Steven Koonin : « La part d’incertitude ». L’artilleur.

Ayant écrit constamment sur les questions écologiques et la « reductio ad stupidum » qui est désormais la caractéristique majeure du discours des médias dominants dans ce domaine, le livre de Steven Koonin m’a toujours apparu depuis sa parution en anglais comme une véritable bible, Lu après l’écriture de Réconcilier Écologie et Économie, j’étais à la fois soucieux des erreurs éventuellement commises et gourmands des analyses proposées sur des données non connues à l’époque de la rédaction. Tout ce que j’ai écrit est confirmé, ce qui est rafraîchissant.

Il ne faut pas se tromper sur la nature du livre de Steven Koonin. Ce n’est pas un livre polémique, ni de dénonciation, ni de prescription, indiquant le bien pensé et les actions efficaces à mettre en œuvre. C’est un livre qui vise à préciser sans parti pris l’état des connaissances scientifiques en climatologie, ce qui est sûr, ce qui faux, ce qui est à confirmer, ce qui est incertain, et tout le champ de ce qui reste à découvrir si on veut améliorer les moyens de cette science.

Alors disons-le : ce n’est pas un œuvre littéraire qui se lit de façon fluide et sans effort. La science peut être ardue et toutes les démonstrations ne sont pas immédiatement démonstratives. Il faut s’arrêter souvent, relire, réfléchir, et recommencer. Bien sûr c’est un travail de vulgarisation où toutes complexités ont été majoritairement contournées pour permettre l’accès au plus grand nombre. Mais cela reste un exercice ! La science, ce n’est pas simple.

Beaucoup seront tentés de sauter vite aux conclusions. Et elles bouleversent un peu le champ des idées infligées aux auditeurs des médias grand public. Résumons la thèse principale : les apocalypses, ni aujourd’hui ni plus tard. La hausse du niveau de la mer est si lente que les submersions catastrophiques souvent modélisées et illustrés de façon terrifiante par les émissions de télévision, ne sont pas un sujet, ni à court terme ni à moyen terme. Inondations et feux de forêts sont dans la norme et ont même tendance à décroître. La hausse de la chaleur est très difficile à mesurer et à prévoir, et les modèles utilisés sont souvent réglés artificiellement ou fragiles, soit par l’absence de données historique suffisante, soit par incertitude de connaissances, soit par construction.

Ayant rédigé une thèse de doctorat sur l’impossibilité de la prévision à long terme dans le domaine de l’économie, qui m’a valu des tas d’ennuis, je sais les limites de l’économétrie (souvent affublée du vocable de « déconométrie ») et des difficultés intrinsèques à tout modèle, dès lors qu’il est plurifactoriel avec des parts de rétroactions. Un ami a fait il y a bien longtemps un modèle à 70 variables avec un programme d’intelligence artificielle chargé de trouver les paramètres des constantes pour que la courbe résultat suive exactement la courbe historique. On aboutissait à des chiffres absurdes sur certains paramètres.

Le réchauffement a bien lieu. L’activité humaine y contribue, mais pour une part faible et de toute façon, les effets d’une réduction drastique des activités n’auraient pas d’impact important à court et moyen terme. Comme nous l’avons, nous-même, écrit, la conversion de l’économie à des pratiques moins polluantes est une affaire de long terme. Nous disions un marathon, pas un sprint. L’auteur emploie une autre formule : orthodontie et pas arrachage de dents.

Le livre n’est pas prescriptif. Il ne vise pas à définir un programme mais à fixer l’état des lieux des connaissances scientifiques en climatologie et éliminer les informations « bidon » cautionnées hélas parfois par des scientifiques « bien intentionnés ». « C’est faux mais cela va dans le bon sens ». Un travail nécessaire qui laisse aux hommes politiques le soin de construire une réponse sensée. On en est loin.

Pour tous les journalistes et les cadres politiques, comme pour les citoyens curieux de vérité, une lecture indispensable.

Didier Dufau pour le Cercle des « économistes e-toile ».

Commentaire
Artiste's Gravatar A faire lire de toute urgence par les journalistes , les décideurs politiques ,les professeurs ,il est temps de revenir à la science .
# Posté par Artiste | 17/11/22 09:12
Le blog du cercle des économistes e-toile

Le cercle des économistes regroupés dans E-TOILE autour de Didier Dufau, Economiste en Chef,   aborde des questions largement tabous dans les media français et internationaux soit du fait de leur complexité apparente, soit  parce que l'esprit du temps interdit qu'on en discute a fond. Visions critiques sur les changes flottants,  explications  sur le retard français,   analyses de la langueur de l'Europe,  réalités de la mondialisation,  les économistes d'E-Toile, contrairement aux medias français, ne refusent aucun débat. Ils prennent le risque d'annoncer des évolutions tres a l'avance et éclairent l'actualité avec une force de perception remarquable.

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