Lettre ouverte à M. Guaino

Cher Monsieur Guaino,

En juin 2006 nous avions écrit au candidat Nicolas Sarkozy sous forme d’une lettre ouverte publiée sur le forum du Monde.fr.  Nous l’avertissions qu’il allait rencontrer une crise terrible en cours de mandat et qu’il fallait qu’il tienne compte de cette réalité difficile dans son discours de candidat.

Nous pensions qu’il fallait qu’il renonce absolument à ses promesses de croissance accélérée qui se briseraient sur le mur des réalités.

Cinq ans après, voilà Nicolas Sarkozy fracassé par la crise annoncée. Lors du discours de Toulon n°1, il nous avait semblé rester trop décalé face aux réalités. Trop de condamnations globales pas assez d’analyses précises. Trop de morale de tribune. Pas assez d’actes concrets permettant de faire face aux évènements.

Voici qu’à Toulon un second discours est censé marquer les esprits, lancer les accords de Bruxelles sur un nouveau traité européen, mettre le candidat en meilleure posture pour la nouvelle élection présidentielle qui se profile.

On attendait qu’il explique pourquoi Toulon 1 n’avait pas marché, pourquoi la crise était au bord d’un nouvel épisode encore pire que le précédent, pourquoi l’Europe était désormais en pleine discorde, pourquoi la zone Euro était en grand péril d’éclatement, pourquoi la récession s’annonçait à nouveau dans le monde en 2012.

Gouverner c’est prévoir. Avoir raté le coche une première fois lors des élections présidentielles précédentes était pardonnable. La situation était si peu analysée par les économistes de cour qu’on comprend que les politiques aient été pris de court.  Avoir raté le coche une seconde fois à Toulon en 2008 était plus grave. Mais rater le coche une troisième fois  maintenant est dramatique.  


Analysons ensemble certaines assertions du discours de Toulon 2. 

« En septembre 2008, ici, à Toulon, au cœur de la tourmente, j'avais tracé une perspective : celle d'un capitalisme de production, d'une mondialisation régulée, d'une finance encadrée, d'un développement durable, d'un nouveau rôle pour l'État dans l'économie, d'une nouvelle gouvernance européenne et mondiale. »


-    Le capitalisme récent a toujours été un capitalisme de production. Il n’a d’ailleurs jamais atteint de meilleures performances. La difficulté est pour la France en particulier que la production a eu lieu ailleurs et que la croissance de la valeur ajoutée française a été de plus en plus médiocre et dépendante de la dette.


-    La mondialisation, s’il s’agit du commerce international  n’a jamais été autant régulée et surveillée par des organismes ad hoc comme l’OMC.


-    La finance a toujours été extrêmement encadrée. Les règles de Bâle existaient en 2008. Et les nouveaux produits financiers avaient tous été avalisés par les autorités compétentes. Aucun n’a d’ailleurs été interdit depuis.


-    Le développement durable n’est pas seulement le développement qui ne consomme pas les ressources rares de la planète.  C’est celui empêche des bulles de  gonfler qui exploseront nécessairement un jour ou l’autre. Mais les bulles n’ont pas été dénoncées. Elles ont explosées et la croissance n’a pas été durable.


-    Le rôle de l’Etat dans l’économie est en France excessif. C'est la coopération des états dans le monde qui est insuffisante.


-    La nouvelle gouvernance mondiale en Europe et dans le monde n’a de sens que si on précise bien les politiques ou les absences de politiques fautives.

Ces têtes de chapitre en elles-mêmes ne sont pas suffisantes. La question fondamentale reste : qu’est-ce qui était mal fichu dans le système précédent et comment le réparer ? Le diagnostic précède toujours la thérapeutique. Sans diagnostic de détail on reste dans des généralités stériles. 

Vous le faites dire d’ailleurs très bien : « Il faut chercher les causes communes qui ont conduit le monde dans la situation où il se trouve aujourd'hui. »

Et vous continuez de façon excellente :

« C'est dans l'instauration, à partir de la fin des années 70, d'une mondialisation sans règle autre que celles qui garantissaient la liberté du commerce que se trouve l'origine des difficultés actuelles. »


Ce qui nous gêne ici c’est l’emploi du mot mondialisation. Il est trop vague.

 

Ce qui s’est mis en place en 71 c’est une liberté du commerce sans politique monétaire internationale. On a prétendu que les monnaies pouvaient varier l’une vis à vis de l’autre dans un rapport quelconque (on a été du simple au double)  mais qu’un demi pourcent de droits de douane était une honte inacceptable. 

Baisser la TVA sur la restauration de quelques points était un sujet de discussion décennale mais perdre 50% de compétitivité vis-à-vis du Yuan ou du Dollar était « normal » et hors du débat entre nations. 

Ce qui a changé en 1971, c’est le système monétaire international. Le système fautif et l’idéologie qui va avec, auront été que les monnaies, gérées en Occident par des banques centrales plus ou moins indépendantes,  devaient flotter au rythme des pulsions du marché alors que les biens, les capitaux et les personnes pouvaient courir le monde sans entraves.


Il n’est donc pas tout à fait exact de dire que le système monétaire nouveau était sans règle.


Les accords de Bretton-Woods comme vous le savez ont été la victime à la fois des Allemands qui du fait des arrivées de liquidités excessives en provenance des Etats-Unis ont décidé de cesser d’en appliquer les règles et des Etats-Unis qui n’ont pas voulu défendre la parité de leur monnaie en or et qui ont finalement refusé de livrer leur or aux détenteurs de dollars.


Le flottement des monnaies a bien été subi. Aucun économiste sérieux n’avait fait une théorie complète et convaincante des changes flottants, à part quelques bribes dans Milton Friedman.


Mais de mauvais esprits ont fini par théoriser un état de fait et rendre tabou toute tentative de le modifier. Le rôle, pour la France,  de M. Giscard et de son conseiller Pébereau ont été à cet égard parfaitement délétère.  Dès 1972 le tarif extérieur commun de la Communauté européenne est abandonné (sans discussion auprès du peuple ni même des forces politiques), la banque centrale se voit interdire de prêter directement aux états et le principe d’indépendance de sa gouvernance est gravée dans le marbre. 

Depuis la zone Euro a été construite sur les mêmes bases d’une banque centrale qui n’est pas responsable de la valeur externe de la monnaie et qui n’a d’autre boussole que les prix moyens d’une sélection transnationales de produits de consommation.


Banques centrales indépendantes, ne finançant pas les états, marchés de capitaux à court et long terme libres, changes flottants, stabilité interne des prix de consommation sont devenus des idées et des institutions  sacralisées.


L’ennui, c’est que ce système n’a jamais fonctionné, ne fonctionne pas et ne fonctionnera jamais. Il est bien à la source de nos difficultés actuelles.


Il faut donc explicitement le condamner ou se condamner au verbiage. 


Voici la phrase que vous auriez du prononcer : « C'est dans l'instauration, à partir de la fin des années 70, d'un système général de monnaies administratives dont la valeur externe flotterait au gré des pulsions des marchés financiers et des manœuvres des banques centrales que se trouve l'origine des difficultés actuelles. »


L’auriez-vous fait qu’il vous aurait  fallu expliquer pourquoi et  dire comment on devait changer le système, mais vous auriez pu prendre date  et démontrer que faute de réforme on allait tous dans le mur.

Nous reviendrons dans cette grande faute intellectuelle de départ. Continuons à lire votre discours.

« La globalisation financière s'est installée pour compenser artificiellement les ravages que la mondialisation sans règle provoquait dans les économies des pays développés.
C'était nécessaire pour que les excédents des uns puissent financer les déficits des autres. »


Ici, vous allez un peu trop vite.  Dans le nouveau système rien en apparence ne laissait penser que les déficits et les excédents excessifs devaient être la règle. Les cours du change des pays en excédent auraient du monter et ceux des pays en déficits baisser. Les mouvements de changes auraient été stabilisateurs. C’était la théorie de Friedman : les ajustements auraient plus petits, plus constants, moins destructeurs. A terme le monde aurait connu une égalisation des taux d’intérêt, une baisse des réserves nécessaires, et des variations modestes de cours de change.  Pour Milton Friedman les changes flottants comme tous les systèmes de prix étaient stabilisateurs. 


On aura vu exactement l’inverse.


Le système ne devait pas provoquer de « ravages ».  Il n’aurait donc pas du être nécessaire d’effectuer des compensations sous forme de dettes.


Votre propos n’a de sens que si on explicite pourquoi en fait dès 1971 a été mis en place un système voué aux déficits et aux dettes en excédents contrairement à la vulgate qui a fini par le justifier.  

Vous ne le faites pas.


Est-ce la libre concurrence qui est le moteur du déficit, les pays pauvres et peuplés emportant progressivement tout le commerce mondial et toute la production ? La régulation doit-elle être commerciale d’abord ? Faut-il donc revenir sur le libre échange quasi intégral qui prévaut aujourd’hui ?   Ou sont-ce les défauts structurels du nouveau système monétaire international de facto qui doivent être incriminés ?


Le discours ne donne pas de clé sur ces questions cruciales.


En revanche il esquisse une explication fausse de l’accroissement de la dette globale. En considérant que la liberté du commerce implique que les pays riches soient mécaniquement  obligés de s’endetter pour continuer à consommer, on se trompe totalement de diagnostic.  Vous semblez croire qu’un pays pauvre a toujours l’avantage sur un pays riche en matière de productivité et qu’il lui prendra nécessairement sa production.

C’est évidemment faux. Sinon il n’y aurait plus de pays pauvres depuis longtemps et la Grèce triompherait en Europe.   Ce que vous oubliez c’est le taux de change. C’est lui qui régule les vannes.  Au sein de la zone Euro il n’y a plus de vannes. Dans un système de changes flottants les vannes sont chaotiques et irrationnelles. L’ennui c’est que le taux de change est un sujet tabou, aussi bien au sein de l’Euroland depuis que la monnaie unique a été choisie de préférence à une monnaie commune mais ajustable, que dans les instances internationales où les changes flottants sont le dogme absolu.


Ce que l’on a vu c’est une panne généralisée de quarante ans dans le fonctionnement des écluses monétaires. C’est sur ce défaut majeur que l’on aurait du se pencher. Mais au G.20, on a considéré,  que les changes étaient un non-sujet. Tragique méprise.
L’ouverture du commerce international et son développement n’est pas la source des difficultés. Au contraire, ils ont été une force de croissance constante et puissante jusqu’à ce que désordres financiers finissent par l’étouffer.


En revanche le pseudo-système, qui s’apparente à un non-système du point de vue technique, qui consiste à laisser une monnaie nationale jouer le rôle principal dans le système monétaire international soit comme monnaie de transaction soit comme monnaie de réserve, en sachant que les autorités dudit pays annoncent qu’elles se moquent de la valeur externe de leur devise, et qui laisse toutes les monnaies flotter ou non selon les stratégies des états, est une absurdité calamiteuse qui a fait tout sauter.

C’est cette absurdité qu’il faut dénoncer. Oui il  importait dès 2007 de prendre date en assénant que l’absence de réforme dans ce domaine provoquerait une crise plus grave encore et dès 2008 qu’elle ne permettrait pas de sortir de la crise qui avait explosé.

Bien sûr la France aurait rencontré des oppositions. Ni la Chine ni les autres pays mercantilistes n’auraient accepté sans réagir la remise d’un système dont ils croient tirer avantage. Les Etats-Unis n’auraient pas lâché leur privilège monétaire d’un tour de main.  Le Royaume-Uni, poumon financier et principale passerelle de recyclage des excédents et des déficits de balances de paiement  n’aurait pas non plus pavoisé.


Mais en indiquant que le prix à payer de l’inaction était une crise mondiale pire que celle de 1929, on se positionnait pour la suite.


Toulon 2011 n’aurait pas été cette pale copie de Toulon 2008.  Le Président aurait pu dire : « Nous nous enfonçons dans la crise comme nous l’avons prévu et annoncé faute de toucher au moteur de la crise. Voulons-nous attendre la vraie grande dépression mondiale pire que 1929 pour agir ? ».


Au lieu de cela vous avez rendu les armes par avance. En annonçant qu’il ne s’agissait pas de remettre en cause le rôle du dollar comme monnaie internationale et qu’on ne reviendrait pas sur les changes flottants et que la Chine était notre amie malgré sa politique mercantiliste agressive,  vous vous êtes privé de tout levier pour faire changer quoi que ce soit. Et vous avez aggravé le tout en affirmant qu’il n’était pas question de revenir sur l’indépendance totale de la BCE.


Que vous reste-t-il comme issue sinon subir l’aggravation de la crise en secouant des petits poings impuissants ? Alors que le Président de la République Française aurait  pu prendre la stature du commandeur.

« L'Europe sans politique, l'Europe en pilotage automatique qui ne fait qu'appliquer aveuglément les règles de la concurrence et du libre-échange est une Europe qui ne peut pas faire face aux crises. »

Nous retrouvons ici une variante de la même analyse : l’Europe serait victime de la liberté commerciale et d’elle seule.  En vérité ce sont les changes de la zone euro qui sont en déshérence.  Lorsque le dollar a été faible ainsi que le Yuan entre 1997 et 2000, la croissance a été forte. Lorsque l’Euro a été trop fort, elle a souffert.

Les déséquilibres internes à la zone  ne sont pas non plus pris en compte. L’Allemagne a conduit une politique « mercantiliste » fondée sur la retenue salariale et une moindre croissance, mais sans trop de dettes, pendant que la France prenait un autre chemin, basé sur la consommation, le farniente et la dette à outrance.  Quant aux autres ! Chacun a fait ce qu’il voulait.

Entre le défaut de construction de la zone Euro qui laisse sans gestionnaire le taux de change (M. Juncker aura été un président fantomatique de l’Eurogroupe) et la politique foldingue de la France fondée sur le vive l’impôt, vive la dépense publique, vive la dette, vivent les avantages acquis, on a assez d’explications des difficultés particulières qui nous assaillent sans remettre en cause exclusivement le libre échange. 

« La croissance extravagante du secteur financier qui a disséminé d'invraisemblables quantités de dettes a eu pour conséquence la financiarisation de l'économie. Elle l'a mise sous la domination exclusive de la logique spéculative et l'obsession du court-terme. On en connait les conséquences dramatiques sur l'industrie, sur l'environnement, sur les inégalités et sur la dégradation de la valeur du travail ».

La question est de savoir quelle est la source de cette « croissance extravagante ».  Vous n’en esquissez aucune description dans le discours. On pourrait penser que votre idée sous jacente est que les pays développés, perdant dans la compétitivité mondiale, se sont lancés dans une course folle volontaire à la dette et que les banques en auraient rajouté pour arriver à la catastrophe que l’on connait.

La vérité, à laquelle vous faites si souvent référence dans ce discours,  est un peu plus précise que cela.

Les banques ne peuvent pas enfler leur bilan toute seule. Si elles avaient le pouvoir individuel de créer de la monnaie à volonté, aucune d’entre elle ne risquerait la faillite.  La dette créée par les banques est toujours un produit dérivé. Il faut une source nette de liquidité pour que la banque prête plus.  Cette source de liquidité à l’échelon d’un pays ne peut venir que de la création de monnaie banque centrale ou dans un afflux net de monnaie internationale, dans la pratique de dollars.

Chaque zone monétaire est donc dans la dépendance des balances qu’elle entretient avec les autres et de la politique de sa banque centrale « indépendante ». 

Dans un système de changes flottants où personne n’est responsable ni des cours des devises, ni des niveaux de balances de paiements, ni des niveaux de balance commerciale, laissés à la libre évaluation ou évolution des marchés, tout va dépendre de la politique monétaire des grands acteurs et principalement de la banque centrale du pays qui émet la monnaie mondiale et qui ne peut alimenter la liquidité mondiale que par des déficits de balances extérieures.

Après dix années d’inflation à deux chiffres et de déficits monstrueux, Volcker aux Etats Unis a donné à la fin des années 70 un énorme coup de frein qui a aggravé fortement aux Etats-Unis la dureté de la crise cyclique décennale. Ensuite Greenspan a repris dès 1987 la politique de Benign neglect et d’injection massive de liquidité à chaque chute de bourse ou début de récession. Lorsque les dettes devenaient trop grandes on ruinait le créancier comme le Japon dans les années 80. Ils ont accumulé des avoirs en dollars replacés aux Etats Unis selon une spirale sans fin (la double pyramide de crédits décrite si bien par jacques Rueff) avant de subir des très graves dépréciations dont ils ne sont toujours pas remis. A partir des années 90 la Chine s’est ajoutée.  Et elle proteste en voyant qu'elle prend le même chemin si lme dollar s'effondre. 


Les pyramides de déficits de la balance dollar des Etats unis ont donc été depuis 1971 la source des pyramides de dettes quiont été certes  partiellement purgées après chaque accident conjoncturel.mais qui ont chjaque fois repris de plus belle.


On a vu ainsi les dettes globales moyenne des Etats industrialisés qui étaient redescendues à moins de 200% du PIB remonter dès 1972.  Partout. On a dépassé  200% puis 250% puis 300% puis 350% de ratio dette/PIB pour atteindre souvent 400 et plus. L’Irlande ira vers les 1000%, l’Islande les 1400% !


Nous avons décidé au Cercle des économistes e-toile d’intervenir quand beaucoup de cs pays ont dépassé les 300% en 1997.  Depuis cette date nous appelons les dirigeants à réfléchir aux défauts d’un système qui ne pouvait qu’exploser de façon cataclysmique. Et on a passé les 300% pour aller vers les 400%  dans le silence absolu des économistes officiels et des politiques !


Le cœur de votre réflexion devrait être fixé sur cette explication : pourquoi et comment depuis 1971 le monde a-t-il vu l’endettement global des pays développés remonter alors qu’il baissait continument depuis la guerre ? 


 « L'Europe sans politique, l'Europe en pilotage automatique qui ne fait qu'appliquer aveuglément les règles de la concurrence et du libre-échange est une Europe qui ne peut pas faire face aux crises. C'est une Europe désarmée. C'est une Europe qui est condamnée à subir. Cette Europe-là, nous n'en voulons pas. »


Ce n’est pas nous qui vous contredirons. Nous affirmons que la gestion par la norme est la grande victime de la crise.  Ce n’est pas vrai seulement pour l’Europe : à partir du moment où il n’y a plus de discipline internationale d’état autour des taux de change, le monde vit dans le spontanéisme corrigé théoriquement par la norme et les institutions juridiques mais en vérité exploité par les puissances en vue de leur propre intérêt. Au darwinisme microéconomique réponds un darwinisme macro économique qui a permis aux Etats unis et à la Chine de tirer au moins provisoirement et en apparence leur épingle du jeu. Mais au prix de la faillite générale. 


Il est clair que dans ce choc des puissances la France n’a pas  fait le poids et l’Europe n’a pas existé.


A l’intérieur de la communauté, sur trop de sujets, la commission européenne dicte sa loi contre les états. Le ministre socialiste Allègre a écrit que la collectivité des ministres de l’éducation n’a rien pu faire pour imposer à un Commissaire un projet que tous les ministres européens avaient accepté. Le Commissaire a dit : niet. Et rien ne s’est fait.  Seule la commission a l’initiative. Et sur certains thèmes un grignotage perpétuel soutenu par la Cour de Justice Européenne a été mené sans résistance réelle de la France.

Dans tous les secteurs communautarisés via la Commission les gouvernements et donc leurs électeurs ont perdu tout pouvoir de contrôle et surtout de changement. Le Parlement européen a toujours été une farce démocratique et le restera.

Avec la BCE la perte de pouvoir est encore plus radicale. Non seulement le pouvoir a échappé aux Etats mais ils sont condamnables s’ils prétendent remédier à ce triste état de fait.  L’indépendance des banques centrales est une fiction idéologique. Ne donner à cette fiction qu’une mission de stabilité d’une liste de prix de produits de consommation plus ou moins arbitraire et moyennée sur une zone aussi grande n’a pas de sens.

Vous venez de prendre des décisions qui mèneront à la perte de la responsabilité budgétaire. La « règle d’or » cela consiste à créer une condition de plus de « pilotage automatique pendant la crise ».

Les Etats européens ne disposent plus du volant règlementaire et législatif dans aucun des domaines communautarisés, n’ont plus de gouvernail monétaire et désormais sont contraints à faire avaliser leurs budgets par la Commission.

C’est une Europe dont les états sont condamnés à subir.

Vous affirmez : nous ne voulons pas d’une Europe passive.  Très bien. Parfait. Mais quels sont les leviers qui restent à disposition du Président de la République Française ?

En revanche des pouvoirs transférés ne sont pas exercés.

Qui était responsable de la politique de change en Euroland ? Pas la BCE, on le sait. On a statutairement mis hors jeu l’institution qui a le plus d’influence sur les changes. Les états de la zone Euro ? Aucun pouvoir.  Les traités disaient : c’est l’Euro-groupe.

Cet Euro-groupe a été présidé par un fédéraliste européen, le luxembourgeois Juncker,  quasiment depuis sa création. Qui a entendu sa voix ? Qu’a-t-il fait ou dit dans ce domaine ? Rien.   Et pourquoi rien ? Parce que l’Euro-groupe et les états de l’Euroland n’ont exactement aucun pouvoir sur les changes externes et qu’ils sont totalement impuissants à contrer les forces centripètes à l’intérieur de la zone Euro.  De toute façon son président n’a même le pouvoir de parler au FMI !

On ne voit pas que ces institutions partiellement informelles, divisées et croupions, ait un rôle quelconque sinon de dialogue entre ministres européens, façon club.

L’Europe a désarmé les états pour tout ce qui concerne les mouvements de personnes, de capitaux et de produits au sein de l’Union.  Et elle ne produit aucune politique dans ces domaines. Les armes mises au râtelier européen ne servent plus.

Votre discours n'est pas faux. Il ne fait guère avancer les choses. On en reste à l’incantatoire. Que faire sans sortir de l'Euro ou sans créer à côté de la Commission un centre opérationnel réel de l'Euroland piloté par la réunion des états concernés ? Surtout comment faire si Mme Merkel ne veut pas  ?

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