Lâchetés

Il est toujours intéressant de faire retour sur quelques questions brûlantes sur lesquelles nous avions pris position au Cercle des économistes e-toile et d'en tirer leçon.


- ISF et bouclier fiscal

Voir ici

et là

Nous défendons depuis toujours la suppression de l'ISF, l'impôt le plus injuste, le plus néfaste, le plus ruineux et le plus stupidement idéologique qu'on ait jamais imaginé. Le bouclier fiscal a été conçu par MM. Chirac et Villepin pour ne pas avoir à toucher à cette vache sacrée du pseudo égalitarisme républicain. N. Sarkozy avait l'occasion de le supprimer. Il s'est contenté d'augmenter le bouclier. Tout lui retombe sur la tête aujourd'hui et les voix qui demandent la suppression conjointe de l'ISF et du bouclier fiscal sont majoritaires non seulement dans les rangs de la majorité mais également, selon les sondages, dans le pays.

On annonce cette suppression pour le collectif de 2011. Tout dépendra des détails. Si c'est pour taxer à nouveau le patrimoine , cela sera de la magouille politicienne sans intérêt.  La bêtise et l'ignominie  font souvent chemin ensemble avec le mensonge.

L'affaire Bettencourt sert de prétexte à faire croire aux Français que "les riches" ne paient pas d'impôts ou disposent de pleins de combines pour échapper au fisc. Rien n'est plus faux. Les beaux quartiers de France passent aux mains de l'étranger. Car des impôts sur le patrimoine se soldent nécessairement par la vente du patrimoine à l'étranger puisqu'ils ne sont plus liés au revenu et il faut bien trouver les ressources quelque part.

Déjà l'île Saint Louis appartient aux étrangers ainsi qu'une bonne partie du sixième et du septième arrondissement. Dans l'immense projet immobilier qui se commercialise à côté du Bon Marché sur l'emplacement d'un ancien Hôpital, plus de 75% des acheteurs sont étrangers. Paris devient une ville de pieds à terre et de touristes. Une frénésie s'est emparée des services fiscaux qui redressent à tout va les estimations en profitant des niveaux de prix de bulle de l'immobilier. Les Français fortunés recommencent à s'exiler. Tous les champions sportifs sont résidents hors de France. Tous les grands managers ne pensent qu'à s'exiler.  Et Nicolas Sarkozy pérorait il y a peu de temps : "La droite veut supprimer l'ISF ; la gauche veut supprimer l'ISF. Mais moi je conserve l'ISF" !  

Il n'y a pas pire sourd que celui que ne veux rien entendre. En attendant les idées que nous défendons depuis maintenant des lustres, le changement d'assiette de l'ISF,  sont reprises par tout le monde, le dernier en date étant Nicolas Baverez. Il y a 5 ans nous étions presque seuls.  Désormais c'est N. Sarkozy qui est seul.  En prime les étrangers qui achètent ces biens exigent et vont obtenir le bénéfice du bouclier fiscal dont ils étaient privés ! Tableau !  
Toutes nos félicitations aux lâches qui nous gouvernent.
 
- TVA sociale

Nous avons développé cette idée à la fin des années 90. Nous sommes parmi les premiers à l'avoir fait en démontrant que cet impôt permettrait de décharger le travail et donc favoriserait l'emploi. Depuis l'idée a été mise en place en Allemagne. La France après l'avoir caressée y a renoncé. pourquoi ? Parce que les charges sont si élevées que les taux de TVA deviendraient exorbitants. Une chose est de passer de 16 à 18% de taux de TVA pour supprimer deux points de Pib sur la production. Une autre est de passer de 20 à 28% de taux de TVA pour réduire d'à peine la moitié les charges sociales sur le travail. Si on se trouve en période de crise, la perte de pouvoir d'achat et de demande globale est immédiate et le gain potentiel ne peut être exploité par les entreprises privées de demande. Si, en prime, on vit une période de guerre des monnaies, les variations monétaires peuvent neutraliser tout le gain possible en une heure. Comme toujours ce genre de mesure ne peut pas s'improviser et impose une vision globale qui n'est pas possible en l'état actuel de l'organisation économique européenne et internationale. Rappelons que si nous devions, en France,  transférer tous les prélèvements sur la TVA collectée par les entreprises du secteur marchand nous aurions une TVA à près de 100% !

Toutes nos félicitations aux lâches qui nous gouvernent.  

- Echec du RSA

Voir nos trois artilces sur cette question ici, ici et.


Nous l'avions annoncé dès l'institution de cette fausse bonne réforme évidemment votée, comme toutes les sottises, quasiment à l'unanimité. Improvisée à la hâte, conçue par un sous ministre de piètre qualité, faussement testée, ne tenant pas compte de la psychologie des personnes concernées, cette réforme ne pouvait qu'échouer. La presse se remplit d'articles constatant que ce dispositif est sans intérêt. Il n'aura servi qu'à créer un impôt nouveau très lourd qui a plombé définitivement l'image de Fillon et de Sarkozy. Mesure politicienne visant à doter le candidat Sarkozy d'un argument social lors des élections présidentielles, elle n'aura même ce rôle médiocre.

Toutes nos félicitations aux lâches qui nous gouvernent.

- Echec de la RGPP

Voir notre article ici.


Nous avions expliqué dès le début que cette mesurette était une plaisanterie. Qui en doute aujourd'hui ?  Pas plus aujourd'hui qu'hier on ne peut réduire les dépenses publiques significativement par ce genre d'exercice.  La dépense publique quand elle est comme en France aussi gigantesque ne peut pas être "rationalisée". Elle ne peut être réduite qu'à la hache d'abordage et au bulldozer. D'autant plus qu'il ne se passe pas un jour où par clientélisme social, la maladie parasitaire de la droite et de la gauche dite "de gouvernement" en France mais aussi en Europe, on n'annonce pas un nouveau "cadeau peuple".

- Echec de la fausse réforme des 35 heures.

Au lieu de prendre la question bille en tête on a voulu finasser. Le résultat :  les dégrèvements fiscaux sur le SMIC sont toujours là et sont financées par la dette. La perte de compétitivité est également toujours là et se retrouve dans l'écart de croissance avec l'Allemagne et le gonflement de nos déficits commerciaux.

Toutes nos félicitations aux lâches qui nous gouvernent.

- Echec de la fausse réforme territoriale

Le "mille feuille administratif", la liberté totale laissée aux régions de faire ce qu'elles veulent en matière fiscale et de dépenses, une décentralisation non maîtrisée, ont conduit à des recrutements débridés dans les régions, sans compensation dans les services centraux et une floraison sans limite de "cadeaux de proximité au peuple".  Aucune réforme n'a été mise en place pour contrer ces évolutions désastreuses. La réforme envisagée intrinsèquement  indigente sera massacrée par les élus-édiles locaux pour la rendre totalement inopérante.

Nos félicitations aux lâches qui nous gouvernent.  

- Echec de la réforme des régimes de sécurité sociale.

Voir notre article ici.
On a vu que la remise en cause du petit risque et du traitement beaucoup trop généreux (remboursement à 100%) pour les maladies de longues durée n'a même pas été envisagée. La réforme était interdite. En même temps que la gestion de type Gosplan du Ministère de la santé et des Hôpitaux donnait à voir ses résultats dans l'affaire du H1N1.

Voici que le Parlement Européen, ce machin méprisé des peuples et qui veut redorer son image, décide d'accorder des congés maternité monstrueux  et aux seuls salariés (les travailleurs indépendants n'existent pas pour les fonctionnaires politiciens qui font les lois en France et en Europe) et qu'aussitôt notre Ministre de la Santé crie aussitôt qu'on va le faire et tout de suite encore. Coût ?  Entre deux et trois milliards d'Euros ! Deux fois la hausse d'impôt justifiée par le prétexte du RSA !  On est riche. Nous n'avons aucun problème. "Travaillez plus pour gagnez plus". Enfin quand vous pourrez. Pour le moment faites-en le moins possible et continuons à emprunter pour payer nos feuilles de soins. Nos enfants paieront.  

Toutes nos félicitations aux lâches qui nous gouvernent.

- TVA réduite sur la restauration : une mesure non durable

Voir notre article ici.

Nous avions montré que cette mesure n'aurait pas les effets escomptées et serait forcément remise en cause.  Nous y sommes.

Toutes nos félicitations aux lâches qui nous gouvernent.

Sur tous ces sujets sur lesquels nous avons prix position il y a maintenant deux ans, la réalité a été conforme à nos prévisions. Rien n'était fondé. Rien n'était solide. Rien ne pouvait être efficace.

La leçon de ces échecs : on ne peut pas faire semblant.   Quand on a choisi la lâcheté, il est impossible d'en sortir.  L'avilissement mène toujours à une avilissement plus grand.  

On dira : "lâcheté, mais c'est un mot bien laid".  C'est le mot qui convient. La France aujourd'hui a sombré dans la lâcheté qu'on croit compenser par des opérations image et une bêlante démagogie. C'est vrai à droite comme à gauche.  C'est vrai pour les dirigeants comme pour la plupart des commentateurs des médias principaux. C'est vrai pour les élus comme pour les électeurs.

Tout le monde savait quelle était la vérité sur les questions que nous venons de passer en revue. Tout le monde. Nous ne prétendons à aucune originalité ni aucune pertinence particulière. Jamais dans un conversation avec un seul élu, un seul dirigeant, et même un seul citoyen de base, les arguments que nous avancions n'ont été réfutés. Ils ont même toujours été largement admis.  Le propre du lâche en politique est de tenir deux discours. Dans le privé, la vérité. En public et au moment de la décision le faux semblant et la mesure démagogique nuisible mais facile, si facile.  

C'est la même chose pour les retraites dont une réforme timide, provisoire et insuffisante, a entraîné les mouvements ruineux et débilitants que l'on connait.  Tout le monde sait qu'il faudra monter l'âge où on peut solliciter une retraite à plein tarif à 65 ou 67 ans. On ne peut pas financer 40 ans de vie au crochet de la société avec 30 ou 35 ans de vie au travail trouée de périodes de chômage. Tout le monde sait que l'iniquité fondamentale du système actuel est entièrement due à la lâcheté gouvernementale qui accepte de payer à ses élus, ses fonctionnaires et aux troupes des syndicats qui cogèrent la nation,  des avantages extravagants qui écrasent le reste de la société et effondre ses capacités productives.

Oui il s'agit bien de lâcheté. Il faut voir l'étonnement glacé de tout ce petit monde devant les mesures prises sans frémir par David Cameron ou devant la réaction libertaire aux Etats-Unis face au risque de sombrer dans le socialisme à l'européenne que symbolise Obama et qui est un chemin effectivement sans retour.

Comment ? Un peuple, dans ses profondeurs, pourrait ne pas être intéressé par des cadeaux et des gratuités ? Comment ? Un gouvernement pourrait tenter vraiment de redresser une situation réellement compromise ?

Pour le lâche invétéré le simple courage est une curiosité qui le laisse perplexe.

Vive l'impôt ! Vive la dette ! Vive le chômage structurel ! Vive la grève !  Vive le déclin !  

Pendant ce temps là la France sort de l'Histoire et les Français de leur histoire.

 

Sylvain Dieudonné pour le Cercle des économistes e-toile.

Commentaire
BCM's Gravatar Excellent article,une nouvelle fois.
Je vais faire suivre cette analyse décapante à quelques personnes de mon entourage adeptes de la "pensée UMPS", je sens que ça va leur faire plaisir ...
Il me semble de plus en plus que des réformes rationnelles sont impossibles dans un mode démocratique, et ce quelque soit le pays, seules des catastrophes (guerres [perdues ..], effondrements financiers, etc.) peuvent permettre de repartir sur de nouvelles bases.
La classe politicienne actuelle risque donc de disparaître tôt ou tard, à moins qu'elle ne parvienne à survivre cachée derrière le paravent européen qui prendra les choses en main, pour notre plus grand malheur d'ailleurs.
Cordialement.
# Posté par BCM | 01/11/10 11:45
jean-marc's Gravatar "Il me semble de plus en plus que des réformes rationnelles sont impossibles dans un mode démocratique, et ce quelque soit le pays, seules des catastrophes (guerres [perdues ..], effondrements financiers, etc.) peuvent permettre de repartir sur de nouvelles bases."

Vous pensez dangereusement. Réformer c'est : Reconstruire, recomposer, reconstituer ce qui avait été détruit, décomposé, dissous" ; mais pour qu'elle raison faudrait-il changer de forme ? La raison qui à créer les formes anciennes n'a pas cessé d'être raisonnable. C'est le cadre qui à changer. Mais l'esprit doit rester le même.
# Posté par jean-marc | 02/11/10 00:44
DD's Gravatar L'article de notre ami Sylvain est sans doute un peu fort. Pourquoi parler de lâcheté ? Nous avons laissé passer cette expression car elle traduit assez bien l'exaspération d'une partie des observateurs devant l'incapacité collective des Français à prendre leur destin vraiment en main pour aller dans la bonne direction. La psychologie compte et ce morceau de bravoure inspiré par la raison mais colorié par la colère donne une certain idée des raisons de la rupture entre le pays et ses dirigeants.

Pour notre part nous nous bornerons à constater que les grandes erreurs qui sont citées ici étaient TOUTES détectables au moment où les décisions ont été prises et que les conséquences étaient entièrement prévisibles. Le système, lui, n'a pas réagi et s'est laissé embarquer dans ces sottises ou demi mesures sans réaction.

Un vrai dirigeant ne peut pas se contenter d'un calendrier exclusivement politique et de tendre le menton pour affirmer virilement que ce que les autres ont renoncé à faire il l'a fait (RSA, TVA sur la restauration, réduction du nombre de fonctionnaires, service minimum dans les transports en commun, réforme des régimes spéciaux, élévation de l'âge légal de la retraite, bientôt risque du grand âge etc..).

Il faut se placer à la hauteur des problèmes et prendre des décisions éventuellement radicale de nature à régler effectivement le problème de façon durable.

Ici on se trouve au croisement d'aspects caractériels du dirigeant suprême et de limites de conception des équipes qui l'entourent.

Le général de Gaulle a réalisé de nombreuses réformes majeures qui ont imprimé leur marque pour plusieurs générations : institution, orientation de la politique étrangère, politique militaire etc. Principalement parce que ces réformes avaient été méditées et peaufinées pendant des décennies et dans l'adversité.

Les réformes de club d'énarques menées les yeux rivés aux sondages par un pur politicien manqueront toujours de souffle.

Faut-il chercher à marquer les esprits ou tenter de marquer son temps ?


Le livre d'interviews des frères Duhamel montre bien qu'en matière de télévision et de radio une agitation forcenée n'a entraîné aucune modification significative de ce qu'on appelle le "PAF" (paysage audiovisuel français).

L'absence totale de vraies réflexions au PS que nous dénonçons depuis l'arrivée de la doctrine fuligineuse du NI-NI et qui s'est dévoyée en système de cadeaux électoraux au peuple et qui est entrain de sombrer dans l'absurdité du "Care", signant la maternisation complète de l'idée socialiste, est tout aussi consternante.

On imagine les deux camp rivés aux sondages et cherchant à trouver des arguments pour prouver qu'ils savent agir sur "le quotidien des Français" (quiconque prononce cette phrase devrait être pendu à un croc de boucher !). C'est pour cela que les Français ne peuvent pas s'exonérer complètement des malheurs qui les frappent.

Un minimum de réflexion, un brin d'honnêteté intellectuelle et un certain souci du long terme et des effets durables permettraient tout de même d'éviter des erreurs parfaitement identifiables dont les méfaits à venir sont totalement prévisibles.

La France souffre du système monétaire international, nous ne cessons de le crier. Mais pour le reste, ce sont les erreurs commises qui pèsent le plus. Elles auraient toutes pu être évitées. Ce qui peut en effet, cher Sylvain, rendre enragé.
# Posté par DD | 04/11/10 09:58
jean-marc's Gravatar "C'est pour cela que les Français ne peuvent pas s'exonérer complètement des malheurs qui les frappent."

Pour sur ! Et c'est pour cela que la démocratie est interpellé. Sauf que les sujet sur laquelle on la sollicite sont brouillés ( sciemment ? ) . A mon avis parce que l'état intervient partout, de fil en aiguille on veut aider ceci cela, on fait des études, on créer un observatoire, on fait des statistiques et hop on alourdit les prélevement parce qu'il faut bien payer les services. On a donc creer des experts et des consultants. D'un autre coté on est toujours sur l'idée que les riches ne payent jamais assez et que les pauvres sont toujours à ne pas solliciter. Cela dédouane l'état qui est en définitive le plus "gros" mangeur à la table de la république.
# Posté par jean-marc | 06/11/10 23:11
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