Tuez le chèque gratuit ? Pas seulement...

L’inlassable offensive des banques contre  la gratuité du chèque a repris avec de bonnes chances d’ aboutir, dans le climat iconoclaste qui entoure la prestation du banquier Macron, chargé, au Ministère de l’économie, de redonner les couleurs du sérieux économique à une Présidence française qui ne connait que les combinaisons politiciennes et  les joies de la  communication.  

Les associations bancaires, constamment à l’affût de l’occasion favorable pour tuer la gratuité du chèque et qui relancent chaque année leur offensive sans jamais se lasser, vont donc faire la peau du chèque gratuit et peut être même du chèque tout court.

Au nom de la modernité, concept creux sil en est un, qui n’a jamais justifié quoi que ce soit. Le prétexte nouveau est l’émergence de nouveaux moyens de paiements sécurisés utilisés sur les réseaux informatiques et notamment Internet.

Désormais toutes les opérations concernant la gestion d’un compte dit encore «compte-chèques »,  seront payantes. Frais d’ouverture de compte, frais de tenue de comptes, frais de fermeture de compte, frais de consultation de compte, frais de versement sur le compte, frais de paiements à partir du compte (chèque, virement ou carte de paiement ou terminaux de paiements),   frais d’incidents sur le compte,  tout sera l’objet d’une facturation.

Tout cela serait bel et bon si on en profitait pour mettre fin au statut bizarre de l’acte de dépôt bancaire. La fourniture gratuite de la propriété d’une liquidité en contrepartie d’une créance sur la banque, n’a plus aucune raison d’être.  Le « déposant » en fait ne fait pas un dépôt. Il perd la pleine propriété de son argent : et l’usus et le fructus.  En contrepartie de cet abandon, l’usager bénéficiait de la gratuité de la gestion de son compte.  Si on supprime cette gratuité, le statut juridique du « dépôt » n’a pas de sens.  L’acte de « dépôt » rendu obligatoire par l’Etat pour des raisons de traçabilité fiscale des transactions,  devient une prédation sans cause économique sérieuse. 

La fin de la gratuité de la gestion de compte bancaire implique, en toute logique, la disparition des banques de dépôts au profit de deux types très différents d’établissements :

-          Les banques de paiement

-          Les banques de crédit

La banque de paiement reçoit un dépôt mais n’en acquiert ni l’usus ni le fructus. Pour des raisons de sécurité elle doit déposer l’argent reçu à la banque centrale. Dans la pratique, c’est comme si toute l’encaisse des agents économiques se retrouvait à la banque centrale.  Les banques de paiements sont des sociétés de services qui doivent effectuer au moindre coût, dans un univers concurrentiel, toutes les fonctions de tenue de comptes, d’encaissement et de paiement.  A elles de mettre en œuvre les technologies de pointe et de faire baisser le coût des transactions. La seule chose qu’on leur demande c’est d’effectuer les fonctions basiques de la façon la plus économique et la plus commode possible, sachant que chacun peut souhaiter avoir un service qui lui convienne et qui soit différent de celui  voulu par un autre client.

La justification du coût payé par l’usager est la sécurité de conservation (par rapport à la lessiveuse remplie de billets) et la tenue de compte (encaissement, paiement, position).

Une banque de paiement ne fait aucun crédit et ne crée aucune monnaie. Elle stocke et fait circuler l’encaisse des agents économiques.

Si une banque de paiements fait faillite, l’argent des  déposants n’est pas perdu, puisque toute liquidité est dans les comptes de la banque centrale,  au nom du client.  Seul  le capital des actionnaires est perdu en tout ou en partie si le prestataire fait de mauvaises affaires.

Il est strictement inutile de prévoir une garantie quelconque des dépôts. 

De même, il n’y aurait aucun  inconvénient à voir se créer d’immenses banques de paiement multinationales.  Au contraire cela n’aurait que des avantages pourvu que la concurrence soit rendue constamment effective.

Actuellement,  par une inversion morale  totalement stupéfiante, l’accélération de la baisse du coût des transactions grâce à l’interconnexion généralisée  de systèmes d’information décentralisés et miniaturisés sur les  autoroutes de l’information,  est considérée par le groupement des banques comme une occasion de frais supplémentaires pour l’usager.  Déjà en 2002 elles avaient obtenu du juge de ne pas être condamnées par la Direction de la Concurrence pour entente illégale alors qu’elles avaient entrepris de taxer les usagers pour « compenser » la perte sur dates de valeur dues à une meilleure organisation de la compensation. 

Le jeu normal de la concurrence devrait permettre aux gains de productivité de bénéficier in fine au consommateur. Pas seulement aux  banques.  En France le « fascio » pétainiste marche encore impeccablement.  Non seulement les banques doivent gagner sur l’utilisation de l’argent déposé mais aussi sur tous les actes qu’elles entreprennent, et si des gains de productivité apparaissent, ils doivent leur bénéficier et à elles seules.

Une parfaite économie politico-administrative, où les liens incestueux  entre haute administration, finance et politique permet, en France, une gestion protégée et monopolistique contraire aux intérêts des particuliers et des entreprises, tout en étant sans aucun risque pour les dirigeants.  D’où la « surprise » de la première banque de France lorsque ses dirigeants furent condamnés à l’étranger pour des comportements douteux. Ce n’est pas en France que cela arriverait. On a vu avec l’affaire du « crazy Lyonnais » qu’on pouvait ruiner une banque sans grande conséquence, pourvu qu’on soit de l’Inspection des Finances.

La banque universelle, qui multiplie tous les conflits d’intérêts, et qui se fait sauver par l’argent public ou les libéralités de la banque centrale  lorsqu’elle se fourre dans un guêpier,  est le prototype du système intolérable, source de tous les mauvais procédés.

Nous suggérons de séparer complètement l’activité de banque de paiement, de banques de crédits, de banque d’affaires et de banque de gestion de fortune.

Les banques de paiement n’auront qu’une activité : gérer les comptes et les transactions de paiement de façon concurrentielle, sûre et productive. Elles n’ont pas  le droit de faire de crédit ni de créer de la monnaie.

Les banques de crédits sont là pour étudier les opportunités de crédit. Elles travaillent non pas avec les « dépôts » des  agents économiques mais avec l’argent qu’elles recueillent sous forme de placement.  La correspondance entre la durée des placements et des ressources est assurée, afin que la « transformation » de placements courts en financement longs ne soit pas trop importante.  Ces banques sont spécialisées dans le crédit et seulement dans le crédit.  Les opérations de banques d’affaires leur sont interdites.  Elles ne travaillent pas pour compte propre dans des opérations hyper spéculatives.  Leur capital sert à couvrir les erreurs d’appréciation sur les prêts.   Il est à noter  que les banques de crédit gardent la possibilité de créer de la monnaie, puisqu’il peut y avoir un décalage entre les besoins de trésorerie et l’encours de dette.  Le multiplicateur existe toujours. L’ampleur d’une crise de liquidité est réduite puisqu’aucune ruée de déposants n’est possible.  En revanche le refinancement peut venir à manquer si les épargnants préfèrent thésauriser dans leurs comptes dans les banques de paiements plutôt que de souscrire aux  instruments de prêts de trésorerie à court terme.

Les banques d’affaires travaillent sur leur argent propre et  l’argent emprunté mais ne peuvent pas faire d’opération de crédit. Elles ne peuvent qu’investir dans des classes d’actifs et venir en support d’opérations financières spéculatives.

Les banques de gestion de fortune, elles, ne peuvent faire ni crédits, ni opérations de banques d’affaires,  ni opérations de paiements.  Elles produisent et distribuent des instruments de placements, agissent pour le compte de leur client sur les marchés d’actifs, et tiennent leur comptabilité titre.

Cette organisation aurait l’avantage de la clarté et imposerait les distinctions indispensables  entre les différents métiers.

Il n’y a aucune raison qu’un déposant risque de perdre son avoir simplement parce que son banquier s’est servi de son liquide pour faire des opérations dangereuses pour son intérêt propre.  En revanche il prend un risque dès lors qu’il souscrit à un titre de placement émis par le système bancaire.  Le risque est donc déplacé, pas supprimé. Le déplacement reste utile, justement parce qu’il met tout le monde devant de justes et claires responsabilités.

Il est sûr que la division en quatre du monde bancaire a une conséquence macro-économique sérieuse : la thésaurisation sera renforcée. Actuellement, lorsque  les particuliers ne gèrent pas leur solde de compte courant, la banque le fait pour eux… Il apparait un stock mort de liquidité dans les comptes des banques de paiements. En cas de crise, les particuliers peuvent rapatrier tous leurs placements courts vers leur compte courant.  Mais les liquidités étant déposées automatiquement en temps réel dans les banques centrales, celles-ci ont tous les moyens nécessaires pour faire face aux  obligations des banques de crédits, si nécessaires.

Au total le système bancaire sera plus solide. Le risque d’emballement des crédits sera limité par la plus grande facilité de thésaurisation et l’obligation de trouver de la ressource, non pas automatiquement, mais en convaincant un souscripteur. Le risque de ruée est limité. Le meilleur ajustement entre longueurs de ressources et d’emplois est bénéfique.  L’internationalisation serait facilitée, notamment pour les banques de paiements.

Le coût pour l’usager d’un système de banque de paiement, financé explicitement par des commissions ad hoc, serait-il très supérieur  au système hybride actuel ?  Rien n’est moins sûr, vu l’importance des progrès techniques en cours.   Ce serait le client qui choisirait le support de paiement en fonction des coûts encourus, pas le banquier en fonction de son seul intérêt. Les accords anticoncurrentiels seraient condamnables.  Si le chèque est trop cher et qu’il existe d’autres alternatives, il n’y aurait aucun inconvénient qu’elles triomphent sur le marché. Alors que le forcing règlementaire intéressé des banques universelles actuelles pour forcer le consommateur est simplement « fasciste », au sens propre et historique  du mot.  Et il lui appartiendrait de compenser les coûts supplémentaires éventuels  en plaçant  le solde de son compte courant au mieux.  

Bref, en lieu et place du système littéralement pervers qui est en place actuellement, on verrait s’installer une organisation plus productive, mieux équilibrée et plus maîtrisable.

Tuez le chèque gratuit ? D’accord. Mais en réorganisant totalement le système bancaire.

 

Didier Dufau pour le Cercle des économistes E-toile.

La France et les deux faces du Dieu Hermès

Le Dieux Hermès a des chaussures avec de petites ailes aux pieds, symbole à la fois qu'il est le Dieu du vol (piquer et fuir) et du commerce (ne jamais rester bloqué dans une activité en déclin et voguer vers les nouveaux marchés à toute allure).

Le malheur, c'est que l'on ne peut jamais avoir l'avers sans le revers. 

Prenons le choix, imprimé au plus profond des neurones de la gauche française, de la promotion d'une organisation de la production sans "bougisme" ni tension, sous la houlette, soit d'une administration bienveillante et soumise, façon socialisme municipal, soit d'un "contrôle populaire" pas bienveillant, comme on dit au NPA, le nouveau parti anticapitaliste. Il est sûr que des activités ainsi gérées sont verrouillées dans la glaise de leur organisation initiale  et ne savent  faire aucune mutation sans catastrophe. Tout le drame de la SNCF, SNCM, SEAFRANCE, HBL, RATP, Banque de France, France Telecom, UAP,  Poste, etc. est là. Il ne faut jamais confier une fonction commerciale à un système qui ne permet aucun ajustement de produits, de marchés, d'effectifs ni de capitaux. C'est une première leçon du mythe d'Hermès.

L'ambivalence du Dieu grec joue aussi malheureusement son rôle du côté du libre commerce. L'arrivée d'Internet a démultiplié l'aspect traditionnel du dommageable "hit and run",  mais a aussi conduit une nouvelle définition du marketing : "seduce or bully". Ce merveilleux concept perce dans certains  séminaires de management pour "grands comptes", centrés sur la "maîtrise statistique de la masse". Le client n'et plus roi. L'attention à son service ne figure même plus parmi les préoccupations des grands chefs. Le mot clé est "RAF", rien à foutre, en clair. L'important est d'imposer un avantage statistique, générateur de profits immédiats et faciles, le contraire de l'individualisation.

Vous voulez un tout petit exemple ? Vous êtes Orange. Vous ne voulez plus payer d'équipes chargées d'encaisser des TIP. Tout le monde doit payer par prélèvement. Si vous faites en sorte que les TIP ne soient pas remis en banque, vous créez un incident de paiement et bloquez la ligne.  Après les habituelles péripéties du support (sic) téléphonique puis d'une visite, stérile, en boutique, le "client" qui a tout fait bien, et ne veut pas et payer un TIP et repayer par carte bancaire, devient fou. Des voix suaves insisteront : "payez par prélèvements qui évitera tellement d'ennuis". Et hop, c'est gagné. Cela s'appelle faire une pression "statistique" sur le client captif. Avec un minimum d'investissement vous pouvez obtenir que la masse des clients passent par vos arcanes. On fait mal (un peu) au client exprès, par tactique. Vous direz : et la concurrence ? Que fait SFR ? Cette société ne veut plus vous envoyer de facture-papier. Elle vous coupe le service sans rien vous demander. Le fisc vous demande les factures ? Vous n'avez qu'à imprimer vous-même ! Il faut appeler pour annuler cette décision unilatérale. Vous le faites. C'est payant. Au bout des drames habituels à l'usage d'un centre d'appels, vous tombez sur quelqu'un de très gentil qui vous demande mille choses avant de s'enquérir de votre question. Vous coupez court au blabla pour demander le rétablissement des factures papier. Il dit "bien sûr", vous demande d'attendre en ligne une seconde. Deux minutes après, cela coupe. La facture papier n'est toujours pas rétablie le mois d'après. Ce ne sont pas des incidents mais des politiques. Etudiées-pour, enseignées, mises en œuvre. Sans aucune faiblesse. Jamais admises. Il n'y a pas de preuves possibles n'est-ce pas ? Alors pourquoi se gêner ? Cela fait des millions d'économies.

Seul le règlement et les "class actions" associées, pas la fuligineuse "régulation", mot qui ne veut rien dire et faire prendre aux gens des vessies pour des lanternes, pouvent durement sanctionner une entreprise qui couperait un service pour non paiement sans avoir averti au préalable du problème de paiement, ou d'une façon incompréhensible , ou qui se dispenserait unilatéralement de produire des factures-papier. Avec des sanctions automatiques et très dures. Le libre marché est impuissant à faire ce travail.

Il est absolument nécessaire que les pratiques commerciales déloyales soient étudiées, interdites, poursuivies et sanctionnées.

De même est-il simplement tolérable qu'une entreprise quelconque puisse s'introduire dans vos systèmes informatiques personnels sans l'expression d'une volonté d'accord de votre part? Lorsque Canal plus dans son nouveau système réinitialise le décodeur alors que vous êtes en train de regarder quelque chose, avec un accord par défaut dont vous n'êtes même pas conscient, est-ce normal ? Lors que mille et un fournisseurs de logiciels légaux, (on ne parle pas ici des voyous), installent sur votre machine des services dont vous ne savez rien et font des traitements sur vos données personnelles sans même vous demander votre avis, est-ce normal ?

Spéculer sciemment sur la négligence des gens est déjà douteux, mais les forcer à faire des choses qu'ils n'ont jamais envisagées de faire, cela s'appelle du viol.

Seule la loi peut maîtriser le viol, surtout s'il est commis par des grandes multinationales "gérées par des "porcs" et qui ne pensent qu'à leur prochaine prime et leur retraite chapeau", comme on écrit au NPA, ce qui, au passage, est sans grande importance mais parfaitement exact. Pas besoin d'être socialiste, anarchiste ou anti-système pour le dire. La seule légitimité du profit est le service rendu. L'enrichissement sans autre cause que le dol et le viol est condamnable.

C'est encore plus vrai dans le domaine du placement, traditionnellement le paradis des plumeurs de fortunes. Dans un espace financier mondialisé, les sous-jacents sont pratiquement inconnus du profane, qui n'a d'ailleurs strictement aucun moyen de s'orienter dans la jungle des différents "produits" et des classes d'actifs indéfiniment diversifiées. Mais il n'y pas plus de vraie technicité au sein des organismes financiers. Ils ne travaillent pas avec leur argent propre et ils agissent en fonction de signaux extrêmement pauvres : La hauteur d'un taux d'intérêt, la mode, la réputation d'un intervenant, le sens du troupeau.

Collectivement la profession a cherché à avoir des avantages cachés vis-à-vis des "clients". Le plus clair est la rétro commission. "Je place l'argent là où on me donne le plus et je me fiche du reste. Je présente de toute façon mes résultats client en net de mes rémunérations. Personne ne sait  combien je me suis fais de plumes sur le dos du canard". La règlementation commence à arriver sur ce sujet. Heureusement ! UBP a ratissé comme cela du Madoff qu'elle a collé pour  5%  de la valeur dans les portefeuilles clients, qui n'en savaient strictement rien. Les énormes commissions versées n'ont jamais été restituées au client qui a encaissé sa perte avec un minimum de compensation de la part de cette banque. "Seduce and/or bully !"

Quand on s'élève encore au dessus, en prenant le monde et l'histoire des quarante dernières années à témoin, on voit qu'un système monétaire et financier défaillant a permis de faire monter à plus de 400% le taux d'endettement moyen des pays de l'OCDE, chiffre intenable qui a provoqué une perte irrécouvrable de près de 12.000 milliards de dollars. La course des comportements individuels et collectifs a été suicidaire dans ce cadre. On cherche aujourd'hui à résoudre, pour le futur, la difficulté en "régulant l'amplificateur", attitude imbécile et coûteuse. La même qui veut qu'on s'attaque exclusivement  à tous les automobilistes, tout le temps, au lieu de redessiner les points noirs !  

Donc oui, certaines réglementations étaient  absurdes. Mais le contexte s'est largement créé, dans l'affaire qui nous occupe, par la libre action d'acteurs sans contrôle.

Un autre aspect est visible depuis l'arrivée de la micro informatique, précurseur de tous les exemples suivants, associés à la technologie. Un champion capte un créneau de la technologie et devient seul possesseur du créneau grâce à la traîne qu'il a su constituer et qui verrouille les usages. Il n'y a pas d'autre traitement de texte que Word et de Tableur qu'Excel. Le "marché" ne veut pas enseigné, recruté, et échangé en dehors du standard principal qui emporte tout. Depuis 30 ans ! Microsoft domine dans le PC, à 80% des OS. Google tient le marché de la recherche sur Internet, Amazon la vente sur Internet, Ebay, les enchères sous internet, SAP la gestion intégrée informatisée,  etc. D'ailleurs toutes les "start-up" cherchent à valoriser rapidement des "barrières à l'entrée", c'est-à-dire à se retrouver en situation de monopole inexpugnable le plus vite possible. Or le monopole crée une rente au détriment du consommateur une fois que le marché est installé. Une fois encore la "protection de l'innovation" et  la "libre concurrence" ne peuvent jouer avec bénéfice que si un cadre légal est mis en place.

Les marchés ne peuvent être laissés sans organisation ni vigilance, mais ne doivent pas être étouffés par démagogie en prétendant aider le locataire contre le loueur, l'employé contre l'employeur etc. Le consumérisme n'est pas la guerre sociale. Sinon il n'y a plus d'emplois, plus de locaux à louer etc. On peut voler les fruits du passé pas utiliser ce qui n'a pas été créé. L'Union Soviétique est morte de ce constat. L'économie est un flux accélére par des volontés individuelles et collectives.

La production ne doit être non plus laissée à des systèmes figés, où la motivation de changement est inexistante et les possibilités d'ajustement des plus réduites.

Guidés par un instinct très sûr, les Français ont fait exactement l'inverse. Au nom du contrôle des relations de domination, leur obsession plus que les inégalités, ils ont rendu quasiment impossible tout lien contractuel privé, faussant toutes les décisions et tous les comportements. Ils ont développé un secteur protégé gigantesque, où l'Etat est impuissant à bien faire et où les ajustements sont catastrophiques. Ils ont créé un complexe politique, administratif, culturel, bancaire et industriel au dessus de toutes vraies contraintes, en particulier celles de la démocratie. L'abus et l'inefficacité sont partout.

Il faut connaître les deux faces du Dieu Hermès et en tenir compte. Quand on connait ses Dieux grecs on les honore !

 

Didier Dufau pour le Cercle des Economistes E-toile

Profil conjoncturel de la crise

Pour le conjoncturiste, la forme des entrées et des sorties de crise est un objet constant d'intérêt. La cyclicité de l'activité, basée pour l'essentiel sur les fluctuations du "crédit" au sens large et des crédits au sens particulier, est une donnée acquise de la science économique, avec son alternance quasi décennale de crises globales dures et molles. La manière dont le cycle se déroule, en revanche, est extrêmement variable.

On sait que, depuis l'abandon des disciplines et des coopérations associées aux accords de Bretton-Woods, les crises "décennales" (8 à 12 ans) sont de plus en plus violentes, surtout dans leur épisode dur. La crise du dollar de 73-74 a été moins forte que l'ajustement de 92-93 qui est lui-même moins fort que l'ajustement en cours.  La raison de cette violence constamment aggravée est connue : la masse de crédits aventurés est à chaque fois plus grosse, donc la correction est plus forte. Nous avons décrit comment la suralimentation permanente en crédits a fini par créer une économie financière baudruche largement déconnectée des réalités sous-jacentes de production et de consommation. Le placement ne cherche plus à se rembourser sur le flux de production mais sur une plus-value occasionnelle, le plus souvent autoentretenue, jusqu'à l'effondrement final. 

Lorsque la spirale ascendante se découvre dans une atmosphère sans oxygène économique, elle s'arrête puis s'effondre comme un cumulo-nimbus trop mûr, balayant tout sur son passage.

Avec un taux d'endettement global moyen de plus de 400%, un taux dément puisqu'il rend impossible de rembourser intérêts et principal, le monde est entrée en crise, dès 2007, sans moyen d'en sortir vite. Rappelons qu'à un taux moyen de 5% et une maturité moyenne de 5 ans, 400% de dettes par rapport au PIB se traduisent par 20% du PIB à trouver en intérêts  et 80% en remboursement de principal. Soit 100% du PIB. Réaliste ?  Les 12.000.000 milliards d'investissements sans contrepartie de rentabilité, majoritairement constitués de crédits sans espoirs de remboursement, signifiaient que tous les circuits économiques étaient artificiels et que le système bancaire global était en faillite.

Le système bancaire s'est effiloché en 2007 et a sauté en 2008, provoquant un effondrement de la production mondiale (entre 9 et 10%, ce qui est …le coût de la guerre de 1914 ou celui de la crise de 1929 en entier)  et l'arrêt de la croissance du commerce international ( qui a baissé de 12 à 15% en 2009, selon les chiffres que l'on possède, contradictoires sur les taux mais qui confirment l'ampleur du désastre).  

Depuis les années soixante, la vulgate économique veut qu'un cas de récession de ce type soit corrigé par des déficits publics sans retenue et l'inondation des marchés financiers par de la création monétaire.    

Cela a été fait de façon massive et concertée en 2009, provoquant un rebond rapide de l'activité au prix de la ruine des Etats, qui se sont retrouvés avec un monceau de dettes à porter. En vérité, on sait que les relances keynésiennes, en système de changes flottants, ne marchent pas. Il faut aussitôt rétropédaler pour ne pas partir dans le décor. La relance Chirac de 74 finira dans les mains du Professeur Barre, celle de Balladur dans le plan Juppé, celle de 2009 dans le traité "Merkosy".

Alors on a vu les "reprises" toujours annoncées, jamais réalisées,  s'évaporer doucement d'année en année, aboutissant à la stagnation quasi complète de 2014.

Le commerce international a été animé par la volonté de la Chine de se débarrasser de ses dollars contre des biens agricoles et des matières premières.  Ces soubresauts ont laissé croire que le cadavre bougeait encore. La vérité était plus prosaïque : le commerce a eu les reins cassés et n'a repris qu'à la marge, les financements internationaux ayant été quasiment arrêtés, les banques revenant précipitamment sous l'égide de leur banque centrale. La "renationalisation" des banques a eu raison d'une partie du commerce international.

La violence de la crise a mis en lumière les défauts de structure de la zone Euro qui n'a aucun organe de gestion et de coordination et dont l'instrument monétaire qu'est le change a été laissé (ou qui s'est saisie) à un organisme dont ce n'est pas la mission, la BCE.

Elle a mis à nu l'imbécillité des Etats qui s'étaient allé à bloquer leur production et à s'installer durablement dans la dette. La France, malthusienne et socialisante, en est le plus parfait exemple.

Ni l'Europe de l'Euro ni la France ne sont à l'origine de la crise mais on voit que leurs défauts de structures et/ou de politique leur font subir, dans la crise, une souffrance bien plus grande que les autres.

Pour la France les chiffres-clés sont accablants :

- 1.250 milliards d'euros de valeur ajoutée par les entreprises du secteur marchand non financier, à peine plus que la valeur d'il y a sept ans. Le revenu par tête lui a constamment baissé pendant 7 ans.   

- 1.200 milliards de dépenses publiques, soit pratiquement la même somme que la production  privée

- 2.000 milliards de dettes publiques.

- A peu près le double de dettes privées.  

- Les dettes du système financier, y compris notre quote-part des émissions de la BCE ne sont pas chiffrées. Mais là aussi les milliers de milliards d'Euros défilent.  

- 65% de charges sociales  sur les salaires.

- Un manque à employer de 7 à 10 millions de salariés dans le secteur marchand, détruit par un suremploi public proprement dément, et un surpoids déraisonnable de prélèvements obligatoires sur les salaires.

- 15 millions de retraités, 5 à 7 millions de chômeurs, 2 à 3 millions d'assistés presque complets, 5 à 6 millions de fonctionnaires ou d'employés à statut, au total près de 30 millions de personnes payées par les autres, qui sont eux à peine 16 millions de salariés.  

- Une imposition entre 65 et 1xx % sur le revenu des cadres et des entrepreneurs. Avec ce taux d'imposition, plus rien n'est possible, mais que faire les actifs doivent payer chacun au minimum deux personnes inactives.  

- Un système bancaire qui ne vit que sous perfusion (argent gratuit replacé pour reconstituer son capital détruit par les pertes). On est passer d'un multiplicateur de 8 à environ 5. Le "develeraging" continue. Pendant ce temps là les banques réduisent leur bilan et reconstituent leur capital.

- Un déficit commercial structurel, lié à une perte de compétitivité qui n'a cessé de s'aggraver depuis Jospin et surtout Hollande.

- Une économie de la construction sinistrée.

- L'investissement à l'arrêt dans tous ses secteurs (privés, entreprises, Etat et collectivités territoriales).

- Un climat de désespérance pour les jeunes qui ne pensent qu'à fuir (le "djihad" n'étant qu'un des modes de fuite).

Dans ce tableau sinistre, la phase "haute" du cycle existe. Mais comme dans les années trente, on ne la perçoit pas sauf dans les parties les plus dynamiques du monde. Qui se rappelle que 1936 et 37 étaient plutôt des années de reprise ? La crise de 1938 est passée inaperçue de la même façon : trop d'évènements politiques ont brouillé la vue.

Nous en sommes là. Une croissance très basse dans les pays et les zones monétaires  désarmées devant l'endettement, soit par les défauts de leur organisation monétaire soit par leurs délires de dépenses publiques, et un peu plus forte ailleurs, notamment aux Etats-Unis qui paient leurs dettes  dans leur monnaie. Des croissances déséquilibrées et chaotiques dans les pays dits "en développement".

Cette croissance lente est encore là pour 2015 et sans doute 2016. La grande question est de savoir si les deux années suivantes verront en Europe, suivant les Etats Unis, une reprise plus franche s'installer. Depuis 2010, on annonce chaque année que les deux années suivantes verront une accélération de la croissance. Les analystes politiques du camp Hollande espèrent que la Baraka de leur leader est vraie et qu'une reprise perceptible sera là.

La presse s'extasie devant une quadruple conjonction "merveilleuse" :

- Pas d'inflation

- Des taux d'intérêt presque nul

- Un cours du pétrole en très forte baisse

- Un Euro dévalué.

Les augures font les calculs de croissance associés pour la France : 0.4% de PIB en plus pour le pétrole, 0.2% pour les taux d'intérêts, 0.5% pour l'Euro faible. Nous venons de recopier des chiffres lancés de droite et gauche dans la presse de ce dimanche. Conclusion : 1.5 à 2% de croissance en 2015 et le double en 2016. Hollande le chanceux va se présenter avec une formidable croissance aux prochaines présidentielles. Il était nulle part. Le revoici au pouvoir pour 7.5 années ! Et pourquoi réformer quoi que ce soit d'un peu consistant ? "Macronisons" avec des babioles et cela suffira bien !

On peut faire une analyse un peu différente :

- Les taux d'intérêt sont très bas du fait qu'il n'y a pas de demandes de prêts. L'absence de projets à financer et la réticence à le faire tant qu'on a pas remis les comptes à flot ne font pas des taux d'intérêts élevés.

- L'Euro est bas parce que M. Dragui l'a décidé, en inondant les marchés de liquidité, qui explique par ailleurs le point précédent.

- Le pétrole est en très forte baisse (près de 40% tout de même, libellé en dollar) parce que la demande est très faible et la spéculation morte. On insiste sur le gaz de schiste américain : mais en fait, il est en difficulté compte tenu de la chute des prix …

Pour la France, ces évolutions ne sont qu'à moitié des bonnes nouvelles. Les industries compétitives tirées par la croissance mondiale souffrent. Le demande interne reste en baisse. L'Etat continue à s'endetter sans faire d'efforts structuraux d'amaigrissement.  

Donc nous n'allons pas réellement profiter du rebond actuel. Il est réel mais médiocre. Pour les ménages la baisse du coût de l'essence est gommée par la hausse d'autres sources d'énergie. La demande n'en sera pas boostée. La compétitivité-devise n'aura qu'une toute petite conséquence sur l'appareil productif, qui travaille à 80% au sein de la zone Euro, même si la zone connaîtra un effet d'entraînement bénéfique. Les taux d'intérêt bas aurait... de l'intérêt s'il restait de l'épargne vraie  à investir. Mais tout est pris par les impôts. On ne trouve que la liquidité banque centrale, qui est replacée à la BCE !  Le bâtiment est au plus bas malgré des intérêts historiquement bas.

Nous voyons bien aujourd'hui que la poursuite des politiques menées dans le monde par le G.20, dans la zone Euro par Mme Merkel, et en France par les socialistes, ne conduit à aucune perspective.

Une fois de plus les trois grandes réformes à mener sont :

- A l'échelon international rebâtir un système monétaire sain et collaboratif avec parité des intervenants (égalité des droits et pas de monnaies nationales jouant un rôle international), responsabilisation des Etats vis-à-vis des taux de change (fixes mais ajustables par consensus) et fin des excédents et déficits massifs de balances extérieures.

- A l'échelon de la zone Euro, créer une structure démocratique de gestion communautaire de la monnaie et des ajustements intra européens. Ou mettre fin à l'Euro (ce qui n'est pas notre premier choix).

- En France, restructurer massivement le moloch étatique en réduisant et le nombre de ses missions et la taille de ses organes, remettre les Français au travail et réduire l'assistanat, et mettre en place un système fiscal équilibré et économiquement responsable.

On voit qu'aucune de ces mesures ne sont même envisagées.

On aura le profil conjoncturel associé : reprise molle globalement mais différenciée en fonction des situations particulières des Etats ; poids de la dette écrasant avec épisodes de paniques ; Europe s'ajustant par la dépression ; France enfermée dans sa fiscalité démente, son socialisme stérile, sa dépense publique effrénée et risquant, toujours plus, un gros collapsus.  

Quelle est la pire hypothèse ? C'est sans doute celle d'un scenario de type année 30. En 1938 une récession mondiale s'est déclenchée, largement ignorée par les commentateurs mais très bien signalée par Alfred Sauvy.  8 ans après le déclenchement de la crise, une seconde crise, plus légère mais réelle, s'est produite. Soit on considère que le coup de froid actuel est cette régression, soit et c'est notre avis, elle est encore devant nous quelque part entre 2015 et 2018.

Le graphique ci-dessous donne le schéma de cette hypothèse conjoncturelle. A ce stade ce n'est qu'une hypothèse. Mais il faudra guetter les signes pour voir si elle se confirme ou s'évapore dans le firmament des idées saugrenues. A ce stade nous croyons plutôt à ce scenario d'un petit choc réellement mondial d'ici à 2018, avec un retour des  risques sur la zone Euro.  Mais ce n'est qu'un pointillé qu'il va falloir surveiller.



Mammouth étatique et hyper fiscalité : qui nous en débarrassera et comment ?

Comme tous les lecteurs de ce blog le savent, nous défendons la thèse que la crise qui nous accable est due à trois causes :

- Un système monétaire international dangereux qui a conduit à la création d'une "économie baudruche", qui est percé désormais de toute part, et qui ne sait comment se débarrasser sans trop de casse de 10 à 12.000 milliards de dollars de crédits irrécouvrables.

-Un système européen qui grève les coûts et entrave les recettes avec une zone euro sans cabine de pilotage qui ne peut s'ajuster que par la déflation et qui entraine le monde dans ses difficultés.

- Une hyper-fiscalité française débilitante qui a ravagé son industrie, provoquant un étiolement presque complet du terreau d'entreprises, un sous investissement chronique, une perte de compétitivité extrême, et un clivage intenable et explosif entre les 20 millions de ménages qui travaillent et qui paient et les vingt millions de ménages qui  attendent l'essentiel de leur revenu de la redistribution étatique.

Le système monétaire international n'a pas été réformé. Au contraire il a été conforté.

La gestion de l'Europe et de la zone Euro n'a pas été réformée. Au contraire ses défauts ont été durcis.

Quant à la France, on voit que le choix a été fait depuis 2008 d'une absence totale de réformes de fond, qui aurait desserré l'emprise démente de la corporation des administrateurs de l'Etat, des Régions, et du Social,  sous la houlette de ce que nous appelons l'énarchie compassionnelle, aggravée aujourd'hui par l'agrégation d'une flopée de petits apparatchiks de parti, passés directement des débats enfumés des AG ou des Cal à des responsabilités d'Etat, sans avoir jamais travaillé.  

Nicolas Sarkozy n'a pas voulu voir arriver la crise en 2007, en dépit des avertissements. Son calendrier présidentiel était entièrement "courtermiste" et politicien.

- Ouverture à quelques cupides de gauche, pour se caler au centre et gêner le camp socialiste ( qui n'aura pas de mal à déconsidérer les "rénégats") .

- Ouverture à l'écologie avec le Grenelle d'environnement (qui finira dans le milliard d'euros perdu dans les portiques et l'autre milliard d'euros perdus dans la subvention d'électricité alternative sans avenir).

-Ouverture sociale vers les non-employés avec le RSA payé par une surimposition des revenus financiers (de l'achat de vote démagogique).

- Ouverture sociale vers les employés avec les heures supplémentaires défiscalisées ( de l'achat de vote démagogique) .

- Ouverture syndicale vers la CGT, dorlotée, à qui on fait de nombreux cadeaux, comme la pénibilité pour les retraites, un rapprochement des régimes spéciaux payés plus cher que la situation avant réforme, une modification du droit de grève indolore dans les transports, etc. (politique stérile qui sera engrangée par la CGT sans aucun retour d'ascenseur)

- Ouverture vers les fonctionnaires avec l'ajout à leur salaire de finalement 75% des économies liées au non renouvellement d'un départ à la retraite sur deux  ( ce qui fera que les fonctionnaires protégés de Bercy verront leur rémunération croître trois fois plus vite que celle des salariés du privé !)

- Ouverture vers les restaurateurs avec la baisse d'une TVA qui ne s'imposait pas (complexe de Zorro).

- Ouverture vers les très riches  avec un plafonnement de l'ISF avec chèque de remboursement pour le millième le plus riche).

- Ouverture vers l'entreprise avec une réforme des 35 heures (qui n'en sera pas une).

- Ouverture vers la presse en déversant les subventions (il se fera "conchier" en remerciement par la plupart des journalistes).

- Ouverture vers tous les mécontentements en déversant de l'argent publique (comme pour les marins pêcheurs).

- Ouverture vers les personnes âgées en réduisant l'impôt sur les petites successions (achat de vote).

La règle : pas de drame ; pas de blocage de la rue. L'important est la réélection, donc pas de rejet massif. Et il  en faut pour tout le monde et pour toutes les sensibilités.

On voit qu'il s'agit d'un programme purement électoraliste qui a pour seul  but de pouvoir se représenter en ayant de quoi répondre à toutes les clientèles : "on a fait quelque chose pour vous".

La crise violente de 2008- 2009, qu'on n'a pas voulu voir venir, balaiera tous ces petits calculs qui auront ajouté des centaines de milliards de dettes aux centaines de milliards de dettes que la crise entraînera mécaniquement, sans rien régler sur le fond.

De panique en panique, on signera le traité Merkozy, qui renforce l'impuissance dépressionniste de la zone Euro, on surtaxera les riches, et on finira, in extremis, par créer une TVA sociale bâclée alors qu'elle était indispensable dès le départ.

Au final :

- Rien n'aura été réformé du système monétaire international qui est confirmé dans sa nocivité.

- Rien n'aura été réformé de l'absence de cabine de pilotage de la zone euro.

- L'hyper-fiscalité n'aura été atténué qu'un temps, le taux de prélèvement en fin de mandat rejoignant quasiment celui du début de mandat.

Aucun des maux structurels du pays n'a été réellement attaqué à la racine. Des centaines de milliers de chômeurs supplémentaires se sont ajoutés. Les faillites se sont multipliées. Les seuls gagnants sont les secteurs super protégés, fonctionnaires des finances, entreprises publiques).

Le calcul politicien se verra comme le nez au milieu de la figure : la première phase de la campagne voit Nicolas Sarkozy chercher à dérouler ce qu'il a fait, tenter de  prouver sa fibre sociale, son cœur écolo, son âme socialisante de gauche.  Son adversaire ridiculisera cette tactique en lançant son impôt à 75% : "Qui est l'ami des riches , hein !".  Il faudra changer de campagne en cours de route, signe d'échec quasi obligé, et foncer dans la surenchère anti-européenne (verbale) , anti-immigré (verbale) et anti-délinquance (verbale), la fumeuse ligne Buisson (un conseiller aimant enregistrer le verbalisme sur magnétophone).

Le mandat Hollande sera de la même eau : un calcul purement politicien. Le pouvoir est à prendre. Soyons assez espiègles et malins pour le prendre. On en jouira et ce sera bien le principal. Pour le reste, nous avons une superbe martingale électorale : "Pendant deux ans et demi on fait payer les riches, ensuite on distribue". On essaie de ne mécontenter aucune des forces qui peuvent mobiliser dans la rue (idem Nicolas Sarkozy 1 qui copiait déjà Chirac 2) et on masque notre impuissance en lançant des réformes sociétales majeures qui nous marqueront à gauche, puisqu'en matière économique, il n'y a rien à espérer.

Le gouvernement Ayrault sera la catastrophe que l'on sait : envolée du chômage et de la dette ; abandon de toutes les esquisses de réformes précédentes. Ruine fiscale des familles aisées. Plus de 10.000 foyers payant plus de 100% d'impôts sur le revenu. La révolte fiscale. Dix millions de personnes, jusqu'ici exonérées, payant l'impôt. L'arrêt de la construction et le marasme immobilier. Les engagement européens jamais tenus. Aucune vraie réforme de structure (seulement des privations de prestations "universelles" ciblées sur les familles aisées , notamment familiales).  

Hollande a mobilisé tout le monde contre lui et finit l'année 2013 avec 13% de satisfaits, l'étalage de sa vie de patachon et dans le mépris général. La fonction présidentielle est déconsidérée ; la France devient un objet de risée mondiale ; elle est marginalisée en Europe ; l'économie s'effondre.

Le Président semble ravi d'être là !

L'année 2014 commence avec un nouveau plan de marche. Il est tout aussi électoraliste que le précédent. L'important est de se retrouver en position éligible en fin de mandat et donc d'avoir des arguments tout en en privant l'adversaire.  Une fois encore, on est dans la continuité de Nicolas Sarkozy.  

On lève l'hypothèque "de droite" du PS en faisant venir Manuel Valls, 5% aux primaires du PS, et un certain Macron, banquier socialiste de gauche (un pléonasme en France). L'idée : transférer la responsabilité du malheur sur les entreprises à qui on aurait fait des "cadeaux faramineux". Rattraper le coup avec les masses surtaxées tout en aggravant encore l'hystérie fiscale portant sur les familles aisées. Montrer grâce à la "triangulation" (l'exécution foireuse d'une partie du programme de droite) qu'il n'y a pas de solution à droite. On conserve les Belkacem et les Taubira pour bien marquer qu'on reste sur les bases sociétalistes initiales qui plaisent tant aux "bobos" spécialisisés dans l'auto-flagellation nationale.  Au moment de l'élection, Hollande apparaîtra dans toute sa gloire "de gauche" après avoir déconsidéré les idées "de droite" :

- "Bien sûr il y a eu la crise mais j'ai résisté à l'Europe qui voulait nous faire "démolir le modèle français"

- Bien sûr j'ai fait payé les riches. C'est autant que vous vous n'avez pas payé.

- Bien sur, les résultats sont désastreux mais c'est la faute aux patrons qui n'ont pas joué le jeu malgré les énormes cadeaux que je leur ai faits.

- Regarder nos adversaires : ils veulent vous faire payer, vous les immigrés, vous les fonctionnaires, vous les petits.

- Je vous protège et je vous protégerai encore".

Les discours sont déjà écrits !

Les sous-entendus sont clairs.

"Peut-être que dans deux ans la conjoncture sera meilleure et je pourrais parader avec un début de résultats. Sinon, on verra. La perspective de ne pas être présent au second tour jouera en faveur du sortant. Alors, Moi, Hollande, je suis prêt."

Le choix de Sarkozy comme leader de l'UMP pose à la "droite républicaine"  un redoutable défi.

A-t-il enfin compris les enjeux de réforme du système monétaire international et est-il prêt d'aller à la bataille sur ce thème ? Rien ne le laisse présager.

A-t-il enfin compris qu'il fallait une reforme forte des structures de pilotage de la zone Euro et un chemin pour y parvenir ? Il n'en laisse rien paraître.

A-t-il enfin compris qu'il fallait restructurer l'Etat en profondeur et réduire drastiquement son emprise sur la richesse nationale ?

Les défis sont considérables. Baisser les impôts alors que ce sont les "riches" qui ont pris des augmentations délirantes et dévastatrices des patrimoines ?  Lorsque  Jospin avait été confronté à ce défit, il avait créé la PPE : la baisse ne doit pas concerner ceux qui avaient subi la hausse par un mouvement inverse et symétrique. On redonnera l'argent pris aux riches…aux pauvres. Vite un chèque. On maintient les pauvres dans la trappe à pauvreté et on bloque le capital et l'entreprenariat ! Si l'impôt doit globalement baisser, on fait comment ? Seuls sont qui ont surpayés seront-ils concernés ? Pour le moment c'est le grand silence.

Restructurer la dépense publique : mais c'est faire mal à des clientèles  (presse, agriculteurs, fonctionnaires) car ce ne sont pas les ROMs et plus généralement les étrangers qui sont le gros du problème de la dépense publique.

Et il faudra répondre à la manœuvre de Hollande : "on a déjà fait tous les cadeaux aux riches et cela ne marche pas . En plus ils veulentvous faire du mal" !

La réunification de l'opposition républicaine autour de Nicolas Sarkozy était-elle la meilleure des solutions ? Rien n'est moins sûr, même si désormais l'opposition est légitimement structurée.

L'erreur de Juppé est de n'avoir aucun programme et simplement de jouir du moment de grâce que lui accorde les sondages. Il faut contrer la parodie électoraliste de M. Hollande dès maintenant pour l'empêcher de fonctionner. Sans parti c'est quasi impossible. Arriver en restant flou pour être élu sur sa bonne mine seule est un pari, à notre avis, perdant.

L'erreur de Fillon est d'avoir raté son coup en 2012. Il aura certes un programme, et on peut le penser, plus puissamment réfléchi que celui des autres. Mais il n'aura pas contré Hollande comme chef de parti  et aura le plus grand mal à ne pas voir ses principales idées pillées par les différents clans.

Reste donc Nicolas Sarkozy. Il lui faudra plus qu'un petit guide électoraliste à court terme comme en 2007. On peut se dire que ne visant aucune réélection à la fin du prochain mandat présidentiel auquel il aspire, il a une carte à jouer vis-à-vis de l'opinion : "je suis là pour l'intérêt supérieur de la nation". On voit la posture mais pas trop la stature.

S'il ne joue que la carte forcée : "je suis en position d'être élu et j'y parviendrais", on retombe dans le petit opportunisme, façon Hollande.

La solution peut venir des échecs électoraux à venir de la gauche socialiste, qui, lessivée aux régionales et aux cantonales, se retrouverait, en quelque sorte,  hors-jeu, en dépit des manigances politiciennes de François Hollande. Une élection par défaut et sans grosse campagne permettrait au chef de l'opposition, quel qu'il soit, de battre Marine le Pen et de proposer, après l'élection, un programme gigantesque de restructuration du pays.   

Mais dans quel état sera la France d'ici 2017  !

Une leçon de la chute des prix du pétrole

Dans un système des changes flottants, la valeur respective des monnaies n'est pas seule à flotter. Toutes les valeurs "d'actifs" flottent également. Et les variations sont d'autant plus fortes que la création monétaire, par les banques centrales ou par les banques commerciales, a été plus massive. Dans une économie "baudruche", comme nous appelons la situation créée après l'abandon des disciplines de Bretton-Woods, toute "classe d'actifs" est alternativement à la veille d'une spéculation à la hausse ou à la baisse.

Dans le cas du prix du pétrole, qui viennent de s'effondrer, la conséquence sur les interprétations fréquemment avancées, est intéressante.

Première erreur : Parler d'un hausse perpétuelle du cours de l'or noir est un non sens. On peut invoquer une hausse tendancielle, guère plus. Nous aurons la charité de ne pas citer les bons auteurs qui voyaient le cours du Brent à 300 dollars le baril en 2014 avant la disparition du pétrole en 2020 (leurs prédécesseurs de 1970 voyaient cette disparition dans la décennie 1990 et au plus tard en 2000). La spéculation sur les cours du pétrole au milieu de la première décennie du siècle avait été tellement forcenée qu'une correction était quasiment obligatoire. Elle a été retardée par les achats chinois qui ne savaient plus quoi faire de leurs excédents de dollars. Et le krach spéculatif a fini par se produire. Cette règle est valable pour toutes les "commodities", y compris l'or qui n'est pas seulement une matière première.

Seconde erreur : croire que le pétrole fait la conjoncture. Les cours du pétrole sont dans la dépendance de la conjoncture pas l'inverse. Beaucoup de commentateurs ont cru devoir expliquer "la crise", depuis 1973, par l'évolution des cours du pétrole. La récession de 73-74 aurait été la conséquence de la guerre israélienne et de la hausse massive des cours du brut qui a suivi la défaite arabe. En vérité c'est la crise monétaire et de change provoquée par l'abandon de la référence à l'or par Nixon qui a provoqué les excès pétroliers pas l'inverse. Plus généralement, faire dépendre exclusivement de la rente pétrolière, qui s'est créée à ce moment là, le gonflement général du taux d'endettement de l'économie mondiale que l'on a constaté depuis 71, est une erreur de jugement.

La fin des "trente glorieuses" n'est pas expliquée par l'évolution du marché pétrolier, pas plus que cette période de forte croissance ne peut se réduire aux besoins de la reconstruction, ou à l'explosion d'un marché particulier. Combien de fois entend-on que la grande croissance a été uniquement le fruit de l'expansion du marché automobile associée à un pétrole pas cher ! Et que désormais tout cela est fini et qu'il faut songer simplement à organiser la baisse démographique  et économique pour songer à un bonheur brut dans l'abstinence.

La conjoncture est entièrement guidée par le crédit et l'investissement. Toutes les crises du cycle sont des crises de crédit, en particulier les phases de crises dures (74, 93, 2009). C'est parce que les mécanismes de régulation monétaire ont été détruits en 1971, que les crises périodiques sont de plus en plus graves. Le phénomène de la double pyramide de crédits, associé mécaniquement aux déficits et excédents monstrueux de balances de paiement,  a fait passer le taux d'endettement moyen à plus de 400%. Dès lors le dégonflement de la baudruche était impératif. Il se produit depuis 2008. Et il touche les marchés de biens, que ce soit l'immobilier, l'or ou le pétrole, en dépit des créations gigantesques de liquidité que les banques centrales ont impulsé (près de 10 mille milliards de dollars tout de même). Un autre mot pour la même chose : la déflation ! Seule une croissance forte dans une cadre plus que légèrement inflationniste et collaboratif permettrait d'éviter une phase de déflation désastreuse. Il n'y a plus de cadre ni de réel collaboration. La déflation est là : surprise, surprise !

La monnaie n'est pas un "voile" sans importance. Monnaie et crédit sont la base de la conjoncture. pas le pétrole.

Un système monétaire international nocif  fabrique des phénomènes conjoncturels désastreux. le système des changes flottants est une erreur calamiteuse.

Delenda est  !

L'effondrement du cours du pétrole, en effondrant en passant les théories absurdes qui font du pétrole la clé de tout, devrait ouvrir les yeux.

Devrait…

 Didier Dufau pour le Cercle des économistes e-toile

Le blog du cercle des économistes e-toile

Le cercle des économistes regroupés dans E-TOILE autour de Didier Dufau, Economiste en Chef,   aborde des questions largement tabous dans les media français et internationaux soit du fait de leur complexité apparente, soit  parce que l'esprit du temps interdit qu'on en discute a fond. Visions critiques sur les changes flottants,  explications  sur le retard français,   analyses de la langueur de l'Europe,  réalités de la mondialisation,  les économistes d'E-Toile, contrairement aux medias français, ne refusent aucun débat. Ils prennent le risque d'annoncer des évolutions tres a l'avance et éclairent l'actualité avec une force de perception remarquable.

Association loi 1901

  
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