Statistiques : éviter le fétichisme autour des chiffres annoncés dans la presse

Assurer l'autonomie de l'INSEE

Un des aspects les plus crispants de la discussion économique publique est cette double difficulté d’interprétation des statistiques :

-          Peu de gens connaissent la manière dont elles sont conçues et beaucoup font donc des contresens parfois gigantesques dans l'interprétation des chiffres publiés.

-          Les chiffres sont en général des estimations qui s’affinent progressivement et au final la chanson n’est pas toujours la même, même si l’air ressemble. La politisation de l’INSEE laisse toujours planer le doute sur la manipulation des chiffres. Le changement de mode de calcul permet souvent de brouiller un peu plus les pistes, même s’il est bien intentionné. Du coup, entre prévisions, prévisions corrigées, estimations, estimations corrigées et calculs définitifs, on constate des différences parfois très considérables.

Méconnaissance et incertitudes comptables rendent donc l’interprétation des statistiques publiques, dans la sphère médiatique et politique, particulièrement hasardeuse et parfois trompeuse.

L’INSEE vient de donner les chiffres définitifs et les estimations de l’évolution du PIB depuis… 2 014.

Cela veut dire que depuis 3 ans nous vivions avec des chiffres provisoires sur la valeur de l’indicateur essentiel de la vie économique.

Jusqu’ici, le gouvernement socialiste se vantait d’une croissance en pleine accélération : 0.8 en 2014 et 1.2 en 2015. En vérité, la croissance était atone à 1 %., avec une montée infime à 1.1 % en 2016. Alors que la reprise était partout sensible danse monde, la France montrait un électroencéphalogramme absolument plat, totalement atypique par rapport aux autres sorties de récession depuis 1945. On se souvient qu’à quatre reprises, les annonces faites étaient : une année en reprise avec accélération l’année suivante. Ce discours optimiste a été systématiquement démenti par les faits. Mais il a bercé la nation, pendant qu’on la lessivait fiscalement, ce qui était le principal.

La période en cours, est en matière de conjoncture, une phase haute du cycle équivalente aux années 1988-1991, 1997-2000, 2006-2007. La seule différence est dans la faiblesse des taux de croissance, notamment en Europe et surtout en France, asphyxiée par la pression fiscale.

Après une accélération finale, la suite est, en général, une contraction de la croissance. La précédente ayant été très forte, celle à venir serait modérée. Après une phase de stagnation aussi importante, il est impossible qu’il y ait un énorme krach. Les bourses risquent évidemment une correction assez forte. Mais l’activité elle-même ne devrait connaître qu’un ralentissement pas une véritable récession, les bulles spéculatives qui exploseront étant pour l’essentiel purement financières et monétaires et n’ayant que peu de corrélations avec le crédit aux entreprises. Ces dernières ont très peu investi, préférant accumuler du cash et racheter leurs actions pour maintenir les cours (et la valeur des stock-options).

La conjoncture française, qui suit la conjoncture mondiale avec un effet retard et une décote, s’améliore très doucement mais va être étouffée par la hausse massive de la CSG exigée par Macron, une erreur colossale. Bien sûr le Trésor a fait que la CSG soit un impôt complexe et largement incompréhensible. Mais si on s’en tient à l’essentiel, l’Inspecteur des finances Macron veut faire passer le taux de 15.5 à 17.2 %, soit une hausse de 11 % environ (sous réserve des modalités de détail), avec un taux marginal de prélèvement de près de 67 %. Il aurait été mille fois plus sage de laisser tranquille la CSG et d’augmenter la TVA, avec un impact sur le prix de marchandises importées relativement faible, et une petite amélioration de la compétitivité prix de l’économie française. Cela aurait un poil dopé nos exportations et aurait permis de réduire notre déficit commercial.

L’effet de la CSG sera extrêmement négatif sur la demande, les fonctionnaires et les retraités étant les plus frappés, en même temps que tous les investisseurs qui se retrouveront avec des rentabilités marginales, après inflation, négatives !

Rappelons que la CSG frappe le revenu disponible net-net et que l’impôt sur le revenu frappe la part saisie par la CSG. La CSG est un « impôt sur l’impôt », le summum de la prédation du Trésor, la merveilleuse trouvaille de l’Inspection des finances en majesté. Le revenu net-net est celui qui reste une fois payé les impôts et les frais fixes de logement. Pour beaucoup des ménages concernés, la hausse prévue aura un impact de plus de 10 % sur le revenu disponible. Pour quelques dizaines de milliers d’entre eux, la perte sera supérieure (parfois très supérieure) à 20 %.

Il s’agit bien d’un nouvel écrasement fiscal, qui sera masqué par des exonérations pour les « faibles revenus », la démagogie habituelle. Ajouté à la hausse de l’inflation (dont on ne tient pas compte avec la CSG), les effets sur le revenu disponible seront majeurs, surtout pour les retraités. De cela, pas un mot dans la presse.

Que l’Enarchie ait choisi de porter à des taux confiscatoires un impôt qui taxe du revenu déjà taxé et du faux revenu lié à l’inflation, ne choque absolument personne. Comme on ne fera aucune correction du champ déraisonnable de « l’action publique » (le terrain de jeu des énarques), comme on ne veut pas toucher au temps de travail d’une administration pléthorique, et comme la petite reprise de croissance va faire jouer la progressivité globale de l’impôt, on va vers un nouveau début de quinquennat fiscalement aggravé. Macron n’a rien compris aux excès des deux premières années du quinquennat Hollande où il était le principal conseiller économique et où il a cautionné une augmentation démentielle de la pression fiscale. Le but est toujours le même : augmenter les impôts au début pour faire un geste électoral pour la réélection. Plus cela change, plus c’est la même chose !

Au total, on voit que la presse ne permet pas au pays de se faire une véritable idée de ce qui se passe. Les chiffres du PIB ne sont ni compris ni mis en perspective intelligemment et on a vu qu’ils ont servi à tromper le pays en vue des élections. On voit aussi que la présentation des hausses d’impôts en point et non pas en vrai pourcentage (pour la CSG 1.7 au lieu de 11 %), est une nouvelle tromperie.

Pour éviter ces dérives, il n’y a qu’une solution : sortir l’Insee du périmètre gouvernemental et en faire une institution autonome rattachée au Parlement ; rendre toutes les statistiques accessibles gratuitement aux institutions universitaires d’économie et à toutes les institutions privées d’analyse de la conjoncture ; faire en sorte que les tableaux de bord publiés et les documents genre « l’économie Française » puissent voir leur contenu discuté publiquement afin de faire ressortir les vraies informations utiles et pas seulement ce qui arrange l’Inspection des Finances.

L’idéal serait de prévoir des sessions de formation à l'interprétation des chiffres pour les journalistes (notamment de télévision) afin qu’ils évitent de servir le communiqué comme des porte-voix débiles et asservis, alors même qu’ils se piquent de faire du « décryptage » (alors qu’il s’agit le plus souvent d’une simple désinformation).

Une merveille de pronunciamiento !

L’Enarchie Compassionnelle, un instant menacée, conserve et étend son pouvoir

Chaque époque génère son élite, c’est-à-dire une sélection des meilleurs pour diriger le pays. Jusqu’à ce que cette élite apparaisse pour ce qu’elle devient toujours : une caste cherchant à maintenir et étendre ses privilèges. Il faut une révolte forte ou une catastrophe pour remettre périodiquement le jeu à zéro.

Lors de la Fronde, l'élite venait du clergé qui sélectionnait les meilleures têtes dans des séminaires qui étaient le summum de la formation. Nous eûmes Richelieu et Mazarin. L’armée a également été longtemps une pépinière de grands esprits. Napoléon, Lyautey, De Gaulle sont exemplaires d’une élite polyvalente sortie de leur spécialité d’origine. En Thaïlande, aujourd’hui même, l’armée est l’école des élites du pays. En Chine, le Parti joue le même rôle, à l’instar de tous les pays socialistes qui ont généré ainsi leur propre nomenklatura, jusqu’au jour où…

En France, la République est construite sur la sélection ouverte à tous d’un enseignement dérivé de celui de l’Église catholique et longtemps remarquable. Dans le domaine militaire, dans celui des ingénieurs et dans celui des gestionnaires, la course aux grands emplois est conditionnée par une réussite scolaire initiale dans des disciplines de l’esprit.

Rien de cela n’est choquant. Que l’État dégage une élite dont il a besoin est difficilement critiquable.

Il arrive malheureusement que cette élite ne reste pas à sa place et se substitue au souverain. Lorsque Louis XIV affirme « l’État c’est moi », il vire sans ménagement le haut clergé du pouvoir et le remet à sa place, en même temps que les Princes et la noblesse frondeuse. Cela ne se passe pas toujours aussi bien. Lorsqu’il faut retourner à la banalité des jours, la Caste vaincue a tendance à se rebiffer voire se révolter. Dans les pays où l’élite est militaire, le pronunciamiento est la règle. On a vu en Turquie les élites militaires refuser de s’incliner devant les nouvelles élites politico-religieuses. En Russie, le KGB, un instant remis en cause dans son hégémonie, a repris le pouvoir avec Poutine, sachant que l’élite du pays a été formée pendant des décennies par le KGB qui gérait tout, de la police à l’économie, de la diplomatie à l’agriculture, du tourisme à la politique culturelle.

Dans le cas de la France, une partie des Hauts Fonctionnaires considère depuis la défaite de mai 1940 que les députés issus du suffrage universel n’ont pas tout à fait le niveau qu’il faudrait. Ils ont entrepris, à leur propre compte, une réflexion sur ce que devrait être la France et considéré que l'élection était un « piège à cons » qu’il fallait circonvenir. Leur idée : seul le haut fonctionnaire a une vision dégagée de toute considération intéressée et mesquine. De plus il est formé sur toutes les questions régaliennes ou autres. Et lui seul. En dépit de beaux succès sous Pétain (la sécurité sociale, l’encadrement des métiers) et pendant la Quatrième République (avec l’arrivée au poste de Président du Conseil d’inspecteurs des finances jeunes et brillants comme Felix Gaillard et Bourges Maunoury), ce n’est qu’à partir de 1974 et l’accès au pouvoir de Giscard et de Chirac, deux énarques jeunes et ambitieux, que l’Enarchie s’est réellement mise en place, avec comme idéologie « l’arbitrage de la société ». L’Énarque croit pouvoir arbitrer entre le patron et le salarié et dépasser la querelle socialiste, arbitrer entre pauvres et riches, et se saisir du message christique, entre vieux et jeunes, entre hommes et femmes, entre sexualité normale et sexualité déviante, entre piétons et automobilistes, etc.

On retrouve dans cette idée d’arbitrage toute la pensée de Macron : « personne n’a totalement tort, personne n’a totalement raison, il faut arbitrer avec raison et je suis là pour cela ». Le « macronisme » n’est qu’un avatar de la doctrine compassionnelle de l’Enarchie triomphante : les Enarques sont là pour arbitrer les tensions et naturellement tout cela se fait par l’épandage d’argent collecté en masse par l’impôt.

Au nom de l’intérêt général, dont elle serait seule porteuse, la haute fonction publique a colonisé l’État, ce qui était normal mais aussi toutes les institutions politiques, ce qui ne l’était pas.

Dès le Club Jean Moulin on entend dire que la division entre droite et gauche n’est pas opérationnelle. Dès les années quatre-vingt on entend les discours de brillants Inspecteurs des finances qui prétendent que le déclinisme est une absurdité.

Le mantra de Macron n’est pas une nouveauté mais l’affirmation sans complexe d’un discours de haut fonctionnaire tenu depuis des lustres pratiquement tel quel et que l’on connaît aujourd’hui sous le vocable de « cercle de raison » popularisé par Alain Minc (major de l’ENA) et Bernard Attali (énarque et major de l’École polytechnique).

Il n’y a évidemment aucune différence, sinon de sobres nuances, entre une énarchie compassionnelle de droite et une énarchie compassionnelle de gauche. Fabius a hésité entre la droite et la gauche un bon moment. Il n’est pas le seul. La compatibilité de Macron et de Hollande, ou de Macron et du Philippe maire du Havre, ou de Copé avec Moscovici, ou de Dutreil avec Guigou, ou de Rocard avec qui on voudra, est totale.

Ayant colonisé et la droite et la gauche, la politique suivie et par les Enarques de droite et par ceux de gauche s’est trouvée fort constante.

L’ennui est que la confiscation des revenus et du capital de la « société civile » s’est aggravée pendant quarante ans avec au bout du chemin un sous-investissement massif, la fuite des capitaux, l’exil des riches et des jeunes, un chômage de masse, des déficits homériques et des dettes abyssales.

Amusant, le vocabulaire de l’Enarchie triomphante reprise par les médias asservis ! « Société civile », qu’est-ce que cela veut-il bien dire ? En dehors des armées toute la société est civile. Ah oui mais voilà : il y a la caste, la haute fonction publique et le reste. Selon qu’elle est hostile ou non à la Caste, ce sera « la société civile » ou une masse de « populistes ». De même tout ce qui n’a pas encore été taxé est « une dépense fiscale », c’est-à-dire une concession révocable à la première occasion.

La situation catastrophique du pays ne pouvait rester sans conséquences. À gauche, le compassionnel énarchique s’est vu contesté du fait de la montée massive du chômage et des mesures de plus en plus dures contre les pauvres, mélangés avec une énorme vague de pauvreté importée. À droite la fiscalité abusive et le déclin de l’industrie ont conduit aux mêmes réactions. Dégagez les Enarques !

Cela a failli réussir. Si François Fillon passait, les effectifs publics auraient été sabrés et les statuts de la haute fonction publique simplifiés et rapprochés de la multitude. De même, Mélenchon représentait une alternative hors Enarchie, inscrite dans la révolte de la base. Il fallait casser le risque d’une union des Frondeurs et des Insoumis, et empêcher Fillon d'accéder au pouvoir par tout moyen. Le candidat naturel était Juppé. Mais cela ne faisait pas les affaires des Enarques de gauche qui venaient de gouverner pendant 5 ans. On se ralliera donc en bloc dès la fin des primaires à l’opération Macron.

Un quarteron d’Enarques montera le piège contre Fillon, en trahissant au passage tous les devoirs de confidentialité de leurs charges. L’effondrement trop rapide du médiocre Hamon a failli prendre tout le monde de court, Mélenchon siphonnant l’électorat de gauche avec une belle voracité. Il a fallu s‘allier avec Bayrou.

Aujourd’hui tout est net et clair. L’Enarchie a gagné. Un président énarque et un premier ministre énarque, comme Giscard-Chirac, comme Chirac-Juppé, Comme Chirac-Jospin, comme Chirac-De Villepin, alors que Hollande avait dû composer avec le PS et ses petits diplômés. Un Secrétaire général de l’Elysée énarque. Un Ministre des finances et de l’économie énarque. Les utilités sont bien cadrées par des Enarques. Tout est tenu et bien tenu. La presse aux ordres n’a plus qu’à chanter la chanson dont les paroles lui seront aimablement fournies. On a vu que l’apparition d’une presse totalement soumise et chantant la gloire du Divin Emmanuel avec une unanimité et une ampleur jamais vue, est une des marques du temps et des difficultés de la démocratie française.

La révolution « macronienne » était en fait une contre-révolution pour éviter la perte du pouvoir de la Haute Administration et sa remise en cause organique. Le pronunciamiento a réussi. Le nouveau héraut de la secte est un peu plus glamour que le président sortant, pitoyable prisonnier de lui-même autant que des dissidents de gauche du PS, devenus maîtres d’un parti mort.

« Emmanuel » (on l’appelle par son prénom comme « Ségolène », ce qui en dit aussi long que les centaines de premières pages de magazine) s’est débarrassé et de la droite souverainiste et de la gauche frondeuse. Il reprend l’habitude des castings, avec « prises de guerre », qui ne sont que des prises de guère et ne donne à moudre que de l'extase médiatique sans intérêt.

Tout le monde il est beau, tout le monde il doit être content et même ravi.

L’élection tronquée a permis de mettre sous le tapis les cris de « ça suffit » qui s’étaient élevés après les attentats contre Charlie Hebdo, après la folie fiscale des deux premières années de gestion par Hollande, après les atteintes permanentes contre la propriété, avec la perte de pouvoir d’achat généralisée, avec l’effondrement de l’emploi, avec la perte de souveraineté et les sujétions constantes, avec l’effritement des libertés, …

Ce succès heureux est présenté désormais comme la volonté du peuple de plus d’Europe fédérale, de plus de renoncements bienveillants, de moins de réticence devant les dégâts des libertés sans frein de circulation des hommes, des capitaux et des produits, de plus de complaisance vis-à-vis des prélèvements, de moins de rejet des « avancées sociétales ». Seuls les « radicalisés », comme diraient Alain Juppé, ne seraient pas bouleversés d’humanité au spectacle d’une jeunesse triomphante et intelligente qui va tout résoudre dans la fraternité et les images positives.

Le sondage Elabe du jour, un institut qui a été le fer de lance de l’opération médiatique pro Macron, devrait faire réfléchir. Le Président et la Premier Ministre ont une cote de confiance minable, en fait la plus basse depuis le début de la Cinquième République. Bien sûr, le savoir-faire est autre que celui du prédécesseur.  Le nouveau Président fait peu de fautes, ne serait-ce que parce qu’il a vu toutes celles qui ne fallait pas faire.  L’onction de la victoire et de la jeunesse jouera son rôle.

Mais le gouvernement nouveau est de pur affichage et noué de combinaisons politiciennes électoralistes à très court terme. Il faut gagner les prochaines élections législatives. L’énorme canon médiatique est braqué à nouveau sur l’électeur : il faut donner une majorité massive à notre phénomène, que le monde entier nous envie. Ensuite les députés inexpérimentés seront aux ordres et les ministres d’affichage strictement encadrés par la haute fonction publique.

Nous sommes sommés de nous réjouir. Après tout, même un haut fonctionnaire peut être compétent dans la sphère politique ! C’est ce qu’on dit des militaires en Algérie après chaque élection, bidon, qui voit le pouvoir militaire maintenir son emprise sur les institutions et la richesse du pays !

Mais on sait déjà que le champ de l’action publique ne sera pas modifié, que les impôts ne baisseront pratiquement pas, que la soumission à l’Europe et aux Etats-Unis sera totale, et qu’au bout du chemin la vraie menace ne sera pas Mme Le Pen, qui a montré sa nullité, mais l’extrême gauche. Il suffira d’une crise mondiale même légère, et on peut s’attendre à un épisode de moyenne importance dans les 6-18 mois, et d’une hausse des taux d’intérêt, pour que le contre-choc se produise.

Il risque d’être violent. C’est là qu’on pourra juger des capacités de notre nouveau Président. L’Enarchie compassionnelle et sa médiacratie associée risquent alors d’apparaître dans toute la splendeur de ce qu’elles sont : une certaine forme d'évanouissement de la démocratie véritable et une capture illégitime du pouvoir.

Espérons que non. Le pire n’est jamais certain. En attendant, bravo l’artiste ! Cette prise de pouvoir aura été une merveille de pronunciamiento réussi !

Les impôts - Histoire d'une folie française de Jean Marc Daniel

60 ans de matraquage fiscal - Tallandier

Cette histoire des impôts en France durant les dernières soixante années est un passage obligé pour qui veut comprendre l’état de déliquescence du pays. Comment un peuple qui a fait la Révolution pour des raisons principalement fiscales (Les Etats Généraux avaient été convoqués pour augmenter les prélèvements) a-t-il pu, en si peu de temps, accepter que la prédation publique passe de 31% à 45%  du PIB ?  

Cette folie, car il s’agit bien d’une folie comme le titre le suggère et pas seulement pour attirer le chaland, est une des dimensions fondamentales de l’effondrement français. On sait que la stagnation multiséculaire de la Chine provient d’un taux de prélèvement confiscatoire de près de 50% mis en œuvre sans faiblesse par une armée de fonctionnaires. La disparition de la France des radars économiques, avec en prime fuite des capitaux et des Français aisés, et l’achat majoritaire du capital français par des étrangers moins taxés, est une des aberrations  les plus phénoménales de son histoire. Comment en est-on arrivé à un point où tous les histrions des chaînes de télévision publiques, riches à millions, crient tous les jours « Vive l’Impôt » à destination d’un peuple qui n’en peut plus des exactions de l’Etat contre ses biens (avec en prime l’acceptation du squat, la dépénalisation massive du vol  et les  atteintes répétées au droit de propriété) ? Comment se fait-il qu’un pays qui a connu autant d’alternances politiques ait pu continûment s’enfoncer dans ce piège mortel ?

Jean marc Daniel a produit un livre informé et d’une lecture plutôt agréable, compte tenu du sujet.C’est une narration qui n’oublie rien d’important.On y voit des figures particulièrement épouvantables et d’abord celle de Giscard qui aura pendant près de 20 ans enfermé la France dans une taxation délirante. Il a réussi à contourner les réticences du Général de Gaulle qui voulait que l’on ne dépasse pas 35%. Il y a un avant et un après Giscard. C’est lui qui a tout encadré, tout verrouillé.  La TVA et l’impôt sur les plus values sont son œuvre. Plus aucun flux n’échappe aux prédations étatiques. Cela finira en 1981 dans le mépris public de l’homme aux diamants de Bokassa. Non pas que l’affaire eut été d’importance. Mais qui eût pu croire  que les tondus du giscardisme eussent pu pardonner à ce fat et à cet obsédé fiscal, connu pour avoir balancé personnellement des contrôles fiscaux aux personnes qu’ils avaient pu envier ou craindre, des richesses abusives ? C’est le premier d’une liste de Présidents de la République  Française rejetés pour leur agressivité fiscale, le dernier en date étant François Hollande. Le choix des Français de sanctionner les effets des trois grandes récessions (73-74, 92-93, 2008-2009) en confiant les rênes du pouvoir aux socialistes, n’a rien arrangé. Ils ont apporté d’abord la taxation des stocks et pas seulement des flux, puis l’idée d’un transfert direct  et sans vergogne de l’argent des uns dans la poches des autres.  L’impôt ne servait plus à couvrir les besoins régaliens mais à assurer des gratuités intenables, dont la gratuité de la vie à tout âge pour tout individu venant à se trouver sur le territoire. Michel Rocard, avec le rétablissement de l’ISF, l’instauration de la CSG, en même temps que du concept d’une allocation à vie sans réelle contrepartie, est le prototype du foldingue fiscal encensé par les imbéciles. La figure d’Alain Juppé s’impose immédiatement après avec le déplafonnement de l’ISF et son refus de le supprimer, accompagnant la hausse massive de bien des impôts. Il faudra attendre ensuite le sinistre François Hollande et ses idées personnelles sur la fiscalité. Les délires de ses deux premiers budgets resteront dans l’histoire comme la marque d’une hystérie incontrôlable.  

Lauré et Giscard, Rocard, Juppé, Hollande : l’énarchie est d’abord une prédation fiscale. L’Assemblée Nationale  ne devrait pas être composée majoritairement de personnes dont la rémunération et le cadre de vie dépendent des impôts qu’ils votent, à l’initiative de présidents issus de la haute administration !   

En mettant en œuvre la décentralisation, l’énarchie a ouvert un champ nouveau d’emplois publics ; l’Europe a été une nouvelle aubaine. L’emploi associatif, moins cher que l’emploi public, a permis d’étendre le domaine financé par l’Etat.  Tout cela représente des millions d’emplois à productivité très faible, financés par des impôts sur les emplois à productivité forte et créant le double de chômeurs depuis 1974 : 3 millions d’emplois créés  financés par l’Etat ; 6 millions de chômeurs, indemnisés par la dépense publique. Merci l’Enarchie !

Si la narration de J.M. Daniel est sans faute, elle souffre sans doute d’un manque d’explications analytiques.

La notion de prélèvements est beaucoup plus trompeuse qu’il ne le dit. Nous rappelons toujours la parabole de l’esquimau lors que nous abordons ces sujets. Un esquimau sur la banquise pêche un poisson. PIB compté par l’Insee de la banquise : 1 poisson. Un type avec un fusil prend le poisson en disant : je te protège des ours blancs. La même Insee dit : production (de sécurité) de l’Etat : 1 poisson. PIB total : 2 poissons. Taux de prélèvements : ½ = 50%.  On se rend compte qu’un taux de 44 ou 45%, que nous vivons grâce à Hollande,  est une quasi-prédation totale de l’économie marchande. Il suffit de prendre les valeurs absolues de la valeur ajoutée du secteur marchand et des dépenses publiques  pour comprendre le problème : environ 1.250 milliards d’euros pour la dépense (probablement nettement plus en 2017) et 1.200 milliards d’euros pour la valeur ajoutée marchande. En France, l’Etat dépense plus que ce que le secteur privé marchand ne produit !

De même il oublie un phénomène fondamental : si la fiscalité est globalement progressive, le trend de croissance conduit automatiquement à une aggravation de la pression fiscale. Les pays agressivement  progressifs dans leur fiscalité ont connu cette mésaventure : plusieurs décennies de croissance rapide ont conduit à l’étouffement fiscal du pays et il a fallu rétropédaler avec force.  La Suède, le Canada, le Royaume uni, la Nouvelle Zélande ont su stopper cette folie et faire machine arrière.

Le rôle des trois grandes récessions est aussi dirimant : C’est à la suite de chacune d’entre elle que les gouvernements se sont retrouvés dans d’énormes déficits qu’ils ont cherché à compenser d’abord et presqu’exclusivement par l’impôt. Les grands coupables sont ceux des gouvernants qui, en période de vaches grasses et de haute conjoncture internationale, ont fait le pari d’aggraver encore la fiscalité, alors que la progressivité s’appliquant à des impôts aggravés, les recettes prenaient l’ascenseur quand la production prenait l’escalier ! Rocard et Jospin, et dans une moindre mesure Hollande, seront les principaux criminels, Rocard étant largement le roi de cette triplette tragique.

Bien sûr, tout le monde a compris qu’on était allé beaucoup trop loin en matière fiscale. Comme nous l’avons démontré ici à de multiple reprise, des milliers de Français paient plus de 100% de leur revenu en impôts ce qui est une violation du pacte républicain. Comme J. P. Robin, au Figaro, le rappelait récemment, la fortune des Français installés à l’étranger est désormais très supérieure à la fortune des Français restés au pays !

L’étouffement fiscal est tel que depuis la crise de 92 et la montée à des hauteurs insupportables du chômage, beaucoup de voix considèrent qu’il faut mettre fin à l’exception française qui a mis l’essentiel des prélèvements sous forme de charges salariales. Mais au niveau de prédation atteint, cela signifie une fiscalité coercitive sur les particuliers et la fin du consentement à l’impôt.

La démagogie électoraliste fait qu’on achète le vote des masses électorales par des mesures ciblées. L’Enarchie qui voyait ses positions de plus en plus vulnérables, a décidé de réagir en portant sur le pavois Emmanuel Macron, après avoir piégé François Fillon qui menaçait directement son pouvoir.  On sait que les deux mesures du président désormais élu sont la suppression de la Taxe d’habitation pour 80% des citoyens, (52% des dits ne paient pas l’impôts sur le revenu, 90% ne paient pas l’ISF)  et la hausse de 1.7% de la CSG pour donner un supplément de rémunération aux actifs du secteur privé, tout en faisant passer le taux marginal d’imposition à près de 70% !

Bientôt il y aura deux France : celles qui paient quasiment tous les impôts et prélèvements et qui n’a droit à rien (car on veut, en plus, lui faire payer les services gratuits pour les autres), et les autres Smicards et RMISTES, ou intermittents du travail.  

Jean Marc Daniel remarque justement  que la signification de l’impôt est perdue. La discussion fiscale se traduit désormais en terme électoral par : arrachons notre train de vie dans le portefeuille des autres, tant qu'il y reste aulque chose.   

Il rappelle que toutes les institutions internationales mondiales comme le FMI ou européenne comme l’OCDE ou la Commission pressent la France de faire la seule réforme utile : baisser massivement la dépense publique.  Comme cettl'annoncer a été liquidé électoralement en moins de deux.

Il y a désormais 16 millions de retraités, près de 6 millions de chômeurs, près de 6 millions de fonctionnaires, deux millions de personnes qui vivent de la charité publique et des allocations sans même chercher du travail, quelques centaines de milliers de malades et d’handicapés…

30 millions de vies accrochées aux impôts pour 15 millions de salariés du secteur privé ! Equation insoluble !  Il faut désormais ajouter ceux qui, au travail,  reçoivent un complément de rémunérations versé directement par l’Etat (prime pour l’emploi etc.) !

Le coup d’état des Enarques qui vient de propulser à la Présidence un Inspecteur des Finances, ne permet pas d’envisager une baisse de la frénésie fiscale, sauf pour les rémunérations de la haute finance. On parle désormais ouvertement d’un nouvel impôt européen et d’un nouvel impôt destiné aux collectivités locales  (après la suppression de la taxe d’habitation pour 80% des citoyens). Le principe de la taxation identique pour les revenus du travail et du capital n’est pas remis en cause, pas plus que la surtaxation de l’immobilier qui fait perdre tout intérêt à l’investissement locatif et pénalise les familles nombreuses.  L’enflure sans limite des dépenses médicales « gratuites » dans un contexte de vieillissement accéléré de la population n’est pas près de s’arrêter après la crise de nerf nationale autour des annonces de François Fillon sur la Sécurité Sociale. Qu’importe qu’il n’y ait plus de médecins ni de production nationale de médicament, et que le parc hospitalier public se clochardise de plus en plus.

L’annonce d’une baisse de 120 milliards d’euros  par le mouvement En marche, à la Saint Glinglin, est un enfumage. L’Enarchie n’a pas voulu qu’on touche aux effectifs publics qu’elle dirige en propre, ni à son statut. Elle ne prendra que des mesures cosmétiques qui ne remettent pas en cause ses privilèges tout en essayant d’éviter de tuer la bête qui la nourrit. C’est une stratégie parasitaire logique.

Cette caste énarchique et la folie fiscale française qu’elle organise depuis 60 ans, sont bien une des causes essentielles de la déchéance française.

Cela va durer.

Didier Dufau pour le Cercle des Economistes E-toile.

 

Jean Marc Daniel - Les Impôts- Histoire d’une folie française. Soixante ans de matraquage fiscal -  Taillandier - ISBM  979-10-210-2055-9

Premier bilan des présidentielles

Au terme de ces élections présidentielles.  J.P. Chevènement, à gauche,  et,  à droite, H. Guaino dressent un constat de carence.  

L'un et l'autre considèrent qu'il aurait fallu partir d'une analyse globale de l'état du monde et spéciale de l'état européen avant d'annoncer une proposition pour la France, ce qui est logique tant est grande l'imbrication de la France dans les processus mondiaux de mouvements de personnes, de capitaux et de marchandises.  L’analyse n’a pas été faite.  Du moins, on n’a pas présenté aux Français  ni les menaces ni les opportunités qui auraient pu expliquer un programme d’action construit et cohérent.

La campagne d’entre les deux tours a été uniquement une campagne d’image basée sur l’émotion : La France « patriote » contre les vilains  étrangers, d’un côté ; La France « anti fasciste » de l’autre, mobilisée contre les vilains antisémites et les vilains xénophobes. M. Macron a été élu par défaut, les carences de Mme Le Pen étant devenues criantes pendant le débat,  et l’ayant exclue de l’espoir même de l’élection. Il s’est contenté de crier : « Hou la vilaine », d’un côté et : « Vive l’Europe, vive la mondialisation, vive tout et tous,  et youpi nous y arriverons ! » de l’autre.  Mais il n’a pas propos é aucune analyse de la situation mondiale, aucune réflexion sur la situation européenne, aucune solution concrète d’importance (mais un flot de micro mesures), seulement des intentions, d’autant moins attaquables qu’elles étaient plus floues. On est certes « en marche » mais surtout en lévitation.

Il va de soi que dès que le nouveau président devra sortir de l’ambiguïté, les difficultés s’accumuleront.  On le voit déjà sur l’Europe. Il veut une Europe « protectrice » avec un Small Business Act à l’européenne, qui réserve aux entreprises européennes les marchés publics. Juncker répond platement non. Macron ne veut pas faire de collectif budgétaire. Moscovici répond : « les objectifs sur lesquels la France s’est engagée sont tenables ». Sous entendu : faites ce qu’il faut pour cela même si Sapin et Eckert ont plombé les comptes avant de partir. Se faire adouber par les militants au son de l’Hymne à la Joie  et jouer les Kennedy la main sur le cœur pendant l’hymne national, joué en second, est une chose. Convaincre les Européens de changer de cap en est une autre.  Il n’a jamais dit comment il s’y prendrait.  Mme Merkel considère que les Allemands seront compétitifs en toutes circonstances, donc la notion de « protection » lui est non seulement étrangère mais odieuse. On peut tenter de lui tenir tête en affirmant : « méditez les résultats : le rejet de l’Europe et de l’Allemagne est là. Ne jouez pas avec le feu électoral ». La démarche est à la fois humiliante et inefficace : « les Français tiennent à leur épargne et ne veulent pas sortir de l’Euro. Appliquez les traités et cela ira bien comme cela », répliquera Merkel.

Certes le nouveau président  va essayer de faire passer par ordonnance une loi Macron 3 directement inspirée par Bruxelles pour preuve de sa bonne volonté européenne.  Outre qu’il n’est pas sûr d’avoir une majorité pour cela, rien ne laisse penser que cela suffira pour fléchir qui que ce soit en Europe.

Sans doute le projet était d’être élu et de régner plus que de diriger.  Après tout s’il ne trouve pas d’assemblée pour soutenir sa politique,  il aura une excuse de n’avoir rien fait de son programme.

Mais même s’il la trouve, faute d’une évaluation réaliste du rapport des forces, rien ne dit que l’action puisse déboucher. 

Chevènement et Guaino pourront affirmer qu’ils l’avaient bien dit. Leur faiblesse commune : ils veulent absolument voir dans les formes actuelles du capitalisme et la fracture entre pays pauvres et pays riches la source principale des difficultés. Ce diagnostic  est en grande partie faux, comme nous avons essayé de le prouver dans vingt articles sur ce blog. Il les met dans l’incapacité de proposer une véritable alternative.

Leur idée commune est, qu’en Europe, le rattrapage des anciens pays de l'Est se fait par abandon de la classe moyenne des pays riches. Dans le monde, le rattrapage de la Chine, de l'Inde et de quelques autres,  se fait par la désindustrialisation générale de l'Occident. Partout, l'"uberification" de l'économie entraînerait des conséquences de masses sur les "exclus", la modernité ne s'installant que dans les grandes villes.

L’un et l’autre ne voient aucune solution réelle dans la liberté totale des mouvements de personnes, de capitaux et de marchandises, mais ont la même difficulté à définir ce qu’il faudrait faire.  Ce refus d’installer des libertés fondamentales dans des cadres non nationaux, où les Etats sont en guerre plus ou moins larvée les uns contre les autres, ne fournit aucune clé sur la nature des restrictions à mettre en place ni sur leurs effets potentiels.  Avec l’un comme avec l’autre, on voit la critique et on voit l’espoir : ne plus sombrer dans les politiques « contractionnistes » coûteuses en emplois.  Mais on ne voit pas les moyens.

En vérité les rattrapages des pays libérés du socialisme auraient pu et du se faire par croissance homothétique et non substitutive, ce qui aurait été possible en imposant le respect des équilibres de balances de paiements.  Ce que ne voient ni les tenants du nouveau président ni leurs contempteurs  peut se résumer ainsi :

-          L’Europe est coupable parce que son organisation économique renforce des déséquilibres internes et externes intenables

-          Le système mondial est coupable parce qu’il installe une « économie baudruche », instable et explosive, basée sur les déséquilibres immenses et destructeurs qui n’enrichissent que quelques gagnants (pourvu qu’ils soient sauvés périodiquement par les Etats).

-          La France est coupable parce qu’elle a réagi aux crises par l’installation d’un socialisme fiscal destructeur, l’exaltation de la dépense et de l’emploi  publics, la destruction des relations du travail et un « sociétalisme » à la fois individualiste et multiculturel, importé des Etats-Unis, destructeur des solidarités nationales élémentaires et de la liberté d’expression.  

Les solutions sont à la fois globales et ponctuelles. Les dysfonctionnements globaux et européens peuvent être corrigés par une meilleure organisation et un autre état d’esprit, basé sur la coopération.  Les difficultés liées à l’exercice non contrôlée de libertés peuvent être réglées par des mesures ad hoc et ponctuelles, mais qui ne remettent pas le principe même des libertés individuelles.

Ce qu’on aurait  aimé entendre des candidats à la présidentielle et désormais de ceux aux législatives, c’est justement cela :

-          Que la crise n’est pas structurelle mais liée à des défauts que l’on peut corriger, aussi bien en Europe que dans le monde.

-          Que la France peut faire mieux que de sombrer dans le multiculturalisme, le « sociétalisme », l’étatisme, le socialisme fiscal et le « politiquement correct » à l’américaine.  

-          Que les excès ponctuels peuvent être jugulés par des mesures au moins transitoires.

-          Que la bonne séquence est : redressement français, puis correction européenne puis correction mondiale.

-          Que cette politique, même avec sa dimension diplomatique délicate, est parfaitement jouable.

Cela aurait mieux valu que de dépasser le point Godwin en trente secondes et de s’envoyer à la figure Oradour sur Glane, d’un côté, et, de l’autre, l’hypothèse d’une « psychopathie pédérastique refoulée d’un gamin violé adolescent par un prof disposant de l’autorité »,  psychopathie dont les conséquences comportementales seraient hyper dangereuses. Ce type de campagne fait frémir sur le niveau politique où sont descendus les Français sous l’effet  de la « crise », de l’effondrement vulgaire des médias (la médiocratosphère bananière), des mauvais coups politiciens et des impostures diverses.   

On peut craindre que le solde de la campagne présidentielle, les Législatives, n’apportent que de la confusion supplémentaire et aucune vraie espérance.

L’Euro : le mistigri de la campagne présidentielle

Qui l’eût cru ? La campagne a basculé sur une question technique monétaire. Tous les commentateurs et les hommes politiques l’avaient répété à l’envi : marre de l’économie et de l’économisme. On n’élit pas un roi républicain sur une question ménagère. Surtout ne pas parler du quinquennat désastreux, notamment ses deux premières années, de F. Hollande. Déplorer le chômage à chaudes larmes, surtout quand il augmente de plusieurs dizaines de milliers d’unités la semaine décisive de la campagne. Mais s’élever au-dessus de ces tristes contingences. Oublier aussi la dette !

Et voilà que M. Dupont Aignan rejoint Mme Le Pen et qu’il demande qu’on revienne sur la sortie de l’Euro, article pivot du plan de la candidate pour sortir du marasme. Il est vrai que les Français (les journalistes disent : les retraités, cela fait plus jeunes, car on sait que la jeunesse n’a peur de rien) avaient la crainte de l’exemple grec : la BCE perdant confiance dans les banques françaises et ne les alimentant, après une fuite des capitaux hors de France, qu’à hauteur de quelques dizaines d’euros par jour et par déposants.

Il fallait donc que la candidate s’explique sur les méfaits de l’euro et les moyens de les juguler sans sortir de l’euro tout en en sortant. Un chewing-gum politique et économique assez difficile à mâcher en public qui a naturellement fait la joie de son adversaire qui, lui, pouvait, selon sa technique de positivité européenne assumée, s’exonérer de toute réflexion sur le sujet.

On a vu le résultat lors de la crise d'épilepsie mutuelle qu’on a appelé « débat », entre les deux candidats sélectionnés lors du premier tour de l’élection censément présidentielle.

Le plus consternant tient tout entier dans le fait que cette question est effectivement fondamentale et que l’indigence des deux clowns tristes dont on parle n’a pas permis qu’on l’aborde comme il aurait fallu.

L’organisation de la zone Euro est effectivement dysfonctionnelle. Elle doit être absolument corrigée si on ne veut pas que tout explose un jour ou l’autre au détriment de tous. Le fonctionnement actuel pèse effectivement lourdement sur la situation économique de la France.

L’indigence du débat et la malignité des combattants n’ont pas permis de comprendre pourquoi ni d’envisager les options qui s’offraient. Le nihilisme du combat de rue l’a emporté sur une réflexion qui est très nécessaire et qui va se révéler pendant les années qui viennent une des clés d’analyse des difficultés qui s’annoncent.

Mme Le Pen a raison : l’Euro pose problème. M. Macron aurait été bien venu de le reconnaître. Elle n’a pas su dire pourquoi. Il n’a pas cru devoir dire pourquoi. La méconnaissance et la tactique politicienne ont étouffé la vérité.

Le traité de Maastricht a mis la charrue avant les bœufs, et les bœufs ont démoli la charrue. Créer une monnaie unique avec comme seul garde-fou deux règles ne concernant que les États (3 % de déficit et 60 % de dette publique par rapport au PIB) était se lancer dans un pari impossible. Le faire alors que le système mondial est fondé sur les changes flottants et l’absence de coopération institutionnelle en matière d’échange et de monnaie, était un autre pari. Ces deux paris ont été perdus.

Le système mondial s’est étouffé en 2007 et a sauté en 2008. La crise européenne a suivi, avec pour conséquence le traité « Merkozy », toujours en activité et une ambiance déflationniste pesante jusqu’à l’insupportable, avec une extension drastique du contrôle européen sur les systèmes bancaires et les budgets. Il est clair que pour beaucoup de pays, la double peine est sévère : perte de souveraineté et perte de prospérité, sous la férule de la Commission Européenne et de la BCE.

Il n’y a qu’Emmanuel Macron pour feindre de croire que tout cela n’a pas d’importance et que « l’euro nous protège ». On sait que sa solution est un nouveau saut dans le fédéralisme absolu. Créer un gouvernement véritablement européen avec un budget européen et une répartition des mannes par le Parlement européen vers les régions des anciens états souverains européens, voilà la solution. C’est celle des milieux européistes et de certains groupes de pression dominants dans les sphères dirigeantes. Ceux qui ont créé l’Euro avec le traité de Maastricht le savaient bien : on créait un truc bancal mais il permettrait de détruire finalement la résistance des nations en rendant nécessaire un nouveau pas dans l’intégration politique. Ce calcul a été vu et dénoncé. L’affaire s’est jouée à peu. Dès 2005, les peuples ont commencé à dire NON, notamment celui de la France qui a refusé la pseudo-constitution européenne.

L’Euro est donc une affaire d’abord politique avant d’être économique. C’était le levier pour aller vers le fédéralisme européen alors que personne n’en voulait vraiment.

Mais c’est aussi une réalité économique particulièrement vicieuse. Une monnaie unique pluri nationale ne peut fonctionner que si les économies restent en équilibre chacune vis-à-vis de l’autre. Dans des régimes où les États ont pris une place déraisonnable de la dépense, la microéconomie ne donne aucune garantie que cette harmonie se produira ou se maintiendra, même si les États renoncent aux gros déficits budgétaires et à l’endettement massif. Supprimer tous les obstacles à la libre circulation des personnes, des produits et des capitaux ne pouvait suffire. Le croire est d’une grande naïveté. Refuser d’organiser ces trois libertés et sanctionner toutes les tentatives partielles en ce sens ne pouvait qu’aggraver la situation : « non seulement cela ne marche pas mais on ne peut rien faire ». Défaillance et impuissance sont les mamelles de la colère des peuples.

La question était déjà rendue difficile par l’intégration dans l’Union de pays soumis au joug socialiste pendant des décennies et en très gros retard économique. Elle st devenue insoluble dès le départ quand on a vu les deux États principaux, L’Allemagne et la France, choisir deux voies totalement incompatibles. Le plan Jospin d’étouffement des relations sociales et de passage aux trente-cinq heures était rigoureusement contradictoire avec le plan Schroeder de compétitivité renforcée.

Le résultat n’a pas tardé : il n’y a eu aucune convergence des économies et le développement d’un excédent phénoménal en Allemagne et d’un déficit phénoménal en France.

Lorsqu’un pays est victime d’une attaque mercantiliste après avoir étouffé son économie par des mesures politiciennes démagogiques et déplorables, les conséquences sont évidentes :

-          Des centaines de milliards de capitaux sont aspirées hors du pays déficitaire et le plongent dans la déflation et la dette. Donc dans les pressions salariales, le sous-investissement, et le chômage.

-          Des centaines de milliards aboutissent dans les caisses du pays mercantiliste qui ne sait rien en faire en local puisqu’il est déjà sur compétitif. Alors il le prête, et se lance dans des spéculations dangereuses. Au premier revers conjoncturel ces banques se trouvent très mal. Le système bancaire allemand est en ruine. Réciproquement les pays emprunteurs se trouvent dans l’impossibilité de rembourser. Voir le cas Grec.

Les pays en faillite sont obligés de se retourner vers le pays dominant pour quémander « une petite seconde M. le bourreau ». Il y met des conditions. Et on a le traité Merkozy et une ambiance contractionnisme délétère.

Bien sûr les banquiers, façon Macron, peuvent faire des produits gigantesques en faisant circuler les excédents vers les pays déficitaires, et en jouant sur les peurs qui provoquent des mouvements de capitaux moutonniers et finalement captifs.

Affirmer qu’on va faire ce qu’il faut en interne comme dans le plan Fillon et dans une moindre mesure dans le plan Macron laisse entendre que la solution est toujours dans le pays déficitaire. Ce qui est faux.

La vraie solution est de rétablir les équilibres. Cela ne peut se faire qu’à deux conditions :

-          Des mécanismes institutionnels qui poussent à la convergence

-          Une gestion commune de la convergence qui ne dépend ni des trois libertés ni des deux seules conditions de gestion publique du traité de Maastricht.

Il appartenait aux deux candidats de s’appuyer sur ces deux réalités.

Emmanuel Macron n’en a rien fait pour masquer son tropisme européiste. Sortir d’une certaine ambiguïté aurait été dangereux pour son élection.

Marine le Pen n’avait pas la compétence pour comprendre et exprimer clairement les alternatives.

Le silence est désormais retombé sur la question de l’Euro. Et pourtant elle continue de se poser et pèsera lourd dans les prochaines années. M. Trump a décidé d'attaquer l’Allemagne sur ses excédents en s’appuyant sur la législation TFTEA passée par Obama. L’Allemagne se cache derrière l’Euro. La situation est intenable au sein même du camp occidental. Quant à la France elle n’atteindra pas 8 millions de chômeurs sans casse politique définitive. Et rien ne dit que dans les 18 mois qui viennent il n’y aura pas un nouveau ressac économique international.

L’Euro et ses dysfonctionnements sont un sparadrap collant dont on ne se débarrassera pas comme cela.

Sottise et dissimulation ne sont pas une solution. Une fois de plus : attention à la colère des peuples.

Didier Dufau pour le Cercle des Économistes E-toile

Un débat présidentiel ? Vraiment ?

Le blog du cercle des économistes e-toile

Le cercle des économistes regroupés dans E-TOILE autour de Didier Dufau, Economiste en Chef,   aborde des questions largement tabous dans les media français et internationaux soit du fait de leur complexité apparente, soit  parce que l'esprit du temps interdit qu'on en discute a fond. Visions critiques sur les changes flottants,  explications  sur le retard français,   analyses de la langueur de l'Europe,  réalités de la mondialisation,  les économistes d'E-Toile, contrairement aux medias français, ne refusent aucun débat. Ils prennent le risque d'annoncer des évolutions tres a l'avance et éclairent l'actualité avec une force de perception remarquable.

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