Deux mots à J. J. Rosa ("L'euro, comment s'en débarasser")

Le livre de J.J. Rosa «  L’Euro, comment s’en débarrasser ?  » chez Grasset est significatif du « triomphe des eurosceptiques ».  L’Euro était une démarche déraisonnable, sans réel objectifs utiles pour les populations et qui va mal tourner.

Il est clair que les désordres actuels renforcent l’euroscepticisme. Pour avoir dénoncé mille fois  le caractère incohérent de l’Euroland depuis 1997, il serait curieux de notre part de réfuter les thèses de JJ. Rosa.

Nous allons néanmoins apporter certains correctifs.

JJ. Rosa s’appuie comme la plupart des contempteurs de l’Euro sur la thèse des zones monétaires optimales. En gros cette thèse de Wicksell déclare que seule des zones monétaires présentant certaines caractéristiques économiques peuvent réussir. En déclarant les pays de l’Europe hors de ces caractéristiques, on condamne ipso facto l’Euro.  Nous contestons cette analyse parce qu’elle est tautologique. Il n’y a pas d’exemples de zones réellement optimales.  Il n’y en a jamais eu et il n’y en aura jamais. La question n’est pas là.  Une monnaie unique est POLITIQUE. Les conditions du succès sont politiques et non économiques.

Si l’Euro a été une initiative problématique c’est essentiellement pour trois raisons que nous avions développées lourdement lors de la discussion sur Maastricht et qui restent d’actualité :

-    Développer un ilot de fixité dans un système global de changes flottants est naturellement problématique.

-    Créer une banque centrale chargée de gérer une monnaie administrative avec un seul objectif de niveau de prix sans aucune considération sur la valeur externe de la monnaie laissée à la seule évaluation des marchés, et sans se soucier du plein emploi,  correspond à une idéologie fausse et dangereuse.

-    Créer une zone monétaire sans mettre en place aucun des organes de pilotage et de contrôles nécessaires était une gageure. Même pour une zone de changes fixes mais  ajustables, il fallait un FMI. Croire en la vertu d’un simple traité était pour le moins audacieux.

On voit que le caractère « optimal » de la zone européenne n’est pas le vrai problème. Les arguments contre l’Euro sont autrement plus graves.

Faute d’analyser la réalité, l’auteur est contraint à une gymnastique peu convaincante.

-    Il fait un procès d’intention : l’Euro sert des intérêts et représente un calcul de dominants pervers. Les gros emprunteurs ont besoin d’un Euro cher et de taux d’intérêt bas. Voici les grandes entreprises du CAC, les hauts fonctionnaires et les banquiers en ligne de mire et complices objectifs. En fait le cours de l’Euro a fait le Yoyo en passant du simple au double vis-à-vis du dollar.

-    Il est contraint de se faire l’avocat des changes flottants sans en voir aucun des inconvénients ni la responsabilité de ce système dans les difficultés actuelles.  

-    Il laisse entendre que la situation d’endettement des pays est liée à l’appartenance à l’Euroland. Le RU n’est pas dans l’Euro : sa situation n’est pas meilleure que celle de l’Espagne !    Alors ?

-    On donne à la dévaluation des effets magiques qui n’existent pas à ce point-là.

En vérité JJ Rosa fait à l’Europe une critique politique, plus qu’une critique économique de l’Euro.

Ses raisonnements et critiques seraient tout aussi valables pour le traité de Rome que pour le traité de Maastricht.  Oui, c’est vrai, les promoteurs politiques de l’Europe ne sont pas très scrupuleux sur l’argumentation  proposée au peuple pour la justifier. Des mensonges, il y en a eu et beaucoup. On peut contester l’intérêt de politiques communes qui éloignent la décision du peuple et la retarde en l’obscurcissant tout en donnant aux lobbies un rôle excessif.  Le « fédéralisme appauvrit » écrit l’auteur. C’est une thèse politique  parfaitement défendable.

Mais l’économie n’a pas grand-chose à voir avec elle.

On le verrait si l’Europe se donnait des institutions compatibles avec une monnaie unique, si le monde revenait à une forme moderne des accords de Bretton Woods, des changes fixes et ajustables garantis par les états et surveillés par une vraie instance de contrôle, si les règles de la BCE était profondément changées, avec pour objectif le respect de la valeur des changes, le plein emploi et la stabilité des prix.

Cela signerait certainement une sortie économique par le haut de la crise des changes et de la dette. Et une aggravation du « fédéralisme honni ».

Mais sur un plan strictement économique cela vaudrait mieux que la solution préconisée : une sortie de l’Euro après une forte dévaluation de la monnaie unique dont les conditions pratiques, faute d’accord général sur les monnaies, sont impossibles à réunir.

L’économie est au service de la politique et réciproquement. Mais il ne faut pas utiliser l’économie à tort et à travers.

Commentaire
marcel chombier's Gravatar overdose des contes de fée sur cette monnaie de m*$=)
# Posté par marcel chombier | 23/05/12 16:41
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Le cercle des économistes regroupés dans E-TOILE autour de Didier Dufau, Economiste en Chef,   aborde des questions largement tabous dans les media français et internationaux soit du fait de leur complexité apparente, soit  parce que l'esprit du temps interdit qu'on en discute a fond. Visions critiques sur les changes flottants,  explications  sur le retard français,   analyses de la langueur de l'Europe,  réalités de la mondialisation,  les économistes d'E-Toile, contrairement aux medias français, ne refusent aucun débat. Ils prennent le risque d'annoncer des évolutions tres a l'avance et éclairent l'actualité avec une force de perception remarquable.

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