus de l'observation des mécanismes de détail, de leur explication minutieuse et de l'examen des corrections possibles conduit automatiquement aux approximations, au" complotisme", à l'animisme et à toutes les nuances du marxisme méthodologique.

Oui le système de Bretton Woods avait un gros défaut, très bien cité, mais pas explicité, par l'auteur : mettre une monnaie nationale comme pivot d'un système monétaire mondial suppose qu'il n'y ait pas de "benign neglect" de la part de son émetteur. Si le bénéficiaire du privilège monétaire se lance dans une course folle à la dépense, la valeur du pivot s'érode et les comportements de défiance apparaissent. Les Etats-Unis ont donc été sous pression en 70-71, jusqu'à faire sauter le système. Favorable à une dépense publique sans limite notre auteur ne peut pas avouer que ce laxisme est la cause de la fin des Accords.

Une fois que le système a sauté, il est clair qu'il a emporté les Trente Glorieuses avec lui. Mais il faut expliquer pourquoi et comment. La question de fond est l'impact du système monétaire sur l'économie, les jugements à porter sur le système non coopératif des changes flottants, dans un monde où les Etats sont les principaux agents économiques, les réformes à faire et les moyens de les obtenir.

Seulement voilà : l'auteur ne veut pas expliquer le désastre par les défauts du système monétaire international dont la correction impliquerait un simple réformisme.

Il faut démolir le capitalisme de façon intrinsèque, car il est toujours mauvais, malgré "l'illusion" des trente glorieuses. Le capitalisme est revenu dans son lit normal et c'est une diablerie normale. Il faut donc que les masses s'y mettent ! Les Trente Glorieuses étaient un accident de l'histoire. L'École libérale autrichienne de Hayek ? Rien qu'une bande de nullards. Le capitalisme est sauvage par nature. Le "néo" management est devenu une technique pour pousser tout le monde au suicide. Il a réussi comme un diable à sortir de la boîte et montre son vrai visage. Etc. On connaît !

Au lieu de traiter précisément de défauts majeurs, on attaque le mal à la racine capitaliste. Le contrat d'entreprise en lui-même est une horreur car il assimile l'entreprise, entité économique, aux propriétaires, beurk, qui ont rassemblé les moyens de la créer et de la développer et qui ne devraient pas avoir le droit à la parole. Le salariat, beurk, est une horreur aggravée du fait du néomanagement qui est le pendant du néolibéralisme. Bref le loup et le renard se sont ligués pour faire suer le burnous. C'est comme cela. Et ils ont pris le pouvoir en contournant les Etats et en imposant leur vocabulaire à des médias achetés. Quant à l'Europe des marchands n'en parlons pas.

Ce genre de livre agace. Les faits désastreux sont bien là. Il faut les observer, les analyser, les expliquer. Le jugement péremptoire à base idéologique et l'injure sont acceptables dans des manuels de combat pour groupuscules. Mais il n'apporte rien à la communauté des non croyants.

Le résultat de cette dérive bavochonne est qu'on n'a évidemment aucune solution au bout du chemin sinon un retour triomphal du keynésianisme militant et de la dépense publique sans limite. La dette ? Connais pas ! La compétitivité ? Une hystérie néolibérale imposée par les "marchéistes" ! La surfiscalité ? Quelle surfiscalité ? Tout ce qui a été arraché aux riches doit être conservé puis encore alourdi.

Le résultat : aucun diagnostic technique précis sur des aspects essentiels comme l'organisation du système monétaire international : aucune analyse par exemple du système des changes flottants et de ses conséquences. Donc aucune vraie réforme et surtout aucune diplomatie économique : on sait pourtant que la révolution dans un seul pays, cela ne marche pas.

Le constat des faits lamentables, indispensable, est gâché car détourné de solutions intelligentes et collectives pour un galimatias socialo marxiste militant qui ne conduit à aucune solution. Le dernier chapitre, qui devrait s'ouvrir sur de nouvelles perspectives et de nouvelles actions, ne propose rien sinon d'essayer de nous expliquer pourquoi les intelligents sont "des cons dans la dérive sectaire" et réciproquement.

On retrouve la stupide opposition, en France, entre économistes keynésiens et libéraux, la haine absurde qui les sépare, le révolutionnarisme de professeurs qui vivent de l'argent public et suivent une carrière sans danger, et le franco centrisme de combats de coqs idéologiques. C'est à rapprocher du livre de Cahuc contre les terroristes de gauche qui empêchent toute réflexion économique un peu soucieuse des faits et veulent une soumission collective à l'idéologie, l'engagement primant la science.

Généreux a écrit un bréviaire et, en Savonarole, l'injure vient en prime. Ceux qui ne sont pas d'accord sont des C… Le titre l'annonce, le texte le confirme. L'injure est l'argument des faibles. Le livre rejoint un autre bréviaire du même genre : "Un cauchemar qui n'en finit pas", de deux "philosophes" communistes, qui proposent, avec Toni Negri (on est sauvé), de "parier sur le communisme élémentaire de la multitude". J. Généreux devraient se méfier, car ils ont choisi aussi de se débarrasser des économistes soi-disant experts qu'ils verraient bien "en esclave de la communauté" comme au temps des Grecs classiques.

Quel triste spectacle donne la France des économistes officiels avec ses Patrick Artus ou les Jacques Généreux qui pensent que leurs opposants sont des nuls et des c…

Ces batailles de caniveau empêchent de voir et de comprendre, donc d'agir utilement pour le bien commun, qui n'est ni dans le maintien d'une économie baudruche ni dans la "dictature communiste de la multitude élémentaire".

PS Quelques remarques :

- L'épargne est par définition strictement égale à l'investissement. Il s'agit d'une identité, comme la dette et la créance. La production non vendue est soit détruite dans le processus de formation d'un bien d'équipement soit envoyée dans les stocks. Donc tous les raisonnements pseudo-keynésiens sur l'épargne qui dépasse l'investissement ou l'inverse sont totalement vides de sens. En revanche, un entrepreneur qui voit ses stocks s'accumuler réduit sa production… en même temps que le consommateur se retire du marché et stocke sa monnaie. Et l'épargne reste toujours égale à l'investissement.

- L'auteur retombe dans le contresens sur les zones monétaires optimales. Il n'a rien compris à la thèse de Mundell. Comme Eric Zemmour.

- L'auteur s'indigne que les professeurs d'économie nommés ne sont que, pour une poignée, "hétérodoxes". Qui est chargé de donner les brevets d'hétérodoxie dans une université ? Va-t-on instaurer la sélection par le délit d'opinion ?

Le dernier livre de l'IFRAP : "Ce que doit faire le (prochain) président"

Un livre à lire et à compléter

On connaît Agnès Verdier-Molinié qui a réussi à s'imposer dans le paysage audiovisuel français, ce qui, sur ses thèses, est un exploit et directrice de l'Ifrap, institut créé par Bernard Zimmern en 1985, dynamique et créatif polytechnicien et auteur qui restera pour son ouvrage clé : À tout fonctionnaire son chômeur.

Oui, elle a bien du mérite quand on voit le traitement qui lui est réservé sur les médias sociaux socialistes. Deux légères citations :

"On n'en peut plus de cette femme au "sourire" ironique, cassante, méprisante qui crache sur ceux qui la font vivre, nous. Odieuse ! Pourquoi Yves Calvi l'invite-t-il aussi souvent alors que, d'avance, nous savons qu'elle ne fera que cracher son venin".

"Lobbyiste ultralibérale, je ne vois pas ce que cette virago vient faire dans une émission du service public qu'elle hait tant. Verdier-Molinier est une idéologue camouflée en soi-disant experte économiste".

"Je ne connais pas cette personne, mais après les "pleurs" (signal de surchauffe) vient en moi l'agacement (je suis polie !). Insupportable de voir cette "journaliste" coiffée de ce sourire amusé / méprisant en arrière-plan de l'intervenant ! Insupportable !!! Merci au cadreur ! Impossible de rester impassible devant ce sourire dédaigneux, moqueur…"

"Ultralibéralisme et réaction font souvent bon ménage. En présentant Agnès Verdier-Molinié comme une experte et en ne l’interrogeant que sur les thématiques qui constituent son fonds de commerce (impôts, syndicats, fonctionnaires, etc.), les médias contribuent à dissimuler que les marottes des libéraux ne poussent pas dans le ciel des idées. Elles servent les intérêts des dominants qui, s’ils veulent librement s’enrichir, ont tout intérêt au maintien de l’ordre social. Elles s’accordent, en outre, parfaitement avec un point de vue ultraconservateur qui voit la main de dieu derrière le libre jeu du marché."

Pour une certaine gauche, le seul fait de s'exprimer sur "le services public" doit être strictement réservé à la gauche pro étatiste et toute autre proposition est indécente.

Pauvre Agnès, traitée de virago pour ne pas avoir viré à gauche, avec des commentaires sur son physique, qui semblent être une pratique normale dans ce petit monde.

Pas de discussion : élimination par la meute hurlante. Voilà le niveau du débat socialiste depuis que la doctrine est morte au champ de déshonneur des massacres et des génocides socialistes et que le socialisme de gouvernement a prouvé qu'il ne produisait que de la misère et des chômeurs. Il faut simplement se réchauffer à l'idée qu'on est quand même les bons et que les autres sont des vilains. Des suppôts du grand capital, qui ne pensent qu'à aliéner les pauvres et ruiner les travailleurs pour accumuler des profits indécents, tout en étant "fille de ", catho rétrograde etc.

Depuis que le socialisme a subverti la gauche et qu'il s'est effondré dans le sang des massacres et les larmes du chômage de masse, il a chassé et Voltaire et la bonne foi, et l'observation, pour devenir une religion de la haine de l'autre cultivé entre soi dans l'injure permanente.

Le livre d'Agnès Verdier-Molinier est pour eux une sorte d'insulte : Le livre est bourré de faits.

Des faits lourds, solidement plantés dans le désastre français. Comme on ne veut pas les voir il faut tuer l'observateur qui a l'audace de les monter du doigt. Fuir la réalité à tout prix. Parce qu'il ne faut pas désespérer Billancourt. Où il n'y a plus un seul ouvrier.

Alors nous disons : il faut lire ce livre en entier et avec soin. Car tout ce qu'on y trouve est vrai et trace un dessin d'un France en plein naufrage bureaucratique et démagogique dont le destin, au train actuel est de se fracasser sur la falaise grecque.

le champ d'analyse de l'Ifrap est restreint : l'abus commis en permanence par le système politico-administratif. Mais les conséquences sont plus générales :

- l'effondrement régalien que nous dénonçons depuis des lustres

- une organisation spéciale abusive pour des fonctionnaires qui ont capté le politique et qui ont organisé deux sociétés, la leur, et celle des autres, avec des règles et des institutions totalement différentes. Chômage, rémunération basse et aléatoire, conditions de vie difficile, retraites incertaines pour ceux qui vivent au feu de la concurrence internationale. Garantie d'emploi à vie ; avantages de retraites, de logements, privilèges nombreux, revenu indépendant des crises, pour les autres. Cette organisation duale forgée sous Pétain et aggravée à la Libération, sous la pression et des communistes et des hauts fonctionnaires, a coupé radicalement la France en deux.

- fausse gratuité distribuée par la bureaucratie qui ruine consciencieusement tout le monde.

- hyperfiscalité démentielle.

- effondrement de l'économie et de la création.

Conseillons à ceux qui veulentse rendre compte de ce dernier point, d'aller au salon de Villepinte : pas un Français. Que des Italiens, des Espagnols, des Allemands, des Nordiques. Il en se passe plus rien en France. Toutes les entreprises ont été étouffées ou les créateurs sont partis ailleurs. Un seul mot, lancinant : "il ne se passe plus rien en France".

Parmi les causes de l'effondrement français, l'étatisme incontrôlé de l' "Enarchie compassionnelle" tient une place effarante. Macron en est le dernier représentant, qui fuit comme les autres toute réalité, inventant la "youpi politique" pour faire perdurer cet abus.

Le livre tend un miroir aux Français, à leurs élus, à leurs fonctionnaires. Et montre de façon imparable qu'on peut faire mieux, pour beaucoup moins cher, avec beaucoup moins de monde.

L'avantage de l'Ifrap est la solidité des études Tout ce qui est écrit est vrai et frappé du coin du bon sens. Évidemment l'idée d'un programme clé en main pour les élus est un peu provocatrice. La politique est l'art de rendre possible ce qui est nécessaire. Ce n'est pas si simple.

L'ensemble des maux français ne se retrouvent pas dans le livre. La bureaucratie, la captation par les hauts fonctionnaires, les blocages syndicaux et les dérives des élus locaux sont une chose. Le "red tape", comme disent les Anglo-Saxons, est un thème qui séduit toujours parce qu'il renvoie à des responsabilités bien délimitées. Gare à la tentation du bouc émissaire. On peut certes faire mieux, d'abord en faisant moins sciemment mal et en faisant aussi autrement. La recherche d'une meilleure performance est légitime. Mais il ne faut pas perdre le bébé dans l'eau du bain versée.

Une grande part des maux que connaît le France est importée. Les deux systèmes dysfonctionnels que sont le système monétaire international et la gestion de l'Euro pèsent d'un poids massif. Une partie de la dérive administrative française, provient de la nécessité d'en juguler les effets.

C'est ce que nous répétons à l'équipe Fillon. Il faut une diplomatie de la prospérité. Et sur ces sujets il n'y a aucune ligne, dans le livre de la belle Agnès au sourire de Joconde, sur ce que doit faire le (prochain) président.

Un livre à lire,…et à compléter.

Guy Sorman : "J'aurais voulu être français"

Un livre nécessaire

Le dernier livre de Guy Sorman est un régal. C'est le plus français de tous ses livres.

En deux sens :

- parce qu'il s'adresse à tous ceux qui ont l'ambition d'être à la hauteur de la meilleure idée de ce que peut signifier "être français".

- parce qu'il n'y a pas de genre plus français que ces Lettres Persanes à l'envers.

Bien sûr, on peut considérer le livre au premier degré, en le centrant sur le mal-être des immigrés juifs d'Europe centrale de la seconde génération. À ce titre il forme un témoignage d'une rare qualité, sans jérémiades ni ethnocentrisme abusif.

L'autre manière est de constater que nous sommes tous devenus peu ou prou des juifs errants.

À titre personnel, la filière paternelle est entièrement marquée par le tourment des cadets de Gascogne, envoyés sans ménagement chercher fortune ailleurs par le droit d'aînesse et le malthusianisme local. Quant à la filière maternelle, elle devînt française quand, après la chute de Napoléon, la conscription de jeunes suisses dans les armées françaises devient impossible. La "capitulation" prévoyait que la Suisse fournisse 16 000 jeunes gens aux Armées françaises, ce qui était de nature à faire baisser la pression démographique dans un pays où les terres étaient pauvres. Le jeune Rodolphe a dû quitter son Argovie natale à coups de pied dans le train et traverser le Jura en sabots (et en hiver) pour se retrouver dans une terre de vignes, un peu semblable à Schinznacht dorf, microbique enclave vinicole au milieu des industries de la région d'Aarau.

Les deux familles avaient en commun de n'avoir aucune possession terrienne et de ne compter que sur des activités de service pour vivre. En 1815, l'une comme l'autre tenaient un bistro local apprécié, mais peu susceptible de faire vivre les cadets.

Mon grand-père maternel, fils de tonnelier, se retrouvera agrégé de mathématiques et ancien de l'École Normale Supérieure, une école dont on peut sortir quand on ne la confond pas avec Science-po !

Mon grand-père paternel, qui avait choisi Arras avant la guerre parce que sa femme avait dû sortir du train en urgence à cet endroit là pour accoucher, puis Amiens parce que la guerre avait rasé sa maison d'Arras, verra son fils devenir  Architecte Grand Prix de Rome. Il aura à reconstruire Amiens dévasté par la seconde guerre mondiale, la maison familiale étant une fois de plus détruite !

Il est dans la nature des choses que les errants prennent l'ascenseur social par l'école. Et qu'ils cherchent à être encore plus français que les autres. Ce qu'ils ne trouvent pas dans la terre, ils le cherchent dans l'idée.

L'histoire de Guy Sorman me touche et devrait toucher tous les Français, car elle est exactement le reflet de cette démarche. Rien à voir naturellement avec un surmoi identitaire et un nationalisme ombrageux. Patriote, oui. Les deux grands-pères cités seront blessés dans les deux mois de la déclaration de guerre de 14. L'un, le gascon, sera transféré en Suisse comme grand gazé, sa femme échouant avec ses derniers sous à la gare d'Annecy et frappant à la première porte pour trouver des secours. Un bon samaritain lui ouvrit non seulement sa porte,  et nourrit et hébergea  toute la troupe mais la transporta à la frontière suisse. Des Justes, il y en a eu de tout temps et de toutes circonstances en France. L'autre grand-père finit par mourir des blessures subies moins de dix ans après la guerre. Il était encore Suisse ! Sa fille renoncera aussitôt à sa nationalité suisse en hommage à son sacrifice.

Oui, l'histoire candide de Guy Sorman est d'une certaine façon celle de tout Français qui se respecte. On peut croire suffisamment à la France pour tenter d'être à sa hauteur dans la vie. Et déplorer voire dénoncer les abandons, les lâchetés, la bêtise crasse des renoncements quand justement la vie économique, politique, intellectuelle et sociale dérive dans le n'importe quoi.

Une des dimensions de l'esprit français est l'ironie critique.

Guy Sorman de ce point de vue est plus français que nature. Il n'a pas peur. Lorsqu'il dit que Sartre est une fausse gloire et une imposture anti française, en un mot un salaud (sans doute au sens sartrien du terme) il a parfaitement raison. Et cela réconforte de constater qu'un intellectuel ne se soumet pas à l'inévitable cagoterie qui entoure finalement un complice subjectif et objectif des pires génocides et crimes contre l'humanité. Les quelques commentaires peu flatteurs de Guy Sorman peuvent être complétés. Vivant à Montparnasse depuis plus de soixante ans , j'ai mes propres anecdotes. Un jour, rue Delambre je découvre que le marcheur devant moi est Jean Paul Sartre et soudain il bifurque vers l'entrée du cinéma porno qui prospérait à cette époque. Les films X avaient cessé d'avoir un scénario et étaient devenus depuis longtemps des compilations de scènes pornographiques sonorisées façon hurlement de plaisir à jet continu. Je lui emboîtais le pas et entrait derrière lui, non sans avoir demandé à la vendeuse si le client précédent était un habitué. Elle pose son tricot et lève les yeux au ciel : "un véritable obsédé". De fait, notre philosophe enlève son imper mastic et se place au premier rang juste sous l'écran. Voyant de moins en moins bien, il avait besoin d'être très près pour décoder les formes qui s'y agitaient sans grande originalité mais avec force cris d'extase. Arrêtons là cette description qui pourrait devenir scabreuse. L'existentialisme dans sa forme ultime avait trouvé son dernier domaine.

Belmondo raconte qu'il volait dans la rue les bouteilles de lait de Sartre et de la Grande Sarteuse et qu'il a cessé dès qu'il a compris de qui il s'agissait. Ce respect était bien superfétatoire." L'argent qui corrompt" coulait en effet plus abondamment que le lait apporté au petit matin.

Guy Sorman évoque son long passage comme Maître de Conférences à Sciences Po. Pour avoir partagé cette activité pendant plus de vingt ans, je suis heureux une fois de plus qu'un esprit libre soit capable d'un peu de distance vis-à-vis de la manière dont l'économie y était enseignée. Il cite un dialogue avec Raymond Barre qui lui disait qu'il ne connaissait rien aux mathématiques et qui espérait que la mode en finisse par disparaître. J'avais moi-même eu, mais en tant qu'élève, un accrochage dans l'amphi Boutmy avec le Maître. Puisqu'il sollicitait des questions, je demandais comment il faisait la liaison entre le premier tome de son manuel qui parlait de la microéconomie et de l'impossibilité des crises selon le modèle walraso-parétien, et le second tome consacré au keynésianisme et à l'élimination des crises. Très honnêtement je ne comprenais pas la soudure entre ces deux approches incompatibles. En professeur consciencieux le gros Raymond avait classé toutes les doctrines existantes aux fins d'exposition mais omis de donner le moyen de les réconcilier. Sa réaction avait été un peu tonitruante, du genre : "vous être un petit malin qui voulait faire rire vos  camarades". Mais la question était sincère et la réconciliation, au passage, n'a toujours pas été faite, malgré de gros efforts,  entre micro et macroéconomie.

Guy Sorman rappelle que l'enseignement à Science-po, en matière d'économie n'avait strictement rien de scientifique : il s'agissait simplement d'expliquer que les fonctionnaires devaient intervenir et de dire comment. Le grand manitou était Bloch Lainé dont "pour une réforme de l'entreprise" est aujourd'hui une occasion de rigolade intense et sans limite. Malheureusement la déviation soulignée par l'auteur n'a pas cessé. L'OFCE qui dépend de Science-po est encore aujourd'hui une chapelle anti libérale et interventionniste et s'exprime comme une organisation de partisans lorsqu'elle envoie ses sbires expliquer que la dépense publique, c'est bien, les impôts c'est nécessaire, la politique de Hollande, c'est merveilleux etc.

L'agrément de la promenade à laquelle Guy Sorman nous invite à l'accompagner, est qu'elle active des tas de souvenirs qui confortent ses analyses.

Il a bien noté que les Américains utilisent la France pour s'autocritiquer eux-mêmes et que la France qu'ils envisagent est totalement mythique. C'est une forme de Lettres Persanes à l'américaine. En prenant la nationalité américaine en sus de la française, Guy Sorman en profite pour écrire ses propres Lettres persanes aux Français.

Oui être français est un effort. Le découragement vient souvent au spectacle que la France peut parfois donner. Je ne souhaitais pas parler des primaires de la gauche, mais sollicitée de donner l'avis des Canadiens sur ce qui se passe en France, Mme Bombardier, invitée par la revue de Presse sur Paris Première, a du renoncer à toute réponse. Le dérisoire est tel que tout le monde s'en fiche, voilà ce qui signifiait le haussement d'épaules, accablé, de cette amusante intellectuelle de la Belle Province. Quand c'est nul, c'est nul. Et affligeant.

Justement être français, c'est faire en sorte que le monde ne s'en foute pas, de la France. Et pour cela il faut donner les coups de balais qui sont nécessaires. Merci Guy Sorman de cette leçon tout en pointillé, comme sans y toucher. N'est vraiment français que celui qui veut être français et ne se décourage pas devant les chausse-trapes semées inlassablement sur son chemin.

Être français n' est certes pas un djihad… mais surement  une ambition.

Didier Dufau

Le livre est paru chez Grasset.

En écoutant Patrick Artus.

Patrick Artus partage avec Jacques Généreux cette idée particulière que pratiquement tous les économistes sont des ânes, surtout ceux qui les accusent de ne pas être toujours raisonnables. Dans le cas de notre conférencier sa ténacité à ne pas prévoir la crise de 2008, à nier les risques associés aux subprimes, puis à vouloir croire que la crise était déjà finie au second trimestre 2008, avait laissé une trace bigarrée sur l'image de sa compétence et de son désintéressement (la banque qui l'emploie ayant évidemment salement trempé dans la finance dangereuse). Il était intéressant de voir si plus de réflexion et de modestie avaient justifié le maintien de sa large sollicitation comme commentateur de l'économie. La réponse a été rapide et claire. L'immodestie et la morgue demeurent inaltérées et la pertinence est toujours aussi aléatoire.

Passons sur l'attitude. À la lueur du Brexit et de l'élection de Trump et de quelques autres candidats au comportement saugrenu, la question était de savoir si la mondialisation avait changé et changerait encore.

La réponse exposée est toute simple : la mondialisation n'a changé qu'à la marge et ne changera pas. Pour l'Euro, il est clair qu'on ne peut pas en sortir. Ce serait une catastrophe même pour l'Allemagne qui verrait ses créances dévaluées et qui devrait donc baisser le niveau de ses retraites. Quant aux échanges internationaux, on peut juste noter qu'une partie de la politique de fragmentation de la chaîne de valeur était modestement remise en cause avec la volonté, exemple Michelin, de faire en sorte que la production se rapproche des débouchés.

Quant au trouble de la classe moyenne dans les pays occidentaux, il ne vient pas de la mondialisation condamnée abusivement mais du progrès technique qui, inéluctablement réduit les métiers intermédiaires et l'encadrement au profit d'une bipolarisation intenable entre une poignée d'inclus et une masse de petits boulots prolétarisés. Tout cela pour finir par un éloge, sans soutien politique, de M. Benoît Hamon, pour avoir posé la bonne question : faut-il couper la relation entre travail et niveau de vie ?

Patrick Artus n'est pas un mauvais orateur. Il est tellement sûr de lui qu'on le suit avec une certaine confiance. Néanmoins, le malaise s'est installé et s'est aggravé tout le temps du discours jusqu'à une forme d'exaspération finale.

Pourquoi ? Parce que la démonstration omettait l'essentiel. Il y a bien eu une explosion en 2008. Elle a eu des conséquences gigantesques. Le drame pointait bien un système global dysfonctionnel. Pas un mot. Pour Patrick Artus, avant c'était bien et pas dangereux et maintenant c'est fini, on est à nouveau dans la normalité. Ce qui est vrai du monde l'est aussi pour l'Euro. "Je ne dirais pas que ce fut une bonne idée, mais on ne peut pas en sortir". Là encore aucune analyse des aspects dysfonctionnels, seulement un peu d'ironie sur les "populistes". Il est vrai que les "sachants" officiels, ces derniers temps, ont prouvé leur capacité de prévoir et de prévenir… On peut détester le discours anti-élite, mais tant de morgue vis-à-vis de ceux qui s'interrogent sur les défauts, donc sur les solutions, montre qu’une partie des "élites mondialisées et mondialistes" est dans l'aveuglement total.

La gêne croissante pendant toute la conférence sera alimentée justement par le sentiment qu'on ne traitait pas les vrais sujets et qu'on évitait les questions qui fâchent, accumulant les banalités sans danger ou les observations superficielles.

En refusant sciemment ou non, par intérêt professionnel bien compris ou non, de voir les causes profondes des désordres, des économistes comme Patrick Artus se condamnent à n'être que des commentateurs approximatifs. Les événements arrivent. On ne sait pas ni pourquoi ni si c'est bien ou mal, ni si c'est à corriger ou à encourager. Ils flottent dans le firmament du commentaire comme les yeux dans le potage. C'est comme cela, puisque je vous le dis. Et ceux qui s'agitent autour des conséquences sont des grotesques. Point final.

Cette absence totale de diagnostic conduit inéluctablement au commentaire impuissant. Du coup l'économiste ne sert plus à rien et l'économie paraît une science sans objet ni prescription.

Dire que cette conférence fut une déception est peu dire. L'intérêt d'économistes de ce genre est quasi nul et même contre-productif. On peut se tromper, ne pas voir arriver une crise, ne pas en comprendre les ressorts, ne rien comprendre de la suite. D'accord. Mais alors on remet la main à la pâte et on ne ressort de son bureau qu'avec des analyses précises de son échec et des suggestions de correction. Et on n'explique pas que les autres économistes sont des nuls.

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Juste un commentaire sur une des questions posées lors de cet exposé : L'emploi "intermédiaire" est-il condamné ?

On connaît cette thèse qui est ressassée un peu partout. Le nouveau capitalisme, pour la première fois de son histoire, produirait un progrès éliminant l'emploi et, dans l'emploi, la source de stabilité qu'était le "middle management ". Le sujet de l'exposé étant l'évolution de la mondialisation, la responsabilité de cette dernière était-elle en cause ou l'affaire était-elle irréversible ?

La réponse du conférencier : oui le middle management est condamné et ce n'est pas du fait de la mondialisation, mais du progrès technique. L'assertion n'est fondée sur aucun argument. L'auteur étant favorable à la mondialisation, il suffisait de la laver d'autorité de tout opprobre.

L'ennui, c'est que cela ne tient pas la route. Creusons un peu.

Lorsqu’on regarde les créations de postes dans tous les pays gagnants de la mondialisation, on a vu se développer une énorme classe moyenne (des dizaines de millions de personnes) avec l'apparition d'une classe de cadres et de professionnels qualifiés en tout point identique à ce qu'on trouvait dans les pays occidentaux. Quand on crée des milliers d'entreprises il faut automatiquement de l'encadrement et des techniciens qualifiés et la hausse du niveau de vie s'est faite justement dans ce segment. Le plus drôle, c'est qu'à un autre moment de son intervention, Artus en convient. Il trouve que l'inégalité est consubstantielle au développement et touche tous ceux qui vont s'élever en participant à la création économique et pas seulement le 0.1 % de la population qui détient les nouvelles entreprises.

Le progrès technique ne peut pas avoir deux faces : destructeurs de métiers d'encadrement ici, créateur ailleurs. Cela n'a pas de sens.

La mondialisation dans la forme qu'elle a prise a donc bien eu un rôle dans l'élimination partielle de l'emploi intermédiaire dans les pays développés.

Du coup tombe à plat tout le discours malthusien habituel sur le progrès économique qui ne serait plus riche en emplois, les robots, Uber etc. Les canuts lyonnais avec nous ! Cette vision peut être vigoureusement contestée. Comme on l'a vu, il est inepte de proposer une explication qui vaut en deçà des Pyrénées et pas au-delà. Si l'emploi a disparu dans les pays développés avec les conséquences sur les classes moyennes, ce n'est pas dû principalement aux technologies. Les robots ne fonctionnent que si des ingénieurs et des techniciens sont là pour les concevoir, les mettre en œuvre efficacement et les maintenir. Tous ces postes sont qualifiés. De même le succès de l'économie collaborative n'est réel que lorsque la législation sociale ne l'a pas rattrapée. Dès l'instant où les locations défiscalisées disparaissent et que l'organisateur du collaboratif devient employeur, il ne reste plus grand-chose du côté disruptif de ces innovations.

Il se trouve que The Economist de la semaine publie un article très fouillé sur les perspectives de l'industrie. Les graphiques publiés démontrent exactement l'inverse des assertions de Patrick Artus : l'industrie représente une partie stable de l'économie chez les émergents et s'effondre dans le monde développé. Si le progrès technique frappait d'anorexie l'emploi, on le verrait aussi bien chez les émergents que chez les développés. Donc, une fois de plus, la mondialisation est en cause.

La vraie analyse est que le développement des pays émergents ne s'est pas fait selon un modèle reproductif ou homothétique mais substitutif., ce qui n'a été possible que parce qu'on avait abandonné toutes les règles sacralisées dans le statut du FMI, article 1, à savoir qu'on n'accepte pas les gros déficits et les gigantesques excédents.

Si dans les pays développés le sous-emploi s'est installé, il a frappé tout le monde, cadre ou pas cadre, middle management comme ouvriers. En Pologne la catégorie qui s'est le plus rapidement enrichie est justement celle des techniciens supérieurs et des cadres intermédiaires. Les salaires qui étaient une fraction minime de ceux des Français sont maintenant à 80 % du salaire français, à parité de pouvoir d'achat !

Si l'emploi s'est congelé dans les pays développés, c'est d'abord parce qu'il y a eu un énorme transfert d'investissement hors de ces pays et surtout parce que l'économie financière mondialisée est devenue baudruche avec une part spéculative délirante. Du coup les capitaux n'ont pas été canalisés vers la production mais la recherche spéculative de "valeur monétaire", en même temps que les récessions successives ont provoqué des chocs durables sur les investissements et l'emploi. L'énormité de la dette a conduit également à un freinage des investissements dans la production de biens et de services.

Par conséquent, une mondialisation fondée sur les changes flottants, à un moment où le dégel communiste a mis brutalement sur le marché de l'emploi des centaines de millions de travailleurs potentiels, ainsi que les déficits et les excédents de balances de paiement délirants qui en ont résulté, sont LA cause majeure de l'effondrement de l'emploi des classes moyennes dans les pays développés et de la réaction politique que cela provoque.

Patrick Artus répond que l'investissement n'a jamais été aussi élevé aux Etats-Unis ces derniers temps. C'est vrai et on peut même ajouter que les exportations chinoises se sont effondrées., forçant les Chinois à utiliser les réserves non plus pour importer mais pour acheter du capital à l'étranger, ce que regrette, à juste titre, notre conférencier qui voit là une source d'accumulation capitalistique qui ferait que la Chine posséderait à terme le capitalisme mondial. Si on regrette l'effet, il faut incriminer la cause. Et là P. Artus reste sec.

Avec des taux à zéro et des placements financiers sans rentabilité, il est normal que l'investissement reparte. Il le fait dans la pierre (bulle) mais aussi dans la production. Et il reste en partie en Occident parce que désormais tout le monde dans les milieux patronaux a pris conscience que le risque politique devenait potentiellement destructeur de l'industrie et du commerce. L'expérience a également montré que la dispersion logistique, dans un système de flux tendu, avait un coût exorbitant. Si un composant est en difficulté toute la chaîne est arrêtée. Les bruits de botte sont l'ennemi de la dispersion industrielle. Lorsque le tsunami a détruit une partie du Japon proche de certaines centrales atomiques, des milliers de produits dépendants de la fabrication de composants logés dans le coin ont cessé d'être produits, provoquant des manques à gagner phénoménaux.

La crise de 2008 a rebattu les cartes et continue de le faire. Aux comportements de panique ont succédé des comportements de précaution. Aux comportements politiques d'acceptation ont succédé des volontés de rupture.

Il est indispensable de repenser et la mondialisation et la gestion de l'Euro. Le progrès technique dans cette affaire n'est pas en cause. Mais l'organisation, ses principes, ses modalités.

Le rôle des économistes est d'éclairer les voies et moyens de ces évolutions indispensables. Pas de conforter l'existant en glosant de façon morose sur ceux qui prônent un certain nombre de changements indispensables.

La mondialisation non coopérative et déséquilibrée est une supernova qui a explosé. Il est inutile d'en chanter les vertus. Elle est mortellement touchée et les spasmes actuels n'ont rien de rassurants si on ne fait rien pour lui donner un débouché différent.

La gestion de la zone Euro ne peut plus rester en l'état. Il est absurde de prôner le statu quo.

Là sont les vrais territoires de l'économie en 2017.

En finir avec la banque universelle française

On est toujours fasciné de voir une profession cartellisée depuis Pétain sur les bases du fascio, en un mot une institution fasciste au sens propre du terme, et vivant en symbiose ouverte avec la haute fonction publique et l'énarchie qui a capté le pouvoir politique en France, se comporter comme des voyous en bande organisée n'oseraient pas le faire, avec l'onction des juges et des politiques.

Prenons un exemple minuscule. Une jeune association se voit imposer début 2017 sans discussion 480 euros de frais de tenue de compte par an pour une recette d'association de 800 euros. Elle est obligée de disposer d'un compte pour encaisser les chèques de cotisants. Elle ne peut garder de l'argent en liquide.

L'exemple est intéressant du fait de la nature très particulière du contrat de tenue de compte par une banque. Comme nous l'avons vu à plusieurs reprises sur ce blog, ce qu'on appelle un dépôt à vue n'est pas un dépôt au sens du droit civil habituel. L'argent versé sur le compte appartient aussitôt à la banque qui en récupère et l'usus et le fructus. Elle en fait rigoureusement ce qu'elle veut sans que le déposant ait la moindre information sur l'emploi des fonds. En contrepartie le client dispose d'une créance sur la banque. Normalement une créance doit être rémunérée. Et c'est là que tout devient psychédélique. La banque a récupéré la pleine propriété du contenu déposé par la petite association et va en faire son miel. elle prend en fait une commission de gestion sur son propre avoir, puisqu'elle a la pleine propriété du contenu du compte. Qui plus est en volant plus de la moitié de la somme déposée. Vous avez bien lu : grâce à nos aimables législateurs, entièrement entre les mains de la haute administration qui vit en symbiose avec les grandes banques universelles françaises, ces dernières gèrent leur argent à vos frais. Cette scandaleuse inversion de toutes les règles de la normalité juridique peut s'analyser, si on préfère, comme un prélèvement à taux usuraire non pas sur le débiteur mais sur ses créanciers. Chapeau ! La banque qui doit de l'argent à ses déposants (les soi-disant dépôts sont une dette comptable et réelle), leur prélève une quote-part démentielle de sa propre dette à titre d'intérêts usuraires inversés !

On marche totalement sur la tête.

C'est contraire à tous les principes du droit. En un mot c'est du vol organisé par une mafia qui vit à cheval entre l'Etat et le secteur bancaire et qui légifère en sa faveur avec une totale absence de principe pour son seul intérêt et celui d'une brochette de cadres aux bonus extravagants compte tenu des pertes abyssales qu'ils ont réalisées.

Si le Conseil Constitutionnel avait un sens, il aurait dû retoquer ces textes aberrants qui rendent obligatoire le compte courant et en organise le vol "légal". Le lobby pétainiste a fait en sorte qu'on ne puisse sortir d'un compte qu'à son détriment et au profit d'une autre banque. Et il fait la chasse au liquide pour imposer la traçabilité totale de tous les échanges. En un mot la grande banque universelle française est un système qui a accepté d'être un auxiliaire du fisc pourvu qu'on les laisse se goinfrer sans limite au mépris du droit.

Le tout baigné dans un bla-bla sur la "banque éthique" et autres balivernes pour gogos.

Nous aurions pu naturellement rappeler les grands délires des banques universelles françaises. Les exploits du "crazy Lyonnais" restent dans toutes les têtes. Les techniques de gestion avancée de la spéculation de la Société Générale sont encore fameuses. C'est la ruine de trois fonds de BNPPARIBAS qui déclenche la crise des marchés monétaires mondiaux et l'explosion financières de 2008. Le Crédit Agricole se fait étriller sur tous ses rachats de banques, totalement aventurés. Dexia a été le succès que l'on sait. Un livre récent montre comment est gérée la Caisse des Dépôts, tenue étroitement par la mafia des inspecteurs des finances qui mélangent adroitement positions administrative et politique. La ruine de Groupama qui croyait faire une bonne affaire en rachetant de la dette grecque et italienne n'est pas mal non plus.

Rappelons au passage que nationalisation puis dénationalisation ont fait de ces banques universelles "privées" l'exemple français d'une oligarchie à la soviétique.

Et si on veut encore remonter le temps, évoquons le glorieux souvenir des contrats d'assurance collective souscrits sans qu'ils le sachent par les déposants, énorme escroquerie qui voyait quelques complices à la tête des banques et des assureurs se gaver d'énormes prébendes sous forme de commissions d'apport ou de gestion, ou en volant carrément les excédents techniques des contrats d'assurance.

À chaque fois, à la tête de ces groupes, c'est une poignée de dirigeants qui se sont servis sans limite. Et les sommes se comptent en dizaines millions d'euros. Au total à peine plus de 500 personnes enrichies sans cause alors qu'ils ont ruiné leur établissement et essaient de se refaire la cerise avec l'argent des déposants.

Il faut évidemment démanteler ce système mafieux. Comment ?

C'est très simple. Le premier acte est de créer un concept de banque de paiement qui reçoit de vrais dépôts qui restent la propriété des déposants. Ces banques sont des sociétés de purs services qui doivent être soumises à une concurrence féroce, afin de faire descendre les frais de gestion au minimum technique. Que ces sociétés facturent des frais au forfait ou à l'acte soit. Mais que les tarifs correspondent aux frais et une marge raisonnable. Gardons à l'esprit que toute la gestion est quasi automatique, reportée pour la saisie sur l'usager et que la réduction de l'usage des espèces limite encore les frais de gestion. Les frais sont essentiellement des frais d'amortissement de systèmes informatiques.

À chacun de choisir l'établissement le mieux disant pour des actes de simple tenue de compte et de paiement. Cette activité doit rester totalement indépendante de l'activité de crédits et du loyer de l'argent. L'avantage de banques exclusivement spécialisées dans le paiement, c'est qu'il n'y a aucune raison d'en brider l'extension internationale. Et il n'y a aucune raison qu'elles soient sous la tutelle de la banque centrale puisqu'il n'y a aucune gestion de risque.

À côté de ces établissements on aurait des systèmes totalement indépendants : les banques de crédits, travaillant sur argent collecté par souscriptions de bons ; Les banques de financements spécialisés ; Les banques d'affaires, travaillant uniquement sur fonds propres ou par émission d’obligations. Les fonds de placements et d'investissements et les organismes de gestion de fortune compléteraient le dispositif.

Tous ces métiers doivent être exercés dans des entités entièrement indépendantes pour éviter les conflits d'intérêts qui sont la base abjecte du système actuel.

Tous les contrats seraient clairs et nets. Et chacun prendrait ses risques de façon parfaitement lisible. Il serait parfaitement inutile de prévoir une garantie des dépôts. Et la faillite d'une banque de crédit ou d'affaires n'engagerait que des investisseurs assumant leurs risques.

Ce système qui se mettra en place à terme de façon presque obligatoire, parce qu'il est LE SEUL LOGIQUE et RATIONNEL. C'est le seul à ne pas être basé sur un concept de vol organisé. L'obstruction hargneuse des grandes banques universelles françaises et des hauts fonctionnaires des finances. doit être cassée avec toute la violence législative et réglementaire nécessaire.

C'est l'Europe qui devrait en prendre l'initiative.

Mais les obstacles sont nombreux : toutes les grandes banques néerlandaises, italiennes, allemandes, grecques, espagnoles sont quasi en faillite. Les Etats-Unis ont fauché tout le marché des grandes opérations de banques d'affaires transnationales. Le bunker français et les multiples établissements européens en difficulté forment un bloc aussi malsain que difficile à faire bouger.

Pourtant, il le faut. Sinon le vocable de bankster a encore quelques beaux jours devant lui. Aujourd'hui, il est parfaitement justifié.

Socialisme : la décomposition délirante

Une campagne sans réel projet

Est-ce un effet de la grippe qui s’est emparée du pays ou d’un souffle au cœur plus durable ? La France socialiste est entrée dans le délire.  Toute à sa joie de ne plus avoir à s’occuper du peuple et des ouvriers,  la voilà en plein « trip », en plein vol au dessus d’un nid de cocos aussi vide que le regard de Lénine dans son formol moscoutaire. Il ne s’agit plus de promouvoir le prolétariat mais de sauver la terre. Il ne s’agit plus de d’aider les pauvres mais de saquer les riches, les vilains, les affreux, les méchants, les ennemis de la terre, l’humanité dévoyée toute entière attachée au meurtre de Gaia.  La haine sociale s’allie à l’enflure écologique pour  promouvoir un n’importe quoi  hargneux où la réalité n’existe plus.  Les éléphants roses volettent allégrement dans un paysage psychédélique où aucune contrainte n’existe sinon dans les mots qu’on fait valser allègrement comme un boxeur s’entraîne à frapper son ombre avec la sombre énergie du somnambule.    

Voici la médecine libérale assassinée par une grandiose imbécile hallucinée.  Plus un médecin ne veut s’installer. Les clientèles achetées au prix fort  ne se vendent plus.  Le désert médical existe et s’étend dans l’indifférence générale de la gauche.  Partout en cette période de grippe les répondeurs téléphoniques répercutent le beau message : « nous ne prenons plus de nouveaux patients. Allez voir du côté des urgences ou appelez le 15 ». Ah, le 15 ! « Vous avez la grippe et des maux de tête ? Je vais vous prendre un rendez-vous pour un scanner à… Criquebeuf ».    Vous laissez tomber. Vous rappelez une heure après le même 15. « Oh c’est la grippe, acheter du paracétamol, il n’y a pas besoin d’antibiotique contre les virus. Le scanner ? Vous êtes dingue, un scanner pour la grippe ! ».  Aucun des jeunes médecins n’envisage plus d’autres postes que celui de fonctionnaire. C’est tellement mieux d’être médecin chef de la sécurité sociale. On ne voit plus de malades et, comme Zazie, on « peut emmerder » ceux qui se les coltinent. Où une jolie planque dans une ARS, le nouveau système soviétique mis en place pour gérer les gros Kombinats de soins amiantés.  35 heures et sortie tous les soirs  à 17 heures. Pas d’obligation de travailler. Plus une vingtaine de jours d’absence maladie bidon pour compléter les vacances. C’est désormais la SS qui paiera, ou non, les médecins libéraux, à sa guise. Un salaud sous tutelle, c’est mieux qu’un médecin de famille dévoué.  Mais oui. Salaud. Salaud  de mandarin pourri qui vote mal et qui influence les malades. Plus une seule spécialité médicamenteuse  n’est produite en France. Par centaine,  elles sont tombées en ruptures de stocks en 2016. Et pas des moindres. Sauvons le système par l’achat de médicaments à bas coûts faits on ne sait trop comment en Inde ou en Chine, les spécialistes de la norme bien respectée. Salauds de laboratoires français qui veulent ruiner le merveilleux système de sécurité sociale française.  Il parait que la mondialisation heureuse est une escroquerie. Sauf pour la SS. Là, c’est super ! La marinière de Montebourg est réservée à une industrie lourde qui a disparu. Pas touche à la sécu, aux yeux aussi bridés que le budget.    

Voici le social ramené à une vie gratuite grâce aux robots. Quelques abrutis viennent nous expliquer cent fois par semaine sur la TNT combien la pensée de M. Hamon est novatrice, formidablement en phase avec l’avenir et tout et tout. Presque du NKM, c’est tout dire. Le candidat socialiste d’à côté pense  qu’il faut néanmoins taxer à mort les robots car ils compromettent l’emploi ! Embrassons-nous Folamour  et faisons la synthèse !

On va mettre des vignettes aux voitures. Les salariés du bâtiment vont être encartés. Les loueurs d’appartements devront être encartés également. Le flicage socialiste est en plein boom.  Hidalgo et son petit coco de service veulent mettre les immigrés sur le palier des riches.  Mais pas sur le sien. Paris est en train de pourrir sous ses coups de butoirs. La ville lumière s’éteint sous les assauts du lamentable Missika qui porte sur son visage la malfaisance jouissive, de l’obsédé Baupin, l’homme qui trouve normal que les bus tuent les vieilles dames « le temps qu’elles s’habituent »,  du sinistre  Najdovski qui affiche ses difficultés mentales dans la blancheur maladive de son visage, et d’une majorité municipale qui a mis la ville en coupe réglée. On ne nettoie plus les rues mais on va frapper d’amende les incivils qui la salissent. Répression. Répression. Il est interdit d’autoriser.  Et de circuler.

Une abrutie sur France-inter, radio donnée aux socialistes militants pour des raisons jamais explicitées, explique que la révolution n’a pas tué assez en France ! Fillon ne bénéficie-t-il pas d’un château ? On retrouve Château Chirac et Facho Chirac dans les délires d’une comique d’arrière salle de garde socialiste belge. Les mêmes insultes qu’il y a quarante ans ! On va bientôt retrouver Bunuel et ses clochards qui se masturbent dans des robes de mariées bourgeoises  et catholiques ! Cà, c’est de l’art, du vrai ! D’accord on a fait le mariage homosexuel et il vaudrait mieux éviter de le faire pendant ces mascarades.  Mais on ne va pas se lasser des vieilles habitudes !

L’avilissement de tout et de tous  est total. Il est partout.  Il est quotidien. Les socialistes ont été au pouvoir cinq ans. Deux millions de nouveaux pauvres.  Six cent mille chômeurs de plus quand les autres sont au plein emploi. Un état ruiné. Des Français hagards sous les coups de sabre  fiscaux. Beaucoup de jeunes en fuite à l’étranger. Des centaines de milliers de départ de retraités vers le Portugal.  Vous allez voir : on va fusionner la CSG et l’IR. Vous allez voir, on va vous prendre l’argent à la source. Vous allez voir on va raser gratis aux frais des méchants. Vous allez voir,  on va y aller d’un dernier coup de rein socialiste malfaisant.  Il nous reste 5 mois.

D’un côté Mélenchon, ce génie à l’intelligence  surréelle  selon le commentateur A. Duhamel, frappé visiblement par le retour d’âge,  qui nous fait de Chavez le parangon d’une vraie révolution  propre à relancer la France et sa façade maritime. 

De l’autre Macron, qui hurle à s’égosiller en faveur de l’Europe fédérale sacrée, et des indépendantistes corses, basques et bretons  dont la passion anti française est tout autant sacralisée, et qui va sauver l’économie en surtaxant les retraités. Seulement les 40% les plus riches ! Restons raisonnables ! La France dans tout cela ? C’est quoi la France ?

Au milieu,  quatre candidats socialistes sans programme  dont les pulsions sont totalement contradictoires et le réalisme inexistant.  Voici Valls, le menton mussolinien rentré pour un instant,  qui a viré le premier Premier Ministre, puis les Ministres qui le gênaient (qui se retrouvent unis contre lui), puis finalement le Président, qui reprend les thèmes Sarkozistes considérés comme porteur, tout en montrant son mépris du 49.3 dont il a abusé.  Voici le diaphane Peillon, fils d’un dirigeant communiste de la grande époque, éphémère ministre d’un enseignement public en déroute,  qui prétend que son costume est plus beau que celui de Valls  et son nœud de cravate plus moelleux. Il n’a même pas eu le temps de construire un programme.  Mais il a déjà la garantie du FMI, sans doute une décoction de FuMIste.  Avec lui l’Europe n’a qu’à bien se tenir.  C’est qu’il va vous l’envoyer en l’air ce satané TSCG !  Pas comme cette nullité de Hollande qui l’avait fait ministre mais qu’est rien qu’une brêle. Il y a même Montebourg qui pense avoir cuvé sa cuvée.

Les primaires de la gauche n’auront même pas une ligne politique  à trancher. Seulement huit têtes qui, une fois tranchées par le vote,  renaîtront aussitôt comme la Gorgone pour crier à la nullité du mal élu.

2012 avait été une élection déplorable  parce que nourrie de mensonges, de démagogie, de mauvais sentiments.  C’était vrai des campagnes  et de Sarkozy et de Hollande dont l’élection a coûté 40 milliards aux Français et aggravé toutes les tares françaises.

2017, à  gauche, est une sorte de sursaut hystérique dans le n’importe quoi. L’achat de vote est noyé dans le grotesque délirant.  Les électeurs « de gôche » sont conviés à une espèce de fête sous LSD idéologique dans l’ineptie farceuse et le délire injurieux contre les méchants.  Il semblerait qu’ils aiment cela, l’idée de patauger sans frein dans le néant  et dans le sans queue ni tête.

Pendant ce temps l’édition de gauche sort des versions coûteuses des lettres d’amour lourdingues de Mitterrand à une de ses maîtresses.  Plus bourgeois bourrin, on n’a pas lu depuis longtemps. Qui osera enfin dire que le Beau François  écrit comme un cochon ?

Et qui osera dire que le socialisme français institutionnel est mort et en train de s’enterrer dans une sorte de  happening électoral grotesque et  sépulcral,  dans la joie d’une explosion de dérisoire atrabilaire  qui laissera sans voie  (et sans représentation politique)  le pauvre  et honteux reliquat des convaincus ?  

Sirius

Le blog du cercle des économistes e-toile

Le cercle des économistes regroupés dans E-TOILE autour de Didier Dufau, Economiste en Chef,   aborde des questions largement tabous dans les media français et internationaux soit du fait de leur complexité apparente, soit  parce que l'esprit du temps interdit qu'on en discute a fond. Visions critiques sur les changes flottants,  explications  sur le retard français,   analyses de la langueur de l'Europe,  réalités de la mondialisation,  les économistes d'E-Toile, contrairement aux medias français, ne refusent aucun débat. Ils prennent le risque d'annoncer des évolutions tres a l'avance et éclairent l'actualité avec une force de perception remarquable.

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