Une imposture bien française : La RGPP !

Les économies générées par la RGPP sont sinon dérisoires du moins hors de proportion avec les réductions nécessaires pour revenir dans la moyenne générale de l’Europe en matière de dépenses publiques. C’était prévisible. Pourquoi ?  Parce qu’il n’y a pas de coût rationnel ou rationalisable pour une dépense publique.  

Prenez une politique publique : la lutte contre les discriminations. Combien faut-il  créer de postes de fonctionnaires ou autres pour assumer cette noble fonction ?  Il n’y a pas de réponse à cette question.  Une conception est d’affirmer que la justice est là pour dire le droit en cas de plainte.  Il suffirait alors de préciser combien d’affaires de ce genre sont à prévoir et d’en déduire le nombre de postes de juges.  Une autre est de dire qu’il faut « une haute autorité ». Cette conception a triomphé avec la création de la Halde.  Posez la question : combien faut-il de personnel pour cette institution ?  Vous obtiendrez des réponses variant entre cinq et mille ! Et personne ne sera capable de vous dire l’effectif de ce machin ni de préciser comment il a évolué depuis sa création.  Il suffira que les hauts fonctionnaires qui le dirigent  finissent par faire admettre qu’il faut des services disséminés sur le territoire pour que les chiffres explosent. 

Sauf à redéfinir radicalement la politique en question,  le simple examen en commission de rationalisation  n’apportera que  des gains cosmétiques. On ne fera  que ralentir le grignotage parkinsonien  qui de budget en budget fait gonfler les postes et les dépenses au nom des bons sentiments.  C’est ainsi que les institutions se superposent, les mécanismes s’enchevêtrent, les services s’accroissent et se croisent  même quand l’objet initial a disparu du collimateur politique.

Il n’y a pas de limite au temps qu’on peut  accorder à une tâche ; Surtout quand cette tâche est floue.  Et quand l’argent est  là, on trouve toujours à le dépenser.   

La seule méthode efficace est de remettre en cause vigoureusement  les  politiques elles-mêmes et les institutions qui les sous tendent.  Faut-il ou non des départements ? Doit-on admettre que les régions gèrent des transports en train ? Le petit risque médical doit il être couvert par la Sécurité Sociale ?  Est-il réellement nécessaire que les rémunérations des fonctionnaires internationaux soient défiscalisées ?  Pourquoi faut-il que le Sénat dispose de plus de 150 membres et l’Assemblée nationale plus de 300 députés ?  Pourquoi conserver le Conseil économique et social ?  Que ce passerait-il vraiment si on supprimait purement et simplement les mille  et un Fonds d’Assurance Formation ?  Etc.

Et il faut veiller à ce que les administrations  ne produisent rien elles-mêmes.  La politique doit définir des objectifs et les faire obtenir par les moyens les plus concurrentiels possibles, en contrôlant les normes et les résultats.

Toute rationalisation de dépenses est-elle impossible ? Non bien sûr.  Mais c’est extrêmement difficile et  exige souvent des dispositions  législatives ou règlementaires nouvelles qui prennent un temps fou.

Vous voulez changer de Carte d’identité et vous êtes en possession de la précédente que vous allez rendre.  On vous demande un extrait de naissance.  Il suffirait au préposé de la Préfecture   chargé du dossier de consulter la base de données centrale. Non : on exige de vous que vous demandiez à un officier d’état civil  de votre mairie de bien vouloir faire cette consultation et d’imprimer le bout de papier.  C’est la loi !  Et le lobby de la fonction publique territoriale fera ce qu’il faut pour empêcher toute simplification.  Jamais depuis qu’il y a un département ministériel chargé de la simplification administrative, on n’a pu régler ce minuscule problème de procédure

Il ne faut pas seulement déterminer si on peut faire mieux ce que l’on fait mais si ce que l’on fait est réellement utile.  La politique la plus efficace est de ne pas se lancer dans des politiques prétextes à grand affichage compassionnel, nécessairement  inefficaces car purement politiques au mauvais sens du terme.   Et de supprimer sans pitié toutes celles qui existent. 

On ne rationalise pas les politiques publiques. On réduit les dépenses à la hache.

Didier Dufau - 02.06.2008

Commentaire
Danielle.bax's Gravatar Cela me rappelle le "zéro base budgeting" très en vogue dans les années 70 et qui n'a exactement rien donné !
# Posté par Danielle.bax | 02/07/08 17:37
DD's Gravatar Et voilà que JF Copé dans le Journal du Dimanche du 25 octobre 2009 avoue que cela n'a pas réellement marché ! Et annonce qu'il faut avoir une démarche autrement plus énergique. Eh oui : on ne réduit les dépenses publiques qu'à la hache. On ne peut pas le faire dans la douceur et en prenant son temps.
# Posté par DD | 26/10/09 06:09
DD's Gravatar Cet article a été écrit en juillet 2008. Ce jour, 10 février 2010 sur la Chaine Parlementaire, les présents à l'unanimité ont avoué que la RGPP au mieux représenterait si tout se passe bien à peine le sixième de ce qu'il faudrait ! Ce n'est pas que cette procédure soit inutile. C'est qu'elle est totalement incapable de s'élever au niveau des besoins. Le fait est désormais avéré pour les parlementaires des deux partis principaux. Question : d'accord mais dans ces conditions qu'est-ce qu'on fait ? Réponse : silence.
# Posté par DD | 10/02/10 01:56
Micromegas's Gravatar Le bilan qui vient d'être tiré par la presse après un an d'expérimentation est sinistre. Pas une seule sortie du RMI (les rmistes ne veulent pas aller vers le RSA) et 600.000 allocataires de plus dans le cadre du RSA. Un désastre. Mais il est vrai que le ministre aux solidarités actives de l'époque passe son temps à rigoler dans livres et médias pour expliquer comment il aentourloupé tout le monde pour en fait subventionner les affidés de certaines associations caritatives. "Je leur ai piqué 2 milliards d'euros en pleine crise !".

On voit le niveau.

Désatreux
# Posté par Micromegas | 09/06/10 13:50
SD's Gravatar Et voici que l'on propose aujourd'hui même de "réformer le RSA". Il n'aura pas fallu deux ans pour que cette réforme électoraliste et politicienne (justifier la présence d'Etienne. Hirsch, un très médiocre personnage dans le cadre de l'ouverture à gauche et se doter d'un argument massu pour les prochaines élections présidentielle, sur le thème vous n'avez ps le monopole du coeur) montre sa vanité et ses erreurs.

Rien n'a changé pour ceux qui vivent en permanence dans l'assistanat, volens nolens. On a simplement créé un impôt nouveau et donné de l'argent aux associations qui vivent sur l'action caritative.

Une imposture totale. Mais que le politiquement correct interdit de dénoncer. Nous avions dit que les défauts du RSA ne seraient dénoncés qu'au moment où on le réformerait. On y est.

Sylvain
# Posté par SD | 04/04/11 10:14
Fred's Gravatar On peut constater en cette fin 2011 que tous les journaux affichent des commentaires rappelant que la RGPP n'a eu qu'une influence marginale. Tout le monde convient qu'il aurait fallu réduire drastiquement les dépenses dès l'arrivée du nouveau président. Bravo de l'avoir dit si tôt.
# Posté par Fred | 10/11/11 10:03
Fred's Gravatar J'ajoute que le récent rapport de la Cour des Comptes dit la même chose : la RGPP ne suffit pas. Il faut cesser de faire porter l'effort sur les impôts et réduire réellement les dépenses. A la hache (3% de PIB en deux ans ! )
# Posté par Fred | 08/02/12 21:18
Le blog du cercle des économistes e-toile

Le cercle des économistes regroupés dans E-TOILE autour de Didier Dufau, Economiste en Chef,   aborde des questions largement tabous dans les media français et internationaux soit du fait de leur complexité apparente, soit  parce que l'esprit du temps interdit qu'on en discute a fond. Visions critiques sur les changes flottants,  explications  sur le retard français,   analyses de la langueur de l'Europe,  réalités de la mondialisation,  les économistes d'E-Toile, contrairement aux medias français, ne refusent aucun débat. Ils prennent le risque d'annoncer des évolutions tres a l'avance et éclairent l'actualité avec une force de perception remarquable.

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