Chomage : le pire est arrivé. Pourquoi ?

Comme prévu tous les indicateurs de 2013 qui nous arrivent sont catastrophiques. Celui du chômage tourne à la catastrophe incontrôlable.

461.380 chômeurs catégorie A de plus en deux ans.

2.000.000 de chômeurs de longue durée.

Durée au chomage : 555 jours.

Sorties du chômage en emploi : <50%

Près de 5 millions de chômeurs toutes catégories.

L'insee annonce un taux de chômage supérieur à 11% pour l'été 2014.

Nous finirons par avoir les taux d'emploi par classe d'âge. Ils seront catastrophiques. La France est parmi les pays industrialisés comparables le pays qui emploie la plus faible partie de sa population. 

Le blocage interbancaire s'est produit en juillet 2007. La crise ouverte s'est manifestée à la mi-septembre 2008.

La reprise artificielle de 2010 n'était pas durable et a conduit à une rechute sanglante. En système de change flottant les relances budgétaires et monétaires débouchent systèmatiquement sur des échecs :

- Relance Chirac après la crise de 73 aboutit au Plan Barre

- Relance Balladur après la crise de 92 aboutit au Plan Juppé

- Relance Fillon après la crise de 2008 aboutit au plan Fillon-Ayrault de 2012-2013.

A chaque fois on tape les 10% de taux de chômage, on fait grimper la dette et le taux de prélèvements explose.

A chaque fois les résultats sont plus graves : crise plus longue et plus profonde.

Ces crises ne sont pas innocentes : des millions de personnes au chômage, des dizaines de milliers d'entreprises au tapis, des dizaines de millions de personnes appauvries, en France.

Ne pas voir que ces phénomènes sont à analyser dans la longue durée, et non pas comme phénomènes de pure conjoncture est une grave erreur. Les gesticulations politiques sont un épiphénomène, même si, dans le cas Hollande, on ne comprend pas bien le prurit injurieux qui a marqué les premiers 18 mois de son mandat, pour aboutir à un revirement presque complet. 

Les graves quesstions économiques restent toujours :

- Pourquoi le trend est-il constamment ralenti ?

- Pourquoi les crises décennales sont-elles toujours plus violentes ?

- Pourquoi voudrait-on que cette évolution tragique change quand aucun dirigeant d'institutions nationales ou internationales ne cherchent à avancer d'explication de ces deux phénomènes ? 

Malgré tous le mépris affiché par certains sur la croissance et les relations à caractère économique d'une façon générale, la décroissance est un malheur certain qui touche des millions de foyers. Ces épreuves sont réelles pas virtuelles.On peut parler pour la France d'une tragédie nationale.

Rappelons que pour nous les trois causes de la situation sont :

- Pour le monde, un système monétaire défaillant qui permet des déficits et des excédents mosntrueux qui poussent à un gonflement démesuré de la dette globale ; la masse de ettes aventurées expliquent la sévérité des crises et la mollesse de laz croissance globale.

- Pour la zone Euro, un système de monnaie unique sans pilote ni cabine de pilotage est un non sens qui implique que tous les ajustements se fassent par la déflation et la récession.

- Pour la France, la préférence hystérique pour l'impôt et la dépense  pubique la rende plus vulnérable et provoque un chômage de masse et cette situation folle et incontrôlable d'un état qui consomme plus que ce que produisent les entreprises (de plus d'une peersonne et du secteur commercial) et qui a fini par créer une situation intolérable où la moitié de la population vit au crochet de l'autre et où la dette publique risque de dépasser rapidement 100%du PIB officiel et 200% de la valeur ajoutée des entreprises.

L' absence de toute réforme du système monétaire international, le renforcement de la gestion par la norme en Europe et la bouffée de folie fiscale supplémentaire française expliquent que la crise perdure et prend, pour la France, la forme d'une déchéance sociale aussi profonde.

Devises : un faux marché !

Combien de fois avons-nous entendu ou lu que le marché des devises, et a fortiori son résultat, les taux de changes, était le prototype d'un vrai "marché" où des millions de décisions venaient se confronter permettant aux libertés économiques de jouer pleinement et d'exercer leur pouvoir bienveillant, guidées par la "main invisible" de l'intérêt.

Les changes flottants, c'est-à-dire le cours des monnaies laissé à la libre appréciation des agents économiques "sans intervention" des Etats, sont désormais considérés dans la presse comme un état de nature, au-delà de toute critique. Aucune appréciation contraire n'est acceptée dans les médias de la PQN. Le sujet est non seulement peu vendeur mais tabou. Pas un "prix Nobel d'économie", pas un "grand économiste" qui s'écarte de cette idée : "nous ne sommes pas capables de définir à priori le cours d'une devise. Seul le marché a raison. Les Etats qui interviennent n'ont rien compris car on ne peut rien contre les marchés qui sont plus forts que tous les Etats, même le plus grand".

Ces doctrines tournent à la farce. Tout est faux, de A jusqu'à Z.

On le voit très bien en ce moment pour peu qu'on se donne la peine de regarder.

Il se trouve que les autorités de contrôle, un peu partout en Occident, ont fini par se rendre compte que tous les marchés monétaires et financiers avaient été largement manipulés. Ils ont enquêté et confirmé qu'il y avait bien eu manipulation. Tiens-donc : les "millions d'intervenants" pouvaient donc être  manipulés par quelques banques alors que les Etats seraient impuissants ?  Bizarre ? Non, pas bizarre. Car on s'est vite aperçu que le marché des changes était tenu par trois banques réalisant 50% des transactions et que 90% de leurs transactions étaient le fait d'ordinateurs et de progiciels de gestion instantanée des tendances. En un mot, trois gus avec leur ordinateurs réalisent 50% des transactions.

Là-dessus on a vu la BNS doubler ses encours d'émission de FS pour contrer la hausse de la devise, et la Banque du japon effondrer sa monnaie. On a vu qu'un seul propos de la FED pouvait amorcer une dégringolade des devises des pays émergents avec des chutes plus que significatives puisque dépassant 40% dans bien des cas comme la Roupie indonésienne ou le mois dernier le peso argentin, la banque centrale argentine intervenant pour mettre fin à la spirale descendante. On a vu qu'un discours de M. Draghi pouvait arrêter durablement un train de spéculation sur l'Euro. Une voix serait plus forte que "des milliards d'actes quotidiens".

Bref, on a vu que le marché des changes étaient tout sauf un marché parfait. C'est un marché de spéculateurs et de régulateurs où la manipulation est partout présente et qui ne correspond à rien sinon à donner l'exemple caricatural d'une instabilité chronique associée à des marchés purement spéculatifs et dotés d'instruments de spéculation concentrés entre quelques mains.

L'Europe a renoncé à utiliser le levier des changes et le change de l'Euro est la variable d'ajustement de toutes les spéculations et manipulations qu'elles proviennent des états ou des intervenants principaux.

Il s'agit d'une faute contre l'esprit autant qu'une sottise économique.

Certains ont affirmé que contrôler les grandes opérations contre les monnaies était impossible. Si la loi internationale  interdisait le "short" des monnaies à partir de fonds rassemblés à cet effet (en général des crédits bancaires atteignant des montants fous) avec des sanctions extrêmement lourdes pour tous les complices, il n'y aurait pas de nouveaux Soros se vantant d'avoir fait fortune sur le dos de la Livre anglaise.

L'examen de la réalité, et il n'y a pas besoin de microscopes, montre bien que toute la théorie qui fonde actuellement la gestion internationale des monnaie est substantiellement fausse et controuvée. Rappelons que la double hélice des crédits qui est à l'origine du gonflement maladif des dettes globales ans le monde, elles mêmes responsables du désastre économique actuel, est la fille des théories sur la nécessaire abstention des Etats dans la gestion des balances de comptes extérieurs.

C'est tout un pan du credo qui prévaut depuis 1971 qui est à démolir et à reconstruire sur des bases différentes.

Volcker vient de dire qu'il fallait une monnaie mondiale. C'est l'idée que nous avons exprimée dans notre article "en route vers le Mondio", il y a 5 ans maintenant. La monnaie unique montre bien que cette idée, pour être efficace, doit être complétée par des modes de gestion opérationnels permettant un pilotage au jour le jour. Les normes ne suffisent pas.

Malgré l'évidence, rien ne bouge sur ces sujets essentiels. La leçon fondamentale de la crise n'est pas tirée.

 

Didier Dufau pour le Cercle des économistes e-toile.

Dépenses publiques : les cinq non-dits

On pourrait penser que tout a été dit et redit sur la dépense publique, son mode de formation, les méthodes pour la maîtriser et le champ d'application des réductions. Il n'en est rien. Si la dépense augmente sans cesse au point de représenter l'équivalent de la valeur ajoutée des entreprises, situation absurde et dangereuse s'il en est, qui pousse en permanence à une spoliation fiscale exacerbée et sans issue, c'est bien parce que son mode de formation n'est pas réellement compris. Pas de diagnostic sur les causes, pas de thérapeutique efficace.

Comme dans d'autres domaines, c'est à la source qu'il faut réduire les dérapages. Considérer que la démocratie pousse les élus au n'importe quoi et que la démagogie est la seule cause de toutes les glissades  n'est pas nécessairement faux, mais l'idée est peu opérationnelle. On ne voit pas ce qui changerait la psychologie des élus ! Le péché originel peut être aussi mis en cause. Mais que faire ?

Depuis le premier livre d'alerte de Bloch-Morhange (La révolte des contribuables la fiscalité sous Mitterrand, Editeur : ALBATROS; Le Figaro (1983)), des centaines d'ouvrages ont tenté de cerner les causes de la dérive des dépenses publiques et ont proposé des solutions. Tous sont excellents, parfaitement documentés, rationnels. Et pourtant rien n'y fait. Cela grimpe sans fin.

N'y aurait-il pas quelques mécanismes sournois dont l'action ne serait pas bien perçue (ou négligée) et qu'il conviendrait de bien comprendre pour les mieux maîtriser ?

Nous en voyons  cinq.

L'effet conjoint du  trend et de la progressivité

L'effet complémentaire  du cycle  

L'effet de la financiarisation outrancière

Le goût pour les fausses gratuités

La confusion du pouvoir politique et du pouvoir administratif

Faute de s'attaquer à ces cinq causes, si possible en même temps, on n'aboutit à rien, comme l'échec de la RGPP et de son succédané "hollandais", la MAP,  l'a montré. On sait que le Président de la République  actuel a réussi, depuis 2006, l'exploit d'exalter l'esprit d'économie, sans en mettre en œuvre aucune, malgré des objectifs sans cesse revus à la hausse. A la dernière conférence de presse c'est 50 milliards d'Euros d'économie sur la dépense publique à trouver …d'ici 2017, qui ont été jetés à la crédulité de l'opinion,  alors qu'ils avaient déjà été annoncés aux autorités européennes il y a plusieurs mois.

Rappelons qu'à fin 2017 la dépense publique cumulée depuis janvier 2014 aura été de l'ordre de 5.000 milliards. S'il s'agit d'éviter 50 milliards en cumulé, cela fait 1% d'économie. Si on parle en glissement,  on aboutit à 100 milliards, soit 2%.  Grandiose ! Et il faut parler de "véritable révolution", "d'effort jamais vu" ou de "retour du complexe de Zorro" pour arriver à une résultat aussi minable !

Examinons les forces favorables à l'expansion de la dépense publique que nous sous-estimons généralement dans le débat français.

La croissance à long terme, qu'on appelle le trend, est une réalité. Au dix-neuvième siècle la croissance était d'environ 1% par an. Au XXème siècle, en dépit des deux guerres et de la crise de 1929, on a été plus près de 3.5%, même si les résultats des études divergent en fonction du champ de l'observation choisi.  3.5% représente à peu près  un doublement de la richesse en 20 ans.  Cette réalité se télescope avec  un fait majeur, notamment en France : l'impôt est progressif. La conséquence est simple : la croissance implique automatiquement, sans aucune décision de personne, une croissance plus rapide des recettes fiscales. La part de la recette publique croit constamment dans le PIB. On peut s'interroger sur ce phénomène : une mesure dite "de justice fiscale", statique ou instantanée comme on voudra,  a-t-elle pour but de transférer toujours plus de richesses vers l'Etat ? 

Notons qu'il suffit qu'un seul impôt soit progressif pour que la masse globale des prélèvements le soit. En France, nous avons multiplié les impôts progressifs : l'Impôt sur le revenu est violemment progressif. L'ISF est fortement progressif. La TVA elle-même est progressive puisqu'une part croissante de la consommation change de catégorie avec le développement de la richesse globale. En un mot, la part des produits dits "de première nécessité" diminue constamment en fonction de la croissance. Le résultat est une imposition nettement progressive qui "prend l'ascenseur quand le PIB prend l'escalier". D'une année sur l'autre, le mouvement est presqu'imperceptible, mais dans la durée, la capture par l'Etat d'une part croissante de la richesse supplémentaire produite devient majeure.

Ce n'est pas propre à la France. Tous les pays à fiscalité progressive sont dans cette situation. Beaucoup ont compris qu'il fallait "rendre au contribuable" la sur-rente provoquée par la progressivité. Les ressources de l'Etat doivent être proportionnelles au PIB et non pas progressives. L'effet de la progressivité doit resté cantonné à un arbitrage fiscal entre riches et pauvres plutôt que d'alimenter perpétuellement en hausse le moloch étatique.     

Cette idée est totalement absente en France où on considère que toute plus value fiscale est bonne à dépenser. C'est même très commode de le faire puisqu'il n'y a pas à changer les taux d'imposition et que l'argent est rentré tout seul. La procédure budgétaire institutionnalise la prise en compte de la rente de progressivité puisqu'on définit arbitrairement un chiffre de croissance, généralement surévalué, qui implique une hausse plus rapide des recettes que la croissance du PIB, et qu'on ajuste les dépenses aux recettes.

La seule solution : constitutionnaliser le fait que la progressivité ne doit pas servir à accroître le revenu de l'Etat et que les excédents doivent être rendus sous une forme ou une autre. On notera que depuis que la réduction de la dépense publique est en débat, cette déviance de la progressivité n'est jamais évoquée et ne fait l'objet d'aucune suggestion dans aucun parti.

L'effet complémentaire du cycle est évident. Le trend n'est pas constant. La conjoncture connait des phases molles et des phases d'accélération brutale. Lors de ces dernières la progressivité joue à plein. On voit alors le rendement de l'IR dépasser 7%, comme sous Rocard, rythme d'un quasi doublement en dix ans (et pas 20 comme le PIB). Des flots d'argent coulent dans les caisses. La tradition française est, pour le gouvernement, de tout dépenser de la manne en question.  

Le phénomène a pris un tour tangible pour l'opinion avec l'affaire de la cagnotte, à la fin du siècle dernier : après le coup de massue fiscale de Juppé, les socialistes arrivés au pouvoir de façon impromptue à cause d'une erreur politique majeure de J. Chirac, aggravent sans raison la fiscalité. Le cumul des deux hausses entraînent un afflux massif d'argent lors de la phase haute de la conjoncture mondiale à partir de 1997. Au lieu de rendre la plus value fiscale aux Français, DSK annonce que le taux d'imposition baissera avec la croissance qui diluera la cagnotte, c'est-à-dire énonce une énorme sottise, puisque l'impôt est globalement progressif et s'accroit avec la croissance !  Dire n'importe quoi n'a pas entaché sa réputation de grand économiste !

Un dernier aspect, lui aussi sous-jacent, automatique et donc mal perçu par l'opinion est la conséquence d'une économie de plus en plus financiarisée. Comme on l'a mille fois dénoncé ici, la dette globale s'est envolée à partir de 1971 et s'est déconnectée du PIB "réel". Ce n'est plus la valeur ajoutée de l'activité qui a fait la richesse mais les plus values sur la valeur des actifs. Appelons cela les bulles financières. Compte tenu de l'extension des impositions portant sur le capital, les plus values et les transactions sur le capital, les plus values fiscales se sont envolées pendant les phases d'ébriété des marchés. C'est ainsi qu'à Paris le maire a disposé d'énormes ressources liées à l'immobilier qu'il a dépensé sans vergogne ("et je ne m'excuse pas" ! dira Delanoë). Ce ne sont même plus des impositions sur le PIB mais sur la mousse des excès financiers.  Il est évidemment aberrant de financer des dépenses régulières sur l'effet provisoire des bulles financières. D'autant que, lorsqu'elles éclatent, les moins values fiscales deviennent également somptueuses.

Trend, cycle et financiarisation ont pour conséquence obligatoire une hausse constante de la pression fiscale. L'Etat engrange dans les phases hautes et …refusent de limiter la dépense lors des phases basses. Il augmente les impôts pour maintenir la dépense, qui est devenu le revenu d'une partie de la population. C'est le fameux effet de cliquet ("ratchet effect" en anglais).

Ces trois mécanismes dont nous devons rappeler qu'ils sont pratiquement invisibles et peu présents dans les esprits, sont la base même de la croissance des prélèvements, alors que personne n'a pris réellement de décision, sinon celle de se laisser glisser quand tout va bien et de maintenir la dépense quand tout va mal.  

Ces trois mécanismes étant compris, on peut évoquer les deux autres qui sont plus directement associés à des intérêts particuliers qui s'opposent à l'intérêt général.

La perversion de la fausse gratuité est un énorme vecteur de difficulté fiscale.  Nous appelons fausse gratuité le fait de dissocier l'acte de consommation de l'acte de paiement. Il y a bien consommation, donc coût et destruction de biens, mais ce n'est pas celui qui en tire le plaisir ou rassasie tel ou tel besoin, qui paie. La conséquence d'un système de fausse gratuité est toujours un coût exorbitant pour la collectivité.

La gratuité du pain institué par Fidel Castro à Cuba, peu après sa prise de pouvoir, est tout à fait exemplaire des effets pervers multiformes de la gratuité.  Le socialisme se devait de supprimer la faim. Tout le monde aurait du pain. Le pays était assez riche pour fournir du pain à tout le monde. Donc le pain est devenu gratuit. Qu'est-ce qui s'est passé ? En moins de quelques mois on donnait du pain aux cochons.  L'Etat qui achetait les grains et payait la transformation s'est vu confronté à des besoins de financement toujours croissants. Il a donc taxé le grain et commencé à réprimer les paysans qui, aussitôt, cessèrent de produire. Bientôt on eut des masses de prisonniers et plus de pain. La famine n'était pas loin. Il fallut abandonner la "gratuité" du pain.

Il n'est pas difficile de voir ces mécanismes à l'œuvre avec notre sécurité sociale, la gratuité des transports etc. La santé et les transports ont en France pris une part démesurée  du PIB. Plus personne ne pense même arriver jamais à l'équilibre. Il n'est pas un jour où une bonne âme ne songe à exiger une nouvelle gratuité. On aboutit à des déficits incurables et à un régime presque policier qui décourage tout le monde. Lorsque Madame Touraine explique aux médecins qu'ils doivent gagner, après dix ans d'études, le quart du taux horaire d'un plombier, le phénomène devient évident. La gratuité encourage les consommateurs indélicats et décourage les producteurs. Il faut donc être extrêmement prudent avec la fausse gratuité. L'essentiel des difficultés actuelles de la France vient du caractère devenu quasiment incontrôlable des dépenses dont le paiement est collectivisé. Le mécanisme introduit un effet politique déplorable : une partie de la société devient débiteur de l'autre et chaque partie du corps social entre en conflit avec l'autre.  Il faut naturellement associer à la gratuité totale, les gratuités partielles qui font, par exemple,  que dans le même immeuble certains auront le même appartement à des coûts de location différents. Pas de meilleur système pour engendrer la haine sociale !

Autre mécanisme délétère de grande importance en France : la capture du pouvoir politique par le pouvoir administratif. Il faut évidemment empêcher que les fonctionnaires qui bénéficient de l'argent public, votent leur budget. D'une façon générale il faut empêcher que ceux qui touchent de l'argent de la République votent leur propre rémunération ou leur propre chiffre d'affaire ou la rémunération de leurs collaborateurs.  

Sinon, les lois de Parkinson s'appliquent sans limite. Nous avons donné sur ce blog l'exemple des Frac. Il suffit de voir l'évolution comparée du nombre des agriculteurs et des effectifs du Ministère de l'Agriculture pour comprendre que la loi de Parkinson est une loi d'airain. On peut aussi méditer sur certaines administrations provisoires comme l'Epad, un "machin" qui survit à la disparition de son objet depuis au moins trente ans.

Plus grave encore est l'extension à l'infini du champ d'application des œuvres de l'Administration. Nous avons décrit et condamné ici trop souvent "l'énarchie compassionnelle" pour ne pas avoir à insister. Si les hauts fonctionnaires veulent "arbitrer la société" parce que, seuls,  ils se considèrent comme dépositaires  de l'intérêt général, il n'y a bientôt plus un geste de la vie courante qui ne dépende pas de leur vigilance intéressée. Arbitrer, c'est arroser les conflits d'argent public et créer des postes de fonctionnaires pour tenir l'arrosoir.

Une des difficultés actuelles de la réduction de la dépense publique est qu'il faut à la fois réduire le champ de l'action publique et réduire le coût des acteurs dans chacun des champs. La haute fonction publique qui a mis la main sur le pays ne tient ni à réduire ses prérogatives ni à augmenter la productivité des services, sources d'ennuis syndicaux dommageables pour une carrière sympathique.

Si on ajoute les institutions internationales, l'Europe communautaire, la décentralisation, la pression vers plus d'effectifs et plus de missions devient un enchevêtrement impossible à démêler. On ne peut pas réduire le mille-feuilles administratif avec les personnes mêmes qui en profitent.

On voit bien que le Parlement français est actuellement pour l'essentiel constitué d'élus qui dépendent quasiment tous, pour leur carrière,  de la dépense publique. Ne parlons pas du gouvernement actuel qui est presque pire, de ce point de vue, que le gouvernement Jospin.

Lorsqu'on laisse la politique économique de la France entre les mains d'un professeur d'allemand,  (qui le parle comme une vache espagnole) qui n'a pratiquement pas exercé (heureusement !)  et d'un prof de maths, M. Eckert, qui n'est toujours pas revenu d'avoir eu un diplôme universitaire avant de se lancer dans la politique, on est sûr que cela va être glorieux et parfaitement utile à la société et aux entreprises…

On voit que les mesures à prendre ne sont pas simples et qu'elles ne pourront l'être qu'après des ajustements institutionnels profonds.

Les règles constitutionnelles suivantes sont à créer :

- Nul ne peut être élu dans une assemblée qui vote sa rémunération

- Nul ne peut toucher deux rémunérations de l'Etat ou d'institutions dépendant de l'état pour son financement.

- Les dépenses budgétaires ne peuvent excéder le budget de l'année précédente augmenté du taux de croissance constaté, sauf vote à la majorité de 66% des membres du Parlement, et pour un temps limité.

- Les bonis de recettes fiscales doivent être restitués aux Français et ne peuvent être utilisés pour accroître la dépense publique.

Une fois ce cadre mis en place les recettes détaillées dans les milliers de livres qui suggèrent des réduction de dépense auront une chance d'être mises en œuvre.

Certains diront : encore des mesures institutionnelles alors qu'il aurait suffi d'un peu de vertu associée à un peu de courage ! D'autres ajouterons : les marchés sont impitoyables avec les démagogues. Laissons les faire !

Soixante années d'expérience démontrent bien que si on ne rectifie pas les institutions, tout continuera comme avant, quelque soit la supervision des Commissaires européens et la puissance des marchés.   Ce qu'on appellera "réduction de la dépense" sera seulement une réduction des allocations publiques pour les populations sans pouvoir de nuisance politique. Alors que la priorité absolue et immédiate est de ramener de 25 à 20% du PIB le coût de l'appareil d'Etat, en restituant ces 5% à l'entreprise.

Didier Dufau pour le Cercle des économistes E-toile.

Big bang ou big flop ?

Nul doute que la conférence de presse du Président Hollande soit une forme de tremblement de terre politique. En s'annonçant comme "social démocrate" partisan "d'une politique de l'offre", il annonce la fin du socialisme pur et dur comme base fédératrice du "peuple de gauche".  

Bien sûr le socialisme était déjà mort. La disparition de l'URSS et la conversion de la Chine à une forme d'économie de marché, avaient signé la mort du socialisme révolutionnaire, et l'enterrement de Marx, Engels, Lénine, Staline et Mao, dès 1989. Il n'aura fallu qu'un quart de siècle pour que le verbe du PS rejoigne la réalité.

En vérité, le socialisme français, en choisissant comme chef, en 1974,  F. Mitterrand,  grand pourrisseur devant l'éternel, s'était déjà suicidé. Le vieux cynique ruinera durablement  le pays et tuera à jamais la prétention "morale" du socialisme. La péripétie Jospin lèvera la dernière hypothèque, celle d'une régénération par le trotskisme apaisé.  Alors que tous les socialismes européens, de  Blair à Schroeder, avaient jeté aux orties toutes les références à un quelconque marxisme, même dans sa variante atténuée, réduite à la méthodologie, le révolutionnarisme verbal du socialisme français, était de plus en plus décalé.

En en jetant les derniers oripeaux par-dessus les moulins, François Hollande radicalise le constat. Le "peuple de gauche" aura du sociétalisme et plus jamais du socialisme, rendu impossible par le remugle intolérable des régimes socialistes sanglants et la conversion du PS à l'Europe mondialisée.

L'analyse politique de ce geste n'est pas l'affaire de ce blog. Est-ce qu'un Président déconsidéré et au plus bas dans les sondages peut être l'instrument d'une révolution mentale et politique du socialisme français ?  En associant le socialisme à  une forme d'illégitimité, F. Hollande assume son "complexe de droite", symétrique du "complexe de gauche" de la droite. En même temps, il tue Sarkozy une nouvelle fois. Il est vrai que c'est son obsession. En affrontant des décisions cruciales que Sarkozy n'avait pas eu le courage d'envisager, Hollande le rend caduque en assumant une rupture que son prédécesseur n'avait pas faite. Il fait de la politique politicienne qui ravira les analystes politiques, toujours prompts à apprécier les belles manœuvres, même si le revirement actuel rend également caduque les 18 premiers mois de la gouvernance hollandaise, morte en Bretagne avec la révolte des nouveaux Bonnets Rouges.    

Sur le plan économique, qui est celui des réalités lourdes, le Pacte de Responsabilité est-il à la hauteur des enjeux ? En annonçant qu'il allait supprimer  les cotisations familiales qui n'ont effectivement rien à faire dans les charges sociales entrepreneuriales, comme il est répété par à peu près tout le monde depuis au moins cinquante ans (on en discutait déjà à l'arrivée du général de Gaulle aux affaires… en 1958), le chef de l'Etat renverse-t-il enfin la table et amorce-t-il enfin un début de reprise en main de la compétitivité française ?

Le niveau de ces cotisations est selon les chiffres contradictoires publiés par la presse entre 30 et 35 milliards d'Euros, à comparer à la valeur ajoutées des entreprises de plus de 1 personne du secteur marchand non financier : 1.250 milliards d'euros. Le tout doit être étalé sur quatre ans (de 2014 et 2017). On aboutit donc à une baisse de charge de 1% par an, qui est presque ridicule par rapport aux besoins. L'affaire se corse si on tient compte que cette mesure remplacera le CICE, même si ce n'est pas dit comme cela. La "boite à outils" magique de l'ancien Hollande socialiste  a été jetée aux orties par le nouveau Hollande social-démocrate.  Le CICE devait fournir 20 milliards en année pleine. Les naïfs ont cru qu'on ajoutait les 30 milliards aux 20 milliards, chiffres à rapprocher des 50 milliards d'économie annoncés sur quatre ans sur la dépense publique, également de 1.250 milliards.  

La réalité est plus prosaïque. Rexecode a calculé que les 20 milliards après impôts du CICE équivalaient presqu'exactement aux 30 milliards des cotisations familiales avant impôts. Pour les entreprises, le nouveau plan est exactement équivalent au précédent et n'apporte aucun allégement supplémentaire. Il est simplement plus lisible. On a changé le ruban sur la boîte à outil.  

Le déficit de l'Etat devrait atteindre 74,9 milliards d'euros en 2013 alors que l'objectif initial  était de le ramener à 62,3 milliards d'euros. La politique suivie a donc été un échec tragique, alors même que la reprise mondiale s'est enclenchée et qu'on est entré dans la phase "haute" du cycle. En rebaptisant l'outil sans en changer  le montant, et en l'étalant sur quatre ans, se met-on en position de faire mieux ? Evidemment non.

Hollande joue sur les mots mais ne soigne aucun des maux de l'économie française. En revanche le gain politique est évident : c'est désormais aux entreprises, bénéficiaires d'un "incroyable cadeau", comme le dit l'inénarrable Mélenchon, d' "inverser la courbe du chômage".

Pour les amateurs d'histoire et d'idéologie, la social-démocratie est un mouvement qui a eu son heure d'efficacité en Allemagne entre 1890 et 1900. L'idée est que le travail et le capital, associés loin des foucades politiques, se mettent d'accord pour prendre, seuls,  des mesures concertées concernant les entreprises et leurs employés.  La forme atténuée de cette idéologie est, en France, le paritarisme. En enlevant au paritarisme la gestion des allocations familiales, l'Etat reprend la main. Le contraire exact de la social-démocratie. L'Unaf a parfaitement compris que l'étatisation complète des allocations familiales était le premier pas vers sa réduction et sa dénaturation, déjà fortement présente dans le projet du PS.  

C'est le côté magique de la politique en France. On fait le contraire de ce qu'on dit, et ce qu'on dit n'est pas ce qu'on dit. La personne qui le dit, élue alors qu'elle n'avait jamais travaillé de sa vie, entourée par l'équipe la plus nulle depuis Charles X,  a tout raté et se trouve complètement dévalué.

Mais tout est changé. Le big flop est devenu un big bang !

Le Français, né malin…



500.000 lectures sur ce blog

Nous avons créé ce blog en juin 2008, parce que nous étions lassés de voir que nos commentaires sur les forums principaux, notamment celui du Monde, étaient régulièrement purgés, ce qui rendait impossible ce à quoi nous tenions par-dessus tout : mettre les faits de notre côté alors qu'ils nous donnaient raison dans la durée.

Depuis 2006, sur ces forums et dans nos bulletins de conjoncture, nous annoncions l'arrivée d'une crise très sévère sur la base d'un raisonnement très simple : le cycle impose, tous les huit à dix ans, une crise qui est alternativement molle et sévère. Depuis l'abandon des disciplines de Bretton-Woods et l'installation d'un système de changes flottants, les crises ont tendance à être constamment plus fortes du fait du gonflement global de l'endettement. Avec des taux d'endettement supérieurs à 400% dans les pays de l'OCDE, taux intenables, les crises de crédit seraient nécessairement plus graves. La crise décennale du début des années 2000 avait été plutôt légère. Nous étions mûrs pour la crise sévère. Il n'était pas difficile d'annoncer, dès 2006,  avec logique et confiance, que nous allions traverser la plus grave crise depuis 1929, et nous avons correctement prévue dès l'été 2007 le déclenchement de la crise ouverte pour l'automne 2008.  

En juin 2008, les journaux s'interrogeaient enfin : allions-nous connaître une récession ? A tous nous avons écrit que "oui, nous allions avoir une récession", et qu'elle serait terrible. Auparavant nous avions écrit au candidat Sarkozy qu'il ne fallait pas annoncer une croissance accélérée pendant son quinquennat car sa mandature serait gâchée par la crise la plus sévère depuis la guerre.

Nous ne pensions pas à une crise de type 1929, mais plutôt à une crise de type 1992-93 aggravée. Ce n'est que si les Etats ne faisaient pas leur travail que nous risquions de voir revenir les années sombres de la décennie 1930.

Notre idée était qu'il fallait intervenir sur les trois causes majeures des difficultés :

- Mondialement, il fallait réformer le système des changes pour restaurer la responsabilité des Etats vis-à-vis de leurs grands déficits ou excédents ce qui impliquait un abandon au moins partiel des changes flottants et de la liberté totale des mouvements de capitaux à court-terme.

- En Europe, il était urgent de créer une instance de gestion de la zone Euro, dans un cadre plus directement démocratique que celui de l'Union Européenne, avec la création d'un poste de Chancelier de l'Union Monétaire, situé à Paris, et  disposant d'un pouvoir d'intervention sur les "trésors" nationaux  et les marchés des changes, en même temps qu'il s'assurerait que les économies locales ne divergent pas trop.

- En France, il fallait réduire le Moloch administratif mis en place depuis des lustres au nom d'une "énarchie compassionnelle" promue et imposée par des hauts fonctionnaires disposant à la fois du contrôle médiatique, du pouvoir bancaire, du pouvoir administratif et du pouvoir politique. Leur étiquette politique n'avait pas de réelle importance. Les alternances n'étant jamais de vraies ruptures, la France avait fini par devenir une société coupée en deux entre les bénéficiaires de rentes publiques et les productifs.

Aucun élément de ce diagnostic n'a été retenu par les responsables politiques, à aucun des trois échelons. Et aucune action dans le sens de nos recommandations n'a été mise en œuvre. Avec au bout du compte, cinq ans de récession ou de stagnation, et de nombreux drames sociaux.

La doctrine des changes flottants de monnaies administratives gérées par des fonctionnaires et  dont la valeur est étalonnée par les marchés reste la doctrine officielle, en dépit de sa responsabilité dans  la survenue et la gravité de la crise.

Les Européistes ont  profité des évènements pour dépouiller les pouvoirs de contrôle des banques anciennement exercés par les Etats membres au profit de la BCE. Etats membres ou Etats démembrés ? Rien n'a été fait pour empêcher la logique dépressive des réajustements intra-européens. Le change de l'Euro reste à la merci des initiatives des autres, sans réaction de l'Europe.  

Les hauts-fonctionnaires se sont appuyés, en France, sur la crise, pour aggraver dramatiquement la fiscalité au point de quasiment tuer le secteur marchand qui a subi seul, comme d'habitude, les conséquences de la récession.

Les résultats globaux, européens et français sont dramatiques.  L'échec des politiques menées n'a conduit à aucune remise en cause des comportements, des idées et des modes d'organisation responsables de la crise.

Pour autant qu'on la comprenne, car elle n'est jamais vraiment explicitée, la pensée des grands dirigeants mondiaux, européens et français est à peu près la suivante :

- Oui il faut un peu plus de coopération dans le monde. Les banquiers centraux se voient. Ils coordonnent leurs politiques en secret. Le G.20 permet des évolutions concertées. Le secret bancaire a été globalement levé. Les banques sont sous tutelle très étroite. Cela suffit pour que l'action des banques centrales soient seules nécessaires et efficaces. Donc ne changeons rien à notre chanson même si les paroles sont un peu décalées par rapport à la musique.

- Oui il faut un peu plus de coopération en Europe. Mais la discipline doit être la source du renouveau. D'où le traité "Merkozy". C'est la Commission qui fera régner un certain ordre dans les finances publiques des uns et des autres. Comme les banques sont ou seront sous tutelle de la Banque centrale, on peut désormais dormir tranquille. Il est parfaitement inutile de changer et de chanson et de musique.

- Oui il faut baisser les prélèvements en France. Les Vœux du Président, en ce début d'année 2014, sont explicites. Il y a trop d'impôts et qui pèsent trop sur les entreprises. La monnaie unique nous a "protégés". Nous n'avons plus à nous préoccuper de la défense de notre monnaie ni même de la défense de nos banques. Tout cela est parti vers les institutions européennes. L'énarchie pourra se perpétuer dans une certaine irresponsabilité pourvu qu'elle respecte grosso-modo le traité. Selon le clan au pouvoir on soulignera "l'efficacité économique" ou "la justice sociale", mais ce sera, comme depuis 1974, la même politique, d'abord "sociétaliste",  pour faire semblant d'exister. Giscard avait commencé ; Hollande a porté l'exercice à des sommets difficilement égalables.  Sur toutes les autres questions, et notamment le contrôle des effets pervers de la libre circulation des hommes, des marchandises et des capitaux, qui est hors de portée des "dirigeants" nationaux, l'action politique se résumera  à de la com' et à la fiscalité.

Autant dire que rien n'a changé, sauf à la marge. Après six  ans de crise sévère qui a vu des dizaines de millions de personnes perdre leur emploi et des centaines de millions d'autres perdre une partie de leur épargne et de leur revenu, avec des pays entiers envoyés au tapis comme la Grèce et le Portugal, le taux d'endettement global des pays de l'OCDE a cessé de grimper mais reste autour de 420% du PIB. C'est un taux intenable. Comme nous l'écrivions, "le hanneton pousse sa boule de crottin mais se fatigue". Ce taux intolérable, pèsera comme d'habitude depuis 1971, sur le taux de croissance (le Trend) et sur la gravité des crises à venir.

Le cycle décennal n'en sera pas supprimé pour autant. Nous entrons aujourd'hui dans la phase "haute" du cycle. Comme nous étions entré dans la phase haute du cycle en 97, après la crise de 92-93, et en 2006 après la crise de 2001. Nous ne nous en apercevons pas car la reprise est très faible et ses taux de croissance associés, ridicules. En 97 la reprise avait été très forte parce que les besoins avaient été comprimés très fortement et que le système avait réagi par une croissance délirante de l'endettement global. En 2006 la reprise avait été médiocre, avec des taux de croissance sinistres en Europe et en France. Nous pensons que le scénario sera plutôt de ce type là, car l'envol du crédit n'est plus possible lorsqu'on traine une dette globale de 420% du PIB. Ceux qui disposent d'avantages compétitifs marqués et les pays en rattrapage,  en profiteront plus que les autres  !

Le Baltic Index marque une reprise du commerce mondial. Cette reprise est encore à un niveau très bas mais l'orientation est sans équivoque.

On va donc vers trois ans de croissance globalement molle avec une atténuation des stigmates de la crise précédente.

Rien n'ayant été réglé sur le fond, ce n'est pas le schéma de 1945 qui va se mettre en place. Rappelons qu'on 1945 l'endettement global était partout supérieur à 400%, sauf aux Etats-Unis qui avaient concentré les créances et les actifs monétaires du monde. En 25 ans, le taux d'endettement avait été réduit à moins de 200%.

Evidemment, pendant cette période, nous n'avions pas de changes flottants mais des changes ajustables mais administrés, avec contrôle par le FMI, sauf pour les Etats-Unis qui faisaient déjà ce qu'ils voulaient et allaient finalement faire sauter le système. Une Europe supranationale gérée par des fonctionnaires non élus n'existait pas, non plus que la monnaie unique.  La France bénéficiait d'un taux de prélèvement global inférieur à 35% du PIB ce qui permettait un dynamisme entrepreneurial réel et sérieux.

Toutes les leçons de cette période ont été oubliées.

Le capitalisme débridé mené par les Etats forts permettra une croissance mondiale faible et déséquilibrée mais réelle, bien que ponctuée de crises graves parfaitement inutiles et évitables. Les doctrines stupides et fausses sur la bonté naturelle des marchés monétaires et financiers resteront inentamées. Gare à ceux qui, dans l'économie officielle, prendraient le risque de s'y attaquer ! Fini les jolies carrières, les postes grassement rémunérés et les récompenses publiques !  

L'Europe continuera son chemin un ton au dessous. A la remorque des autres et sans politique économique extérieure, sa croissance sera faible et ponctuée de crises locales. La bureaucratie européenne ne lâchera rien. Personne n'a le pouvoir de lui faire lâcher prise.  

La France se félicitera de son "trip" à la Péron. On se souvient que cet abruti avait réussi l'exploit de transformer un des pays les plus riches du monde en cauchemar économique. La triste question est de savoir si nous vivrons un péronisme larvé façon Evita ou énervé façon Chavez. Les hauts-fonctionnaires français ne lâcheront rien. Personne n'a le pouvoir de leur faire lâcher prise.  

La reprise, même insignifiante,  gommera toutes les idées de réformes structurelles.

Paradoxalement, la crise n'a pas été assez forte pour que soient remis en cause les Credo  les plus  néfastes, à la différence de ce qui s'est passé après 1929. L'idéologie de base restera la même : "Vive les changes flottants ! Vive l'Europe supranationale ! Vive l'Euro ! Vive l'impôt ! "

Rendez-vous entre 2024 et 2027 pour la prochaine grande crise décennale !  2008-2009 avait été pire que 1992-1993, qui avait été pire que 1973-1974.  Il se peut que la sévérité radicale de ce qui se passera permette enfin un changement des doctrines et des organisations. Souhaitons le pour la fin de carrière de nos enfants, et pour l'avenir de nos petits enfants !  

Mais nous aurions préféré que la pédagogie de la crise actuelle suffise enfin et que les modes d'organisation néfastes soient éliminées avant un autre désastre.  

Nous espérons que ce blog, qui vient d'atteindre le nombre inespéré de 500.000 lectures, permettra aux économistes qui s'intéresseront à la période de découvrir que toute la séquence 2007-2014 était parfaitement prévisible et lisible, qu'elle porte des leçons importantes et qu'il serait bon d'en tirer parti.

Très modestement, nous pensons avoir eu constamment raison, parce qu'à chaque fois, sur toutes les questions clés, nous avons annoncé à l'avance des conséquences qui se sont effectivement développées selon les modalités et dans les délais que nous avions indiqués.

Nous avons voulu fournir des clés d'interprétation que la grande presse et la plupart des publications ou des économistes "autorisées" fuient comme la peste, soit parce qu'ils ne les comprennent pas (analyser les faits est très fatigant), soit parce que l'effort d'explication n'est pas danger pour des carrières ou des financements officiels.

Il est inutile d'avancer une quelconque théorie du complot. Il existe une pensée dominante, informe mais dominante. La crise est d'abord scientifique et intellectuelle avant d'être politique. Les erreurs sont souvent  le fait de "chevaliers du bien" qui n'ont pas compris que l'enfer est pavé des meilleures intentions. 

Oui les libertés économiques sont fondamentales. Mais il faut des écluses et des canaux pour éviter les débordements. Les mouvements de marchandises, de personnes et de capitaux  doivent s'inscrire dans des processus contrôlables. 

Oui l'Union Européenne est une idée généreuse et bien orientée, mais sa construction ne peut pas être fondée sur le démantèlement des Etats européens, et une pratique d'offuscation des peuples qui veut qu'on mette la charrue systématiquement avant les bœufs pour forcer des changements dont les peuples ne sont pas nécessairement friands. Au prix de désordres désastreux. 

Oui la solidarité est nécessaire. Mais aboutir à l'asphyxie économique n'est pas une solution et prendre plus de 100% du revenu d'un citoyen est la mort de l'idée républicaine. 

Il serait agréable de se dire qu'il suffit d'éclairer un camp politique et que sa victoire électorale permettra de passer de la connaissance à l'action. Le problème est que l'alternance est nécessaire et qu'il faut que les partis de gouvernement se convainquent, aussi bien l'un que l'autre, des remises en cause nécessaires. La pensée a fui aussi bien l'UMP que le PS.  L'idée d'intérêt général s'est évaporée. Les carrières politiques  sont devenues des affaires de  clans appuyés sur des hommes de communication exaltant des postures et manipulant de l'opinion.

Le "sociétalisme" et les chasses à l'homme, pas plus que le "complexe de Zorro",  ne font une politique.  

Ce qui est vrai pour les élections présidentielles le reste pour les élections locales.

On le verra lors des prochaines élections municipales. Lors des dernières à Paris, la campagne avait parlé de tout …sauf de Paris. Il est facile de prévoir que le "débat" portera sur ces questions fondamentales : "NKM fait-elle trop la sucrée ?", à gauche, et "Hidalgo n'est-elle pas une ex-inspectrice du travail qui a choisi de se sucrer", à droite. Attention les diabétiques ! Le tout sur fond de boboïsme militant et d'affaire Dieudonné. Passionnant !

L'Europe n'est plus, et depuis longtemps, un foyer de réflexion transnationale permettant de dépasser les clivages politiciens. Le budget spécifiquement européen qui intéresse vraiment les européistes est celui de la propagande. Tenir l'opinion tout en exploitant les occasions  pour arracher quelques pouvoirs aux Nations, voilà l'obsession. Quel intérêt pour les peuples ? Les élections européennes sont le plus souvent l'occasion de régler des comptes politiques nationaux, sur fond d'abstention record. Personne ne parle du bilan de la précédente législature et n'a la moindre idée du programme de la prochaine. La double question de l'organisation technique de la zone Euro et de la démocratie européenne devrait être au cœur des débats électoraux. Gageons qu'il n'en sera rien et que tout tournera autour de la question de savoir quel parti est le premier en France.

Quant aux cercles de discussion mondialisés, il sont entièrement dominés par les Etats-Unis d'un côté et de l'autre par les groupes de pression, sur le mode ONG, qui défendent leurs prés-carrés dans la mouvance des financements de l'ONU et/ou des lobbies.  Introduire de la lumière dans ces sources de chaleur intenses mais intéressées est quasiment impossible. Il n'y a plus aucune réflexion économique collective désintéressée.

Alors que réflexion collective et coopération rationnelle seront toujours les mots-clés d'une humanité supérieure.

La crise économique que nous avons annoncée et que nous commentons depuis cinq ans et quelques mois est le témoin le plus direct de l'échec d'une approche mondiale non coopérative fondée sur des intérêts mal compris et laissant de côté toute observation économique un peu savante, pour se satisfaire du statu quo pervers que des idéologies molles ou infondées mais politiquement pratiques, appuyant des relations de force, ont créé depuis 1971.  L'ineptie d'une telle démission morale, intellectuelle et politique est masquée par un activisme déplacé sur tout ce qui est facile, dérisoire et insignifiant.   

Tout reste à faire.

Didier Dufau pour le Cercle des économistes e-toile.



RSA : la double escroquerie

Nous avons dénoncé sur ce blog, et cela dès sa création, l'erreur qu'était la création du RSA. Il n'y avait strictement aucune chance que ce système marche. Nicolas Sarkozy voulait une mesure sociale phare "de gauche", pilotée par un "homme de gauche" pour assurer sa réélection. Il avait recruté pour se faire une nullité ambitieuse, Martin Hirsch.  Ce dernier ne ménagera pas sa peine pour faire passer une mesure qui est en fait une double escroquerie.

La première escroquerie est fiscale. Pour financer le RSA, il fallait des recettes nouvelles. On a donc taxé un peu plus le revenu de l'épargne des Français. Les chiffres annoncés : 2.5 MdE. Dans la pratique la recette récurrente est de 6.5 MdE.  Comme d'habitude on a menti aux Français en minorant les conséquences d'un impôt nouveau. Et les dépenses effectives du RSA ne dépassent pas 1.5MdE. C'est l'histoire de la vignette pour les vieux qui recommence. L'argent est parti ailleurs.  

Deuxième escroquerie : celle qui a consisté à annoncer qu'on sortirait de la pauvreté 2 millions de personnes (propos tenus mille fois par Martin Hirsch). En fait on a presque doublé le nombre de personnes indemnisées. Actuellement on en est à 2.2 millions de personnes. RTL ce matin, interrogeait les intéressés : tous étaient au RSA depuis 3 ans ! Les statistiques évoquées parlent de 8% de sortie du RSA sans qu'on sache exactement les causes de ses sorties.

Tout cela était inscrit dans le code génétique de cette mesure politicienne faussement généreuse. Nous l'avons dénoncée dès le départ parce que les lacunes étaient manifestes. S'agissant d'une "mesure généreuse" les médias applaudissent, par principe, au départ et se taisent jusqu'à ce qu'un nouveau projet soit proposé quelques années ou décennies plus tard. Alors on se déchaîne sur les anciennes modalités pour justifier le changement.  

La radio cite ce matin deux  critiques …que nous retrouvons identiquement dans notre papier de l'époque.

- Il y a trop d'avantages connexes attachés au statut de RMiste ou de RSastre pour en sortir facilement. Nous ajoutions : c'est tellement difficile d'arriver à tout obtenir qu'une fois qu'on y a réussi, on ne va pas tout remettre en cause pour…gagner moins, de façon précaire, avec l'angoisse de recommencer tout le processus dans quelques semaines. RTL évalue l' avantage connexe entre 1.500 et 2.500 Euros par an, en  sus des indemnités du RSA.  La mendicité, le travail au noir et diverses activités délictueuses permettent éventuellement de compléter le tout (toutes les prostituées de la rue Saint Denis étaient au RMI à peine un an après la création de la chose par Rocard…).  

- Lorsqu'une crise décennale dure se profile, on sait que le nombre des indemnitaires va augmenter massivement. Lorsqu'on est sage, on s'arrange pour faire face à l'afflux et on ne s'occupe pas de revaloriser les rentes de ceux qui, déjà, ne travaillent pas.   

En fait, sous le couvert de bons sentiments, alors que l'ambition était politicienne chez Sarkozy (moi Président de gauche,  vous vous rendez compte !)  et carriériste chez Hirsch (moi, Ministre, vous vous rendez compte !),  on a enfermé des populations dans l'assistanat de longue durée, qui était déjà le défaut majeur du RMI, dont le "I" (pour insertion) a toujours été quasiment inexistant.

Rappelons que toutes les politiques de charité sont excellentes lorsqu'elles sont :

- Provisoires : elles aident à passer un cap difficile

- Ciblées : tout le monde ne mérite pas d'être aidé

- Assorties de conditions : la personne aidée doit y mettre du sien

- Modulées pour tenir compte de l'état de la conjoncture : les périodes de vaches grasses ne sont pas les périodes de vaches maigres.

- Différenciées en fonction des populations concernées : on ne doit pas traiter de la même façon des populations dont "l'employabilité" est très différente.

- Unifiées et globalisées : toutes les aides doivent être accessibles au même guichet avec une possibilité d'offrir le jeu le plus adéquat, dans le cadre d'un budget global.

- Décentralisées : les commissions d'attribution et de suivi doivent coller au terrain et connaître la clientèle.

- Transparentes : tout le monde doit pouvoir savoir ce qui a été accordé à qui.

- Contrôlées : les abus doivent être durement sanctionnés.

Sinon, on ne fait qu'affirmer un droit à vivre aux crochets des autres indéfiniment.

Il est à noter que F. Hollande ("Moi Président"… et je n'en suis toujours pas revenu !") a repris exactement le même schéma en créant la "garantie jeune" qui permet de rester désormais dans l'assistanat pendant toute sa vie.

"Plus ça change plus c'est la même chose" avait déjà  remarqué Jean-Baptiste Alphonse Karr il y a un siècle et demi . La démagogie parlementaire dénoncée du temps de la Troisième et de la Quatrième République est passée à l'échelon présidentiel, la réduction à 5 ans du mandat, confortant cette tendance.

Le Français, né malin et charitable, est content mais cocu, qu'il soit payeur ou bénéficiaire.

Le blog du cercle des économistes e-toile

Le cercle des économistes regroupés dans E-TOILE autour de Didier Dufau, Economiste en Chef,   aborde des questions largement tabous dans les media français et internationaux soit du fait de leur complexité apparente, soit  parce que l'esprit du temps interdit qu'on en discute a fond. Visions critiques sur les changes flottants,  explications  sur le retard français,   analyses de la langueur de l'Europe,  réalités de la mondialisation,  les économistes d'E-Toile, contrairement aux medias français, ne refusent aucun débat. Ils prennent le risque d'annoncer des évolutions tres a l'avance et éclairent l'actualité avec une force de perception remarquable.

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