Un article remarquable de Ph. Simonnot
Nous allons faire ici une chose que nous ne faisons jamais : recopîer honteusement un article entier qui nous parait excellent en espérant que son auteur nous pardonnera.
Il est vrai que nous répétons que les medias ne font pas leur travail et ne laisse pas passer de lueurs sur les vrais problèmes économiques qui se posent. Cet article est la preuve que l'exception peut confirmer la règle.
Naturellement on peut contester que l'étalon or soit la seule solution. On sait que nous sommes plus ouverts à des variantes d'organisation moins sommaires. Mais en centrant la crise sur sa cause principale c'est à dire les dérèglements devenus incontrolables d'un système monétaire défectueux, on va au fond des choses.
"La règle d'or, ersatz d'étalon-or
par Philippe Simonnot, directeur de l’atelier de l’économie contemporaine
Les petits génies du marketing politique qui ont lancé l'expression "règle d'or" ont fourni aux princes qui nous gouvernent une occasion supplémentaire de montrer à quel degré d'impudence ils sont capables d'accéder. En dernier recours, le dos au mur, menacés d'une dégradation de la note de la dette publique sur les marchés, nos gouvernements essaient de vendre au bon peuple ainsi qu'aux méchants marchés quelque chose qui brille dans la nuit de cette crise interminable, quelque chose d'inaltérable comme l'or qu'on essaye de faire revenir dans le système au moins sur le plan symbolique – bref un ersatz papier d'étalon-or.
Le plus cynique, dans cette imposture de Nicolas Sarkozy, qui a déjà fait plusieurs émules en Europe, est que le général de Gaulle, dans sa célèbre conférence de presse du 4 février 1965, après avoir célébré les vertus monétaires de l'or, "tenu, éternellement et universellement, comme la valeur inaltérable et fiduciaire par excellence", avait lui aussi employé le vocable galvaudé aujourd'hui par son lointain successeur. "La loi suprême, la règle d'or – c'est bien le cas de le dire – qu'il faut remettre en vigueur et en honneur dans les relations économiques internationales, avait-il déclaré, c'est l'obligation d'équilibrer, d'une zone monétaire à l'autre, par rentrées et sorties effectives de métal précieux, la balance des paiements résultant de leurs échanges." Ces quelques mots suffisent cependant à montrer la distance, pour ne pas dire l'abîme qui sépare le pseudo-étalon-or, que l'on cherche à nous vendre, de l'étalon-or authentique qui, lui, règle non seulement les budgets des Etats mais aussi leur balance des paiements.
La "règle d'or", telle qu'on ose nous la proposer, est une promesse sur le papier d'équilibrer le budget de l'Etat (on ne dit rien des collectivités locales dont beaucoup sont proches de la faillite). Promesse d'ivrognes ! Songeons au Pacte de stabilité européen de 1997 trompeté avec quelle solennité ; il avait acquis une valeur normative par deux règlements du Conseil de l'Union européenne la même année. Cela ne l'a pas empêché d'être violé quelques années plus tard par ses signataires les plus "honorables", au premier rang desquels l'Allemagne qui fait figure aujourd'hui de pays vertueux, et la France dont l'Etat s'est montré incapable d'équilibrer son budget depuis 37 ans. Que le papier sur lequel sera couchée la règle d'or soit constitutionnel ne change pas grand-chose. On sait sa valeur d'un tel papier dans un pays comme le nôtre.
Supposons même que cette règle d'or soit vraiment, par miracle, respectée quelques années ; elle ne règlerait qu'une partie du problème. Car la crise actuelle ne vient pas seulement des manquements des Etats aux règles de l'équilibre budgétaire. Ces manquements ont été appelés à cors et à cris par tous ceux qui nous serinent depuis le début de cette crise – trois ans déjà - qu'on a fait mieux qu'en 1929 grâce à plus d'Etat. Keynes, le grand retour ! clamaient-ils. Ils ne voyaient pas, ils ne voient pas, et ils ne veulent pas voir que la crise est d'abord d'origine monétaire, qu'elle est l'ultime accès d'une fièvre qui s'est emparée du système capitaliste depuis qu'a été fermée la fenêtre d'or le 15 août 1971 par Richard Nixon, alors président des Etats-Unis. Ce jour-là, on le sait, le dernier lien qui existait entre le métal jaune et une monnaie (et pas n'importe laquelle puisqu'il s'agissait du dollar) a été rompu. Depuis, le système de réserve fédérale, libéré des contraintes de la convertibilité métallique, n'en a fait qu'à sa tête, générant un "aléa moral" qui pousse les banquiers du monde entier, et donc aussi leurs clients, à prendre des risques bien supérieurs à ceux qui auraient été pris dans un système régulé – non pas symboliquement, non pas sur le papier, mais réellement – par l'or-étalon.
La solution existe, elle est simple, pratique, à portée de main. Le seul problème – et il est politiquement de taille - est que les privilégiés du système actuel, gouvernants, banquiers et autres ubuesques "phynanciers" proches du pouvoir de création monétaire, leurs profits abusivement gonflés par cette proximité, feront tout pour ne pas l'adopter.
Dernier ouvrage publié : Delenda America, éditions Baudelaire, 2011."
Le cercle des économistes regroupés dans E-TOILE autour de Didier Dufau, Economiste en Chef, aborde des questions largement tabous dans les media français et internationaux soit du fait de leur complexité apparente, soit parce que l'esprit du temps interdit qu'on en discute a fond. Visions critiques sur les changes flottants, explications sur le retard français, analyses de la langueur de l'Europe, réalités de la mondialisation, les économistes d'E-Toile, contrairement aux medias français, ne refusent aucun débat. Ils prennent le risque d'annoncer des évolutions tres a l'avance et éclairent l'actualité avec une force de perception remarquable. Association loi 1901 |
Jean Marc Vittori dans les Echos ne dit pas autre chose :
http://blogs.lesechos.fr/jean-marc-vittori/la-fina...
Notre position est très claire : nous disons NON ! Nous ne devons pas le conserver.
Accessoirement : est-il possible d'organiser un ilot de stabilité dans un océan de flottement et si oui dans quelles conditions ?
Où sont ceux qui disent oui à la première question et leurs arguments ?
Par qui la question est-elle posée au FMI, à la BCE, en Europe, au G.20 ?
Qui a cherché d'y répondre dans ces institutions ?
Nous dévalons la pente dans un véhicule qui casse de partout, qui a déjà fait plusieurs tonneaux et blessés ces passagers. Nous ne pensons qu'à rembourrer l'intérieur et à ligoter le pilote. Alors qu'il faut changer de voiture.
DD